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Deux fois plus de chances le samedi soir brochure sur la biphobie

mis en ligne le 1er août 2018 - Anonyme

NOUS N’AVONS PAS À PROUVER NOTRE BISEXUALITÉ.

La bisexualité est une orientation sexuelle, minorisée et silenciée.
Nous ne la choisissons pas non plus. Nous ne sommes pas des usurpateur.rices. Nous ne sommes pas plus « infidèles » que d’autres.
Hétéroland ne représente pas non plus pour nous une « zone de
confort
 ».
Nous sommes ni plus, ni moins opprimé.e.s que les lesbiennes et les
gays, nos réalités sont tout simplement différentes...

  • Il ne s’agit pas d’entrées et de sorties de placard.
  • Il ne s’agit pas simplement de sexualité mais de
    désirs et d’envies parfois mouvantes.
  • Il ne s’agit pas de s’adapter pour se sentir légitime
    dans une communauté où, de fait, nous sommes
    légitimes.
  • Il ne s’agit pas non plus de laisser les autres nous
    définir.

Il n’existe
pas de cadre rigide
pour caractériser mon envie
de vivre ou d’aimer. Aucun
cadre ne permettrait de contrôler les identités de chacun.e ou
qui définirait dans un périmètre
infranchissable, qui est dedans,
qui est dehors. Il y a des expériences, des envies, et des colères
qui sont propres à chaque individu. Il n’existe pas non plus de
« langue commune » pour désigner des réalités partagées plus
ou moins visibles. Mais un désir
de nommer l’existant pour mieux
lutter contre tout ce qui nous
opprime, y compris à l’intérieur
de nos propres luttes.

Nos existences et nos attirances sont fluides. Nos envies et nos désirs dépassent la simple question de « sexe » (en terme de pratique) ou de la « sexualité » (hors du désir).

Pour beaucoup, la biphobie serait
la somme de préjugés et clichés
issu des « deux mondes » (hétéros
et homos), de leur méconnaissance et du manque de visibilité
des personnes bies...
Les personnes bisexuelles
n’existent aujourd’hui sociale‐
ment et politiquement qu’à travers
l’hétérosexualité ou l’homosexualité. Une des caractéristiques
principales de la biphobie est la
négation de la bisexualité comme
orientation sexuelle à part entière.
Pour certain.e.s parent.e.s, et pour
les psys par exemple, les bi.e.s
sont des gent.e.s sexuellement et
mentalement un peu perdu.e.s...
Selon Freud, à qui on ne peut
soupçonner aucune sympa‐
thie antisexiste, nous naissons
toustes bi.e.s... Les sexualités
« s’affinent » en grandissant pour
entrer ensuite, à maturité, dans les
cases sociales prévues à cet effet
(hétéro/homo). Imaginez-vous les
conséquences que peuvent avoir
certains propos sur des personnes
en questionnement ? Dire que leur
sexualité n’existe pas, que c’est
une phase, une mode, ou encore
qu’iels finiront (en grandissant)
par trouver le droit chemin, par
faire un choix...

Si la bisexualité masculine
est souvent mal perçue (virilité oblige), la bisexualité
féminine, elle, est partie
intégrante de l’imaginaire
pornographique hétérosexuel.

Au passage, le risque de subir
un viol est multiplié par trois
pour les meufs bies/pan/pluri [1].
Par ailleurs, très peu d’études
(correctes) existent au sujet des
risques d’IST/MST (sauf la mise
en exergue des rapports à risques
soit disant liés aux « rapports
divers et multiples ». Pourtant certaines personnes sont
bisexuelles et n’ont pas d’activité
sexuelle fréquente ou régulière).

La question des mots

Dans le langage courant (et donc
pas forcément le nôtre), une personne bisexuelle est une personne
qui est attirée à la fois par les
hommes et par les femmes. Cette
définition est cissexiste (car elle
suggère que l’humanité se divise
en deux groupes : hommes et
femmes).

On remarquera au passage que
d’autres définitions recouvrent
des problématiques similaires
comme le terme homosexuel
– homo, du même sexe et hétérosexuelle, orientation, attirance
sexuelle pour des personnes du
sexe opposé [2]. Les définitions de
la plupart des orientations monosexuelles sont de fait binaires, et
excluantes pour les personnes
intersexes et les gentes qui ne souhaitent pas entrer dans un genre
déterminé (comme les personnes
F to U, M to U – U pour Unknown
par exemple).

On a alors cherché un mot plus
convenable comme le terme
pansexuel.le qui lui, met l’accent soit sur « tous les genres »,
soit sur « peu importe le genre ».

Cependant, pour nous (rédacteur/trice de ce zine), être bisexuel.le, c’est pouvoir être attiré.e
par plus d’un genre.
C’est-à-dire : pas forcément tous, mais
ça peut
, pas forcément le même
genre que nous-même, mais ça
peut
. Nous pensons que le terme
« pan » gomme certaines de
nos réalités. Parfois, selon nos
vies, nos envies et leur temporalité, nous vivrons une attirance
sexuelle envers plus d’un genre,
mais romantique uniquement
avec les personnes de même
genre (ou assignés) que nous (par
exemple).Les choses bougent. Le
peu importe n’est pas toujours
valable.

Certain.e.s bi.e.s ont des préfé‐
rences. Certain.e.s sont asexuel.les ou bisexuel.le.s aromantiques.
Certain.e.s bi.e.s n’ont relationné
dans les faits uniquement avec des
personnes d’un seul genre. Tous
ces vécus sont valides.

La bisexualité pose des réalités différentes et rarement
superposables.
Dans les faits, il
est impossible de rencontrer une
personnes ayant 50 % de relations
hétéro/as et 50 % de relations
homos ; puisque nos relations, nos
envies, nos genres et nos identités sont mouvantes et différentes
selon les personnes.

Il est important de noter qu’être
en couple n’enlève rien à la
potentialité des attirances : une
personne bie en couple, quel que
soit le genre de son/sa partenaire,
reste bie.

De la même manière, on peut être
bi sans avoir eu d’expériences
sexuelles ou romantiques. Le
terme « fluidité » renvoie à la
variation des comportements...

Même si être bisexuel.le, ce n’est
pas un statut plus mouvant qu’un
autre. Pas plus que celui d’homo
ou d’hétéro/a. De toute manière,
on ne devrait pas avoir peur de
la fluidité et du changement. En
définitive, l’identité sexuelle est
issue de la perception de soi-même. Elle n’est pas inhérente à
un parcours spécifique.

« Et sur cette idée que pour être
un.e bi-e valable il faille un 50-50 de
pratique, OK, mais qui compte les
points ? Et à quel moment ? Genre
on va attendre ma mort et retracer
mes histoires amoureuses/sexuelles
et compter avec combien de mecs (cis
ou trans), de meufs (cis ou trans), de
personnes non binaires, j’ai couché ou
été amoureuse et décider pour moi,
post mortum, si finalement j’étais
vraiment bie ou en fait une lesbienne
jamais sortie du placard ou une hétéra
qui voulait faire son intéressante ?
Ça n’a aucun sens ».
( Témoignage, V. )

En fait, si certain.e.s préfèrent
« pan » car iels privilégient un
vocabulaire qui ne fait pas référence à la dichotomie homme/femme, d’autres préfèrent « bi.e »
car c’est un mot plus largement
connu, et parce qu’iels estiment
que cette identité, très dénigrée, est à défendre.

BIPHOBIA NOT IN MY NAME

En tant que personne trans non binaire, plein de choses sont dites à
ma place. Je choisis de me définir comme bisexuel-le malgré les voix
insistantes qui me disent que je ne devrais pas. La plupart du temps
cette biphobie est masquée derrière des excuses comme « la complexité
du langage » et « l’inclusion des personnes trans ». L’idée que le mot
« bisexualité » renforce la binarité de genre occidentale, et du coup, mau‐
vaise pour les personnes trans comme moi, est une forme de biphobie
tellement commune qu’elle se trouve à côté de Photograph de Nickelback
dans la playlist de trucs que je peux plus entendre.

Cette idée ne vient pas d’une complexité de langage mais de la biphobie.
Quand les gens parlent de comment les mots renforcent la binarité,
c’est toujours uniquement à propos de la bisexualité. Je suis allé-e à
beaucoup d’événements LGBT où j’ai pu entendre « nous devons laisser
tomber le B » ou, dans un contexte plus personnel : « oh, je n’utilise
pas le terme bi, ça renforce la binarité ». Vous savez ce que personne ne
dit jamais ? Comment les mots gay et lesbienne renforcent eux aussi la
binarité de genre. Personne ne dit jamais « je ne me définis pas comme
lesbienne parce que ça ne prend pas en compte les personnes trans ».

C’est comme ça que je sais que c’est de la biphobie masquée en « langage
inclusif ». Seul les bisexuels doivent changer, seule notre identité est
mauvaise. Bien que la communauté bi se définisse elle-même comme
« attiré par plus d’un genre », cette binarité, c’est seulement les mecs
et meufs cis extérieurs à la communauté bi qui l’imposent en notre nom
(de personne trans).

Source : http://projectqueer.org/post/127959369623/biphobia-not-in-my-name Traduit par F.

L’arbre qui cache la forêt

En réalité, d’éternelles remises en
cause nous rappellent souvent que
notre orientation sexuelle déplaît,
et que nous sommes sur la sellette.
Parfois même dans un milieu qui
lutte pour la reconnaissance de
toutes les formes de sexualités
et identités... La bisexualité reste
largement méconnue, c’est pour
cela qu’elle est souvent remise en
question.

Dans son ouvrage, Le miroir bi,
Catherine Deschamps souligne
comment la bisexualité est traitée
différemment de l’hétérosexualité et de l’homosexualité. Des
« preuves » étant régulièrement
exigées des bisexuel-les pour
confirmer et ré-affirmer dans le
temps leur orientation sexuelle.

« Je suis attiré-e par XXXX*
(*genres pluriels) mais je
me prends que des râteaux...
suis-je vraiment bisexuel-le... »

Voilà le genre de chose que l’on a
déjà entendu lors d’un débat sur
la biphobie. Certes, on a le choix,
mais la réalité est plus complexe,
je ne choisis pas mes attirances,
mes désirs, ni mes fantasmes
et mes amours. La plupart du
temps d’ailleurs ça me tombe sur
le coin de la gueule. Et scoop :
On ne choisit pas d’être bi
tout comme on ne choisit pas
d’être homo ou lesbienne.

Scoop encore !

Nous serions quasiment aussi
nombreux.s.e.s : Selon une enquête
Ifop-Têtu réalisée en France,
février-mars 2011, les personnes
se déclarant homosexuel(l)es et
bisexuel(l)es représentent 6,5 % de la
population française âgée de 18 ans
et plus, dont 3,5 % d’homosexuel(le)s
et 3 % de bisexuel(le)s.

L’invisibilisation

L’ouverture du mariage aux
couples de même sexe
, nous
rappelle à quel point la vision
binaire du couple (quelle soit
hétérosexuelle ou homosexuelle)
subsiste dans notre société.

De fait, le coming out bi est souvent complexe (et régulier, comme
après une rupture ou lors d’une
nouvelle relation), nombreux.ses
sont celleux qui se sont entendu
dire après une rupture « tu vois
t’es pas bi.e » ou « c’était juste une
passade ».

Nos amours et nos envies n’apparaissent pas forcément comme
une évidence (« ah tu dois avorter mais... T’étais pas lesbienne ? »
J’étais en couple avec une fille
blaireau, maintenant non, mais
au fait on aurait pu faire un bébé
aussi !).

« À peu près à chaque fois que je
relationne avec une personne de genre
et/ou expression de genre différente
de la relation précédente, face aux
personnes qui me connaissent peu ou
pas, je vois la surprise dans leur yeux
et je me sens obligée de réexpliquer
pourquoi, ou encore « comment c’est
possible ? ».Aujourd’hui, j’ai encore
du mal à parler de violence conjugale,
d’avortement ou de sexisme dans le
cadre de relations juste parce que
parfois j’ai l’impression de parler d’un
privilège (le fameux privilège bi) alors
que les choses que je vis/subis chez
Hétéroland sont souvent violentes. »
( Témoignage X. )

En fait, avec un pied chez Hétéroland, il faut régulièrement
montrer patte blanche
 : avoir eu
suffisamment de relations homo/lesbiennes pour être un.e vrai
bi.e (t’as donc intérêt à avoir du
succès : si tu te manges constamment des râteaux démerde-toi avec
ton identité d’hétéraflexible !). En
réalité, Hétéroland présente pour
nous aussi un certain nombre de
problématiques du fait de notre
bisexualité, socialement et sexuellement.

Remarque : Quand on parle de
ce qui nous fait violence dans
une relation avec un/des mecs,
la réponse « t’as qu’a arrêter de
coucher avec les mecs », est à éviter. Primo parce que c’est pas
hyper féministe en fait (t’as qu’à
arrêter de t’habiller sexy pendant
qu’on y est ?). Ensuite parce que
ça invisibilise juste les violences
vécues, sous couvert de biphobie
et de culpabilisation.

Pour le docteur Alfred Kinsey, la
sexualité humaine se situerait
plutôt sur une échelle, de 0 à 6, soit
totalement hétérosexuel d’un côté
et 100 % homosexuel de l’autre.
Cette analyse ne prend pas en
compte la dimension temporelle et
reste une analyse sociologique figée.
Autre exemple, si 1/3 des personnes
bies s’étaient identifiées comme
gays ou lesbiennes dans le passé. Le
contraire est également possible. Et
là, SCOOP : pour certaines personnes
la bisexualité n’est PAS une étape.
Elle n’est pas passagère, elle est
même souvent l’aboutissement de
différents parcours amoureux.

La silenciation

« Le fait que la bisexualité
soit tue, que les bisexuel.les
ne se présentent pas en tant
que tel.les, augmente l’impression qu’il s’agit là d’une
chose dont il faudrait avoir
honte ».

L’occultation de la bisexualité est
la tendance à ignorer, falsifier
ou réinterpréter toute preuve de
la bisexualité apparaissant dans
la littérature, les archives historiques, les travaux universitaires,
les médias et toutes les autres
représentations mainstreams [3].

Certaines personnes bies peuvent
également chercher à se dissocier de certains groupes pour
se distancer le plus possible des
représentations négatives liés à
la bisexualité. Par exemple, en
mettant volontairement en valeur
certaines relations plutôt que
d’autres.

Dans les années 80, au sein du
magazine Lesbia n°36, Nelly Fage
porte son attention sur la manière
dont la bisexualité a été décrite
dans la presse féminine au regard
de la norme hétérosexuelle, afin
de sensibiliser les lectrices à
cette question : « Égarements
d’adolescentes, étourdissements
féministes, transgressions excitantes de l’interdit, surprenantes
conséquences de l’alcool ».

L’intention est ici d’insinuer que
la bisexualité n’est qu’un caractère
passager ou exceptionnel
. Finalement, les rédactrices de Lesbia
bouclent ce dossier sur la bisexualité avec un article intitulé « Au
royaume des bi, les hommes sont
rois ». Le débat houleux sur la
bisexualité dans Lesbia Magazine
perdure jusqu’aux années 1990.

(En réponse à l’article : « Au
royaume des bies les hommes
sont rois ? »...Le prince
charmant est déjà mort...)

« De base, ça me paraît ultra cissexiste.
Parce que j’imagine qu’on parle ici de
meufs cis bies et de mec cis hétéros ?
Ensuite, pour moi cette phrase veut
insinuer que les meufs (cis) bies
finissent toujours en couple avec des
mecs (cis hétéros). Est-ce qu’on peut
rappeler qu’il y a aucune « étude »
(pour ce que ça vaut) de grande
envergure qui démontre cette soi-disant réalité ?

Et si on a l’impression que c’est
vrai, on peut parler du rôle de
l’hétéronormativité, ou du rejet de la
part des lesbiennes envers les meufs
bies ? Entre les deux, ça favorise les
rencontres vues comme hétéros. Et
pour celles qui auraient eu la chance
de traîner avec des lesbiennes pas
biphobes et qui seraient quand
même tombées amoureuses de mecs
cis hétéros et seraient en couple monogame avec eux ? euh ben cool
pour elles ? On est au cas par cas,
chaque vécu est différent, chaque
rencontre etc. Un moment faut arrêter
de généraliser...

Ou alors, cette même phrase veut
insinuer que les meufs bies, comme
elles sont bies, répondent au
fantasme très courant de l’homme
cis hétéro : le plan à trois (avec
deux meufs cis of course). Et là,
allô féminisme  ?!

Les meufs c’est pas les jouets des
mecs, ouais même les meufs bies. Si
une meuf bie choisit de participer à ce
genre de plan à trois, c’est son droit.
Quand bien même le mec de l’équation
serait « gagnant » dans l’histoire. Et
pourquoi ce serait lui le gagnant en
fait ? C’est pas parce qu’on relationne
avec des mecs cishétéros qu’on ne sait
pas ce qu’on fait ou qu’on est victime.
Un moment peut-être, on peut faire
la part des choses entre les hommes
cishétéro, en tant que communauté/système oppressif, et les individus ?

Et pour finir : en fait c’est quoi cette
phrase à la con ? Ça met complètement
de côté les mecs queer ? Les mecs
bi/pan, les mecs trans. Est-ce que
ça leur « sert » à quelque chose les
meufs bies ? En quoi ils sont « rois »
de quoi que ce soit dans l’histoire ?. »
( Témoignage, V )

« Nous sommes accusé.es
de profiter du privilège de
pouvoir être pris pour des
hétéros, alors que quand on
est homo, ce même privilège
est appelé placard... »

Et donc, s’il n’y a pas de placard
pour les bi.e.s c’est qu’il n’y a pas
de bi.e.s ? Ce qui insinuerait que
nous vivons des oppressions uniquement dans nos relations non
hétéro et jamais dans ce que nous
sommes, en tant que tel, en tant
que personnes bies.

Premièrement , il existe des
personnes bies qui sont butch,
intersexes ou transgenres et des
personnes gay ou lesbiennes qui
ont des passing typiquement
hétéro. De plus, penser que l’on
peut être identifié comme un
couple hétéro dans certaines de
nos relations est une idée cissexiste. C’est penser que la société
peut correctement deviner les
genres des personnes en relation,
juste en les voyant, ce qui est faux.

Scoop : Le passing hétéro est
difficilement imputable aux
seules personnes bies. Quand
vous allez dîner quelque part
avec quelqu’une d’un autre genre
que vous ? Quand vous allez faire
des courses avec quelqu’une d’un
autre genre, vous êtes hétéro ? Les
gens qui ne vous connaissent pas
vont probablement vous croire
hétéro/as. L’hétéronormativité
dans toute sa splendeur.

Scoop toujours : Il arrive également que ce soit l’idée de la
bisexualité en tant que telle
qui provoque le rejet
(familial par exemple), et pas sa stricte
dimension homosexuelle.

Prenons quelques exemples : un
amant jaloux qui va nous forcer
(et sexuellement) à rentrer dans le
droit chemin, la psychiatrisation
de nos comportements, ou encore
l’infantilisation permanente (ça
te passera...), l’intrusion dans
nos vies, les questions déplacées
(comme si nous étions des bêtes
de foire : je peux regarder ?, Qu’est
ce que tu préfères au lit ?
etc.), la
lesbophobie/homophobie ordi‐
naire (je vais te présenter untel.le ;
iel va te plaire, forcément iel n’est
pas straight lui/elle non plus) et
tant d’autres choses.

Un jour iels retourneront chez Hétéroland... pour le confort...

Si par malheur, iels (les bi.e.s
toujours) tombent un jour amoureu.se d’une personne d’un autre
genre, leur passé, leur vécu ne
vont pas s’effacer pour autant. Iels
retourneront dans Straighland
(pas dans leur tête ni dans leurs
esprits qui ne gommeront pas
leurs désirs et leurs fantasmes...,
mais aux yeux des autres).

On ne leur souhaite que du
bonheur et on ne reprochera
pas de tomber amoureu.se.

On imagine sans difficulté qu’iels
ne seront pas les premier.e.s à
venir manifester contre le mariage
pour tous. Iels restent bi.e.s et
les définir comme des traîtres est
biphobe. Ce sera tout simplement
un couple perçu comme hétéro
entre une personne hétéro et une
personne bie.

Scoop toujours : On ne va pas
chez Hétéroland pour le confort
mais seulement par amour/envie/désir... Dans le cas contraire,
quelqu’un.e veut bien nous expliquer en quoi c’est confortable de
faire des choix, sous contrainte,
pour intégrer la norme, éviter
le jugement d’autrui, et autres
ennuis ?

Identités politiques et pratiques

« Chaque personne a son
propre vécu et éprouve plus
ou moins le besoin de s’extérioriser un peu, beaucoup,
pas du tout. »
(bi’cause)

Parfois on ressent l’envie de se
rassembler, pas toujours, et pas
forcément parce que nous vivons
les mêmes oppressions mais parce
que nous partageons une même
colère.

Le fait de se définir bi.e semble
pour certain.es servir la catégorisation liée à la norme,
en figeant l’existant.
Une
façon aussi de dévoiler au monde
son intimité sans pour autant
être certain.e.s que celle-ci sera
reçue de manière positive bien
au contraire.

Pour d’autres, c’est justement une
manière de chahuter, faire
bouger les frontières, en parlant de fluidité, de bizarrerie.

La norme doit être exclusive identifiable, facilement cernable, voir
même quantifiable. Or, pour les
personnes bisexuelles ce n’est
pas le cas. Les réalités bies sont
tellement complexes qu’il parait
difficile de pouvoir les essentialiser.

Revendiquer, c’est aussi rendre visible, justement pas pour figer les choses, mais pour que les mentalités et comportements bougent autour de cette question.

L’argument de base selon lequel
il y aurait autant d’orientations
sexuelles que d’individus pousse
à subir et surtout à ne pas réfléchir aux schémas de domination
qui apparaissent dans nos rapports. Il est parfois nécessaire de
trouver les mots pour exprimer ce
que l’on vit, avec ou sans étiquette
mais en se sentant respecté pour
ce que l’on est et ce que l’on vit,
sans honte, sans avoir peur d’en
parler. Et ce, même si les mots
ne suffisent pas, parce qu’ils ne
reflètent jamais complètement
l’entièreté des vécus, des réalités,
et des ressentis...

En 1978, l’élaboration de la grille
d’orientation sexuelle de Klein
par
le sexologue américain Fritz Klein, a
permis mieux saisir les différentes
nuances de la bisexualité
 : au
delà des identités sexuelles fixées,
il utilise différent critères dans
son analyse (relations, sociabilité,
auto-identification, fantasmes...).

Et sinon, « vous n’avez qu’à vous organiser, vous les bi.e.s plutôt que de pleurer sur votre sort... »

Plusieurs raisons expliquent la
difficulté de rencontrer des personnes ouvertement bisexuelles. Il
est souvent nécessaire de verbaliser sa condition, sauf que le risque
de remarque, rejets, brimades est
important. Et ce même si, régulièrement, des personnes prennent
soin de nous outer en prévenant
directement les copain-es (attention, danger !).

Comme cette identité est plus
méconnue, l’outing est aussi difficile
(et plus régulier) selon une étude
américaine réalisé en 2013, 70 %
des homos et 70 % des lesbiennes
sondés se sont outés auprès de leurs
proches/familles, pour les personnes
bies ont passe à 13 % chez les
hommes bis et 33 % chez les filles.

Selon Catherine Deschamps, le
manque de visibilité de la bisexualité et la difficulté d’en médiatiser
une représentation visuelle représentent un véritable obstacle.

Quand on cherche à mettre en
image des personnes ou relations
bisexuelles, on va facilement
représenter un couple à trois.
Ce qui va de nouveau entrer dans
les stéréotypes. La licorne est
souvent utilisée comme emblème,
en réponse aux personnes qui
pensent que les bi.e.s n’existent
pas et donc seraient des créatures
imaginaire.

« Je pense à une amie gouine qui
n’est pas super à l’aise avec tout ça
et aurait même tendance à penser
que les bi-e-s sont une menace
mainstream pour le groupe (pourvu
qu’elle ne se reconnaisse pas, si tu te
reconnais, sache que je t’aime malgré
ça !), son petit ami ayant transitionné,
indépendamment de l’influence ou
non de cette situation sur sa façon
propre de se définir, elle « risque »
d’être socialement perçue comme bi...
Par ailleurs, n’est-ce pas un peu con
je vous prie, qu’indépendamment de
nos opinions politiques (qui peuvent
être à chier et ça c’est un bon motif
d’exclusion), nous puissions nous
sentir mal à l’aise et rejeté-es en
raison de nos préférences sexuelles
et sentimentales dans ces groupes ?
Du style parce que notre militantisme
lutte contre ça à la base ou un truc
approchant [4] ? »

Salut, c’est la biphobie !

  • Et un jour tu va décider de te maquer, tu finiras hétéro/a.
  • Tu devrais te définir comme-ci/comme ça.
  • T’as pas peur qu’iel te quitte pour un mec/meuf/X.
  • T’as pas peur qu’iel te trompe avec un mec/meuf/X.
  • Les bi.e.s sont moitié homo/lesb moitié hétéro/as.
  • Tu as le choix.
  • Le privilège bi.
  • C’est politique de refuser de coucher avec un mec.
  • Je peux regarder.
  • Tu es bisexuelle ? Bon alors on couche ensemble ?
  • Du coup tu kiffes les plans à 3 ?
  • J’ai rien contre les bi.e.s mais j’ai connu un/e personne bie qui... (a trompé, voulait pas s’outer, a été conne, a brisé le cœur de machine, a fini avec...).
  • C’est pas très Queer les Bi.
  • Croire que c’est « un passage avant de devenir lesbienne/gay » ?
  • « ...Bi.e.s s’abstenir ».
  • Attendre le moindre faux pas pour pouvoir tomber sur les personnes Bi.
  • T’as déjà été en club échangiste ?
  • Les bi.e.s procurent trop d’insécurité à leur partenaire.
  • Heureux.se au lit ? Malheureuse en amour ?
  • Tous le monde est bi. C’est qu’une phase, une mode, un jour tu finiras par choisir l’un ou l’autre (hétéro/a/homo).
  • Définir quelqu’un.e comme bi en fonction du % de relations qu’iels a eu avec le même genre qu’iel.
  • Vous n’avez qu’à vous organiser (plutôt
    que de pleurer dans votre coin et de vous
    plaindre !).
  • En tant que Bi tu es légitime si.
  • Nympho !
  • Choisis ton camp !
  • Donc tu n’es pas vraiment radical.e.
  • Parler à la place des Bi.e.s.

—> C’EST DE LA BIPHOBIE.
• Je sors avec un mec trans mais je suis toujours lesbienne vous en faites pas.
—> C’EST DE LA BIPHOBIE ET DE LA TRANSPHOBIE.

L’outing forçé (attention iel est bi.e !), et
c’est craignos, rappelez-vous c’est
la BASE
, le simple fait de se sentir plus
facilement autorisé à le faire pour une
personne bi.e est révélateur, alors que c’est
bien connu qu’on n’out pas pour les autres.

—> C’EST BIPHOBE

Respecter les personnes bisexuelles, c’est pourtant
assez simple, et ça devrait
être assez intuitif : c’est
leur laisser de l’espace
de parole, aller à leur
rencontre, ne pas parler à
leur place, savoir admettre
qu’on ne sait pas tout de
leurs vies. C’est respecter
les personnes qui ne
souhaitent pas s’identifier
comme bie. Il s’agirai de
dépasser les clivages pour
simplement lutter contre les
discriminations fondées sur
la catégorisation sexuelle.

http://www.minorites.org/index.php/3-lagence/922-le-b-de-lgbt.html

Notes

On n’est pas trop fan des études
en tous genre, mais quelques
chiffres ça aide à visibiliser cer‐
taines réalités alors...

« Selon une étude de SOS
Homophobie, la bisexualité est
reconnue comme une sexualité à part entière par 85 % des
personnes interrogé.e.s (seul
5 % des personnes interrogé.e.s la considère en revanche
comme une identité). Pour les
15% restants il s’agirait d’une
passade, d’un coming-out non
abouti voir d’une perversion.
Lorsqu’il s’agit d’entretenir
une relation de longue durée,
le nombre de personnes prêtes
à s’engager diminue fortement
(seul-e-s 61 % des personnes
interrogées seraient prête à
s’investir avec une personne
bie) [5]. »

Un peu d’histoire...

Les revendications des activistes
bisexuels tirent leurs racines des
mouvements féministes et LGBT.
Le mouvement prend son
envol aux États-Unis dans
les années 70
, entres autres
avec le National Bisexual Liberation Group à New York fondé en
1972, et grâce à un énorme travail
de recherche de visibilité.

La décennie 80 voit augmenter
l’activisme bisexuel. De nouveaux
groupes éclosent dans les grandes
villes américaines.

Certains affirment que le déclenchement réel du mouvement
bisexuel est redevable à l’inclusion des « bi » dans le titre de
la 1993 March on Washington for Lesbian, Gay, and Bi
Equal Rights and Liberation
,
autrefois March on Washington
for Lesbian and Gay Rights. Cette
mention donnera une énorme visibilité à la communauté bisexuelle
et prouvera son acceptation et son
support de la part des communautés gay et lesbienne. Aucun
rassemblement bisexuel n’est
présent pendant la décennie 70
en France (Deschamps, 2002).

Le mouvement bisexuel
démarre donc dans un
contexte d’absence politique
et de doute de la part des
associations homosexuelles
et féministes lesbiennes, avec
le refus de mentionner des
relations avec des personnes
d’autre sexe/genre et des
doutes sur la véracité cette
orientation sexuelle.

Cette ambivalence peut être expliquée par la dichotomie entre
homosexualité et hétérosexualité profondément ancrée dans la
société, exigeant de tout individu
qu’il positionne ses pratiques
et ses relations d’un côté ou de
l’autre [6].

La journée de la bisexualité

« La bisexualité existe, parce que nous, bisexuel-le-s, nous affirmons
comme tel-le-s. Nous n’avons pas à prouver notre orientation, ni à
choisir, elle est un état de fait et est une composante de nous-même
que personne ne peut juger. C’est pour cela que le 23 septembre
nous marcherons, pour montrer que la bisexualité se manifeste,
s’exprime et qu’ensemble nous la défendons ».

En 1999, trois militants bisexuels américains, Wendy Curry, Michael
Page et Gigi Raven ne supportent plus l’incompréhension et les
interrogations dont ils font l’objet en raison de leur orientation
sexuelle. Ils décident de créer la journée de la bisexualité en marge
des manifestations destinées à l’ensemble des LGBTQI+++
desquelles ils se sentent exclus.
Effectivement, si depuis peu
on parle de Marche des fiertés, ne dit-on pas couramment « Gay
Pride » pour évoquer ces grands défilés présents dans le monde
entier et censés donner la voix à l’ensemble des sexualités dites
minoritaires ? Depuis 16 ans, cette journée a pris ses marques.
Depuis 2004 au Canada, en Australie, en Afrique du Sud, en Nou‐
velle-Zélande, en Suède puis en Allemagne avant, enfin, en France
en 2009*.

*La date de la journée de la bisexualité est donnée ici à titre informatif afin d’étayer
et de contextualiser l’histoire des luttes autour de la question bie. Tout comme le
8 mars et les autres journées commémoratives, on est bien conscient du caractère
formel de ce type de démarche.

Bisexuel.les ne pas s’abstenir !

Des personnes qui se sont
outées publiquement :

Pink, Freddie Mercury, Evan
Rachel Wood, Virginia Woolf, ...

Lani Ka’ahumanu : écrivaine et poète
se qualifiant de bisexuelle et queer,
a débuté le bal du « coming‐out »
bisexuel public et a été l’une des
initiatrices des premiers groupes
bisexuels à San Francisco. Elle a été
porte-parole du mouvement bisexuel
à de nombreuses reprises et a été
l’une des fondatrices du groupe
BiPOL.

ON A LU/ENTENDU/VÉCU (on peut en pleurer ou en rire) :

« C’est de votre faute si le sida a été propagé aux hétérosexuels. »

« En fait, tu es gay, mais tu n’oses pas l’avouer »

« Je suis allée, hier, le vendredi 1 novembre, au festival Cineffable, festival lesbien et féministe. Au cours du visionnage d’un court métrage, The Confession of father John Thomas, où il a été rapidement question d’une bisexuelle, une femme a dit tout fort dans la salle salope puis traîtresse »

« C’est une hétéra ! Zappe-là ! Elle est dégueulasse ! »

« L’amitié fille/garçon n’existe pas (réponse : et pour les bi.e.s on fait comment ?) ?

« T’as le droit de me tromper mais seulement avec des filles. »

« J’ai rien contre, mais si tu as le choix dans la vie choisis plutôt les hommes t’auras moins de problèmes ! » (WTF !!)

« T’es à voile et à vapeur [sic], tu couches avec des hommes, tu couches avec des femmes, t’es dégueulasse [re-sic] »

« La bisexualité a toujours existé. Elle existe parce que
nous, bisexuel(le)s, dans notre diversité, déclarons l’être.
C’est un sentiment d’être au monde avant d’être un style
de vie. Nous sommes attirés affectivement et/ou sexuellement par des personnes de tout sexe et de tout genre,
sans nécessairement avoir de pratiques sexuelles, et nous
l’assumons. Nous aimons vivre nos désirs, nos plaisirs,
nos amours, simultanément ou successivement. Nous les
vivons, comme chacun, de façon permanente ou transitoire. Nous nous octroyons un large choix de possibilités
sexuelles, de l’abstinence au multipartenariat. Nous ne différons des personnes monosexuelles que par cette double
attirance. Parmi nous, certain(e)s vivent leur bisexualité
comme un choix, pour d’autres, elle va de soi. Nous la
vivons dans notre identité et/ou dans nos pratiques. Ce
que nous partageons, c’est la volonté de l’assumer en soi
et, si possible, avec les autres. » Bi’cause

TÉMOIGNAGES ET EXTRAITS

Suis-je bisexuel·le ou pansexuel·le ?

Définir les termes « bisexualité »
et « pansexualité » est toujours
une source de débat.

Je trouve que définir la
bisexualité comme binaire
par rapport à son étymologie et à l’histoire du terme
est assez fallacieux et c’est un
cliché contre lequel beaucoup
d’activistes biEs se battent.

Actuellement, la bisexualité est
définie par la majorité des associations bisexuelles comme une
attirance sexuelle pour le même
genre et un ou plusieurs autres
genres (mais pas forcément tous).
Occasionnellement, on parlera
d’attirance pour deux genres ou
plus (mais pas forcément tous).
On peut d’ailleurs sans problème
trouver des personnes bisexuelles
qui ne sont pas attirées par « les
hommes et les femmes », mais par
exemple par « les femmes et certaines expressions de genre non
binaires » (d’ailleurs, certaines
personnes non-binaires sont
bisexuelles). C’est loin d’être rare
et ces personnes ne se retrouvent
pas nécessairement dans la définition de la pansexualité qui
implique souvent une attirance
pour tous les genres.

Il est évident qu’il y a des croisements entre ces deux sexualités
et que certaines personnes se
définiront comme pansexuelles
sans être attirées par tous les
genres alors que d’autres, attirées
par tous les genres, s’identifieront comme bisexuelles. Je ne
souhaite pas participer à
une forme de police des étiquettes, l’étiquette choisie est
propre à chacunE.

Je pense néanmoins qu’il est
important de ne pas tomber
dans le piège de la sexualité à
la définition fixe et immuable.
« Bisexualité » est un mot qui a
beaucoup évolué depuis sa création (il ne définissait même pas
une sexualité humaine à la base)
et qui est fondamentalement
amené à évoluer avec l’évolution de nos connaissances et des
milieux LGBTQIAP.

La définition de la bisexualité,
non biphobe, appartient aux
bisexuelLEs et, il me semble,
le combat mené ces dernières
années pour supprimer cette
vision binaire de l’esprit des gens
tend à prouver que la bisexualité
ne peut jamais être considérée
comme une sexualité binaire.

Certes, « bi » signifie
« deux », mais « gay » signifie
« heureux », « lesbienne »est
une habitante de Lesbos.
Faut-il réellement chercher
le « deux »dans ce mot qui a
déjà beaucoup évolué ?

Conclusion : bisexualité, pansexualité, fluidité sexuelle
(mais on pourrait aussi évoquer l’asexualité et le spectre
asexuel) ne sont pas des termes
définitifs. J’irai jusqu’à dire que
hétérosexuel et homosexuel sont
des termes amenés à évoluer sur
le long terme avec la question de
la non binarité. Il me semble
que le plus important est
d’utiliser l’étiquette qui nous
semble la plus appropriée que
ce soit pour des raisons politiques ou personnelles. Il y a
forcément des croisements
car on parle d’individus.

http://faitespasgenre.tumblr.com/post/131340194739/suis-je-bisexuelle-ou-pansexuelle

Les filles aussi ?

« Quand j’étais adolescente, je
me disais les filles aussi. Aussi,
comme si j’étais principalement
hétéro, ou aussi, comme une
transgression à ma socialisation
en milieu hétéro. Aussi, comme un
petit cadeau qu’on se fait à soi-même, un plaisir qu’on s’octroie
mais qui n’est pas vraiment raisonnable un truc un peu luxueux.

D’abord, il y a eu les garçons,
c’est plus facile les garçons,
c’est dans l’ordre des choses,
il y en avait autour de moi
alors que les filles qui aiment
les filles il y en avait pas trop.

J’étais amoureuse de ma meilleure amie mais je ne m’en rendais
à peine compte, elle était hétéro,
mon semblant de déclaration à fait
un flop alors j’ai cherché des
filles qui aimaient les filles.

Jeune adulte au début des années
90 j’étais passé à côté du minitel
et internet n’était pas en accès
quotidien, d’ailleurs je n’avais pas
l’idée d’y chercher des lesbiennes.
Mes amis gay vivaient des histoires avec des garçons, j’étais
désespérée d’être en reste à un
âge où la quête d’expérience est
une préoccupation majeure, puis
j’avais envie de confirmer ce que je
pensais ressentir. Les filles aussi
ou pas, alors ? À cette période là,
j’allais à la marche des fiertés, j’ai
fait mon entrée dans les réseaux
féministes. J’y ai rencontré des
lesbiennes qui m’ont prêté des
numéros de Lesbia magazine. Je
me souviens d’une petite annonce
qui m’avait particulièrement heurtée ; une femme qui cherche une
autre femme finissait son texte
par « bisexuelles et alcooliques
s’abstenir ». À l’époque, cela
me paraissait très répréhensible
d’être alcoolique, je n’aimais pas
être assimilée à une alcoolique.
J’expérimentais pour la première
fois la biphobie, et ce ne sera pas
la dernière. »

Extrait de la brochure « Bi or not
to be ».

Suis-je bisexuelle ?

Par défaut c’est l’identité que je
m’attribue le plus souvent, quand
je suis dans une relation avec
un garçon je la garde je la
défends.
Quand je suis avec une
fille j’ai plus tendance à l’aban‐
donner pour me dire lesbienne,
parce que c’est plus classe
,
parce que c’est ce que je crois
que ma partenaire attend, parce
que c’est ce que j’ai l’air d’être.
Aussi, par loyauté envers les
lesbiennes, par positionnement
politique contre la lesbophobie
et par crainte de la biphobie.

Parfois ça passe mieux de
se dire bie en milieu hétéro
mainstream, souvent pour de
mauvaises raisons parce que
ça fait cool et que ça existe
qu’en milieu lesbien féministe lesbien.

Une bie n’est-ce pas une lesbienne
qui ne s’assume pas, ou n’est ce
pas une hétéro qui se donne des
frissons qui ne se coltine pas la
lesbophobie quotidienne, et qui
brise le cœur de lesbiennes au
passage ? Une bie n’est ce pas
une traître ? Mais finalement
non je ne me sens pas traître,
illégitime oui souvent.
Ce qui
émane des représentations sur
l’identité lesbienne de certains
discours, c’est qu’une lesbienne,
elle n’a pas de relations affectives
et sexuelles avec des hommes, no
way.

Par conséquent je ne m’autorise pas toujours à me
dire lesbienne c’est un statut
inaccessible. C’est comme la
classe moyenne dans laquelle
j’évolue et dont je ne suis pas
issue, je n’ai pas les codes je
n’ai pas eu le bon parcours.

Je me dis alors que classe moyenne
ou lesbienne, ce n’est pas tout à
fait ma place. J’aime bien l’idée de
la bisexualité comme une sexualité ouverte et non figée, j’y associe
étroitement la notion de liberté
car la bisexualité permet
de s’émanciper de l’injonction à l’hétérosexualité de
la société et de l’injonction
à se positionner clairement
et définitivement dans certains milieux féministes
lesbiens, mais en même
temps la bisexualité reste
une catégorie.
Les catégories
homosexualité-hétérosexualité-bisexualité mettent de côté la
question du désir et du plaisir. J’ai
vécu des histoires affectives et/ou sexuelles avec des gays ou des
hommes chez qui la socialisation
hétérosexiste n’avait pas, c’est
heureux, fonctionné à 100 %. Il y
avait bien un homme et une
femme pourtant je n’ai pas eu
l’impression que c’était des
relations hétérosexuelles.

De plus en plus souvent, je
vois avec plaisir la rigidité des
catégories prendre des coups,
notamment autour d’amis en
amour autour des personnes
trans, certaines de ces rela‐
tions font voler les catégories en
éclat. Aujourd’hui je me mets
beaucoup moins de pression qu’avant pour le définir
j’étends le domaine de ma
liberté à ne pas me définir
ou à changer d’identité en
fonction de l’humeur de ce
que je vis d’avec qui je vis,
d’avec qui je parle, rien de
définitif. Bisexuel fait partie
de ces identités possibles et
de cette identité découle les
autres, et je ne me dis plus les
filles aussi les filles surtout.

Extrait de la brochure « Bi or not
to be ».

Je suis bisexuel

Pourquoi tu parles jamais que
t’es bi sur ton blog ?
Alma me
demande, à moitié endormie, il y
a quelques temps. C’est une bonne
question.

J’ai fait 4 coming out. Un premier
à 13 ans, je me disais bisexuel.
Deux ans plus tard, à 15 ans, je me
suis dit gay (mon mot à l’époque,
je n’ai jamais pu être confortable
avec le mot lesbienne). À 19 ans,
butch ; à 21 homme trans. Voilà,
donc, j’en suis au 5 e , qui n’est en
fait qu’un retour au premier : je
suis bisexuel.

C’est quelque chose que j’ai réa‐
lisé récemment. Ce qui a rendu
cette réalisation difficile,
c’est que mes attractions
sont très inégales.
Pour être
plus précis : je suis bisexuel et
hétéroromantique. Je suis attiré
sexuellement par les hommes et
par les femmes, mais je n’éprouve
de sentiments amoureux qu’en‐
vers les femmes.

Mon attraction pour les femmes
est complètement développée,
vibrante, définitive. Je sais très
clairement quand je suis attiré
par une femme ou pas ; et si je
suis attiré par elle aujourd’hui,
je le serais encore probablement
demain. J’ai des crushs sur des
femmes. Je suis follement amoureux d’une femme.

Mon attraction envers les hommes
est plus vague, fuyante, plutôt un
potentiel qu’une réalisation. Ces
sentiments d’attraction vont et
viennent, et je peux être incertain
quant à mon attraction pour un
homme en particulier. Si je suis
attiré par un homme ce matin, je
me sentirais peut-être différent
cet après-midi. Quand j’ai des
sentiments stables pour un
homme, ce n’est pas tellement
des sentiments romantiques
comme l’amour, mais plutôt
un sentiment d’amitié et de
camaraderie avec une attirance sexuelle.
Même si j’étais
célibataire, je ne pense pas que je
voudrais sortir ou être en relation
avec un mec.

Mon attraction pour les hommes
me fait penser à ce que j’ai pu
lire à propos des gray-sexuels et
comment ils ressentaient leurs
attractions sexuelles en général.
Je veux remercier la communauté
asexuelle pour avoir fait un travail
de fond en explorant et inventant
de nouvelles terminologies pour
décrire les différents types d’attractions.

Je suis allosexuel [7], et je n’aurais
jamais eu les mots nécessaires
pour décrire ce que je ressens
sans la communauté asexuelle.
Asexuel-les des internets, vous
êtes géniaux !

Je ressens ces attractions, dans ce
modèle inégal, depuis les débuts
de ma puberté. Mais ça n’a com‐
mencé à faire sens qu’après ma
transition. J’avais expérimenté
avec des gars un peu, quand j’étais
jeune adolescent, mais ces expé‐
riences sonnaient faux parce que
j’étais dans un rôle féminin.

Quand j’ai réalisé
avoir des sentiments
amoureux pour les
femmes mais pas
pour les hommes,
je me suis dis que je
devais être exclusivement attiré par les
femmes.

Quand j’ai commencé à explorer
mon genre, j’en avais conclu que
mes attirances pour les hommes
étaient le résultat de mon identification au genre masculin
— et c’en est d’ailleurs une part.
Ces sentiments sont une envie
de m’exprimer sexuellement
avec d’autres hommes, en tant
qu’homme.

Voilà. Ça me paraît important de
partager tout ça à cause de l’in‐
compréhension de ce que ça veut
dire d’être bi.

Jusqu’à récemment, jamais
je n’aurais cru m’identifier
comme bi parce que le terme
me paraissait suggérer fortement une attraction égale aux
hommes et aux femmes.

Mais je vois maintenant que c’est
faux. D’ailleurs, beaucoup de bi
font l’expérience d’inégalités dans
leurs attractions. J’ai été inspiré
de réclamer le label bi en lisant
cet essai de Charles. M. Blow, sur
son développement sexuel et le
déséquilibre entre ses attractions
pour les hommes et les femmes
[tw pédophilie].

Je n’aime pas le préfixe « bi- ».
Il y a plus de deux genres, et
je suis définitivement attiré par
les personnes genderqueer. Mais
bien sûr, les termes homosexuel/
gay/lesbienne et hétérosexuel, ont
exactement le même problème :
ils sont basés sur la binarité de
genre. Je trouve que les bis
sont accusés à tort [de renforcer cette binarité] quand
vraiment c’est en fait un
problème de notre conception même de l’orientation
sexuelle, et j’y vois là un
exemple de la biphobie.
Alors,
malgré ce défaut, j’utilise le terme
bisexuel parce qu’il est largement
reconnu et parce que je ne peux
plus nier que le terme me décrit.

Il semble que le terme « bisexuel »
pose problème à une grande partie
de gens qui pourraient pourtant
se définir comme tel. C’est un cas
spécial ; je ne vois pas une large
part de personnes décrites par les
termes hétéro ou gay qui rejettent
ces mots là. Je respecte la capacité de chacun à s’auto-identifier
 votre orientation est celle que
vous dites - mais je pense qu’il
s’agit souvent de biphobie, purement et simplement. Je veux
faire ma part et aider à changer
ça. Alma et moi partageons un
cheminement de découverte en
grandissant dans nos identités
queer. Nous avons mis en place
une espèce de non exclusivité
pour me permettre d’explorer
cette autre part de ma sexualité.
Spécifiquement, je suis curieux de
coucher avec d’autres mecs trans.
Ça serait important pour moi, non
seulement pour l’expression de
mon attirance envers les mecs,
mais aussi au niveau de mon che‐
minement d’acceptation de mon
corps trans.

Aujourd’hui, ce n’est pas quelque
chose dont je ressens le besoin
de faire absolument. Ça peut ou
peut ne pas arriver. Mais ça fait
toujours du bien d’être honnête.

http://mantodayblog.wordpress.com/2015/05/01/i-am-bisexual/

Sources

 :

Ressources

Associations/collectifs :

Big up ! C’est pour toutes les naaaan jsuis
pas gouine qui mettent des doigts dans
leur copiiiiiines
 ! <3

Annexe (ajout de dernière minute) :

Suite à la lecture et relecture de la
brochure, pas mal de questions se
sont posées autour du rapport à
la communauté justement, de la
question de se sentir légitime etc.
De fait, la notion de communauté
en tant que telle est un concept
figé difficile à définir (et tant
mieux) dans un cadre rigide.

Je veux des amis, pas une communauté

« Les communautés ... on pourrait
les définir en terme de relations
alimentaires – on se demande qui
mange qui. » Marston Bates.

Presque partout où je vais j’entends parler de communauté.

On dirait que c’est quelque chose
dont tout le monde a besoin,
quelque chose auquel tout le
monde devrait vouloir s’abandonner. Dans les grandes villes,
il est facile d’ignorer ces appels
à appartenir, car il est difficile
pour les partisans désarmés de
la communauté [8] de s’immiscer personnellement dans la vie
des autres. Je vis actuellement
dans une zone rurale. Cela a de
nombreux avantages, mais sa
population humaine inclut beaucoup trop de libéraux, activistes,
bien pensants, bref, de ceux qui
mettent leur nez partout et pour
qui la communauté est sacrée,
une divinité impersonnelle dont
les croyants veulent que tous la
connaissent.

Ces communautaristes locaux sont
très clairs sur ce qu’ils entendent
par « communauté » dans leurs
plaintes contre ceux qui ne se
conforment pas aux normes de
la communauté et leur tentative
d’enrôler d’autres personnes
contre ces éléments anti-sociaux.

Il s’agit en effet de « qui mange
qui », de qui passe son temps à
entacher la réputation de ceux
qui ne rentrent pas dans leurs
normes.

La communauté, en tant qu’idéal,
est en opposition avec l’individualité, parce qu’elle a besoin de
restreindre l’unique à un supposé
ensemble plus vaste. Je ne reconnais pas d’ensemble plus vaste à
qui je serais prêt à donner un tel
pouvoir, alors la communauté ne
m’intéresse pas.

Est-ce que cela veut dire que je
veux être isolé ?

Eh bien, il y a des moments où
j’apprécie ma solitude.

Mais à d’autres moments je veux
jouer avec d’autres. Je ne veux
simplement pas m’abandonner à
un « ensemble plus vaste ».

Et la « communauté », comme
ses partisans l’entendent, est un
ensemble plus vaste imposé. Ses
partisans l’utilisent pour renforcer
une conformité des rôles qui font
de vous et moi de simples unités
de données d’information numérique qui affluent vers la machine
sociale cybernétique, en supprimant les particularités qui nous
rendent intéressants les uns pour
les autres.

Cela renforce l’isolement, rendant
de plus en plus difficile pour quiconque de se rencontrer en dehors
de ces fonctions sociales. Et votre
fonction ne m’intéresse pas vraiment. Vos particularités, ces
propriétés uniques dans lesquelles
vous vous développez, sont la raison pour laquelle je désire vous
connaître, dialoguer avec vous, et
les standards de la communauté
servent à les supprimer.

Je n’ai donc aucun désir de communauté.

Je veux des amis, des compagnons, des amoureux, des
camarades, des complices.

Pour le dire autrement, je veux
intentionnellement et passionnément créer des relations avec des
individus en particulier, parce que
j’y vois un potentiel pour un plaisir et un intérêt mutuel. L’amitié,
les rapports entre compagnons,
la camaraderie amoureuse et les
complicités ne sont pas des choses
auxquelles j’appartiens, mais des
interactions que je crée délibérément avec d’autres.

L’origine de certains de ces mots
rend cela clair.

Un ami c’est quelqu’un avec qui
on préfère passer du temps avec,
sans éprouver de l’amour à son
égard.

Un compagnon c’est quelqu’un
avec qui on veut partager la nourriture.

Un camarade c’est quelqu’un avec
qui on partagerait sa chambre. [9]

Un complice c’est quelqu’un avec
qui on joindrait sa force dans un
but particulier.

Et un amoureux c’est quelqu’un
avec qui on peut partager un plaisir et une joie réciproque.

Dans chacun de ces cas, il n’y a
pas un ensemble plus vaste, pas de
pouvoir plus grand, pas d’obligations imposées, simplement deux
ou plus d’individus qui choisissent
d’entrelacer leurs particularités
pour mieux apprécier leurs vies
ou accomplir un effort qui leur
bénéficie mutuellement.

L’individualité, l’incomparable
unicité absolue de chacun qui est
impliqué, fournit la base pour
la réciprocité dans ce genre de
relations – relations qui ne sont
jamais « plus que la somme de
leurs parts », mais étendent plutôt la grandeur de chaque individu
qui y prend part.

Il y a deux autres relations que je
pourrais ne pas désirer ou qui ne
comptent pas autant pour moi que
celles que je viens de décrire, mais
que je préfère encore à la tolérance et l’assentiment réciproque
nécessaires à la communauté :
l’inimité et le mépris.

Se contenter de tolérer les autres
est intolérable pour moi.

Si vos projets, buts ou désirs sont
en conflit avec les miens, nous
serons ennemis. Si vous n’êtes pas
dignes d’être des ennemis je vous
traiterai avec mépris.

Faire autrement, au nom de la
communauté et de la « bonne
entente », serait une insulte
contre votre individualité, votre
unicité, et renforcerait le mensonge de la communauté.

Apio Ludd

https://diomedea.noblogs.org/post/2017/03/10/je-veux-des-amis-pas-une-communaute/

[2https://m2bmo.tumblr.com/
post/110980357491

[7Une personne allosexuelle est une personne
non asexuelle

[8Bien sûr, les forces armées de
la communauté, les flics, agissent
par la force pour imposer les
normes de la communauté.

[9Il y a des camaraderies imposées : le prisonnier avec son codétenu, ou l’appelé dans la caserne.


)

Juin 2017 - version avril 2018
— Anonyme
Merci à Consuelo pour la mise en page



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