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Essais militaires dans le Salto di Quirra en Sardaigne

mis en ligne le 10 mars 2023 - anonymes

Depuis les années 1950 et le début de la guerre froide, l’OTAN et les États-Unis ont transformé la Sardaigne en un vaste territoire militarisé, un pivot stratégique au cœur de la Méditerranée.

De multiple infrastructures servent aux forces militaires : formation, exercices, expériences de nouveaux systèmes d’armes, guerres simulées, dépôts de carburant, armes et munitions, réseau d’espionnage et télécommunications.

La Sardaigne comporte a elle seule 60% des territoires militaires italiens.

Le « Poligino Interforze del Salto di Quirra » (PISQ), Champ de tir Interarmées du Salto di Quirra, est l’un de ces centres militaires, au sud-est de l’île. Le gouvernement italien décide de le construire en 1956 et d’en faire un centre d’expérimentation de missiles, théâtre de « war games » grandeur nature et de destruction à ciel ouvert d’armes obsolètes des dernières guerres. Le polygone est aussi loué (aujourd’hui encore) à des firmes d’armement privées, à l’OTAN, et à des armées diverses du monde entier, au prix d’un million d’euros par jour, somme qui est versée directement à l’Etat Italien.

Avant Quirra, d’autres régions de Sardaigne étaient parvenu à empêcher la construction de la base. Malgré l’opposition de la population, la base militaire s’est imposée et une grosse partie de la population a été expropriée ou contrainte à rester dans une région polluée

Par ses tests d’explosions, ses lancers de roquettes, ses armes à l’uranium appauvris, ses enfouissement de carcasse de missiles, de bombes, de matériel électrique, le Polygone a répandu des substances toxiques et radioactives dans l’air, la mer et les terres, contaminant un territoire et sa population, pour les intérêts de puissances impérialistes dans des guerres, notamment en Palestine. Entre les années 1986 et 2004, 1180 missiles Milan (à tête au thorium) auraient été lancés. Des habitant-e-s et militaires du Salto di Quirra sont morts de cancer et des enfants et des animaux sont nés avec des malformations. On parle du « syndrôme de Quirra ».

Au début des années 2000, une opposition vive ravive la population. Un journal est diffusé dans toutes les maisons de la région et des assemblées hebdomadaires ont lieu avec l’objectif claire de fermer la base militaire.

Nous avons traduit quelques documents pour faire connaître l’histoire de ce territoire et de ses luttes, pour rappeler l’usage et les raisons militaires de l’énergie atomique et pour croiser des histoires de luttes qui grandissent en se rencontrant. Contre l’armée, le nucléaire et les frontières. Pour un monde libéré du colonialisme, de ses dominations et de ses recherches de profit.

Merci à l’Arkiviu Bibrioteka Tommasu Serra (https://anarkiviu.wordpress.com/) qui nous a partagé tous ces journaux et histoires de luttes.

Une salutation solidaire au compagnon anarchiste anti-nucléaire Alfredo Cospito, qui lutte aujourd’hui de tout son corps contre le régime d’isolement carcéral 41bis comme il a lutté hier contre la fabrication de centrales et l’expansion coloniale du nucléaire. (https://luttercontrele41bis.noblogs.org/)

L’arnaque du champ de tir du salto di quirra

Publié dans « Foras de Lakanas ; zornale pro s’audeterminatzione », décembre 2007.

Une base militaire est un lieu où des hommes et des femmes s’entraînent à faire la guerre et la guerre est le meurtre légalisé d’hommes, de femmes et d’enfants classés pour l’occasion comme des ennemis. La base militaire du Salto di Quirra est précisément un de ces lieux et l’hypocrisie des uns et des autres ne peut pas cacher une telle vérité.

Un champ de tir d’essai est un lieu où l’on expérimente et l’on développe des nouveaux systèmes d’armement ; ses utilisateurs sont les fabricants d’armes et leurs acheteurs : les militaires. Le Salto di Quirra est le plus grand champ de tir d’essai d’Europe.

La guerre, les armes, les instruments de meurtre de masse font peur, à juste titre, et les gens n’acceptent pas facilement de vivre avec ça. Dans les années 50, quand le champ de tir a été créé, la Seconde guerre mondiale était terminée depuis peu et le refus de la guerre et du militarisme de la part de la population était encore plus fort qu’aujourd’hui. Pour cette raison, les responsables politiques et militaires ont fait croire à la population locale qu’il ne s’agissait pas d’un lieu destiné à la conception de nouvelles armes, mais d’un champ de tir destiné à la recherche spatiale civile. Le bobard des activités civiles qui auraient lieu à l’intérieur du champ de tir dure encore aujourd’hui et il est ressorti à l’heure où on voudrait l’agrandir et développer ses activités. Sur ce bobard s’est fondée aussi la cohabitation pacifique entre le champ de tir et la population locale, qui, en cinquante ans, a presque fini par s’habituer à sa présence.

Un autre aspect de l’arnaque est celui selon lequel la présence d’une base militaire apporterait de la richesse, du bien-être économique et de l’emploi. Le champ de tir de Quirra est un bon exemple du fait que tout cela est absolument faux : face à quelques centaines de civils qui y travaillent, il occupe 12 000 hectares de terrain et une quinzaine de villages proches sont directement exposés aux conséquences de l’activité et des expérimentations d’armes de guerre. Des dizaines d’hectares de terre pour chaque travailleur employé à la base ! Entre-temps, dans l’attente des richesses promises, l’émigration continue a dépeupler les villages près de la base, exactement comme il y a 50 ans.

Ce que la base a apporté, en réalité, est une pollution insidieuse et invisible, qui provoque à tout moment des maladies et des morts parmi la population civile, en plus que parmi les militaires. Il suffit de dire que dans le secteur de Quirra on voit une incidence de cancers hemolymphatiques mortels qui est au moins dix fois supérieure à la moyenne de la région, tandis que dans la commune d’Escalaplano il y a eu, au cours d’une seule année, 8 malformations très graves à la naissance, sur 21 nouveau-nés. Des malformations, des avortements et des maladies terribles se produisent aussi, souvent, parmi le bétail élevé à proximité du champ de tir.

Comme si cela n’était pas assez, les projets des institutions politiques et militaires prévoient un élargissement et une intensification des activités du champ de tir, de la recherche et de l’expérimentation d’armes de destruction toujours plus létales et plus sophistiquées.

Les faits démontrent que la possibilité de cohabiter avec le champ de tir est une illusion, alimentée par la propagande militariste. Le développement et la production d’armes terriblement destructrices, utilisées chaque jour dans des guerres d’extermination dans toute la planète, ne sont pas compatibles avec la vie des civils. Accepter cette cohabitation signifie nous rendre complices des actions destructrices du militarisme. Nous pouvons continuer à subir en silence ces massacres quotidiens, tout en étant les complices des pouvoirs et des intérêts des va-t-en-guerre, en plus d’être leur premières victimes, ou bien nous pouvons dire ASSEZ ! et organiser notre opposition.

Dans la commune de Villaputzu est actif depuis des années un Comité qui croit dans la possibilité d’une lutte populaire, en dehors de toute alliance politique et institutionnelle, et qui s’oppose, enfin, à la présence de la base militaire en ce lieu, pour en finir avec le saccage de notre terre et de son peuple, avec la cohabitation avec toute production, expérimentation, entraînement d’hommes et d’instruments de guerre. Grâce à ses efforts, une Coordination contre le champ de tir de Quirra a été constituée, et nous invitons tous ceux qui partagent une telle perspectives à y participer.

On peut contacter le Comité chaque samedi, à partir de 18h, à Villaputzu, au local « Ruspa », rue *** ; pour contacts et communications avec la Coordination, vous pouvez utiliser cette adresse : nopisq@@@tiscali.it ou bien le numéro de téléphone ***.

Coordination de lutte contre le Champ de tir du Salto di Quirra

Pour en savoir plus sur la base militaire

Publié dans « Birdi ke su porru, Gazetinu de novas, in sardu e italianu », n.03, décembre 2008/janvier2009.

Le Champ de tir Interarmées du Salto di Quirra (PISQ)

Le domaine national militaire occupe, dans toute l’Italie, 783 km carrés. La Sardaigne, à elle seule, en héberge 230,70 km2, c’est-à-dire environs 24000 hectares, dont environs la moitié au Champ de tir d’essai de Quirra. En ce qui concerne les servitudes – c’est-à-dire les terrains non inclus dans le domaine national militaire, mais soumis à des limitations à leur libre utilisation – elles occupent en moyenne le 0,15% du territoire. Par rapport à ça, la Sardaigne est bien plus touchée que la moyenne, avec le 0,65% de son territoire (157,39 km2), sur une superficie nationale totale de 451,762 km2. Les zones concernées sont les champs de tir de Quirra, Teulada, Capo Frasca, l’ancienne base de sous-marins nucléaires de La Maddalena, où se trouvent encore plusieurs structures de la marine militaire italienne, l’aéroport militaire de Decimomannu et d’autres structures moins importantes.

Les activités

Les activités effectuées dans le PISQ sont en lien avec des programmes d’essai à terre et en vol de systèmes d’armes complexes, ainsi que des programmes d’entraînement à l’utilisation de toute typologie d’armement, pour une utilisation aérienne, navale et terrestre.

Les principales activités d’entraînement consistent en « lancers de roquettes et de missiles, larguements de bombes, essais de tirs, tests d’explosion, tirs d’artillerie, chevalerie de l’air, entraînement de groupes d’incursion ». Le champ de tir est utilisé, non seulement par les armées de l’air, les armées de terre et les marines militaires de l’OTAN, mais aussi des entreprises privées qui construisent des systèmes d’armement : Fiat, Alenia Aerospaziale, Eurosam, Iveco, Thomson, Meter, etc. Il fonctionne comme une grande foire-marché, où des industries privées font des essais, testent des missiles, des roquettes, des armements et des matériaux de guerre et où elles amènent des organismes militaires étrangers – leurs clients potentiels – pour des démonstrations promotionnelles à des fins de vente. Le coût de location du champ de tir est, en moyenne, de 50000 € l’heure.

Le PISQ est le seul champ de tir d’essai interarmées, en Italie, pour des activités d’essai et d’entraînement avec des systèmes d’arme à moyenne et longue portée et il est la seule zone en Italie pour l’entraînement actif de « guide laser », à partir d’avions ou de terre. Il est aussi un champ de tir pour la guerre électronique, qui offre la possibilité de simuler des scénarios tactiques. Ces dernières années, le champ de tir a été utilisé pour tester : a) la capacité d’oléoducs pétroliers à résister à des explosions ; b) la mise à point et le développement des moteurs Zefiro, à monter sur des vecteurs qui peuvent porter en orbite des satellites ; c) des avions sans pilote, ou drones, utilisés, selon le modèle, pour l’espionnage ou pour le bombardement.

Le champ de tir est de niveau mondial, il est proposé comme un « système qui peut augmenter le poids international de l’Italie. Une contribution de prestige » (Airpresse, 31/5/03). L’objectif affiché est de mettre en déroute la concurrence des autres champs de tir, s’accaparant de nouveaux clients. « Une étude élaborée à Pedrasdefogu, qui propose le Salto di Quirra comme l’alternative italienne aux champs de tir en Suède et en Afrique du Sud ». Le marché d’armes ne connaît pas de crises. Dans les pays ainsi-dits pauvres, le pain et les médicaments manquent, mais les armes ne manquent certainement pas.

50 ans de ravages

En 50 ans, presque tous les systèmes d’armement ayant apporté mort et destruction dans les pays en guerre ont été testé et expérimenté dans le champ de tir de Quirra. Cela a eu lieu sans aucun contrôle des effets sur la santé du territoire et des populations qui y habitent et sans aucune remise en état après coup. Chaque utilisateur du champ de tir certifie lui-même la typologie des armements et les exercices qu’il y fait. Toutes les institutions qui auraient dû protéger la population ont omis de le faire. Cela a été le cas pour les maires des villages du secteur, censés intervenir quand la santé des citoyens est en danger, mais ils se sont limités à demander des dédommagements financiers pour nos vies à tous.

La commune de Villaputzu en est un bon exemple. Quand la cible radio est tombée à côté de l’école maternelle de Santa Maria, et le massacre a été évité de peu, le maire de l’époque, Casula, s’est borné à demander plus d’argent. Le maire actuel, face à la situation désastreuse qui, peu à peu, fait surface, se borne à demander que l’argent promis soit versé régulièrement et aujourd’hui, alors qu’il approuve l’élargissement du champ de tir, il compte sur la bonne volonté des producteurs d’armes et il demande que ceux-ci embauchent du monde.

Un autre organisme chargé de la sauvegarde de la santé est l’Agence régionale de santé, mais celle-ci s’est bien gardée de se poser des questions. Quand enfin elle l’a fait, elle a simplement voulu calmer la population. Comme cela a été le cas lors de la farce des échantillons, à l’époque du sous-secrétaire Cicu, quand M. Aste (le patron de l’ARS) disait en conférence de presse que la cause des maladies qui se répandent dans ce secteur était l’arsenic des anciennes mines de Baku Loci. Une enquête épidémiologique réalisée en quelques heures, avec des résultats qui peuvent bouleverser le savoir médical !

Et que dire de la Région, qui se limite à déclarer sa contrariété, mais après fait tout sauf ce qui pourrait gêner le champ de tir. Par exemple, les conseillers régionaux de l’actuelle majorité criaient au scandale, quand ils étaient la minorité, ils demandaient des commissions d’enquête… mais une fois au gouvernement de la Région ils ont créé une commission, ils ne l’ont pas faite travailler pendant toute la durée de leur présence au gouvernement régional et ils ont clamé contre les alarmistes, comme si les morts de leucémie, les bébés et les animaux nés avec des malformations n’étaient que de l’ « alarmisme ». Mais l’oeuvre des parlementaires de cette même majorité est encore pire : ils demandent à grands cris la construction d’un aéroport militaire dans le secteur de Kardiga.

L’État italien, qui a créé et gère le champ de tir, ne va certes pas s’en priver, à moins qu’on pense que pour lui les citoyens du Sarrabus comptent plus que les intérêts des industries de l’armement et ceux de l’armée. L’État joue à créer en permanence des commissions, entre-temps le temps passe et ces commissions ne produisent aucun résultat crédible, mais seulement de la propagande criminelle, dont le seul but est de tranquilliser les citoyens et de tout laisser exactement comme c’est.

Enfin, les militaires créent une commission d’enquête à eux, afin de réaliser, avec la collaboration de toutes les institutions locales et d’une association pacifiste, une enquête-farce pour créer du consensus à l’élargissement du champ de tir.

Ce n’est pas étonnant que les hauts gradés de l’armée, une fois à la retraite, passent tranquillement des postes de commandement militaire à la direction de multinationales : c’est par exemple le cas du général Arpino (comme lui, 6 généraux sont passés à la direction d’entreprises du groupe Finmeccanica, dont le chiffre d’affaires a grimpé à 8 milliards d’euros en 2008).

Quand, enfin, on arrive à la signature des contrats, on voit les visages de députés comme Mme Pinotti (possible ministre de la Défense dans l’éventualité d’un gouvernement du Partito Democratico) et le sous secrétaire à la Défense Cossiga, qui, lors du gouvernement précédent, faisaient partie de la commission parlementaire sur les servitudes militaires. A l’Assemblée, les deux poussent dans le sens d’une augmentation des dépenses militaires, la première en faveur d’entreprises du secteur aéronautique, le deuxième d’entreprises de la Marine.

Comment tout cela est-il possible ? C’est simple : le jeu est truqué et nous sommes tous des cartes sur la table.

Il est évident que, si nous ne bougeons pas, nous directement, personne ne le fera pour nous.

Les projets pour le futur

L’aéroport militaire qu’ils essaient d’imposer sur le Monti ´e Kardiga servira notamment pour tester des UAV (Unmanned Aerial Veicles), des drones.

Le 25 juillet 2008, le gouvernement italien a donné son accord p la construction de la piste et le 1er août a reçu des États-Unis, au prix de 330 millions d’euros, le modèle MQ-9 du Predator-B, armé de missiles antichars et de bombes à guidage laser, utilisé par les américains pour des bombardements dans des pays en guerre.

Les précurseurs des drones sont les cibles-radio, utilisées pendant les exercices avec des missiles (celles utilisées au PISQ sont fabriquées par l’entreprise Meteor, du groupe Finmeccanica, situé à Ronchi dei Legionari, près de Trieste).

Les drones ont été utilisés en guerre pour la première fois en 1999, pendant les bombardements de l’OTAN sur la Serbie, avec une fonction de reconnaissance et d’espionnage. Par la suite, ils ont été utilisés aussi pour le guidage de missiles.

Les nouvelles versions, comme celle qui vient d’être achetée par l’Italie, sont équipées d’armes et peuvent tuer avec plus d’autonomie. L’Italie est, après les États-Unis, le premier pays de l’OTAN à avoir acheté des drones, le Predator A, un avion-espion acheté en 5 exemplaires (dont deux sont actuellement utilisés en Afghanistan) auprès de la société américaine General Atomics, pour le prix de 50 millions d’euros. Ensuite le gouvernement a donné en gestion à Meteor, filiale de Finmeccanica, le géant industriel publique privé (cette société appartient pour un tiers au Ministère de l’économie) italien, des nombreux UAV construits ou en chantier.

En plus de ceux construits par Galileo Avionica, le Nibbio, un drone de reconnaissance, et le Falco, testé au PISQ et vendu au Pakistan, qui l’utilisera pour téléguider ses missiles, il y a aussi ceux produits par Selex (une autre entreprise contrôlée par Finmeccanica) : les minuscules Otus, Asio et Strix. Il y a ensuite le projet Neuron, un drone armé et invisible aux radars, qui doit être produit par un consortium européen auquel participe aussi Finmeccanica. Il y a aussi le drone Sky-X, conçu et produit au PISQ par Alenia, un autre fabricant d’armes italien qui est intéressé à la gestion du PISQ.

A l’avenir, des UGV (Unmanned Ground Veicles) pourraient y être testés : de vrais robots assassins, que les États-Unis sont en train de développer, avec un programme d’investissement de 200 milliards de dollars.

Les premiers robots de combat ont déjà été utilisés par les États-Unis en Irak (les Swords, des robots commandés à distance, montés sur des chenilles et équipes d’une mitrailleuse à 750 coups par minute).

Finmeccanica est prête à investir 400 millions d’euro pour construire l’aéroport à l’intérieur du champ de tir ; de cette façon elle entrera, comme d’autres sociétés, dans le conseil d’administration de la NewCo, la société publique-privée qui doit être créée pour gérer, à l’avenir, le champ de tir et l’intégralité de notre territoire.

La Vitrociset, déjà présente sur le champ de tir, a entre-temps augmenté son capital de 80 millions d’euro, certainement en prévision de la constitution de la NewCo. Tout cela démontre que la dernière commission d’enquête, celle créée par les militaires eux-mêmes, et financée par le Ministère de l’environnement (2,5 millions d’euro, environ) connaît d’avance les résultats d’enquêtes qu’elle n’a même pas commencé : c’est-à-dire que « tout va bien » dans le secteur de la base de Quirra.

Si ce n’était pas le cas, quelle entreprise privée y investirait des fonds si importants ?

Maintenant, tout dépend de la population locale : si celle-ci se mobilise conte l’énième agression militariste, il est certain que l’État et le capital privé feront un pas en arrière.

Atobiu des groupes autogérés

Publié dans Birdi ke su porru, n.14, en avril 2011.

Articuler la lutte en partant des spécificités.

Toute structure militaire (et ses activités) est quelque chose qui implique des territoires et des populations même très éloignés. Le PISQ [Poligino Interforze del Salto di Quirra ; Champ de tir Interarmées de la Salto di Quirra], qui est à la fois une base d’expérimentation et d’entraînement, ainsi qu’un marché pour la vente et le développement d’instruments de mort, est une affaire qui touche directement tous les lieux de conflit dans le monde. Pour une lutte qui vise à démanteler la base militaire, l’intervention directe de personnes venant de nombreux endroits, en Sardaigne et ailleurs, est donc souhaitable et à prévoir…

Une telle variété détermine des perceptions différentes de la nécessité d’une lutte pour la fermeture de la base, et un niveau différent de motivation (pensons à ceux qui sont exterminés ou mutilés par les dispositifs testés et expérimentés au Champ de tir de Quirra) ; nous en tenons compte au moment de proposer une modalité organisationnelle particulière de la lutte.

Nous proposons donc que la lutte pour le démantèlement du PISQ soit articulée à partir des communautés et des situations spécifiques. Nous souhaitons et nous soutenons donc la création de groupes autogérés pour le démantèlement du PISQ dans chaque village, qu’il soit proche ou éloigné de la base militaire de Quirra.

Bien que la spécificité des différentes situations soit évidente, nous réitérons cependant que la collaboration réciproque, bien qu’occasionnelle, lorsque les conditions existent ou sont créées, est indispensable pour une lutte large et incisive, plus à même de parvenir au démantèlement définitif du PISQ par la mobilisation directe et convergente des populations.

Groupes autogérés pour le démantèlement du PISQ : organisation, méthodes et objectif

Nous pensons que les Groupes autogérés de lutte pour le démantèlement du PISQ (l’individu singulier est entendu comme un Groupe) doivent se constituer, s’organiser et agir selon les critères suivants :

– constitution des Groupes par adhésion individuelle volontaire, afin de garantir leur autonomie et d’éviter une éventuelle instrumentalisation par des entités collectives externes déjà existantes ou nouvellement constituées ;

– constitution des Groupes exclusivement pour la lutte contre le PISQ, car sinon une entité politique serait créée, dont l’adhésion serait limitée en raison du consentement requis pour chaque autre domaine d’intérêt du groupe.

– l’autonomie totale des groupes par rapport à toute institution, parti, église et syndicat, y compris d’un point de vue financier, car toute dépendance vis-à-vis d’entités étrangères est préjudiciable à la lutte elle-même et à l’existence même du groupe. L’autofinancement garantit son opérabilité, et l’autogestion – c’est-à-dire la gestion directe des initiatives et des relations internes et externes – complète son autonomie et évite les délégations et l’instrumentalisation de toute sorte ;

– le refus de tout compromis : le but pour lequel les groupes autogérés se forment est le démantèlement du Pisq. Toute négociation, tout compromis serait un renoncement à cet objectif, parce qu’il concéderait des issues et des perspectives pour laisser les choses en l’état, en trompant les gens et en les repacifiant envers leurs propres assassins ;

– action directe, pour éviter les divisions entre ceux qui dirigent et ceux qui exécutent, afin que les défenseurs d’élaborations théoriques ou d’initiatives à concrétiser interviennent eux-mêmes en première personne pour les mettre en pratique.

Il va de soi que chaque village peut donner vie à un ou plusieurs Groupes, qui collaboreront quand ils le veulent, comme ils le veulent et s’ils le veulent.

« Atobiu » des groupes autogérés

La perspicacité de la lutte globale sera d’autant plus grande et cohérente que les différents groupes autogérés noueront des rapports entre eux, collaboreront en fonction de l’aide réciproque, échangeront leurs expériences, leurs énergies et leurs outils opérationnels, et mettront en place des initiatives communes qui engageront l’ensemble du front de la lutte.

Nous considérons donc qu’il est indispensable pour une lutte visant à démanteler le Pisq qu’il y ait un lieu, un temps, un espace commun que nous appelons Atobiu.

Atobiu est un « lieu » de contacts, d’échange d’expériences des Groupes, et une occasion de socialiser des propositions opérationnelles dans lesquelles tous, ou en partie, convergent et font. Les critères organisationnels et méthodiques de ce lieu sont les mêmes que ceux des Groupes : l’autonomie, l’autogestion, l’action directe et le refus de toute négociation sont des pratiques qui le caractérisent.

Le nom d’Atobiu ne sera utilisé que lorsque les documents et les initiatives proposées trouveront un accord entre tous les Groupes qui s’y réfèrent. Les Groupes qui se reconnaissent dans l’Atobiu, tout en agissant en totale autonomie dans leurs propres activités et initiatives, peuvent, s’ils le souhaitent bien sûr, indiquer évidemment leur « adhésion » à Atobiu à côté de leur signature.

Évidemment, tous les groupes et entités qui se formeront, et qui sont peut-être déjà être actifs d’une manière ou d’une autre contre le Pisq, ne doivent pas forcément faire partie d’Atobiu, et Atobiu ne doit pas forcément accepter tous les groupes qui veulent le rejoindre. En effet, tout le monde pourrait dire « vouloir », et « lutter » pour, le démantèlement du Pisq. Mais : quand et de quelle manière ? Avec qui ?

C’est dans la réponse à ces questions que l’on peut trouver ou non des affinités de méthodes et d’action. Cependant, le refus de faire une soupe et de créer de la confusion ne signifie pas du tout déserter chaque initiative autre, mais plutôt y participer quand cela est jugé positif avec les outils analytiques et méthodologiques autonomes qui caractérisent aussi bien les Groupes individuels qu’Atobiu.

Les critères décrits ci-dessus restant fermes, et compte tenu de l’autonomie des groupes, chacun d’entre eux est libre d’évaluer comment, quand et avec qui réaliser d’éventuelles initiatives communes.

En attendant qu’Atobiu ait son propre siège, qui pourra éventuellement être aussi celui des Groupes existants ou qui se constituront, pour toute information et demande de matériel produit, utiliser le numéro de téléphone suivant : ***.

Il est aussi possible de consulter le blog : http://smantellamentopisq.blogspot.com

VIDÉOS

Perdasdefogu, Giuseppe Ferrara 1961 (sous-titré en français !)

Reportage sur ce que pensait la population de la base en 1961.

Pour mettre les sous-titres, cliquer sur Paramètres -> Subtitles -> French .

https://kolektiva.media/w/vydoTaBW1joppqfhreqhVt

NO Thorium – The Myth has been debunked – Nonukes1987

https://www.youtube.com/watch?v=icEPbwXEBmg

Poisons mortels – France Ô, Investigations :

https://www.youtube.com/watch?v=1u5jU__ApMg

Quirra, poubelle des armées. 2014.

Enquête sur le polygone expérimental de Quirra, où sont détruites des armes obsolètes. – Uranium, un poison légal. 2009.

Une enquête sur les conséquences, pour la population et l’environnement, de l’exploitation de l’uranium au Gabon et au Niger par la société française Areva.

Uranium et thorium scandale en puissance chez les militaires – France 3, Pièces et convictions :

https://www.dailymotion.com/video/xqwwe3

À LIRE AUSSI

Tous les Birdi ke su porru [Vert comme le poirreau], mensuel autoproduit de critique sociale, contre la militarisation du territoire et pas que, sont téléchargeables ici (en sarde et en italien) : https://romperelerighe.noblogs.org/post/2011/04/22/birdi-ke-su-porru/

Ils sont également disponibles à l’Arkiviu Bibrioteka Tommasu Serra à Guasila en Sardaigne : https://anarkiviu.wordpress.com ; anarkiviu@autistici.org

Sardegna, servitù militari – Sito ufficiale della Regione Sarda a statuto speciale : https://www.regione.sardegna.it/documenti/1_26_20051107122255.pdf

Le gouvernement énonçait l’hypothèse de stocker les déchets radioactifs italiens à la base militaire de Quirra : https://www.sardiniapost.it/politica/il-deposito-delle-scorie-nucleari-nel-poligono-di-quirra/ . Il s’est par la suite rétracté. Aujourd’hui, le gouvernement cherche de nouveau un emplacement pour les stocker.



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