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Un monde d’exploitation animale Définitions et perspectives contre le spécisme

mis en ligne le 12 septembre 2023 - souslaplage

Genre et animaux

Nous avons décidé pour les animaux non humaines une écriture aléatoire en terme de genre. Plein d’espèces ne correspondent pas forcément à la binarité que l’on connaît et que l’on essaye d’inculquer pour toute espèce (voir à ce sujet le texte Zoologie queer).

1) Qu’est ce que le spécisme, quelques définitions

Le spécisme c’est l’idéologie occidentale qui place l’être humain au dessus des autres espèces animales, lui conférant le droit d’exploiter, de torturer et de tuer tout individue non-humainE, ou encore de s’accaparer et de détruire des territoires pour leur profit sans aucune considération pour les formes de vie qui en dépendent.

La critique de cette idéologie s’ancre donc dans ce contexte précis. Il nous semble important de le préciser car c’est souvent une difficulté quand on aborde ce sujet, où des défenseur.euses du spécisme essayent de parler d’autres sociétés non-occidentales (le fameux "mais vous voulez empêcher les inuits de se nourrir ?") ou encore d’autres époques. Par ailleurs, d’autres sociétés n’utilisent pas forcément le terme d’antispécisme mais ont un rapport sensible aux autres espèces et une considération pour celles-ci.

Sentience : La sentience c’est la capacité que possède les espèces animales de ressentir de la souffrance et / ou du plaisir. Certaines personnes veulent scientifiser cela (via des démonstrations scientifiques), mais des approches sensibles / empathiques sont tout aussi légitimes. On n’a pas toujours besoin de validation par des experts pour comprendre et ressentir une interaction avec un autre animal, tout le monde est capable de voir un individu sentient chercher à éviter la souffrance ou une situation angoissante, à soigner ses blessures, à se préserver de la mort, à chercher des interactions positives avec d’autres, à vouloir se déplacer à son gré, etc.

Il y a une importance à avoir de la sensibilité pour la place de toutes les espèces (végétales et animales), mais le fait que les animaux non-humain.es ressentent de la souffrance et ont un intérêt à agir dans leur environnement et à l’aménager, sont des élément à prendre en considération vis à vis d’elleux.

Les espèces végétales ont une perception et un ressenti de leur environnement. Si c’est un élément suffisant pour aussi les prendre en compte afin d’empêcher des projets de destruction de leurs espaces, ça n’en devient pas un argument pour dire que finalement on peut exploiter comme on le souhaite les animaux non-humain.es.

Le spécisme ne serait pas une oppression systémique ?

On peut reprendre une définition de ce qu’est une oppression systémique qui est qu’elle doit s’ancrer à la fois au niveau :

• Institutionnel : au niveau des institutions d’une société.
• Structurel : qui se retrouve dans toutes les strates de la société.
• Historique : qui trouve ses racines dans le passé, repose sur un système élaboré dans le temps et par des évènements précis et datables.
• Individuel : qui se retrouve au niveau interpersonnel, entre deux personnes ou plus ou qui a été intériorisé.

Institutionnel : Les animaux non humains ont peu, voir pas de droits :

Les animaux domestiques (et les animaux "sauvages captifs") sont – dans la loi - sensées être protégées des tortures, privations et maltraitances graves (même si dans les faits on n’attend pas grand chose de la justice à ce niveau là) mais n’ont pas le droit de "divaguer sur la voie publique", de ne pas être identifiables et non rattachés à un.e propriétaire, etc. Il est légal de décider de leurs vies, environnements, relations, nourriture, loisirs (quand iels en ont) comme ça nous arrange...

Les animaux sauvages n’ont pas de droits (sauf espèces protégées), hormis celui de ne pas être tués à certaines périodes. Les assos de chasse ont même le devoir de tuer un quota minimum d’animaux sauvages pour les "réguler". Il est légal d’utiliser leurs corps comme on le souhaite (nourriture, déco, etc).

Les animaux d’élevage sont des biens et des produits de consommation, on a tout droit de les enfermer, les exploiter, les tuer et les consommer.

Les animaux liminaires (animaux sauvages qui vivent à proximité des humain.es dans des espaces urbanisés comme les rats, pigeons, lapins, écureuils, corbeaux, étourneaux...) n’ont pas de droits, il est légal d’en tuer un grand nombre quand les bureaucrates considèrent qu’iels créent une nuisance, ils sont alors considérés comme nuisibles. Les arrêtés préfectoraux utilisent alors le terme de "destruction administrative".

Structurel : On retrouve le spécisme dans toutes les strates de la société.

Par exemple, l’espace urbain est réfléchi pour et par les humains (principalement pour les hommes cis, bourge, blanc). Aucun espace de vie, de déplacement et d’accès a la nourriture n’est laissé ou pensé pour animaux sauvages.

Historique : Notre histoire est remplie d’une conception biaisée des animaux non-humain.es.

À une période ils furent considérés comme des machines, de simples objets sans "âme" (merci Descartes et les chrétiens). Petit à petit une vision d’eux comme des "êtres sensibles" s’est imposés mais ils gardent le statut de "biens", même si ils ne sont plus des "meubles".

Nous venons aussi d’une histoire où les humain.es ont soit éradiqué les espèces qui leur faisaient peur ou concurrence comme les grands prédateurs, soit sélectionné et croisé des races d’animaux pour optimiser leur productivité, leur apparence ou leur poids pour notre plaisir et notre confort, souvent au détriment de la santé des nouveaux individus. Nous avons ainsi construit un rapport aux animaux uniquement utilitaire.

Individuel : Un rapport dominant aux animaux non humain.es a été intériorisé depuis l’enfance et dans tous nos rapports avec elleux

Du livre d’images avec la vache qui fait meuh dans un champs idyllique et qui fait du lait, aux adultes qui tirent sur la laisse de "leur" chien en ville ou aux poules qu’on égorge en campagne. On nous a souvent dit qu’on était "bête". On nous a appris qu’un corps humain mort était un cadavre à respecter et un corps animal mort de la viande à consommer. Tous nos rapports quotidiens aux animaux non-humains sont tellement empreints de domination qu’il nous est impossible d’en faire la liste.
Notre éducation est ancrée dans une vision de domination sur les autres espèces animales. Cela fait partie de notre quotidien, de ce qui est transmis à la télé, par la famille, par l’école. Les lobbys de la viande sont particulièrement présents dans le domaine publicitaire, ou à l’école. Les chasseur.euses et le syndicat d’agriculteur.ices d’extrême droite qu’est la FNSEA sont proches de politicien.nes et influencent les médias.

Tu veux comprendre un animal ? Tuons le et ouvrons le, allons voir un zoo, achetons en un dans une animalerie ou sur leboncoin. Il n’est souvent vu que par le prisme de son utilité pour l’être humain, ou résumé à sa biologie. Iel est rarement vu dans sa complexité comme individue pouvant ressentir, agir, éprouver des émotions, de la solidarité avec d’autres êtres. À la limite on préfère montrer à quel point les animaux non-humaines sont compétitifs et violents pour justifier le système en place. Cette éducation on l’a intégrée et on la reproduit sur les animaux non-humaines que l’on côtoie ou dans notre rapport aux espaces.

Ce système oppressif engendre, comme toutes les oppressions, que le spécisme est naturalisé et invisibilisé, il est "naturel" et "normal" d’exercer un rapport de domination sur ces individues, la place de dominé.e.s serait leur juste place, ce qui amène à croire qu’ils ne pourraient pas vivre autrement dans le monde sans cette domination constante.

2-Constat sur les conséquences du spécisme

C’est la partie avec pleins de chiffres car ça parle à certaines personnes. À ces échelles complètement hors de portée de ce que l’on peut concevoir, on pense que ces chiffres sont toujours à prendre avec des pincettes et comme des estimations grossières. Dans ce paragraphe on voulait aborder quelques domaines non exhaustifs dans lesquels s’imbriquent le spécisme :

S’approprier, exploiter et détruire les corps

- avec l’élevage en 2019, 80 milliards d’animaux terrestres et plus de 300 milliards d’animaux aquatiques ont été exploités puis tuées dans le monde.

- la pêche massacre 790 milliards d’individues pour la consommation humaine et 460 milliards pour nourrir des animaux d’élevage, dans le monde chaque année. La pêche industrielle vide les mers de ses habitant.es, mais la pêche de "loisir" touche aussi de très nombreux territoires.

 la chasse s’exerce sur l’ensemble du territoire national non-urbanisé, à l’exception – pour l’instant… – des Parcs nationaux (où il y a parfois des dérogations). On peut dire qu’en France, la chasse s’exerce sur plus de 85 % du territoire national non-urbanisé, ça représente environ 1 million de chasseurs qui tueraient autour de 30 à 40 millions d’animaux chaque année. Ces espaces deviennent pour de nombreuses espèces des environnements où ils doivent maintenir une vigilance constante.

- L’expérimentation animale qui touche dans le monde prêt d’1 milliard d’individues chaque année qui en meurent dans des conditions plus ou moins sordides : si l’expérimentation ne les tue pas directement, iels sont tuées puis incinérées comme déchets biologiques. On retrouve cela dans tous les domaines de recherche : médecine (obligatoire en Europe sur 2 mammifères différents pour chaque médicament), technologie, « environnement », nucléaire, armée, animaux génétiquement modifiés, cosmétique,... Et si certaines pratiques sont interdits dans certains pays, comme on a affaire à des multinationales, il suffit d’externaliser la recherche dans un autre.

- La domestication animale avec 80 millions d’individues en France et tout le marché économique qui va avec. Par exemple en France, 35 millions de poissons rouges sont vendus chaque année, vivant un calvaire dans des bocaux pour mourir au bout de quelques mois alors qu’ils peuvent vivre jusqu’à 25 ans.

- L’enfermement en zoo qui enferme 100 000 animaux dans 200 zoos en France (et 10 000 zoos dans le monde).

 Dans tous ces domaines, mêmes les conditions de tortures les plus hard core sont légales, banales et acceptés : gavage, chasse à coure, corrida, élevage en batteries, individues violentées, mutilées, reproduites de force, attachées ou enfermées dans des espaces particulièrement petits, etc.

Pollutions et activités humaines

- Les pollutions détruisent les territoires ou les espèces de manière conséquente. À cela s’ajoutent les catastrophes climatiques, les feux de forêts gigantesques dans le monde entier. En 2019-2020, 18,6 millions d’hectares de forêt brûlés en Australie ont causé la mort de près de 3 milliards d’animaux hors insectes.

- En Amérique du Sud 4 millions d’hectares de forêt sont détruits chaque année, entre autres pour développer la production de soja nécessaire à l’élevage ou l’huile de palme.

- La population d’animaux sauvages a été réduite de 60% dans le monde entre 1970 et 2014

- 78% de pertes d’insectes constatés dans les prairies d’Allemagne.

Accaparement et destruction des terres

En urbanisme les espaces occupés par des êtres vivants qui ne sont pas utiles pour un projet capitaliste sont considérés comme des espaces inutiles à "valoriser". Beaucoup d’espaces sont segmentés par des murs / grillages. Il n’existe que peu d’espaces sans emprise de projets capitalistes humains :

- Les villes ne sont pas prévues pour d’autres espèces, celles qui arrivent à s’y adapter sont rapidement considérées comme des nuisibles à contrôler.

- Les forêts servent à produire du bois, de la chasse ou des balades.

- les parcs naturels servent à du tourisme et à "compenser" des projets destructeurs.

- les routes et notamment les autoroutes segmentent les territoires, ainsi certaines espèces qui subissent déjà la traque de la chasse et qui ont besoin de grands espaces peuvent avoir des problèmes de santé à cause de consanguinité. A rajouter à la mortalité directe : chaque année en Europe, plus de 220 millions d’animaux sont tués sur les routes. Pour les insectes, une étude de 1990 (la dernière en date à ce sujet) montre que 60 billions (60 milles milliard) d’insectes meurent dans un choc contre un véhicule chaque année en France et il y aurait plus de 100 tonnes de cadavres d’insectes le long des routes.

"Je veux voir les blaireaux vivants,
pas écrasés sur l’autoroute
Vivre avec son anatomie
Mal coloré, pas fini
Je veux qu’un million d’espèces,
se rallument pas disparaissent
Je veux voir les blaireaux pas morts,
Quand leurs entrailles sont dans leur corps"
Grace et Volupté Van Van - Blaireaux vivant

 Le colonialisme est particulièrement virulent dans l’extermination d’autres espèces :

"On estime à environ 75 ou 125 millions le nombre de bisons qui peuplaient l’île de la Tortue [terme utilisé par certains peuples autochtones pour désigner l’Amérique du Nord] avant la colonisation. En l’espace d’un siècle (le XIXe), leurs populations ont été décimées. Plusieurs éléments convergèrent vers leur extermination de masse. D’une part, la construction des grands chemins de fer transcontinentaux s’accommodaient mal de ces troupeaux sauvages grandioses de centaines de milliers d’individus qui dévalaient les collines et arpentaient les prairies. D’autre part, les bisons étaient la principale source de nourriture des populations autochtones que les colons souhaitaient affamer. Finalement, la fourrure se vendait bien..."

Le spécisme c’est ce qui fait que ces constats sont invisibilisés par les médias et dans l’histoire qu’on se transmet et dans le quotidien, malgré l’ampleur de la situation. Via cette idéologie on voit dans nos médias chaque année l’histoire du touriste qui se fait tuer par un requin. Les requins tuent moins de 10 humain.es par an, en parallèle 100 millions de requins sont tués chaque année, dans des conditions particulièrement sordides. C’est ce qui fait qu’on entend beaucoup plus parler des sangliers qui détruisent des parcelles de maïs que de la destruction des espaces où vivent les sangliers, ou encore que tous les ans on se coltine la propagande contre les loups ou ours qui ont tué quelques milliers d’animaux d’élevage, anecdotiques face à la mortalité due aux maladies, sur des élevages de plusieurs centaines de milliers de bêtes destinées à la mort. La France a délivré en 2022 l’autorisation de tuer 174 individues de loup, sur une population totale de moins de 1000 individu.es...

3 – Culture animale

Critique de l’idée de nature

Le fondement de l’idéologie spéciste repose sur l’idée qu’il y aurait d’un côté la nature, de l’autre la culture, les animaux ne seraient que des choses subissant leur environnement, immuables et réduites à leur biologie.

Pour nous il n’y a pas d’entité de Nature, qu’elle soit idyllique, ou le lieux de tous les dangers, de toutes les compétitions. Si ça n’est pas ces éléments que l’on a voulu aborder dans ce texte, on sait que parmi les animaux sauvages il y a des violences, que tout n’est pas mignon. Mais cela ne peut justifier les horreurs commises par l’être humain, car nos actions impliquent des questionnements profondément éthiques et politiques. D’autre part les humain.es sont des animaux, et cette séparation nature / culture est artificiel.

Culture animale : groupes sociaux complexes

Il semble important de rappeler que les animaux non-humains sont des individues qui luttent elleux-même pour leurs désirs et libertés.

La lutte antispéciste est compliquée par le fait de ne pas avoir de langage commun simple avec les autres animaux. Cela peut nous pousser à les considérer comme de faibles choses passives à sauver, et non comme des agents de leur propre libération. Nous tenons à rappeler que les animaux se battent pour leurs droits, comme tout groupe oppressé. Des taureaux encornent leurs éleveurs, des orques attaquent leur dresseur ou détruisent leurs bassins, des poulpes s’échappent de leurs laboratoires, des dizaines de drones ont été attaqués par des goélands, des adultes adoptent des orphelins (de leur espèce ou d’une autre) suite à des meurtres commis par des humains, des meutes de chiens se forment pour s’entraider dans la ville, des sangliers libèrent leurs potes de cages etc. Aujourd’hui il y a besoin d’un mouvement humain pour faire cesser l’oppression spéciste active et permanente mais cela ne doit pas être un prétexte pour tout contrôler.

Quelques exemples de culture animale

On observe chez les corbeaux des apprentissage d’utilisation d’outils "Les corbeaux sont capables de former plusieurs types d’outils du même matériel, qu’ils utilisent dans des contextes spécifiques, et de transmettre cette connaissance à leurs congénères. [...] le design de ces outils variait selon les aires géographiques, la forme de cet outil dépendrait de l’apprentissage social du groupe vivant dans le milieu où il a été façonné."

Des corbeaux qui se sont fait capturer puis relâcher par des humaines sont capables de transmettre cette information aux autres en leur montrant le danger, à la suite de quoi des corbeaux n’ayant pas subi ni vu la capture iront attaquer l’humain.e en question si iel les approche. Les jeunes corbeaux peuvent passer jusqu’à 4 ans à apprendre et grandir avec leurs parents (ils peuvent vivre plus de 30 ans).

Éléphant : Les éléphants ont des groupes sociaux très soudés, ils ont un langage commun, se transmettent des médications (comme des plantes pour aider à l’accouchement), des jeux, s’apprennent leurs astuces (mettre de la boue dans les cloches à leur cou pour pouvoir aller ensemble voler des bananes en scred par exemple). Une harde restera toujours soudée sauf en cas de capture ou de mort : les membres aideront et essaieront de soigner une des leurs blessée, et feront des rites funéraires après leur mort (passer plusieurs jour autour du cadavre, le recouvrir de feuilles et de terre, faire des "sons" tous ensemble, ramener un corps enlevé par des humaines là où il a été tué, revenir près des ossements tous les ans, ...). Ils ont une prise sur leur environnement et ils le modifient ensemble en construisant des barrages pour se baigner, faisant tomber des clôtures électriques avec des pierres, rebouchant des puits qu’iels ont creusé pour que l’eau ne s’évapore pas, ...). Iels communiquent beaucoup entre elles : par des vocalises graves (inaudibles par les humaines) qui peuvent porter à 2km et où ils reconnaissent les voix de centaines d’éléphant.es différent.es, mais aussi par des chocs avec le sol qui créent des vibrations perceptibles entre diverses hardes (peut-être jusqu’à plusieurs milliers de kilomètres, ça met une claque quand on se rappelle qu’on les enferme dans des cages de quelques mètres), iels se servent énormément de tactilité pour échanger (caresses, contacts de trompe, queue, oreilles, pattes). Iels se transmettent leur culture en famille, un petit passe au moins 10 ans avec sa mère et sa harde (et sera adopté par d’autres si la mère meurt), et les femelles peuvent passer toute leur vie à apprendre de leur harde.

Orques : Depuis 2016, certaines des orques de Gibraltar, dans la liste rouge des espèces menacées (il n’y resterait que 40 à 60 individues) attaquent en groupe les bateaux de plaisances brisant le gouvernail, cassant parfois le safran jusqu’à créer une entrée d’eau, coulant certains bateaux. Se diffusant cette pratique, le nombre d’attaques augmente chaque année, et s’étend sur les côtes espagnoles, portugaises, françaises, pour arriver à 207 signalement d’attaque en 2022.

Gorilles : Au Rwanda, suite à la mort d’une jeune gorille dans un piège à corde, plusieurs membres de son groupe sont allés chercher et détruire les autres pièges présent dans la forêt.
Les gorilles sont des animaux sociaux qui vivent en groupe, ils vivent entre 30 et 50 ans. Ils apprennent les uns des autres (transmission de plantes ou pratiques médicinales, etc).

4-Antispécismes

Intersectionnalité des luttes

Comme toutes luttes, il y a plein de groupes qui ont une diversité d’approches, certaines plus visibles médiatiquement que d’autres. Il n’est pas possible de généraliser la pensée antispé, certaines approches sont pour nous complètement problématiques : approches racistes, capitalistes, antiféministes, transphobes, validistes, colonialistes… Il nous semble essentiel que les luttes antispécistes soient intersectionnelles et intégrées aux autres luttes.

Luttes individuelles, luttes collectives, luttes contre le système

On peut mettre en place différente manière de lutter, comme par exemple : apprendre à mieux écouter les besoins ou laisser de l’espace aux individus non-humains qui nous entourent. Proposer des soins à des individues en galère. Faire de la pédagogie à son entourage sur l’existence et les conséquences du spécisme. Avoir une alimentation et une consommation végétalienne, etc.
Les luttes seulement individuelles mettent rarement un système oppressif en déroute et il faut les combiner à des luttes collectives qui amènent à des changements plus radicaux, des élargissements de la compréhension, etc.

Quelques histoires d’antispécismes

Dans les années 1970 en Angleterre ces luttes contre les violences faites aux animaux ont rapidement pris de l’ampleur pour former une multitude de groupes, qui se sont depuis répandus dans de nombreux pays.

Il y a notamment des assos (comme 269 Libération animale, L214, hunt saboteur association,...) qui cherchent à faire prendre conscience et faire diminuer les souffrances animales et à octroyer des droits aux animaux par exemple en faisant des campagnes de sensibilisation ; qui filment, en caméras cachées ou un rentrant en force, ce qui se passe dans les élevages et les abattoirs pour que ça ne soit plus caché derrière des murs ; qui font des groupes qui informent les gens dans la rue ; qui libèrent des animaux enfermés en élevages ou en abattoirs ; qui organisent des contre-sommets de l’élevage, etc.

Mais aussi des groupes autonomes d’actions directes qui sabotent, brûlent, attaquent des labos, usines, magasins ou entreprises qui participent à l’exploitation animale (expérimentation animale, production ou vente de fourrure ou de viande, etc), zbeulent des parties de chasse, mettent des coups de pression à des dirigeants d’établissements spécistes, etc. Certains de ces groupes utilisent des sigles communs pour revendiquer leurs actions, comme "Animal Liberation Front" (ALF) ou "Animal Rights Milicia".

Il est difficile de situer quand et comment une lutte commence, globalement on retrouve des traces de personnes prenant position pour les droits des animaux dans l’Antiquité et au Moyen-âge, et de nombreuses cultures non-occidentales ont depuis longtemps un rapport aux animaux non-humains très différent du spécisme occidental actuel.

Repenser une société antispéciste

Place des animaux domestifiées

Chattes, chiens, poissons, cochons d’inde, oiseaux en cage ont été développés au fur et à mesure des époques pour répondre à des envies/besoins humains. Que ce soit pour servir de décoration d’ambiance, de meubles, pour faire de la traction animale, comme compagnon.nes, pour se sentir moins seul.e, apporter de l’affection, du réconfort, comme cachet social, par tradition... l’animal est pris d’abord pour répondre à des besoins humains. Toute une industrie s’organise autour de ça : centres de reproduction dans des conditions particulièrement sordides, industrie animalière qui broie une grosse quantité d’animaux d’élevages pour nourrir les animaux domestique.

Les avis divergent dans les pensées antispécistes sur quelle place donner aux animaux domestifiés dans notre société spéciste. Dans tous les cas il faut rompre avec cette volonté de posséder une individue non-humain.e pour répondre à des besoins socialement construits et réfléchir à comment adapter les espaces pour qu’iels puissent y vivre correctement, repenser notre rapport qu’on a avec elleux. Mais il faut aussi questionner la place qu’iels occupent. Amener des prédateurs (chien.ne, chat.te) dans tous les espaces, c’est aussi détruire des espaces pour d’autres espèces non domestifiées (oiseaux, petits mammifères, ...).

Place des animaux sauvages

Dans des sociétés occidentales où tout a été accaparé par et pour les humaines, quels espaces peut-on recréer pour les animaux sauvages ? On peut se demander comment cohabiter dans les espaces humains : casser les routes pour faire des bandes de haies pour les hérissons et oiseaux, prévoir des parcs moins aseptisés et plus végétalisés, dépolluer des anciennes zones industrielles sans chercher à spéculer sur le terrain après, casser les murs et barrières qui segmentent les espaces, etc.

Nous pouvons aussi trouver comment faire cohabiter des productions paysannes avec d’autres espèces sauvages.

Et enfin nous pouvons faire en sorte de laisser plus d’espaces sans exploitations ni emprises humaines.

Place des animaux d’élevage

On se rend bien compte qu’aujourd’hui on ne peut pas aborder de la même façon nos rapports aux animaux sauvages ou à ceux "d’élevage" par exemple. Ces individues ont été selectionnées pour être entièrement dépendants de l’humain.e et leur redonner leur liberté dans un espace ne suffit pas. Cette question n’est pas simple et ne fait pas consensus dans le milieu antispé (notamment face aux échelles énormes du nombre d’individus que cela représente). Il nous faut de la créativité pour réfléchir à de nouveaux rapports à ces animaux, qui nous permettent de maintenir par exemple une relation de soin avec certains d’entre eux.

L’industrie de l’élevage avec ses abattoirs et ses centres de reproduction, de transformation et de vente de produits animaux sont une cible importante des luttes antispé. Mais tous les élevages - même petits - sont problématiques, car les animaux non-humain.es y sont toujours traités comme des inférieur.e.s dont la vie et la force de travail nous appartiennent.

Nous décidons où, comment et de quoi iels vivent, pour pouvoir tirer des services et produits de leur vie. Une individue n’existe jamais pour nous servir, même si on est « gentil.le » avec lui ! L’élevage est tellement ancré culturellement qu’il est difficile d’avoir un collectif (ou des individu.es au sein de ce collectif) en campagne avec des espaces végétalisés qui ne réfléchisse pas à installer un élevage.

Lutter contre les zoos et toute forme d’enfermement

Ces espaces commerciaux sont conçus pour que l’animal soit montré, ne puisse pas se cacher. Ils ont un rôle éducatif important dans le spécisme, les matons, qui y sont nommés des "soigneur.euses", expliquent à de nombreuses personnes ce qu’est telle ou telle espèce. Ça nie complètement l’individualité des animaux non-humaines, ça nie qu’en tant qu’individue enfermée elle n’agit pas de la même manière qu’une individue libre. De plus iels ont souvent des troubles mentaux, ou des problèmes de santé conséquents liés à leur enfermement (la zoochose qui provoque des comportements stéréotypés chez les animaux), leur espérance de vie y est souvent écourtée.

C’est aussi un lieu d’enjeux politiques, où la naissance d’un animal rare en fait le symbole de la ville, à l’image de Knut l’ours polaire né à Berlin, qui a permis la commercialisation de produits dérivés (jusqu’à 400 000 visites en 1 mois grâce à cette opération médiatique), mais curieusement lorsqu’il meurt à l’âge de 4 ans ça fait moins le tour des médias, tout comme toutes ces villes où l’animal phare du zoo photographié sur un panneau énorme à l’entrée est mort depuis longtemps.

Créer des sanctuaires / refuges pour les animaux

En opposition aux zoos, élevages, lieux d’exploitation animale il existe les sanctuaires / des refuges. Contrairement aux zoos où la culture du divertissement entre en concurrence avec le bien-être animal, les sanctuaires sont des endroits créés dans le but d’accueillir des animaux (parfois blessés) qui étaient exploités dans des élevages, centres d’expérimentation animale, cirques, zoos... Les sanctuaires ne capturent pas d’animaux sauvages, ne font pas se reproduire en cage celleux qu’ils hébergent. Ils n’existent que pour fournir un refuge et des soins aux personnes non-humaines qui ont souffert par les humaines, pour qu’iels puissent continuer leur vie sans exploitation et dans des espaces dignes pour leur mode de vie. Il est donc possible de penser / créer / contribuer à de tels espaces.

Ces sanctuaires peuvent, si c’est possible pour certaines espèces, être liés à des objectifs de réintroduction.

Antispécisme et écologie

La vision dominante des luttes écologiques est de défendre l’environnement pour l’intérêt de l’être humain.e actuel ou des générations futures (et pas pour l’intérêt des non-humain.es). Au sein d’une vision antispéciste de l’écologie, les individues sont considérés à part entière et pas seulement pour leur appartenance à leur espèce.

Ces luttes auxquelles on participe devraient intégrer le fait que les autres espèces ont droit d’avoir une place sans que ça soit en lien avec leur utilité pour l’être humain.e. On veut lutter pour que des espaces soient libérés de l’emprise capitaliste.

L’antispécisme implique donc de lutter contre l’implantation de grands projets destructeurs, contre les pollutions environnementales et contre l’urbanisme. L’écologie qui veut limiter son domaine au réchauffement climatique est une écologie emprunt du lobby capitaliste, une écologie de greenwashing. Toute pollution est destructrice, que ce soit rejeter du plomb, de la radioactivité ou n’importe quels produits chimiques dans les sols, eaux, et atmosphère. Les giga industries se permettent de faire cela à des échelles énormes en terme de territoire (parfois planétaire) et de temps, voir même de manière irréversible. L’écologie voulant réduire les émissions de carbones est complètement insuffisante, et le principe capitaliste de la « compensation » est une vaste blague de mauvais goût. L’humain.e ne peut en effet « recréer » ce qu’il a détruit, on ne compense pas les mort.es.

Lutter contre le colonialisme

L’idéologie colonialiste se fonde aussi sur la volonté de dominer et d’accaparer des terres, ressources, d’exploiter et d’écraser l’autre. Les agissements militaires et économiques occidentaux doivent être combattus dans ce sens.

On peut voir par exemple comment l’introduction des vaches par les colons au Brésil a permit de coloniser des terres que les européens n’étaient pas assez nombreux pour occuper, en même temps que détruire ces immenses espaces d’habitation et de vie transformés en pâturage. Mais aussi de mettre à mal la culture des peuples natifs, de délégitimer leur mode de vie et leur alimentation, etc.
Ou comment une grosse partie de l’Amazonie est détruite pour y implanter des monocultures de soja servant a nourrir les animaux d’élevages des occidentaux.Le spécisme occidental et les volontés colonialistes sont nécessaires au capitalisme mortifère et doivent être combattus ensemble. [1]

Quelques ressources pour aller plus loin

Brochures :

• Plein de brochures dans la section la section antispecisme d’infokiosques.net https://infokiosques.net/antispecisme : Bestiaire inespéré, Des animaux en captivité, A propos de la destruction de la culture des éléphant.e.s, Heureux.se comme un.e dauphin.e captif.ve, contre l’idée de nature, ...

https://leseditionscafarnaum.noblogs.org/

Action directe :

https://web.archive.org/web/20201101022547/http://directaction.info/ (site qui parle d’actions de l’ALF. Le site est fini, il faut regarder ses archives)

https://attaque.noblogs.org/post/category/liberte-animale/

https://unoffensiveanimal.is/

Podcast :

https://www.nonbi.fr/ (podcats et interviews antispé et queer)

https://avisdetempete.noblogs.org/ : Épisode 7 : La patte de la vache, récits de luttes antispécistes au Brésil

Film :

Blackfish, film de 2013 Gabriela Cowperthwaite, qui revient sur les orques en captivité dans les zoos à travers le parcours de Tilikum.

The Plague Dogs, Martin Rosen dessin animé long métrage pour adulte, 1982. Deux chiens s’évadent d’un laboratoire d’expérimentations scientifiques pratiquant la vivisection et entament une fuite en quête d’une vie meilleure.

Pokot, film polonais de 2017 d’Agnieszka Holland, où beaucoup de chasseurs bien placés se font tuer.

Earthlings, 2005, film avec plein d’images particulièrement violentes de l’industrie du spécisme (TW : c’est très gloque).

Livres :

• "Sans fumier ! Manuel de maraîchage biologique sans intrant d’élevage", traduction collective, Carpelle, 2021. Livre en téléchargement libre et commandable sur sansfumier.com

L’Arrivée des Capybaras, Alfredo Soderguit, livre pour enfant.

[1Pour approfondir ce sujet, discussion avec Sandra Gamaraes, une antispéciste Brésilienne sur nonbi radio (www.nonbi.fr) : veganisme populaire et décolonial (15/09/22)


)

Le texte a été écrit à 2 et relu par plusieurs copaines. Si envie de réagir / interagir sur son contenu : souslapage[at]riseup.net



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