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ZADissidences 2
Des voix off de la ZAD - 1ère vague d’expulsions - Avril 2018
mis en ligne le 28 septembre 2018 - Comité El Condor passa , Des ami·e·s d’ici, des ami·e·s d’ailleurs , Des habitant.e.s de la zad et d’ailleurs , D’innombrables occupant·e·s intemporelles et déterminé·e·s , Juju , Légal team de la ZAD , Un camarade lointain
Éditoto
Tu tiens dans tes mains le deuxième numéro de ZADissidences. Il est en
deux parties pour pas être trop gros à diffuser, divisé entre la première et
la deuxième vague d’expulsions. L’idée est ici de continuer à compiler des
textes qui causent de la zad, critiquent la tendance dominante dans le
mouvement de lutte contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, et tentent d’enrayer ses pratiques autoritaires et réformistes.
Plus précisément, nous voulons participer à diffuser des voix de ce mouvement qu’on entend moins et qui refusent les choix et les visions
politiques d’une partie des occupant·e·s, notamment celle qu’on entend
beaucoup et qui depuis quelques mois préfère se nommer « habitant·e·s »,
(comme pour se défaire d’un costume devenu gênant). Ces conflits ne sont
pas nouveaux, l’abandon du projet n’a fait qu’amplifier ce qui était déjà la
direction prise depuis des années par quelques occupant·e·s en alliance
avec les « composantes », direction qui en déjà fait fuir plus d’un.e depuis
longtemps.
Zad dissidences 1 concernait la période allant de la « victoire » de mi-janvier et s’arrêtant au tout début des expulsions-destructions de début avril
2018. Celui-ci relate ces deux mois d’assauts et d’occupation militaires de
la zad, avec en parallèle les nombreux rebondissements démocrates, des
négociations aux « fiches ».
Nous avons écrit ces lignes dans un contexte de « fin d’expulsions » sur la
zad, que l’état définissait comme « ciblées », et qui suivent leur cours par
vagues plus ou moins annoncées et avec plus ou moins d’intensité. On ne
va pas raconter ici dans le détail les expulsions, le siège de la zone, les affrontements, l’asymétrie face au dispositif militaire, entre les lieux
attaqués et les lieux épargnés, entre les lieux soutenus et les autres, les
destructions de cabanes (plus de 35), les arrestations (plus de 70), les
peines de prisons (qui vont continuer à pleuvoir), et les blessés (plus de
300)...
On avait pu entendre la prévision clamée ces derniers mois que le mouvement d’occupation se retrouverait isolé et faible face aux expulsions. Qu’il
serait donc suicidaire de ne pas aller négocier, que ce serait se couper du
soutien vital des « composantes » du mouvement contre l’aéroport. On a
pourtant vu débarquer des centaines de personnes, connaissant la zad ou
non, pour la plupart hors de ces fameuses « composantes » dont il fallait
tant prendre soin (et qui n’ont pourtant pas hésité à se désolidariser à la
première occasion). Ces personnes sont venues sur zone affronter cette
situation et faire douter l’état de sa maîtrise. Sa vieille stratégie couplée
entre le militaire sur le terrain et l’administratif dans les négociations, et
le médiatique pour la population, lui a permis de jouer l’épuisement et la
dissociation, de maintenir la menace et la pression tout en sauvant la face
démocratiquement. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cela a bien
fonctionné. Il faudra bien en tirer les leçons.
L’état a donc enfin trouvé comment sortir de son impuissance. Il a vu un
tapis rouge déroulé devant lui par une partie du mouvement qui s’est
proposée en interlocutrice, en donnant des signes de bonne volonté qu’il a
su interpréter à juste titre comme des signes de faiblesse. De la route des
chicanes aux fiches de projets individuels, en quelques mois la liste est
longue de tous ces pas faits vers la préfète malgré qu’une à une toutes les
limites que s’était donné « le mouvement » soient dépassées. Tout ça sans
autre contrepartie de sa part, jusqu’à accepter des Conventions d’Occupations Précaires valables uniquement jusqu’à la fin de l’année 2018.
Chose étonnante, alors que la préfecture a finalement obtenu une liste
très claire de noms et de parcelles concernées, on constate que le fameux
flou du « manteau » l’est surtout pour les occupant·e·s elleux-mêmes. Illes
doivent spéculer à partir des articles de la presse locale pour comprendre
ce qui se joue, et même pour deviner si oui ou non une fiche a été déposée
pour leur lieu, étant donné que cela s’est passé en moins de 48h et parfois
sans leur consentement. : « Euh, est ce que tu crois que quelqu’un aurait mis
sur une fiche l’endroit où on vit sans qu’on le sache ? Et qui ? Dis, t’as vu, quand
même, quatre élevages ovins sélectionnés, y doit bien y avoir les voisins dedans
non ? Ben ouais, parce que j’en vois que trois, moi ! Mais alors peut être on est
même retenu·e·s pour « l’avenir » malgré nous ? ».
L’« avenir » nous dira ce qui parviendra à « rester », et à quel prix... En attendant, du côté de ce qui se vit sur place, beaucoup n’oublieront pas ces
fameux « 6 points » passés à la trappe, les intimidations et dissociations, et
tant de promesses non tenues dans le face à face avec les troupes venues
éradiquer la partie moins « jolie » de la zad.
Nous choisissons de ne pas attendre un hypothétique « dénouement » pour
publier ces textes, parce qu’il nous semble urgent de permettre à chacun · e
de se faire sa propre idée de ce qui se passe ici, par d’autres angles de vue
que le lyrisme à grands moyens de celleux qui dirigent le navire de
« l’avenir dans le bocage ».
Il y a beaucoup à dire sur le processus en cours dans cette fin de lutte. De
nombreuses personnes sont arrivées sur la zad ces derniers mois, comme
lors de la résistance à l’opération César de 2012. Elles parlent des AG fermées aux dits « soutiens », du mépris d’être reléguées au rôle de « personnes
de passage » sans qui pourtant cette zone n’existerait plus depuis
longtemps. Elles viennent avec leurs propres perspectives participer ici à
la lutte contre le monde de l’aéroport, ce monde qu’elle subissent et combattent déjà depuis longtemps partout ailleurs.
De même pour celleux qui sont ici depuis plus longtemps, les côte-à-côte
et face-à-face permanents entre des visions tellement opposées du sens de
ce qui se joue ici minent le quotidien, et polarisent comme rarement on a
l’occasion de le vivre dans ce monde pacifié à l’extrême.
Certain·e·s trouveront triste de donner tant de place à ce qu’illes préfèrent
appeler des « embrouilles internes » et se diront que ça n’a pas vraiment
d’importance comparé aux grands enjeux de « l’avenir » de la zad. D’autres
sauront y voir la densité des réels conflits politiques que la situation
révèle, et chercheront à en tirer des leçons pour d’autres luttes. Déjà
beaucoup sont parti·e·s écoeur·é·es, d’autres tiennent le coup vaille que
vaille. Il y aura encore tant à raconter et à discuter de cette aventure dans
les temps prochains avec celleux qui voudront y donner de la place.
4On imagine pas que cette compilation soit lue d’une traite. Les textes ne
sont pas écrits du même point de vue et ont chacun leur propre histoire à
prendre en compte séparément. Mais on peut sentir qu’ils ont en commun
une sorte de rage. Et ces temps-ci, c’est notamment cette rage qui nous
permet de nous reconnaître dans la tempête. On a choisi ces textes-là
parmi d’autres, sans être nécessairement en accord sur tout. On vous encourage à aller en lire d’autres sur internet.
Le Zadnews, hebdomadaire de la zad, a vécu une période de galère due aux
expulsions, tant pour déposer des contributions dans des lieux qui n’existent plus ou avec internet difficile d’accès, que dans le travail de mise en
page en équipe très réduite débordée et avec de petits moyens, sans parler
de l’impression et de la distribution au milieu du carnage. Une spéciale
dédicace à qui l’a fait exister malgré tout. Bon, du coup, même si la plupart
des textes sont passés par le Zadnews, on suit plutôt la chronologie de
leurs parutions sur internet. Cette fois la parole n’est pas restée sur zone...
Merci encore pour toutes ces contributions, et prenez soin de vous !
Merci de les lire, et tenez bon !
Et ne soyons pas tristes, car tout ce qui a été vécu dans cette lutte, y com-
pris ces derniers mois, continue de nourrir des parcours et des rencontres
contre ce monde de merde.
À la prochaine !
Sommaire
- Éditoto
- Résumé partial des épisodes précédents
- Quelques définitions
- Chronologie de la 1ère vague d’expulsions
- Prise de position de la légal team sur les actions de milice à la ZAD
- Quand Lama faché, lama cracher !
- Prise de parole à l’assemblée des usages du 16 Avril 2018
- Lettre de compassion aux signataires des C.I.
- Contre les lèche-bottes et leur monde
- Signe ton formulaire et ferme ta gueule
- L’Ancre Noire a été expulsée, rien n’est fini, tout commence
- Communiqué des sans fiche
- Appel à détruire les routes circulantes de la zad hors période d’expulsion
- Face aux attaques de l’État et ses relais internes : guérilla sociale anti-autoritaire !
- B.D stratégie de l’État et ennemis intérieurs
- Bibliographie
Résumé partial des épisodes précédents
08 Mars : La préfète confirme les expulsions à la fin de la trève hivernale
« L’intervention des forces de l’ordre se fera « avec discernement », assure Nicole
Klein, et visera des lieux d’habitation abritant des personnes refusant de s’inscrire
dans une démarche de régularisation. » Les menaces sont claires. Source :
Presse Océan
12 Mars : Les travaux de la route touchent à leurs fins, il ne reste que
quelques zones où finir le bitume « Le contrat est rempli ». Des composantes
communiquent que « toute tentative d’expulsion ferait l’objet d’une réaction
forte et immédiate », le Cedpa se dissocie de cet appel. Source : Presse Océan
12 Mars : AG extraordinaire du mouvement.
12 Mars : Appel à semaine de chantier sur la ZAD du 1er au 8 Avril, en plus
de la présence à l’Ambazada d’une brigade du pays basque. L’appel ne
parle encore que de « menaces » d’expulsions... Source : ZAD nadir
14-15 Mars : Dans la nuit, quelques bouts du nouveau bitume de la D281
sont arrachés alors que la route devait être rendue circulante dans les
jours qui suivent. Sans doute pour protester contre le fait qu’aucun
ralentisseur hormis des cordes n’est visible sur cette route, malgrès la fin
des travaux et son ouverture annoncée, et les engagements du
mouvement à les « réclamer » aux autorités.
19 Mars : « À propos de l’interruption des travaux sur la d281, des menaces
d’expulsions et de nos engagements communs. » : texte de dissociation du
« sabotage » de la D281 et parlant « d’engagements communs » (sic), alors
qu’il n’y a toujours pas de ralentisseurs en vue. Source : ZAD nadir
19 Mars : Comité de pilotage et rassemblement clairsemé devant la
préfecture à Nantes.
20 Mars : Assaut sur la Gaieté pour kidnapper une personne ayant
publiquement assumé le débitumage de la D281. Celle-ci sera tabassée
jusqu’à avoir des membres fracturés, et emmenée dans un coffre pour être
« déposée » devant un HP...
20 Mars : Rencontre stérile entre Le Cornu et la « délégation inter-composante ». Rien n’y sera porté vis-à-vis des ralentisseurs sur la D281.
L’État reste sur sa position, déjà claire depuis un moment : il y aura bien
expulsions à la fin de la trêve hivernale, pas d’entité collective mais des
déclarations individuelles et « les normes doivent être respectées ». Toutes les
« demandes » de la délégation sont rejetées. Source : Indymedia Nantes
20 Mars : La Freusière est incendiée.
20 Mars : AG extraordinaire « du moment » (histoire d’entretenir le flou
entre « des usages » ou « du mouvement » ?).
21 Mars : Au matin, Le Cornu fanfaronne sur la D281 : « La main de l’Etat ne
tremblera pas ». L’accueil est mitigé selon les lieux. Source : Presse Océan
21 Mars : Depuis la destruction de Lama Faché, les personnes de la zone
non-motorisée et leurs soutiens construisent le camps de la massacrée.
« Appel à sur-occupation à la massacrée ». Source : Indymedia Nantes
22 Mars : « Toujours armé-e-s contre le béton ». Source : Indymedia Nantes
22 Mars : AG des zab’ qui écrit un court texte condamnant les milices tout
en continuant d’affirmer ne pas savoir qui mené l’attaque de la Gaiété.
Source : Indymedia Nantes
25 Mars : Malgré la fin des travaux de la route, la présence policière se
renforce. Les incursions ailleurs que sur la D281 se multiplient. Les cordes
qui y servent de « ralentisseurs » sont régulièrement volées, des chicanes
mobiles sont montées pour les remplacer puis défaites sous la pression
policière, qui restent occuper le terrain.
27 Mars : Des occupant·e·s des alentours de la route s’organisent hors
assemblée pour ramener des remorques de pneus au milieu des patrouilles
de flics pour préparer des barricades.
28 Mars : Annonce de la fin des travaux sur la D281.
30 Mars : Texte contre les expulsions de « l’ensemble des habitant.e.s de la
ZAD ». Les occupant.e.s y ont iels participé.e ? Source : Indymedia Nantes
31 Mars : Manif contre toutes les expulsions à Nantes.
03 Avril : AG des usages qui publie un texte en réaction aux menaces
d’expulsions. Source : ZAD nadir
03 Avril : La date du début des expulsions se confirme : le 9 Avril.
04 Avril : quelques « ex-totos » (probablement membres du CMDO)
publient une « mise au point » assez crapuleuse sur le site de la ZAD.
06 Avril : AG exceptionnelle sur la ZAD contre les expulsions.
07 Avril : Intercomité, qui publie un appel à mobilisation.
07 Avril : L’ACIPA publie un communiqué contre des expulsions,
demandant aussi de laisser les routes ouvertes pour ne pas donner de
prétextes pour expulser, comme si l’État en avait besoin...
08 Avril : Les GMs ferment la D281 à la circulation en voiture. Mais n’ont-ils pas entendu l’ACIPA ? Pendant ce temps des barricades poussent un
peu partout.
Pour resituer certains trucs qui prennent beaucoup de place dans cette lutte et donc dans les textes qui suivent
Coord : « Coordination d’opposant.e.s à l’aéroport » regroupant une cinquantaine
d’assos, partis, syndicats et orgas citoyennes (dont l’ACIPA principale asso
citoyenne contre l’aéroport , l’ADECA asso des exploitants agricole de la zone,
Europe Ecologie Les Verts, le parti de gauche, ATTAC, le Modem, Solidaires, la
Confédération Paysanne, etc)
COPAIN : collectif regroupant une soixantaine d’agriculteurs des environs contre
l’aéroport où la confédération paysanne prend beaucoup de place.
CMDO : « Comité pour le Maintien De l’Occupation » est un regroupement d’occupant-es de divers lieux, dont les initiatives sont principalement axées sur
l’organisation avec les « composantes du mouvement » pour des évènements spectaculaires contre l’aéroport et pour imaginer un « avenir sans aéroport ». Ce
groupe au départ secret s’est peu à peu « autonomisé » du reste de l’occupation,
n’acceptant pas les critiques qui pouvaient, une fois son existence connue, leur
être faites sur leurs méthodes qui privatisaient avec les autres « composantes » les
décisions du mouvement.
A.G. des Usages : assemblée crée en septembre 2017, avec pour objectif de préparer l’« avenir sans aéroport ». Sa vocation est de créer une délégation et des
arguments pour aller négocier avec l’état après l’abandon du projet. Elle a été
mise en place par un accord entre le CMDO et les « composantes », laissant de côté
comité locaux et autres non-affilié·e·s. S’y sont joint d’autres occupant·e·s pour
au départ surveiller ce qui s’y disait et faire que les décisions y soient le moins
pire possible, jusqu’à finir par y reconnaître une légitimité et pleinement y par-
ticiper. Elle fonctionne par commissions, échanges de textes (mais seulement de
« composantes ») et compte-rendus. Ses réunions n’étaient, en général, pas annoncées publiquement, et au fur et à mesure il devenait de plus en plus difficile
de suivre les débats qui s’y déroulaient tant ils devenaient techniques qu’au vu
du temps que cela demandait. Les personnes qui ne sont pas « habitantes » depuis
longtemps sont priées de ne pas prendre la parole lors de ces assemblées. Elle est
parallèle à l’AG du mouvement, ouverte à tou.te.s, qui se retrouve ainsi de fait
dépossédée de certains débats.
Chronologie de la 1ère vague d’expulsions
Semaine du 09 au 15 Avril
09 Avril : Début des expulsions. Les flics arrivent dès 3h du matin et se
positionnent sur la D281 et la route des fausses noires jusqu’à 6h, où ils
commencent à expulser et détruire. Leur objectif de la journée est la destruction
d’une dizaine de squatts sur la apparement quarantaine concernés par
l’ensemble de l’opération. La chévrerie résiste vaillament aux différents assauts
et est encore debout le soir.
09 Avril : Parution de « seconde manche » sur lundi.am (site appeliste), texte
continuant à parler d’une unité avec des « Nous » et des « le mouvement » mais
mettant les expulsions sur le dos des auteures du « débitumage » de la D281.
09 Avril : Le Cedpa et Verchère se dissocient dans la presse et ne défendront pas
les occupant.e.s.
09 Avril : AG d’expulsions à la Wardine, avec le constat que les occupant.e.s sont
loin d’être isolé.e.s. Beaucoup de « soutiens de l’extérieur » sont sur place.
10 Avril : Les expulsions continuent. D’après la préfecture, 15 lieux ont été
détruits. Il semble que le point de cristallisation sur les vraie-rouges a permis de
faire diversion pour pouvoire raser tranquillement les cabanes de la zone non-
motorisée. Interrogée sur la destruction des 100 noms, la préfête continue à
mettre la pression sur celleux qui aimeraient se légaliser « Je n’ai eu aucun projet
individuel de déposé, aucun des squats expulsés ne faisait objet d’un projet individuel ».
10 Avril : AG d’expulsions. Y est critiquée la sur-médiatisation de l’expulsion des
100 noms plutôt que les autres.
11 Avril : 13 autres lieux sont rasés ou en cours selon la préfecture. Énormément
de blessé.e.s ce jour-là. Une liste de permis de démolition émise par la mairie de
Notre-Dame-des-Landes montre que les fausses noires et les vraies rouges ne
sont pas concernées. À plusieurs reprise l’électricité et l’eau sont coupés dans
différents lieux/quartiers (La Grée au départ, puis Wardine, fausses noires, ...).
11 Avril : AG des usages déplacée au hangar de l’avenir et appelée uniquement
par texto. Y est dit qu’il faut une assemblé spéciale pour les nouveaux et
nouvelles arrivant.e.s pour leur préciser les enjeux de la lutte et éviter le
« syndrome post-barricadier ». Et ça reparle de négociations...
12 Avril : Annonce de la fin de la première phase d’expulsions par Macron et la
préfecture. Selon leurs déclaration 29 lieux auraient été rasés, mais le décompte
est bien en deça du nombre réél de cabanes détruites (plus de 35). L’activité sur
zone de la police ne serait plus qu’une opération de protection du déblaiement
des restes de cabanes, d’ouverture des routes et pour empêcher les
reconstructions, bref, du « maintien de l’ordre ». Dans les faits : des dizaines
d’arrestations, des contrôles routiers, des contrôles d’identité sur zone, des
affrontements, des blessé·e·s, des destructions de lieux qui continuent en
loosedé...
12 Avril : AG des usages. Pendant cette AG, COPAIN a la préfecture au téléphone,
qui marchande l’annonce dans la presse de la fin de l’opération contre le retrait
des tracteurs.
13 Avril : La prefecture « tend la main » (celle qui ne tient pas la grenade) en
agitant un « formulaire simplifié » qui permettrait de signer une COP temporaire.
Perquisition à la Grée, les flics attaquent les lascars à la Saulce. Beaucoup de
blessé.e.s, et d’arrestations, de lourdes peines de prisons prononcées ce jour là.
13 Avril : AG « des nouveaux arrivants ». Elle est conflictuelle, le mandat de la
délégation est rapellé, selon quoi les négociations devraient être rompues dans
les conditions actuelles.
14 Avril : Manifestation à Nantes.
14 Avril : « Rien n’est fini, tout recommence ! » Des « occupant·e·s » y affirment « Dans
les circonstances actuelles où les menaces d’intervention policières sont toujours
présentes, il nous paraît très difficile d’envisager la reprise du dialogue. »
14 Avril : « Invitation à la solidarité depuis la ZAD de NDDL contre les violences
militaires du gouvernement français ».
15 Avril : 1ère manif de réoccupation (de Bellevue au Gourbi) « Le temps est
venu ». Pendant ce temps, à l’Est, la Grée est nassée rendant leur appel à aller
récupérer / réocupper les cabanes détruites impossible à réaliser. À 19h a lieu à
la Saulce l’affrontement le plus violent depuis le début des expulsions. Des
blessé.e.s par dizaines en deux heures.
Semaine du 16 au 22 Avril
16 Avril : La nouvelle charpente du Gourby est assitôt détruite au petit matin par
des blindés. Les flics continuent les déblaiements. L’AG des usages décide qu’il
faut reprendre le « dialogue » avec la préfecture. Y est aussi lu « Prise de parole à
l’assemblée des usages du 16 avril 2018 des "Soutiens de l’Exterieur" ».
17 Avril : La préfête se promène sur la ZAD. « On n’est pas idiot, il y a des lignes qui
peuvent bouger, indique l’un des porte-parole de la Zad [ à la presse ]. On a compris qu’il
fallait faire évoluer nos positions et réfléchir à différents « cadres » permettant aux uns et
autres de rester. Mais on veut avoir des garanties, trouver une forme qui n’exclut
personne et qui n’étouffe pas notre volonté de porter des projets collectifs et solidaires, tels
qu’on les construit ici. ».
18 Avril : Rencontre entre la « délégation inter-composantes » et la préfecture, avec
le patron d’Ushuaïa. Ils ne reculent pas d’un pouce : il faut signer les fifiches
simplifiées individuelles.
18 Avril : AG des usages. Des personnes critiques y dénoncent son réel et unique
objectif, celui d’aller négocier. Il y a parallèlement des tentatives de s’organiser
hors de ce cadre sur d’autres bases.
18 Avril : Verchère étale sa dissociation dans la presse et quitte le mouvement.
Ciao pantin.
19 Avril : Réunion appelant à « discuter de l’état des négociations après le refus de la
COP globale par le gouvernement », et se concentrant sur le dépôt de « fiches de
projets individuels, nominatifs mais inter-dépendants ». Pour Julien Durand dans la
presse : « La solidarité, c’est ne pas s’entêter à continuer les conneries de s’appeler
Camille. C’est faire le minimum pour sauver le maximum »...
19 Avril : Parloir sauvage à la prison de Carquefou.
https://nantes.indymedia.org/articles/41025
20 Avril : Dépôt à la préfecture du dossier rassemblant quarante « fiches projets »
dont plus des deux tiers concernent des activités agricoles. Avec un beau schéma
et tout et tout.
20 Avril : Julien Durand craque et vomit dans la presse « [...] c’est vrai, à une
époque, l’Acipa a soutenu la ZAD. Saufqu’aujourd’hui, l’aéroport est abandonné, "la zone
à défendre", c’est fini. Alors, les zadistes radicaux, allez voir ailleurs ! »
https://www.lci.fr/societe/zad-notre-dame-des-landes-les-leaders-historiques-multiplient-les-appels-a-la-raison-julien-durand-acipa-sylvain-fresneau-2085063.html
20 Avril : AG du mouvement à la Wardine. Des positions sont exprimées contre
la signature des fiches. La facilitation est critiquée comme n’étant pas neutre et
quitte son poste.
21 Avril : « Des occupant.e.s » écrivent leur ras-le-bol de Julien Durand aux
adhérent.e.s de l’ACIPA. https://nantes.indymedia.org/articles/41034#comment-288890
21 Avril : Des conflits autour des barricades commencent à agiter la zone et se
poursuivront la semaine suivante. Un lieu à l’ouest (St Jean du Tertre) qui ne se
sent pas menacé par des expulsions à ce moment-là détruit les barricades faites
par des lieux menacés car ils n’ont pas remplis de fiches, sans leur demander ni
venir à la réunion de quartier. D’autres conflits autour des barricades auront lieu
jusqu’à la deuxième vague d’expulsion.
Semaine du 23 au 29 Avril
23 Avril : Attaque de véhicules de l’entreprise Louis XVI (fourrière nantaise
participant aux expulsions) par « l’amicale Verts Chers ».
https://nantes.indymedia.org/articles/41065
23 Avril : Fin de l’ultimatum de la préfecture pour le dépôts des fifiches. Annonce
par la préfecture dans la presse d’une « trêve » (pas d’expulsions, mais toujours
des opérations policières de « maintien de l’ordre ») jusqu’au 6 juin.
24 Avril : Les 4 familles d’agriculteurices exproprié.e.s encore sur zone signent
leur COP dans leur coin.
24 Avril : « Appel intergalactique en provenance de la ZAD »
https://nantes.indymedia.org/articles/41076
25 Avril : La priorité de certains « habitant·e·s » de la ZAD semble être de s’excuser
platement aux voisin·e·s des désagrements causés par... la présence policière...
https://nantes.indymedia.org/articles/41079
25 Avril : Le squat « L’ancre noire » à Fay s’est fait expulser en loosedé.
26 Avril : E. Philippe annonce dans la presse que les expulsions reprendront à
partir du 14 Mai.
28 Avril : Manif anti-repression à Nantes.
28 Avril : « Déclarations et bla-bla d’un premier ministre : "les menaces doivent cesser"
crie la naïveté ! » https://nantes.indymedia.org/articles/41128
29 Avril : Grand jeu « Passe à l’Est » pour essayer de passer la D281 occupée par les
keufs et reprendre les lieux détruits. https://nantes.indymedia.org/events/41053
Prise de position de la légal team sur les actions de milice à la ZAD
Publié sur Indymedia-Nantes le 30 mars 2018.
Mardi 20 mars dernier, 5 personnes cagoulées, armées de battes de baseball et de
gazeuses ont fait une incursion dans un squat sur la ZAD. Ils ont tabassé les personnes sur place pour embarquer une personne, mains et jambes ligotées, scotch sur les
yeux et la bouche. Ils mettent la personne dans un coffre de voiture et repartent aussitôt. Plus loin ils la tabassent encore et lui cassent une jambe et un bras, pour
finalement l’abandonner à coté d’un hôpital psychiatrique.
Son tort, c’est d’avoir voulu mener une action contre un projet de l’état qui ne colle
pas avec la stratégie dominante dans le mouvement, c’est à dire celle d’inviter la
préfète, les flics et les aménageurs sur la ZAD pour négocier avec eux.
On est bien au delà de la phase d’essayer de dire gentillement à certains groupes
qu’ils vont trop loin, des remises en question, etc. Pour autant on trouve ça aussi
craignos qu’il n’y ait quasi pas de prises de position après cette opération dégueulasse d’aspirants flics. Pour comparaison, quand des journalistes invité.es par l’ACIPA
se sont pris un peu de compost, une boulangerie s’est mise en grève, les assemblées
ont du déménager, l’internet d’un lieu a été coupé, etc...
Une partie du mouvement veut essayer de gagner des points auprès de l’état en
faisant le travail des flics. Des offrandes dont ils croient qu’elles vont motiver l’état à
donner des cadeaux à son tour. Cette opération montre que la répression d’où qu’elle
vienne, revient grosso modo à la même chose :
On cherche à punir celleux qui dérangent. On cherche à menacer celleux qui pourraient vouloir le faire. On profite de l’impunité policière en faisant partie des groupes
dominants, avec le plus de moyens et la meilleure organisation.
On défend les intérêts de l’état et des citoyens privilégiés avec de la violence et des
rapports de force Un nombre important de personnes peuvent être gênantes pour le
pouvoir, par contre la répression est adaptée à la classe sociale. Les personnes trop
connectées, trop bien vues, on ne va pas les mettre à l’hôpital pareil, juste des coups
de pression, des insultes, du mépris,…
Par contre une personne plus vulnérable, on se permet. On reproduit même l’aspect
classiste de la répression d’état. En plus, on s’est permis de faire le procès de la victime le soir même dans l’assemblée du mouvement.
En déposant la personne devant un hôpital psychiatrique, on rajoute une touche de
validisme. C’est bien la place pour les personnes qui dérangent. Qu’on expose une
personne ainsi au risque de se faire placer en HP sous contrainte, par exemple si elle
avait eu des antécédents psychiatriques, ils en ont forcément rien à foutre, voire ça les
aurait arrangé.
Les forces réactionnaires dans toute leur splendeur. Ce qui est hallucinant, c’est qu’il
y en a toujours qui prétendent que sur la ZAD on essaie de s’organiser sans faire recours à la police et la justice. Que ici on fait commune, que ici on est révolutionnaire.
Pour la légal team, cet acte représente ce contre quoi nous avons toujours lutté. On
rappelle qu’un mouvement de lutte n’est pas à l’abri des rapports d’inégalités, les
oppressions et leurs aspects mêmes les plus violents, et on vous invite à réfléchir et
agir pour éviter dans d’autres luttes que certains prennent le dessus pour rétablir le
pouvoir des classes dominantes, et du coup, de l’état.
Rrrrr-appel
1er Avril 2018
Dans le contexte actuel, à la Zad comme ailleurs, c’est toujours intéressant de se rappeller quelques unes des bases politiques auxquelles certaines personnes ou groupes ne veulent pas être associées en façade, mais qui font tellement clairement écho à leurs pratiques
dégueulasses... que ça leur colle à la peau. Pour mémoire, un petit extrait de l’ « Appel »,
ce livre écrit en 2003, référence pour certain.e.s, et ses « 6 propositions » dont voici un
passage. Ca parle suffisament de soi-même pour ne rien avoir besoin d’y ajouter....
« Proposition V :
À toute préoccupation morale, à tout souci de pureté, nous substituons l’élaboration collective d’une stratégie.
N’est mauvais que ce qui nuit à l’accroissement de notre puissance.
Il appartient à cette résolution de ne plus distinguer entre économie et politique.
La perspective de former des gangs n’est pas pour nous effrayer ; celle de passer
pour une mafia nous amuse plutôt. »
Quand Lama faché, lama cracher !
Publié sur Indymedia-Nantes le mardi 10 avril 2018
Ce texte a été distribué un première fois lors de la manifdu 31 mars dernier contre toutes
les expulsions à Caen. Nous l’avons distribué à nouveau ce lundi soir alors que quelques
200 personnes ont arpenté les rues avec une belle énergie avant de rejoindre une gare
SNCF vide et sans trains au départ. Les flics se sont fait discrets.
Nous souhaitions en distribuant ce texte manifester notre solidarité face aux expulsions en
cour dont la première de Lama faché. Mais en même temps signifier d’où cette solidarité
s’exerçait et comment elle n’était pas dupes des jeux de pouvoir sur zone, et des appetits de
composition qui tracent leur chemin à la ZAD comme dans bien d’autres villes...
Enfin ce texte écrit fin mars ne rend pas compte de l’agression qui s’est passée sur la ZAD
ces derniers jours.
« Tous les partis, les syndicats, Et leur bureaucratie, Oppriment le prolétariat, Autant que
la bourgeoisie. (...) » Comité pour le maintien des occupations (CMDO) [l’original
pas la copie] La commune n’est pas morte, juin 1968
Le 17 Janvier dernier, le gouvernement Macron décide de mettre un terme au
projet d’aéroport de Notre-Dames-des Landes. Une fois n’est pas coutume, un
projet d’envergure est stoppé par ses opposant·e·s. Inutile de préciser que Manu
n’est en rien conquis par les vertus d’un bocage débarrassé de ces masses de
béton. Ses amitiés et ses intérêts sont tout autres. Seulement, il y a là une occasion stratégique à saisir, celle de désarmer un mouvement de solidarité qui
habite davantage qu’un bocage : des vies et des imaginaires. Et ce en normalisant
un espace où s’enracinait un lutte remettant en cause, pour nombre de ses protagonistes, bien davantage qu’un aéroport.
Malheureusement, et comme il est souvent de coutume en de telles circonstances, certaines franges du mouvement ont décidé de répondre positivement à
cette normalisation. Dans les heures qui suivent l’annonce gouvernementale
l’Assemblée du mouvement décide autoritairement de plier aux recommandations de la préfecture en ouvrant la voie à une occupation militaire du site, en
acceptant de débarrasser de ses chicanes la D281.
Et ce en expulsant, contre des habitant·e·s, deux cabanes occupées ponctuellement ou plus durablement. Rapidement, des troupes de gendarmes mobiles
prennent possession des lieux. Drones, appareils vidéos et micros directionnels
envahissent le paysage.
Si cette même Assemblée a, dans un texte en 6 points , affirmé vouloir maintenir
l’unité des composantes en lutte, s’opposer à toutes les expulsions et prendre en
charge l’avenir du mouvement, ses premiers gestes auront été d’une part de «
libérer » une partie de la ZAD et de l’offrir à son nouveau partenaire, l’Etat ; et
d’autre part de négocier avec le pouvoir. Le 19 mars, l’Assemblée appelait ainsi à
un rassemblement pour soutenir « une délégation intégrant l’ensemble de ses composantes – habitant·e·s, paysan·ne·s, élu·e·s, naturalistes, voisin·e·s. » représentant
paraît-il l’ensemble du mouvement. Le vieil adage qu’en Politique il faut avant
tout juger les actes plutôt que les paroles s’applique une nouvelle fois...
Lorsqu’en 2012 l’état ordonne de lancer l’opération César contre la ZAD, il ne se
doutait pas tomber sur un os. En quelques jours l’évacuation s’embourbe dans
cette zone humide avant que quelques 50000 personnes ne décident de réoccuper
les terres, et de construire des cabanes. Cette journée, où les militants et mili-
tantes politiques, associatifs et syndicaux étaient invités à ranger leurs drapeaux
respectifs, marquait la prélude d’une résistance massive et déterminée, le
fameux « kyste » décrit par Manuel Valls.
Dans ce coin, il y a eu de nombreuses luttes dans le passé, des liaisons entre
paysans et ouvriers de 68 aux luttes antinucléaires contre les centrales du Carnet
et du Pellerin. Les complicités fragiles mais riches, qui ne manquèrent pas de se
tisser, s’enracinaient dans les luttes passées, tout autant que dans un fort sentiment de résistance aiguisé dans des occupations débutées quelques années plus
tôt.
Seulement, au fil des ans et du succès de cette lutte, les complicités légitimes tissées dans cette résistance ont fini par laisser place à une manière stratégique et
instrumentale de se rapporter à la lutte : la composition.
Contriarement à l’image que certain·e·s n’ont eu de cesse de véhiculer, les conflits
ont toujours existé sur la ZAD et dans le mouvement contre l’aéroport. Les con-flits du quotidien dans la manière de vivre l’occupation entre éleveurs et antispécistes, entre antiféministes et féministes, etc. Mais également dans les
manières de vivre la lutte entre partisan·e·s de l’action directe et de la désobéissance, entre institutionnels et autonomes, entre assembléistes et affinitaires,
entre médiatiques et anti-médiatiques, entre « contre l’aéroport » et les « contre ce
monde ».
Ce qui se vit là-bas s’est construit sur la juxtaposition des logiques. Le slogan
contre les grands projets inutiles recouvrait dès l’origine des intentions et des
modes opératoires totalement opposés. L’extrême-gauche y voit une gabegie
économique ; EELV un projet peu compatible avec leur vision du capitalisme
vert ; les agriculteurs, des terres qu’on leur vole ; les primitivistes, une atteinte à
une nature sanctifiée ; et certains radicaux, un des nombreux aménagement de
nos existences par le capital et l’Etat. Les trois premiers espèrent un aménagement du territoire par l’Etat et le capital plus à même de correspondre à leurs
désirs, les deux derniers veulent pour des raisons parfois peu compatibles en
finir avec l’aménagement du territoire. Par ailleurs certain·e·s sont des gestionnaires, les autres promeuvent horizontalité et auto-organisation.
Ce qui tenait tout le monde ensemble c’est que chacun et chacune a toujours eu
besoin de l’autre pour que la lutte continue. L’ACIPA des zadistes pour occuper
les terres vouées à la destruction, les zadistes des agriculteurs et des organisations pour leur servir de bouclier et légitimer leur lutte. Les rapports qui nouent
les groupes entre eux ne sont plus dès lors que des rapports de dépendances réciproques qui les lient sur un mode instrumental. Même si bien évidemment la
lutte et la vie recèlent des moments beaucoup plus chouettes.
Derrière l’image d’unité qui est véhiculée, se terrent des antagonismes profonds
qui ne demandent qu’à resurgir à chaque fois que l’occasion se présente comme
lors d’un caillassage de flics. Il y aura toujours alors un Julien Durand de l’ACIPA
pour dénoncer dans la lignée de Bové ou de Mélenchon, les dangereux irrespons-
ables peuplant le bocage voué à destruction, ou une équipe des Verts pour singer
l’ouverture d’une maison équipée de bottes achetées le matin même à Montparnasse.
Ce qui ne manqua pas d’arriver à bien des reprises comme lors de la manif de
Nantes de février 2014 où l’on vit un Julien Durand, porte-parole de l’ACIPA,
jouer les contorsionnistes en se dissociant de la casse tout en évitant de con-
damner les casseurs, bref marquer sa désapprobation tout en cherchant à
maintenir l’unité avec les occupants et occupantes de la ZAD dont il avait encore
besoin. Dans les mois qui suivent l’entreprise de pacification consistera à refuser
toute nouvelle manif à Nantes. Injonction à laquelle ne manquera pas de répon-
dre une partie des « zadistes ».
Cette composition s’organise autour de composantes qui empilent les acronymes.
L’ACIPA est une des associations historiques des anti aéroports. La coordination
des opposants qui réunit les organisations. Le COPAIN réunit les agriculteurs
principalement liés à la Confédération Paysanne. Enfin, l’Assemblée de mouve-
ment, initiée par des occupant·e·s.
« Pendant longtemps, c’est resté un endroit de débat et de mise en commun des idées et
projets des différents bords, sans prétendre y décider de façon unitaire. Pour moi, le
« mouvement » était lié à cet espace créatif où différentes tendances s’informent et se
répondent, s’affirment et se critiquent, et sans renier leur autonomie d’initiative. Je crois
que c’est ça que certains ont commencé à appeler « composition », en tous cas moi c’est
là que j’entends ce mot pour la première fois. Sur le coup, j’ai pas fait trop gaffe, ça parlait
du « mouvement » et de ses « composantes ». Plus tard, je me suis dit que le concept de
composition ressemblait plutôt à une manière de pacifier la situation, d’en parler en mots
séduisants sans laisser apparaître le conflit et la contradiction. Bref de nous endormir
quoi. Jusqu’à appauvrir cette ébullition en cherchant sans arrêt une « voie du milieu »,
et que dans « mouvement » on finisse par oublier la diversité qui surprend pour en faire
une masse qui bouge « tous ensemble ». "Témoignage, Le mouvement est mort vive... la réforme !, Une critique de la com-
position et de ses élites, février 2018, par un groupuscule insignifiant.
Il ne manque jamais d’autoproclamés stratèges révolutionnaires ou réformistes
pour au nom de l’unité, du pragmatisme, de l’urgence imposer une direction et
une unicité au mouvement.
Des chefs ont fini par se dégager au sein même des occupant·e·s, mobilisant leur
force matérielle, leurs réseaux, leur puissance... non pas seulement au profit de
18l’ensemble de la communauté, mais pour structurer une hégémonie idéologique
sur la zone et la lutte. Ils et elles ont condamné au côté des « institutionnels » des
actions... comme l’attaque d’une voiture de journaliste. Mais également celle, à
l’aide d’un jet de purin, d’une conférence de campagne électorale de la France Insoumise à la Vacherie, lieu occupé de la ZAD. Leur vision de la composition
signifie faire taire les divergences et imposer une discipline de mouvement.
À la manœuvre, le Comité pour le maintien des occupations (CMDO) et quelques
complices, pompeusement baptisé de la sorte en référence à son ancêtre situa-
tionniste de 68. Ancêtre qui ne manquait pas à l’époque de marquer une distance
rédhibitoire avec l’ensemble des bureaucraties syndicales et gauchistes. Dans ce
comité de vieilles gloires de l’autonomie qui n’hésitent pas à jouer les portes
paroles médiatiques, à activer des complicités avec les bureaucrates de tous poils,
à accepter le jeu de la négociation avec l’Etat. Bref, à devenir des gestionnaires de
lutte.
Ces mêmes gloires, du fait de leur origine de classe, monopolisent les ressources
et les discours, disqualifient systématiquement leurs adversaires, les insultent,
les menacent. Les derniers incontrôlables qui n’avaient pas encore déserté les
Assemblées du mouvement, finissent par s’en barrer, écœurés.
La composition finit par montrer ses limites une fois l’objectif atteint ou la lutte
défaite. Si un texte en 6 points revendique officiellement la gestion de la ZAD par
une instance issue du mouvement, les composantes du mouvement cherchent
pour l’essentiel la négociation. Pour autant, pour le moment l’Etat ne lâche rien.
Une Assemblée des usages avait marqué depuis quelques mois ce soucis de
penser l’après aéroport. Sur ce terrain, certains comme l’ACIPA ou le COPAIN
avaient de l’avance. La proximité de nombreux et nombreuses de leurs protago-
nistes avec des anciens et anciennes du Larzac leur permet d’agiter quelques
vieilles recettes. Celles d’une zone normalisée, sous bail STCL avec l’Etat, cogérée
par la confédération paysanne et les écologistes d’Etat. C’est cette option que
défend d’ailleurs José Bové militant EELV, ami d’Hulot et de Julien Durant de
l’ACIPA, et ancien du Larzac en janvier dernier.
La normalisation de la D281 marque l’emprise de cette stratégie. Habitué à son
hégémonie le CMDO ne prend à cette occasion même plus soin des formes, et ne
s’appuie même plus sur un vote d’Assemblée. Les jours qui suivent, quelques 200
personnes démontent les barricades non sans bousculer les quelques récalcitrant·e·s qui refusent la décision, devançant à cette occasion le travail de
maintien de l’ordre. Lama Faché, une cabane sur la route, est démonté. Certain·e·s
le reconstruiront plus loin. Depuis l’Assemblée de lutte qui ne représentent plus
qu’une partie, certes sans doute majoritaire des occupant·e·s et des gens en lutte,
tente de négocier.
Pour maintenir l’unité, les idéologues de la composition auront rompu l’unité de
ceux et celles pour qui cette lutte visait autre chose que conquérir une ferme ou
un champ négocié avec l’Etat. Comme quoi cette lutte nous aura rappelé que les
« Amis » ne sont pas forcément des amis, les COPAIN pas forcément des copains.
Tout cela nous aura remis également en mémoire qu’une forme ne peut à elle
seule assurer une horizontalité. Certain·e·s qui ont pourtant toujours détesté les
Assemblées les ont investies. Non pour les potentialités de liberté et d’auto-organisation qu’elles pouvaient offrir, mais au contraire pour les logiques de
gouvernement, de contrôle et de soumission qu’elles pouvaient ici promettre. Si
nous restons pour notre part attaché aux Assemblées, c’est pour de toutes autres
raisons : nous coordonner, pouvoir exposer les jeux de pouvoir de bandes ou de
groupes, éviter de nourrir les postures narcissiques de groupe, etc. Bref pour leur
potentialité anti-autoritaire.
La composition est à l’auto-organisation ce que les chaînes sont à la liberté. Nous
avons pour notre part toujours défendu les associations d’individus dans des assemblées de lutte, des collectifs, contre la composition stratégique entre
organisations ou bandes. Nous sommes de ceux et celles qui ont toujours refusé
de cosigner des textes avec des organisations, et pas seulement « politique ».
L’empilement d’acronymes n’est pas une identité et une force autonome, mais
n’exprime au contraire que la soumission à des états-majors. C’est un peu comme
s’il y avait une inquiétude à la décomposition de la gauche, qui n’a jamais été
qu’une facette de la soumission, qu’il faudrait aider à remettre sur pieds, voire y
participer. Composer, c’est jouer un rôle, se grimer en vue d’élaborer un front
large. C’est bien porter ses activités à partir d’une approche essentiellement
stratégique et non d’un rapport éthique. Et surtout, tout cela ne produit que dépossession, et des espaces où chacun et chacune est sommé de suivre la voie déjà
tracée, plutôt que de chercher à nouer des complicités et construire du commun
sans taire les divergences et les réalités personnelles différentes. Composer c’est
pour l’essentiel renouer avec la vieille tradition Politique dans ce qu’elle a de plus
sordide.
Aujourd’hui cet appareil idéologique de milieu semble avoir pris comme une
fièvre. Des assemblée de luttes sur les demandeurs d’asile peuvent recevoir une
sénatrice EELV jadis alliée de Valls à visiter ses squats, des collectifs anti-répres-
sion penser à informer une union locale CGT qui avait condamné les casseurs en
2016 de ses activités, la Maison de la grève accueillir Houria Bouteldja, des mem-
bres du cortège de tête parisien protéger des locaux d’Emmaus, complice de la
machine à expulser... Il faut dire que pour d’autres ça fait déjà quelques temps
qu’ « élu·e·s des territoires qu’ils et elles habitent », jeudi ça peut être zbeul, et le lundi
Conseil Municipal.
Ce que l’idéologie de la composition répand c’est une discipline de milieu privilé-
giant les liens avec la gauche syndicale, politique et associative à toute radicalité
effective. Le spectacle ritualisé de l’action directe sous contrôle servant tout au-
tant à assouvir les pulsions activistes et les affects guerriers qu’à entretenir une
image faussement insurrectionnelle. Le spectacle de la contestation plutôt que la
contestation du spectacle.
Comité El Condor passa, Caen, mars 2018.
Prise de parole à l’assemblée des usages du 16 Avril 2018
On a beaucoup entendu parlé de nous à la dernière Assemblée des Usages (celle
du samedi 14 avril). Alors en tant qu’autre composante de la lutte (!), on est
venu·e·s parler en notre propre nom.
« On » c’est des personnes qui faisons partie de la désormais célèbre catégorie
« les soutiens de l’extérieur ». Celle qui n’est pas invitée à l’assemblée des usages à
prendre des décisions. Parce que comme beaucoup de gens ici, on ne vit pas sur
la zone tout le temps. Et comme beaucoup de gens ici, ça fait des semaines, des
mois, des années qu’on vient, qu’on habite pendant des périodes plus ou moins
longues sur la zad, qu’on passe du temps dans les structures de la zad (radio,
medic, legal), qu’on investit de l’énergie et des moyens matériels pour participer
à (feu ?) la lutte contre le monde qui va avec l’aéroport.
On a mis du temps à vous écrire.
Parce que ces derniers mois, on était éparpillé·e·s dans différents coins de fRance,
un peu isolé·e·s avec nos incompréhensions, nos questions et nos colères par rapport à ce qu’on perçoit de la situation sur la zad.
Parce que depuis une semaine, c’est l’urgence de l’opération militaire sur la zone,
et que prendre le temps de se retrouver pour discuter et écrire entre en compétition avec dormir, faire à manger, bouffer du gaz lacrymogène ou des grenades
assourdissantes, faire de la medic, aller soutenir les potes au tribunal, faire de la
radio, accueillir des gens, tenir des barricades, prendre du temps avec des gens
pour parler de ce qui se passe pour les un·e·s et pour les autres.
On vous écrit parce qu’on sait que les derniers mois on été compliqués. On sait
que vous avez eu plein de discussions interminables, des doutes plus ou moins
grands sur ce que vous êtes en train de faire, des moments de tensions avec des
camarades et des ami·e·s, et beaucoup de désaccords.
On n’est pas là pour dire comment faire, parce qu’on n’a pas de solution magique.
Et on s’est dit que ça valait le coup d’ouvrir le champ des propositions, de sortir
de la binarité : « on a tou.te.s le même discours » ou « on ne peut rien faire ensemble ».
Mais on vous écrit parce qu’on est super vener de ce qui est en train de se passer.
On est vener de ce en quoi la zad est en train de se transformer. On est vener des
prises de pouvoir qu’on perçoit de là où on est. On est vener de la violence des
keufs, de l’État et de la préfecture. On est vener que des gens soient arrêté.e.s,
blessé.e.s et mutilé.e.s par centaines. Et on refuse que ce soit pour défendre une
zad de quelques projets agricoles.
On vous écrit pour vous dire que pour nous, ce qui se passe est inacceptable
... la violence de l’État et de la police est inacceptable. Leurs grenades, leurs
blindés, leurs flashballs. Pas la violence des barricadières qui se battent au risque
de perdre un bras, un œil, un pied ;
... les communiqués de presse signés du mouvement, où il n’est question ni de
solidarité avec les expulsé·e·s, ni de prise de position contre l’État et les flics, sont
inacceptables. Surtout ceux qui condamnent les expulsions de lieux parce que
celui là est un projet agricole prêt-à-être-déposé ou celui-ci la maison d’une des
représentantes des occupant·e·s dans la délégation intercomposante. Ya des
crachats qui se perdent.
... les composantes comme le CMDO qui ne s’assument pas en tant que telle et qui
font semblant de ne pas exister pour pouvoir mieux agir dans l’ombre, sont inacceptables ;
... le recours aux arguments de « vie normale » pour s’opposer aux expulsions est
inacceptable. La promotion d’une zone qui serait un environnement « sûr, ni zone
de non-droit ni contre-société, sur laquelle vive des enfants déclarés, fréquentant les écoles
ou les garderies des bourgs alentour » (Communiqué des parents de la Zad de Saint
Jean du Tertre) est inacceptable ;
... l’unité à tout prix est inacceptable. Celle défendue par la logique des composantes qui accusent toujours les mêmes composantes de ne pas composer.
Celle qui pousse vers des positions toujours plus réformistes. On était là en 2012.
Et même avant. On se souvient qu’à l’époque l’ACIPA avait exigé publiquement le
retrait des forces de l’ordre. On se rappelle que les occupant·e·s refusaient que
des personnes identifiées nous représentent et que ça a valu pas mal de prises de
tête avec les autres organisations du mouvement. On se souvient aussi que les
réponses aux journalistes étaient des prises de parole collectives (et souvent
masquées !) pour lutter contre l’individualisation et la personnalisation du mouvement.
... l’absence de clarté sur ce qui se passe ici est inacceptable. Est-ce vraiment encore une lutte ? Parce que de notre côté, on trouve inacceptable de demander à
des dizaines de milliers de gens de faire des milliers de kilomètres pour venir ici,
apporter du matériel, mettre leur vie et leur intégrité physique en jeu ... pour
défendre des terres pour quelques projets agricoles soit disant alternatifs.
On sait aussi qu’ici comme ailleurs ya plein de gens qui continuent à lutter contre
le monde dégueulasse dans lequel on vit. A celleux là on veut apporter notre solidarité.
Malgré tout, si on continue à venir, c’est parce qu’on est solidaires ...
... des gens qui ont été expulsé·e·s de leurs cabanes, que ce soit par le mouvement
d’occupation sur la D281 ou par les keufs.
... de celleux qui développent des projets agricoles en dehors des normes étatiques d’hygiène et de sécurité (et certainement pas avec celleux qui pucent leurs
brebis), avec celleux qui développent des projets non-agricoles, et avec celleux
qui n’ont pas de projets du tout.
... de celleux qui construisent de l’expérimentation sociale et collective. D’ailleurs
on aime le mot collectif et on se demande bien pourquoi il est désormais quasiment systématiquement remplacé par le mot commun dans tous les textes et
appels à chantiers. On se demande aussi pourquoi les usages ont remplacés le
mouvement ? La gestion foncière aurait-elle remplacé la lutte ?
... de celleux qui portent la conflictualité comme une force de lutte. Parce que ne
pas être d’accord et s’engueuler c’est pour nous beaucoup plus intéressant que de
produire un discours commun et unitaire qui écrase les voix discordantes au passage.
... de celleux qui ont fait des compromis jusqu’à maintenant : celleux qui n’ont
pas attaqué les flics malgré leur présence sur la D281 depuis des mois, celleux qui
ont démonté leurs cabanes sous la pression du mouvement, celleux qui ne
voulaient pas des négociations avec la préfecture mais qui y sont allées quand
même ;
... de celleux qui se sont fait écraser au nom de l’unité et de la composition à coup
de stratégies d’intimidations, de mépris, de menaces verbales et physiques, et
même parfois de coups, de blessures et d’utilisation de l’institution psychiatrique. On est solidaires avec tou·te·s celleux qui sont parti·e·s à cause de ça.
On est solidaires de celleux qui luttent contre les normes de vie imposées par un système hétéropatriarcal, raciste validiste et capitaliste, de celleux qui luttent
contre la police et contre l’État fRançais. Et on se permet de croire que ce sont
aussi les raisons pour lesquelles des messages de solidarité arrivent du monde
entier, de Palestine, du Chiapas, de Turquie, des États-Unis, ...
Nous en tous cas c’est pour ça qu’on est là. Pas pour gagner une tranquillité et
une normalisation de nos vies sur des terres gratis. Nous avons vu de grandes
différences de stratégies et de visions politiques dans cette assemblée des usages.
Et nous ne voulons pas que certaines soient écrasées au nom de l’unité.
Les ruptures ne sont pas forcément définitives et peuvent constituer une force.
La composition comme certain·e·s disent, ce n’est pas forcément une unité qui
aboutit au réformisme. La composition, ça peut très bien être que l’assemblée des
usages exigent le départ des forces de l’ordre et la fin de l’occupation militaire,
même si tou·te·s ne sont pas d’accord et que certain·e·s auraient préféré rencontrer la préfète. Pourquoi ne pas assumer une coexistence conflictuelle ?
Des ami·e·s d’ici, des ami·e·s d’ailleurs
Lettre de compassion aux signataires des C.I.
Publié sur Indymedia-Nantes le 20 avril 2018
Ceci est un message sincère adressé à toutes celles et ceux qui ont l’intention de
remplir des conventions individuelles.
À vous qui êtes prêt·e·s à assurer votre avenir sur la ZAD. À vous qui acceptez de
vous soumettre à l’injonction de Mme la pré-fête par l’envoi de conventions individuelles afin de pouvoir cultiver vos champs ou votre petit jardin, d’élever vos
petits poulets (avec des aliments biologiques) et vos petits enfants dans un
monde apaisé, nous tenons à vous apporter tout notre soutien.
Ces derniers jours vous avez subi un grave traumatisme : grenade, manque de
sommeil, agressions diverses et permanentes dues au barbarisme du pouvoir, de
quoi en perdre espoir et raison !
Parce qu’il est très difficile de se renier soi-même et de lâcher le mouvement au
moment le plus violent de la lutte, faisant fi des milliers de soutiens, dont vous
représentiez l’espoir vers un avenir meilleur. Parce qu’il va être très difficile
pour vous de trouver votre place dans ce qui faisait la ZAD, sans doute avez vous
des doutes quant à votre capacité à trouver une place possible sur ce territoire à
défendre. Sans doute que renier vos idéaux passés va vous ficher un sacré coup
de vieux ! Peut être n’allez vous jamais pourvoir vous en remettre, ce qui serait
bien compréhensible : un tel niveau de traitrise et de renoncement, ce n’est pas
anodin ! Nous sommes très triste de vous avoir perdu, car vous ne serez plus ja
mais crédibles dans aucune des luttes à venir. Vous voici donc alors complice du
pouvoir et traitres envers vos frères et sœurs.
Surtout, n’essayez pas de vous donner bonne conscience en pensant que se mettre à genoux devant la pré-fète facilitera le développement de projets collectifs
et solidaires. Cette solidarité là, vous savez ce qu’elle vaut et sans doute ou la
mettre... N’oubliez pas de tirer la chasse !
Votre vie passée est morte, à partir d’aujourd’hui, il ne vous reste plus pour
tenir, que l’apitoiement sur vous même et votre silence face aux inconnu·e·s vis à
vis de votre dernière trahison.
Nous espérons, il va sans dire, un très grand succès à l’envoi massif de fausses
déclarations individuelles, afin que celles-ci noient les votres, et vous permettent
de vous en sortir sans trop de bobos.
En réalité, nous tenons à vous et nous pleurerions de vous perde.
Juju
Contre les lèche-bottes et leur monde
Publié sur Indymedia-Nantes le 21 avril 2018
Alors que je m’apprête à venir rejoindre mes amis et mes camarades à la ZAD, et
que, comme beaucoup à travers la France, je suis l’évolution de la situation derrière mon écran et dans les journaux, je suis désagréablement frappé par les
discours que j’y lis, que j’y entends. Ce sont toujours les mêmes « porte-parole »
plus ou moins auto-désignés, tenant toujours les mêmes propos : l’État, malgré la
sincère volonté de négociation du « mouvement » soi-disant uni, bafouerait ses
promesses, par exemple (comme par hasard) en expulsant les Cent-noms, collec-
tif « agricole » - et maison de certains des chefs du Comité pour le maintien des
occupations (CMDO). Ces propos, maintenant plus que jamais, il faut en faire une
critique politique.
Le jeu de l’État depuis quelques mois est (comme à son habitude) de diviser les
occupants en deux camps, opposables entre eux, les « bons » qui donneraient des
gages (« nettoyage des routes ») et déposeraient des projets agricoles « individuels » ; et les « mauvais » qui ne sont, apparemment, que des « branleurs »
(« Michel » à radio-France-info, le 9 avril). Or, au lieu de dénoncer ces grossières
manœuvres, et de faire preuve de ce qu’on appelait autrefois la « solidarité » (on
consultera au besoin un dictionnaire du XXe siècle), un bon nombre de ceux
désignés comme « bons » se sont empressés de se soumettre à toutes les injonctions de la préfète et autres. Et, bien évidemment, plus on obéissait à ces
injonctions, plus de nouvelles injonctions étaient formulées. L’exemple désormais connu du « nettoyage » de la D281 est encore dans toutes les mémoires : on a
d’abord exigé que soient détruites quelques constructions, puis rapidement
toutes les constructions, puis il y a eu une présence policière permanente « pour
accompagner les travaux de réfection de la chaussée », etc. À chaque étape s’illustraient un certain nombre d’individus, qui par ailleurs pour nombre d’entre eux
étaient membres de l’organisation politique ayant confisqué l’essentiel du pouvoir (mainmise sur les outils de communication, monopole des rapports avec les
autres « composantes », création d’une « assemblée des usages » bidon où tout est
prêt à l’avance, etc.) : le CMDO.
En fait, il était question de prouver à l’État qu’ils étaient capables de maintenir
l’ordre eux-mêmes.
Alors a eu lieu la première « trahison » de l’État : les « opposants » qui pourtant
pensaient avoir tout prévu pour leur intégration (avec un organigramme institutionnel complet), n’ont même pas été invités aux négociations sur la gestion
future des terres ! Quelle humiliation pour ceux qui voulaient, à n’importe quel
prix, s’intégrer à la gestion bureaucratique et devenir les relais de l’État !
Mais, au lieu de tardivement prendre conscience de leur rôle abject et de l’évidence que ce rôle ne pouvait que se retourner contre eux, nos braves
aspirants-gestionnaires ont néanmoins redoublé de lèche-bottisme, et ont déposé des projets agricoles en urgence pour ne pas voir expulser leurs maisons,
sans plus faire mine de se soucier des autres occupants (les « branleurs »). Dès
lors, toutes les soumissions à l’ordre bureaucratique que par ailleurs on pré-
tendait combattre sont bonnes : un autre chef, Delabouglisse, le porte-parole de
Copain44, a ainsi précisé mardi 10 avril en conférence de presse que « les brebis
venaient d’être pucées » par les habitants des Cent-noms. Semblant ignorer (mais
ne l’ignorant pas) tous ceux qui luttent encore contre le puçage des brebis, et en
général contre les normes agricoles (et qui sont très attentifs à ce qui se passe à
Notre-dame-des-Landes), il témoigne de la volonté désespérée de s’intégrer à
tout prix à l’appareil bureaucratique, en donnant tous les gages imaginables de
soumission complète. Et il va même jusqu’à s’excuser de ne pas pouvoir « en
deux mois proposer un projet parfait ».
L’inénarrable Julien Durand (Acipa) a finement suggéré une solution dans Presse-
Océan du 9 avril, c’est à dire en plein pendant les attaques des gendarmes : « On
encourage vivement les habitants de la Zad à déposer des projets individuels pour obtenir
une relative levée d’inquiétude [sic] sur l’ampleur de l’opération d’expulsion [sic]. » Tout
est dit : quoi qu’il arrive, à présent qu’il n’y a plus d’aéroport, il faut liquider le
mouvement d’occupation, gaz lacrymogènes ou non.
En résumé, « depuis le début de la discussion avec la préfecture, on a été bluffés totalement. »
« Alors là, ils sont forts, parce qu’ils nous ont eus, on a cru au dialogue, à l’apaisement et
aujourd’hui ils nous répondent par la violence », pleurniche « Willem » dans Ouest-France le 10 avril. Naïveté ou crétinisme ? Je ne peux trancher.
D’autre part, si les Cent-noms (entre dix autres maisons, rappelons-le même si
c’étaient des maisons de « branleurs ») ont pu être attaqués, évacués et détruits
dès le premier jour de l’opération des gendarmes, c’est bien avant tout parce que
la route D281 (qui y mène) avait été abandonnée, sous la pression, entre autres,
de certains habitants des Cent-noms eux-mêmes ! Un enfant de cinq ans découvrant le jeu d’échecs n’aurait pas fait une telle erreur tactique. On s’indigne de la
violence (« illégale ») des gendarmes alors même qu’on leur a soi-même déroulé
un tapis rouge, en écrasant les récalcitrants au passage.
Et pourtant, devant les ruines fumantes de sa maison, un des habitants, au lieu de
tirer les leçons de sa veulerie, pleurnichait encore, accusant l’État de ne pas avoir
« le respect de la valeur-travail [sic] » (« Michel » à radio-France-info, le 9 avril). Il
semble nécessaire, hélas, de rappeler que la plupart des occupants tâchaient et
tâchent toujours de lutter contre le travail et l’exploitation. Que certains aujourd’hui fassent l’apologie du travail dans la presse, c’est le comble de la
saloperie.
Dans le cadre de la répression des luttes, il est assez banal que l’État essaie d’intégrer certaines fractions particulièrement arrivistes ou ambitieuses, pour
encadrer le reste et miner la lutte ; et il est bien rare qu’il ne trouve pas des can-
didats (syndicalistes, « leaders » étudiants, etc.). À la ZAD, ç’aura donc été le
CMDO, en plus de l’Acipa/Coord et de Copain (un tel comportement étant
évidemment bien plus attendu pour ces dernières structures ouvertement ré-
formistes et co-gestionnaires).
Pourtant, malgré les marques les plus délirantes (et évidemment dangereuses) de
soumission, l’État n’a pas voulu d’eux ! Peut-être parce que, disposant de toute
façon par ailleurs de relais bien rodés (p. ex. Acipa), l’État a voulu marquer
qu’une frontière symbolique ne pouvait être franchie : celle de la propriété. Ou,
plus exactement, que l’État ne cède pas la propriété d’un bien (d’une terre) par la
négociation ; et par le rapport de force, très rarement. Ce serait de sa part recon-
naître que le sacro-saint principe de propriété, pilier indispensable du
capitalisme, n’est en dernière analyse qu’un vulgaire bout de papier. Mais doit-
on s’émouvoir du sort de ceux dont les espoirs odieux sont ainsi réduits à néant ?
Le CMDO est seul responsable de ce qui lui arrive, et il est inutile de verser des
larmes sur sa pitoyable déconfiture.
En revanche, il convient de continuer à soutenir celles et ceux qui, loin des
caméras, des conférences de presse et des tables de négociations de la préfecture,
luttent, non plus certes contre l’aéroport, mais contre « son monde » que certains
ont opportunément oublié.
En tous cas, de pleurnicherie en léchage de bottes, nous voici passés d’une situation où l’État, acculé à l’échec par la lutte, devait renoncer à un projet
d’infrastructure considérable, à une situation où les opposants eux-mêmes, au
nom d’une « union sacrée » dont on connaît pourtant les mécanismes, ont réalisé
une partie du travail de leur propre expulsion.
Il est vital de continuer à s’opposer, à la ZAD et partout ailleurs, à la répression
brutale de l’État ; mais pour ce faire il est indispensable de tirer les leçons politiques de ce qui s’est passé à la ZAD ces dernières années et plus encore ces
derniers mois, sous peine de reproduire, encore et toujours, les mêmes erreurs,
et de tolérer, encore et toujours, les mêmes prises de pouvoir et les mêmes coups
de poignard dans le dos.
Heureusement, certains sont encore là qui résistent sérieusement et avec une
détermination remarquable. Puissent-ils faire reculer pied à pied l’État — et ses
sbires, actuels ou en devenir.
Un camarade lointain
Signe ton formulaire et ferme ta gueule
Publié sur Indymedia-Nantes le 23 avril 2018
Hola Compas !
Nous t’écrivons pour te tenir au courant de ce qui se passe sur la Zad de Notre
Dame des Landes, une zone qui depuis des années veut se libérer de l’emprise de
l’état sur les décisions des individu·e·s et des collectifs et cherche comment vivre
et s’organiser. S’il y a eu une infinité d’expériences comme gérer le quotidien et
les conflits sans autorités et règles étatiques, et qu’une cohabitation de logiques
très diverses étaient possible grâce à la taille géographique de la zone qui
promettait, dans une certaine mesure, de s’organiser à sa manière sans s’imposer
aux autres ; la dégradation de la situation s’accélère rapidement !
Après que l’état ait abandonné le projet de l’aéroport qui réunissait des
citoyen·ne·s et des subversi·f·ve·s dans une lutte face à un ennemi commun, il
cherche maintenant toutes les raisons pour détruire cette zone qui échappe à
son emprise. Comment croire qu’un état pourrait tolérer sur « son territoire » des
endroits qui nient, par leur existence, la légitimité des lois qu’il impose.
Plus de 90 lieux coexistaient avec des conflits entre eux et tendaient à trouver
des solutions.
Aujourd’hui, certains choix et décisions prises ne peuvent plus cohabiter. La zone
en tant que totalité a perdu sa négation du pouvoir de l’état.
L’état français a donné un ultimatum aux occupant·e·s de la zone pour remplir
des fiches individuelles de légalisation de projet agricole jusqu’au 23 avril 2018.
Avec à la clef une menace d’expulsion si ces fiches comprenant les terres de la
zone n’étaient pas remplies et rendues. Il a souligné cette menace en commençant à détruire une trentaine de lieux dans la partie Est de la zone
(principalement dans celle non-motorisée).
Beaucoup de gen·te·s utilisent l’argument de l’urgence pour sombrer elleux-même dans une logique de diplomatie et de paternalisme. Ielles se permettent de renforcer à l’intérieur de la zone des mécanismes autoritaires au travers d’attitudes manipulatrices pour faire ce qui leur paraît juste tout en prétendant agir
pour le « bien commun » sur la zone. Le phénomène va aussi loin que certain·e·s
occupant·e·s ont décidé de signer des fiches qui incluent les terres et lieux
d’habitation des gen·te·s qui elleux refusent de faire légaliser « leur » lieu de vie,
leur projet, leur quotidien ! Ces fiches ayant parfois été signées dans leur dos,
sans aucune consultation.
Il suffit de quelques personnes ou collectifs prêt·e·s à marchander avec l’état
pour que celui-ci, avec ses mécanismes d’intoxication médiatique, puissent faire
un tri, entre ses citoyen.ne.s qu’il prétend protéger et les « criminel·le·s » qu’il se
devrait de réprimer au nom de la sécurité et du bien-être de sa population. N’est
ce pas une hypocrisie totale de prétendre sauver une zone du joug de l’état en
imposant la légalisation à toutes celles et ceux qui considèrent les lois et l’au-
torité comme deux facteurs majeurs de leurs oppressions ?!!
Pire que cela : prétendre agir en tant que collectif incluant toute la zone alors
que les occupan·te·s/habitant·e·s des lieux déjà détruits ne sont même plus ni
pris.es en compte, ni concerté.e.s après l’expulsion et la destruction de « leur »
lieu. Et que le refus denégocier et de signer des groupes et des individu.e.s est
piétiné et ignoré !
Prétendre protéger la lutte contre l’aéroport ET son monde en devenant propriétaire ou responsable légal est absurde ! La croyance en une victoire
bureaucratique est sidérante. On a toujours vu des organisations institutionnelles
tenter de récupérer des combats, ce mécanisme est désormais interne à la ZAD.
Croire pouvoir signer des contrats et faire ce qu’on veut derrière est illusoire.
Comment pouvoir croire gagner un jeu dont les règles sont écrites et constamment modifiées par nos adversaires ?
Contrairement à certain·e·s légalistes, nous n’allons pas imposer nos choix aux
autres. Mais il serait bien que tou·te·s celleux qui croient pouvoir gagner de la
liberté en se soumettant aux conditions de leurs oppresseurs soient conscient·e·s
du fait qu’ielles légitiment encore plus la répression contre celleux qui refusent
de négocier avec les autorités.
Même parmi les signataires, les idées, les raisons sont nombreuses et diverses.
Certain·e·s espèrent que ce soit une sortie de secours pour ne pas perdre les lieux
de la zad et continuer à créer et expérimenter des modes de vie. D’autres, de
récupérer des terres de manière délibérée. D’autres encore, culpabilisent des
personnes dubitatives en invoquant un processus de signature collectif qui serait
entravé par d’éventuels refus de signature.
En effet, les cabanes et jardins peuvent être détruites parce que l’état détient la
puissance militaire pour anéantir des structures physiques et matérielles et pour
tuer. Donc une grosse partie des problèmes est là : sauver des idées au risque de
perdre des espaces ou sauver des lieux en perdant ses idées.
Compa ! Ce ne sont pas les lieux qui nous font vivre mais nous qui faisons vivre
les lieux. Donc même si les autorités internes ou étatiques rongent les espaces, il
reste de l’espoir : les luttes contre TOUTE forme d’autorité sont toujours
présentes ici à travers de nombreux groupes et individu·e·s. Les ami.e.s du pouvoir peuvent bien essayer de faire croire le contraire. Nous ne sommes pas dupes, à nous de les contrer !
Solidarité aux 4 copa·in·e·s incarcéré·e·s, aux autres et aux personnes coffrées.
Contre tous les placards !
D’innombrables occupant·e·s intemporelles et déterminé·e·s
L’Ancre Noire a été expulsée
Rien n’est fini, tout commence
Publié sur le blog de l’Ancre Noire le 24 avril 2018
L’Ancre Noire a été expulsée dans la foulée pendant la « trêve » que la délégation
de l’assemblée des usages (organe du pouvoir bureaucrate sur la zad) a mendié à
la Préfecture la semaine dernière, en échange de quelques formulaires légalistes ;
les mêmes que les sbires de l’État tendaient à la main des arrêté·e·s de la semaine
dernière, en guise de la blague de mauvais goût qui devient de plus en plus une
réalité – « ce papier est le prix qu’on donne à ta liberté ».
L’État, on sait bien ce que c’est et ce que ça fait aux gens et espaces qui nient son
emprise, depuis le début de son histoire. Les rebelles, dont ces gens et ces espaces
(dont quelques fois représentent aussi des nouveaux ou anciens États), ont une
aussi historique tendance à s’affronter, a poser des conséquences face aux offensives de l’État jusqu’à son collapse, ou jusqu’à à leur disparition ou assimilation.
Du coup, en parlant d’assimilation, on tient à dire que cette assemblée des usages
et ses délégations font partie du dégradant spectacle institutionnel qui se déroule
sur la zad depuis au moins un an, depuis la reddition progressive de la route des
chicanes (chantiers de “nettoyage autogérée” de Mars et Décembre 2017, et
chantier de la DDE avec occupation policière légitimé par l’AG des usages de Janvier à Mars 2018), depuis le comité de médiation pour l’abandon de l’aéroport
(Octobre 2017 – Janvier 2018) jusqu’aux actes de torture le soir du 20 mars proportionnés à un ami à nous par les mains et coffres de bagnole de certains
enfants de Toni Negri (suite à un symbolique et sympathique sabotage de la route
fraîchement restaurée), quelques repentis basés sur zone et organisé·e·s sous la
bannière du CMDO à la zad – et plus généralement dans le parti imaginaire
français – qu’on appelle ici à se dissocier et bannir définitivement de tout espace
dit « libéré », « occupé » et « auto-organisé » – dans la région, dans l’État Français, et
internationalement. À son temps, ces noms et ces faces seront mis (encore plus) à
publique, pour dissuader des autres coups à la bolchevique dans le futur.
On fait appel ici aux camarades des espaces se déclarant antagonistes, partout
dans l’État Français et ailleurs, à ne plus héberger et s’organiser avec des telles
personnages, meneurs d’une institutionnalisation fracturante dans le mouvement révolutionnaire, et d’actes d’agression de teneur corporative – de
collaboration avec les intérêts répressifs et politiques de l’État.
On tient aussi à dire qu’en début Février, les occupant.e.s de l’Ancre Noire se sont
définitivement dissociés de la zad institutionnelle quand les discussions pour une
« envisageable » demande de légalisation des terres périphériques de la zad ont
évoqué le squatt. En la considérant à la fois comme foyer de beaucoup d’ami.e.s,
on peut définir maintenant la « ZAD » comme une institution en plus à renverser,
et un territoire en plus à libérer, avec ses logiques de pouvoir et oppression
structurelle.
On préfère tenir une existence comme des indivu·e·s libres et sauvages en perpétuelle tension envers le pouvoir, tout pouvoir, soit là d’où on vient, de là ou on
va, et surtout, de là ou on est.
Toute notre solidarité aux enfermé.e.s par l’État Français depuis le recommencement de la conflictualité à la zad ... See you in the barricades ?
Communiqué des sans fiche
Publié sur Indymedia-Nantes le 24 avril 2018
Le jeudi 19 avril, certain-es d’entre nous ont été informé-es tardivement, voir
par hasard, qu’une réunion était appelée au Camps des Cheveux Blancs. L’ordre
du jour était : discuter de l’état des négociations après le refus de la COP globale
par le gouvernement. Il s’agissait encore d’une énième dernière tentative d’arracher une gestion collective de la zad, cette fois-ci grâce à un dépôt de fiches de
projets individuels, nominatifs mais inter-dépendants.
Certain-es d’entre nous ont préféré ne pas ou ne plus adhérer à ces « pirouettes »
et nous nous réunissons aujourd’hui pour tenter d’expliquer pourquoi. Pour une
partie, la négociation avec l’État n’a jamais été acceptable. D’autres, initialement
relativement optimistes ont progressivement perdu toute confiance et enthousiasme ces dernières semaines et mois...
De plus, ce nouveau lâchage de lest a été présenté de telle sorte qu’il fallait que le
« consentement », que le consensus des signatures individuelles soit total. Si un
lieu refusait cela bloquait tout. Nous avons rejeté et cet ultimatum et ce paradoxe
de consentement forcé. Nous prenions position : que notre refus de dépôt de
projets ET signatures soit clair et respecté, mais pour ne pas faire barrage au processus, il n’y avait pas de veto.
Tous-tes refusons des pratiques jugées autoritaires, de chantages jouant sur la
peur, d’imposition de logiques d’urgence, de lobbying etc, que tout cela vienne de
l’intérieur ou de l’extérieur de la zone.
Nous n’acceptons pas que certain-es fassent abstraction de personnes luttant au
quotidien contre les normes, qu’elles vivent ici ou ailleurs. Ni que d’autres en situations irrégulières puissent se retrouver muselées.... bien que parrainées.
Nous refusons de nous inscrire dans l’état de droit, collectivement et individuellement.
Nous comprenons ou imaginons bien que certain-es tentent des « petites histoires » légalistes, pour soit gagner du temps, ou re-re-regagner la solidarité
d’autres composantes.
Mais ici, au vu et déroulé de ces dernières semaines et mois, tout ceci est devenu
futile sinon nuisible à nos yeux. On ne se reconnaît pas/plus dans cette stratégie
molle.
Même dans le Meilleur Des Mondes, ces projets acceptés mèneraient à la longue
très certainement vers le pire : une normalisation qui légitimera untel ou unetelle plus que d’autres à vivre ici.
Enfin, malgré les présentations et les promesses, on a le sentiment que le légalisme pour Tous ternit d’autres luttes qui elles sont et resteront sans titre, sans
chef, sans parcelle, sans frontière...
Merci pour les soutiens, celleux qui viennent et les bonnes énergies.
Une pensée pour tous et toutes nos ami-es blessé-es et/ou incarcéré-es.
Maintenant, débrouillons nous de tous ces « NOUS ». <-------- ?
Appel à détruire les routes circulantes de la zad hors période d’expulsion.
Publié sur Indymedia-Nantes le 27 avril 2018
Ce texte est un détournement de celui publié sur le site de la ZAD intitulé « Appel à laisser
circulantes les routes de la zad hors période d’expulsion »
Nous, qui habitons ce territoire et entendons continuer à y rester, croyons que
les barricades ont été un des nombreux outils permettant de nous défendre et
qu’elles le seront encore en cas d’attaque.
Mais l’important dans la guerre qui nous est faite n’est pas tant la barricade en
elle-même que de savoir quand la mettre et quand aller plus loin. Plus important
encore est le nombre de personnes qui seront prêts à la défendre et à se
mobiliser par d’autres moyens le moment venu.
Les routes laissées libres (et existantes) en dehors des journées d’expulsions font
monter grandement le ressentiment au sein de la population locale ( et
internationale).
Sans le soutien de celle-ci, qui est aujourd’hui rendu extrêmement fragile de ce
fait, il nous sera très difficile de gagner les batailles à venir et sans doute
impossible de nous projeter ici dans le futur ou de croire le but commun de cette
lutte.
Nous pensons que les barricades sur les axes routiers principaux doivent pouvoir
être prêtes, permanentes et mises hors du débat avec des économistes démagos
de la zone qui utilisent la notion de "moment opportun". #différence d’agenda.
Nous proposons donc la destruction des routes comme préalable à toute
discussion sérieuse.
La marche à pied des composantes alliées permet de continuer à mettre en
oeuvre un soutien public et concret face aux expulsions.
Nous voulons une zone non motorisée car les néo-agricult-rice-eur-s
productivistes et autres artisan-e-s capitalistes n’ont pas le monopole de la
pensée du blocage des flux...
Les ouvertures de routes ( et leurs existences ) entravent la possibilité pour nos
camarades et nous-même de pouvoir faire nous projeter dans cette zone, de la
considérer comme "safe" ou sérieusement révolutionnaire, elles mettent en péril
nos futures. Elles entravent nos propre circulations et acheminements les jours
où elles ne sont pas nécessaires. Nous remercions toutes les ami.e.s venues nous
soutenir sur le terrain et leur demandons de prendre en compte cette analyse de
la situation.
Des habitant.e.s de la zad et d’ailleurs
Face aux attaques de l’État et ses relais internes : guérilla sociale anti-autoritaire !
Publié sur Indymedia-Nantes le 1er mai 2018
Suite à un texte publié le 26 avril 2018 sur le site zad.nadir.org et signé « des habitant·e·s de la Zad » appelant à debarricader.
Dans le contexte actuel de la Zad de Notre Dame des Landes, à l’heure où des
fiches individuelles de projets « collectifs » ont été déposées en préfecture afin
d’obtenir des conventions d’occupation précaires, à l’heure où les forces militaires sont toujours présentes sur la zone, certain·e·s habitant·e·s appellent (sans
concertation) à débarricader les routes (et le font !).
Nous refusons ces pratiques autoritaires et dangereuses.
Alors que chaque jour depuis janvier les forces armées militaires nous expulsent
violemment des routes, chemins, champs et bois de la Zad, contrôlent nos allées
et venues, nous photographient, filment et fichent depuis leurs drones et hélicos ;
Alors que chaque jour des reconstructions sont détruites et le matériel collectif
volé et/ou détruit par les forces de l’état ;
Alors que toute résistance est réprimée à coup de grenades GLIF4 et de gazs indéterminés, de flash-ball et de tirs tendus de lacrymo provocant de nombreuses
blessures, que les peines judiciaires s’amoncellent avec leurs lots de fichages, interdictions de territoire, amendes, contrôles judiciaires, peines de prison fermes
ou avec sursis ;
Une partie du mouvement d’occupation (d’habitation ?), croît bon d’appeler à
« rendre les routes circulantes » (parlez en donc à la préfète ou à Macron, c’est bien
elleux qui envoient les militaires occuper la Zad et ses routes !) .
Habiter vient de haber : avoir, posséder et résume bien la teneur de la lutte de
certain·e·s : accéder à une propriété d’usage privative des biens communs de la
Zad pour le bénéfice de groupes affinitaires et donc fermés (quand ce n’est pas
secret).
Dans ce but, recevoir les félicitations de la préfecture est important !
La Zad comme espace de déradicalisation par le travail était une des options envisageables par l’état pour sortir de la crise Nddl. Cette stratégie bat son plein
relayée en interne par les ex-radicaux·ales et nouveaux·elles compositionneur·euse·s (d’une « théorie » politique tactique disant, grosso-merdo, « toutes les
alliances sont possibles pour sauver nos acquis matériels »).
Bien entendu, tout cela ne peut tenir qu’au prix d’une large dissonance cognitive
(combattre le capital en signant avec l’état capitaliste en rentrant dans ses cases)
abreuvée par une mythomanie collective (on va endormir l’état en se cachant
derrière un « manteau légal ») et une culture du déni assumée (on s’en fout de
celleux que l’on considère comme « minoritaires » ou « n’ayant pas conscience des
enjeux de La lutte », on passe en force et tant pis si le « processus de prise de décisions
est foireux », excusez-nous encore une fois de plus, on recommencera plus cette
fois c’est sûr — même si la dernière fois on a dit la même chose, et les fois d’avant
aussi...).
Ainsi, cette pensée politique (le compositionnisme) repose sur l’idée de créer des
« bases arrières » pour la révolution internationale. Comment pouvons-nous être
une « base arrière » en pactisant avec l’état et le capital ? Qu’est ce qu’une « base
arrière » dans la lutte contre la globalisation capitaliste ?
Être dans la lutte anticapitaliste et anti-étatique/anti-autoritaire ou pas, voilà la
question !
Les dépôts de projets le confirment : ces projets sont bien compatibles avec l’état
capitaliste, avec les félicitations de la préfète pour le travail effectué (tu
m’étonnes ! Dynamiter de l’intérieur la lutte contre le monde de l’aéroport tout
en faisant le travail de sélection et de fichage à la place de la préfecture, c’est
tout bénèf pour l’état !).
Le texte prévoit de mettre des barricades « seulement au moment opportun ». Mais
qui juge du/des moment·s opportun·s et pour qui ?
Ces habitant·e·s mettent-ielles à disposition les matériaux, outils et engins pour
faire ces « barricades circulantes » ou laissent-ielles les autres se démerder (au nom
de l’autonomie et de l’autogestion, sans doute ! C’est pratique ! Surtout pour
celleux qui oublient la revendication de l’amnistie des actes en solidarité avec la
zad et connaissent surtout la solidarité envers leurs propres cercles « affinitaires » ou d’intérêts !) ???
Lancer un appel à débarricadage sans même consulter ni informer les personnes
concernées témoignent de pratiques autoritaires et méprisantes pour toutes les
personnes dont la liberté et la sécurité dépendent pour partie de ces barricades.
L’occupation militaire est générale (via les forces armées directement (armée,
police services de sécurité privés,etc...), ou via la guerre économique qui exclut
les pauvres de certains espaces, les tue en les privant de ressources), la Zad fait
partie des espaces en libération des forces de l’état et du capital. Sur zone aussi,
la lutte se fait contre les autoritarismes et les oppressions systémiques.
Pour notre sécurité, sur « zone », barricadons, chicanons, et fortifions les routes,
les chemins, les champs et les bois. Pour ne pas laisser le capital contrôler nos
vies, ne le laissons pas s’approprier les espaces ni gérer les flux ! Organisons nos
espaces de luttes et d’offensives, nos chemins de repli à couvert et de contre-attaque, et nos points d’observation et de transmission.
Harcelons les forces armées étatiques partout où elles sont présentes jusqu’à ce
qu’elles dégagent !
Désarmons l’état, réquisitionnons ses armes, formons des bataillons !
Dans cette guerre asymétrique, la guérilla sauvage et imprévisible est notre
meilleure arme.
Ici comme ailleurs, non à l’occupation militaire !
Bibliographie
Des textes qu’on a pas inclus mais qui valent le coup de lire.
- La brochure « Le mouvement est mort ! Vive...la réforme ! » (février 2018)
- La brochure « Zadissidences 1 »
- La brochure « Des dynamiques inhérentes aux mouvements de contestations » (Mars
2018) - Un article sur l’expulsion du lieu de vie la Chèvrerie
- Un article plus ancien du collectif hors-norme « À NDDL comme ailleurs, seul un territoire en lutte peut s’opposer à la normalisation industrielle agricole »
- « Plus de frangines, plus de frangins »
- « Invitation à la solidarité depuis la ZAD de NDDL contre les violences militaires du gouvernement français »
- « Censure, repression et babillages politicards en direct de la ZAD de NDDL »
- « Une série de témoignages à propos de différents lieux de vie détruits par l’État ces derniers mois... » (Audio)
- « Rouen : anti-autoritaires, round 666 »
- « Toujours armé.e.s contre le béton »
- « Milices sur la ZAD 2, le retour »
- « Mais que font les anti-autoritaires »
Ni oubli ni pardon pour nos bourreaux !
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