A


Anthologie de la subversion carabinée [extraits]

mis en ligne le 11 octobre 2007 - Collectif

LES ARNAQUES ROBINHOODESQUES

Lui, graveur, et un ami, imprimeur, avaient conçu le projet de ruiner le régime capitaliste ! Dans ce but, ils œuvraient des nuits entières, pour fabriquer des billets de banque qu’ils allaient distribuer en rue et aux portes des usines. A force de mettre en circulation de la monnaie fausse, ils espéraient voir tomber à zéro la valeur de l’authentique !
Jean de Meur (L’Anarchisme, ou la Contestation Permanente, 1970)

Gigantesque escroquerie jugée à Londres : « Elle aurait pu saper le système bancaire de l’ensemble du monde civilisé », affirme l’accusation.
(Le Soir, 27 mars 1978)

Abus-Roi
Entendant bien s’offrir d’enivrantes vacances, quoiqu’ils soient financièrement à fond de cale, une douzaine de présumés voyous imaginèrent d’annoncer la mise sur pied d’un grandiose banquet-bal pour lequel ils vendraient à bon prix de fourbes cartes d’entrée. Comme théâtre des libations, il choisirent l’hôtel Hilton, comme vedettes animant la soirée, ils “engagèrent” Michel Sardou, Charles Trenet et Thierry Le Luron, et comme thème du jour ils optèrent pour une “fête de la police bruxelloise” au profit des vétérans de “police-sécurité”. Mises en vente pour à peu près cent francs, les cartes de la “Nuit de la police” s’écoulèrent sans accroc à travers la capitale jusqu’à ce que la RTB et les canards nationaux ne dévoilent la supercherie.
Bruxelles, août 1972 (Actuel)

Compte licencieux
(...) Les guérilleros projetaient de localiser les banques employant le télex international. Pour chaque opération, ils auraient envoyé l’un de leurs membres ouvrir un compte. Dans un second temps, ils auraient loué une maison ou un appartement proche de la banque visée, d’où ils prévoyaient d’intercepter la ligne reliant la banque au télex central. La personne qui avait ouvert un compte demandait alors un transfert de fonds vers un pays étranger. Les guérilleros interceptaient le message émis par la banque et le réémettaient après avoir accru le montant de l’ordre de virement, qu’ils auraient touché à l’étranger.
Uruguay, 9 mai 1972 (La Libre Belgique)

Les Attrape-cagots
(...) Des centaines de prêtres français ont été victimes d’une escroquerie rocambolesque assez énorme.
Un séduisant jeune homme brun de vingt-sept ans, suivi par un personnage qu’il appelait son “chambellan”, se présentait, affolé, des sanglots dans la voix, auprès d’un ecclésiastique en déclarant être tantôt le prince Erik, tantôt le prince Karl-Axel de Danemark.
D’après ses dires, il venait d’être victime d’un escroc qui l’avait dépouillé de tous ses papiers, de ses bagages et de son argent, alors qu’il était en mission ultra-secrète pour son pays. Une mission si secrète qu’il ne pouvait même s’adresser à ses services diplomatiques...
S’il constatait que l’abbé mordait à l’hameçon, le faux aristocrate poussait ses avantages en sortant de son attaché-case un hebdomadaire français Valeur-Actualités (exemplaire unique d’une revue qui n’existe pas) où sa photo était à la “une”, puis, pour “achever” le prêtre, il lui montrait un pli confidentiel fermé de cinq impressionnants cachets de cire.
Les ecclésiastiques trop confiants, face à ces deux hommes en détresse, prêtèrent (contre reçu, toutefois) de l’argent — plusieurs millions de francs français — pour aider le “prince” à poursuivre secrètement et honorablement sa mission. Il ne portèrent évidemment pas plainte, dupes jusqu’au bout de cette monumentale supercherie.
France, 27 juillet1975 (Le Soir)

Le Réseau pensant
L’arrestation en mars 1973 d’un sacripant qui avait mis au point un petit appareil électrique lui permettant d’établir des circuits sans passer par le truchement des centraux téléphoniques, fit éclater la nouvelle comme une torpille : depuis plusieurs années, dans 175 centraux, au moins, des PTT de Grande-Bretagne, des standardistes téléphonaient gratuitement dans le monde entier grâce à des circuits illégaux ou à des standards qu’ils avaient fignolés afin que les communications ne soient pas enregistrées sur les compteurs. Perte estimée par les autorités britanniques : 1,75 million de livres. Du coup, huit standardistes et ingénieurs des télécommunications furent jugés à Bristol pour fraude (l’un d’eux avait même monté une affaire d’avions affrétés avec les USA qui, grâce à des circuits à l’œil, ne lui coûtait pas un penny), tandis que neuf étudiants de Leeds étaient à leur tour harponnés par la justice. Et on apprit bientôt que la moitié de la ville de Bath savait comment téléphoner à l’étranger sans bourse délier, et qu’à Edimbourg la filouterie avait pris de telles proportions que les rares payants ne parvenaient pratiquement plus jamais à obtenir une communication tant les circuits internationaux de la localité étaient perpétuellement surchargés par les resquilleurs.
Angleterre, 1973 (Actuel)

Mon beau sapin
“Certains n’hésitent jamais sur les moyens à mettre en œuvre pour se procurer de l’argent pour boire”, écrit une revue moscovite.
L’organe des syndicats soviétiques révèle à ce propos que le 1er janvier dernier, deux hommes ont, pour acheter à boire, coupé et vendu le sapin ornant la place du Palais des Sports de la ville de Lipetsk, à 600 km au sud-est de Moscou. Ils l’ont remplacé par une bûche.
URSS, 3 avril 1978 (La Meuse)

Le Fabricant d’armées
(...) Walter Schmidt, qui était chargé de la répartition des soldes à la base de Mechernich, avait créé une armée de soldats fantômes — jusqu’à 125 hommes à un moment donné — et s’adjugeait non seulement leurs soldes, mais également leurs primes de Noël et de démobilisation lorsqu’il les rendait à la vie civile pour les remplacer par de nouvelles recrues tout aussi fantomatiques. Le détournement a été estimé à un million de marks environ.
RFA, 2 avril 1977 (La Lanterne)

Les Coureurs de notes
Un mois durant, deux canailles nommées Jacques Derke et Daniel Noël manœuvrèrent chaque soir comme ceci : dînant le plus chichement possible dans un restaurant onéreux et archi-bondé, Noël sélectionnait une table où de nombreux convives faisaient bombance. Puis après avoir calculé approximativement ce que tous ces mets et tous ces magnums allaient coûter à leurs dégustateurs, et après avoir déterminé un moment où les serveurs de l’établissement étaient mobilisés dans un autre coin, il sortait trente secondes de l’établissement et fourrait dans la main de Derke la très crédible note qu’il avait griffonnée sur un bout de papier idoine. Sur ce, Derke, accoutré en maître d’hôtel, pénétrait dans le restaurant, un plateau vide à la main, et priait les clients visés de bien vouloir être assez aimables pour le régler tout de suite afin qu’il puisse terminer son service. Ce bien périlleux jeu se termina cocassement le 3 avril 1974, quand un authentique maître d’hôtel de l’endroit vint présenter sa note au même moment que le simulateur.
France, 1974 (Actuel)

Cœurs d’ordinateurs
(...) Depuis 1964, les chercheurs de Stanford ont pu recenser 148 “délits électroniques différents”. Certains sont simplissimes, comme celui qui consiste à glisser parmi les fiches magnétiques de paiement établies par une banque une ou plusieurs fiches établies à son nom, à ajouter électroniquement des zéros à la somme, ou bien encore à programmer la machine pour qu’elle verse à un compte discret, tous les restes infinitésimaux des opérations dont le total, selon l’expression consacrée, “est arrondi à l’unité inférieure”. Vingt-cinq centimes, multipliés par un million, c’est déjà une jolie somme...
Une simple pression sur un bouton d’effacement, et des millions d’informations vitales disparaissent dans le néant, un néant qui peut signifier le chaos pour une administration comme le fisc (...), ou l’effondrement d’une entreprise. Un seul homme — qu’il ait été menacé, acheté, ou qu’il agisse sous l’emprise de ce que l’université de Stanford appelle le “syndrome Robin des Bois” — pourrait ainsi en envoyer des centaines d’autres au chômage.
Ou agir comme cet étudiant en informatique qui fit distribuer par un ordinateur new-yorkais plus de sept millions de dollars à des indigents de l’assistance publique. « L’ordinateur a tout simplement été programmé pour envoyer quelque vingt mille chèques à des personnes nécessiteuses, mais sur la base de dossiers vieux de plusieurs années. Le seul espoir, si l’on peut dire, des édiles communaux, c’est que les bénéficiaires soient décédés entre-temps ou qu’ils aient quitté la ville depuis longtemps. Les autorités pourraient ainsi récupérer au moins une partie de l’argent indûment versé. Si les destinataires ont réellement perçu le montant de ce chèque providentiel, les frais de procédure risqueraient de coûter plus cher encore que la distribution erronée. »
USA, 1974 (Actuel)

Sans rime ni maison
« En 1968, alors que j’étais hospitalisé depuis des semaines, je remis la clé de ma propriété de Langedonk à mon cousin afin qu’il aille y passer le week-end avec sa famille. Mais le lundi suivant mon cousin vint m’avouer qu’ils n’avaient pas trouvé la villa et qu’ils avaient dû coucher à l’hôtel. Je me moquai de lui, et lui fis un plan détaillé de l’emplacement de la propriété. Il me jura que c’était exactement là qu’il s’était rendu, mais qu’il n’avait trouvé qu’un terrain vide. Je crus à un malentendu ou à une blague mais cette histoire hanta tout de même mon sommeil. C’est pourquoi, dès que je fus convalescent, je me fis conduire sur place pour me rassurer. Je crus devenir fou quand je constatai que la maison avait disparu, complètement disparu. Elle avait été érigée sur une parcelle de 40 ares mesurant 7,50 m sur 20 et tout s’était envolé : poutres, briques, portes, fenêtres, dallages, tuiles... Il ne restait plus que la fosse d’aisance. L’herbe avait même repoussé sur les fondations. » Le garde-champêtre établit bientôt que des turlupins inconnus étaient venus durant plusieurs week-ends de suite démonter la bâtisse pour sans doute la reconstituer en un autre point du continent.
(Récit de M. Alphonse Diddens, greffier de Kortrijk-Dutsel, Belgique).
Belgique, 1978 (Actuel)

LES COUPS D’WASSINGUE DE LA RACAILLE

Vous avez faim, vous manquez de pain,
Allez et pillez les greniers remplis de blés.

Le mage Mazdak de Perse, en l’an 600

Le Pan-Pan de l’émeute avance. Fini le chômage assassin ! Assaillir et enlever les résidences (...). Le Pan-Pan, ce soir est en rouge. Tout et rien que l’acte est beau.
Clément Pansaers (Le Pan-Pan au Cul du Nu Nègre, 1920)

A Alcoy, petite ville située entre Valence et Alicante, les 8 000 ouvriers de l’industrie papetière et textile font grève pour réclamer la journée de huit heures. Comme ils défilent en narguant les policiers, un de ceux-ci s’énerve et tire. C’est aussitôt une bataille sanglante au cours de laquelle le maire est tué. Les grévistes l’emportent, massacrent des policiers, défilent de nouveau portant sur des piques des têtes coupées.
Georges Blond, à propos des tumultes de 1872 (La Grande Armée du Drapeau Noir, 1972)

L’histoire n’a jamais fait un pas qu’en faisant des ruines et qu’en les foulant dédaigneusement aux pieds.
Jules Andrieu (Notes pour servir à l’Histoire de la Commune de Paris en 1871)

Les Tours infernales
En 1971, le gouvernement japonais envisageait de dégorger une partie du trafic aérien encombrant l’aéroport côtier d’Haneda en construisant un nouvel aéroport à 60 km de la capitale, près de la ville de Narita. Immédiatement, de nombreux paysans refusent de vendre leurs terres aux promoteurs, s’organisent et résistent pas à pas à la police, aidés par de très nombreux militants d’extrême-gauche. Au fur et à mesure que les travaux avancent, les affrontements se font plus sévères. Des tours de béton et en acier sont construites sur la future piste par les manifestants, et chaque fois, la police doit livrer de véritables assauts pour démolir les édifices.
Samedi dernier, cinq jours avant l’inauguration officielle de l’aéroport, une nouvelle tour a été érigée par une cinquantaine de paysans et de militants qui repoussèrent la police avec des pierres et des flèches en acier lancées grâce à des fusils sous-marins. Tandis que la police achemine ses troupes, l’extrême-gauche concentre les siennes et le dimanche matin, 14 000 policiers font face à 200 000 manifestants. Les uns et les autres sont casqués, armés de barres de fer et de longs bambous de bois, parfaitement prêts pour le choc. Il est incroyablement violent. Les cocktails Molotov volent, se brisent sur les bulldozers et les voitures de police chargent des deux côtés. Profitant du combat, six gauchistes escaladent la tour de contrôle par l’extérieur pendant que ses servants s’enfuient et se réfugient sur le toit. Un hélicoptère viendra les délivrer, mais la tour y passe. Les vitres volent en éclat, les installations et le reste.
Narita, 28 mars 1978 (Libération)

Un recteur au céleri râpé
La situation, bien que ce soit la version du Conseil de l’Université, est loin d’être retournée à la normale.
Le Recteur, qui, lui, fut forcé de s’en rendre compte, fit quelques menaces pour reprendre la situation en main, disant qu’il ne porterait plainte que contre X alors qu’il avait de nombreux noms sous la main. A cette occasion il fut recouvert de tout, d’eau minérale mélangée avec de la viande hachée, de poignées de couverts de table, et pour finir de “deux kilos de céleri râpé”.
Ban, 31 mai 1977 (La Repubblica)

Les Mômes aux boulons
Des civils, parmi lesquels de nombreuses femmes ont harcelé les forces de l’ordre à coups de pierres, de briques, de cocktails Molotov. Une nouvelle arme a même fait son apparition : des boulons de 2 cm au bout de flèches catapultées par des arcs spéciaux. « Cela peut faire mal, même à une distance de 300 m. », a remarqué un officier anglais.
Belfast, 1970 (La Meuse)

Nô nô navettes
L’émeute a commencé quand un groupe de voyageurs, dans l’impossibilité de trouver place dans un train, a attaqué le conducteur qui a pris la fuite, abandonnant sa rame de douze wagons dont les vitres ne tardèrent pas à voler en éclats.
La foule, dont les rangs grossissaient sans cesse avec l’arrivée de nouveaux voyageurs, se lança ensuite à l’assaut des bureaux du chef de gare qu’elle saccagea, et détruisit des cabines téléphoniques ainsi que des appareils de distribution automatique.
Deux mille policiers ont été mobilisés pour rétablir l’ordre et empêcher que l’émeute ne gagne d’autres gares.
Tokyo, 14 mars 1973 (La Métropole)

Parce que les trains (freinés par une grève du zèle) avaient du retard, des Japonais ont saccagé 27 gares.
Tokyo, 16 mars 1973 (La Lanterne)

Ah, les petites flammes...
Vers onze heures du matin jeudi, des ouvriers montés sur un bulldozer défoncent le groupe électrogène qui assure l’éclairage et le chauffage du camp. Les communications avec Montréal, à partir de ce moment, sont interrompues. Cinquante policiers sont dépêchés sur les lieux. Contre 900 ouvriers en colère, ils sont impuissants. (...)
Bientôt, des flammes surgissent : allumés avec du pétrole, des foyers d’incendie se déclarent dans les bureaux administratifs, la cafétéria, la taverne, les salles de jeu et certains dortoirs.
L’ordre d’évacuation du camp est donné. (...)
Le projet hydro-électrique de la baie James, qui représente un investissement de six milliards de dollars et qui doit fournir en 1980, plus de huit millions de kilowatts, est bloqué « pour plusieurs mois ».
Québec, 23 mars 1974 (La Libre Belgique)

Le Tir aux poulets
Le campus universitaire venait d’être évacué sans véritable désordre. L’opération de police requise par le recteur de l’Université, M. Ruberti, qui est un homme de gauche, s’était déroulée quasiment dans l’ordre. Dans les rues voisines du campus, des détachements de policiers et de carabiniers étaient disposés pour contrôler de loin les réactions éventuelles des manifestants, mais n’exécutant aucune manœuvre. C’est alors que des petits groupes de “commando” de jeunes gens au visage masqué ont pris position derrière des barricades improvisées (des autobus, dont un en flammes, et des voitures renversées) et, sans le moindre motif, se sont mis à tirer sur les policiers à coups de pistolet. (...)
Mais ce qui a frappé c’est qu’à aucun moment ces manifestants n’ont pu se sentir menacés, bousculés, traqués. Ce sont eux qui, tranquillement, comme à l’exercice, ont pris les policiers dans leur ligne de mire et ont fait feu de tous côtés sur la troupe. Cela est entièrement nouveau. Jusqu’ici, lorsqu’un policier ou un manifestant était abattu dans une échauffourée, c’était dans une confusion totale.
Rome, 22 avril 1977 (Le Soir)

Escadrille de chasses
En protestation contre la limitation des heures d’écoute de la télévision et de la radio, plusieurs dizaines de détenus de la prison américaine de Cuyahoga ont tiré en même temps la chasse des WC au 4e étage de leur bâtiment. Il en résulta un éclatement des canalisations d’écoulement et dans trois salles d’audiences situées aux étages inférieurs, des procès ont dû être interrompus par suite de l’intrusion des eaux résiduaires.
USA, 20 novembre 1971 (La Meuse)

Tiens la bougie... droite
Pour la première fois les artisanales bouteilles/cocktails Molotov ont été remplacées par des bougies bleues — semblables à des gros cierges pascals, remplis de charges très explosives. Ces nouveaux engins, moins dangereux à manier et moins encombrants que les bouteilles d’essence, ont un effet semblable à celui d’une petite bombe : pas simplement incendiaires, elles sont aussi capables de démolir, comme ce fut le cas pour le siège de la Démocratie chrétienne, les murs au travers d’un appartement et de déplacer les lourds éléments des vieux chauffages central.
Rome, 16 octobre 1977 (La Stampa)

Chaînes à défaire
Certains ouvriers à la chaîne haïssent l’usine au point qu’ils s’en vont au milieu de la journée et ne reviennent même pas réclamer leur paie... _ Dans certaines usines, la rage ouvrière se traduit par des sabotages caractérisés : boulons dans les freins de tambour, manches d’outils jetés dans les ailes au moment de la soudure (ce qui provoque des ferraillements mystérieux, persistants, impossibles à localiser), peinture rayée, sièges lacérés, clefs de contact brisées dans la serrure... Il en résulte un gaspillage de main-d’œuvre, une baisse de rendement, un accroissement des coûts, l’embauche d’un plus grand nombre d’inspecteurs et de retoucheurs, des réparations plus fréquentes de voitures sous garantie et la colère des usagers, qui causent de graves préjudices à la réputation de la firme !
USA, années Nixon (Fortune, revue patronale américaine)

Un train vaut mieux que deux...
Dans le Sud de la Serbie, il est devenu courant que les voyageurs, à l’approche du village où ils habitent, actionnent le signal d’alarme et descendent du train.
Les trains internationaux ne sont pas épargnés. Peu avant Noël encore, les trains Dortmund-Athènes et Paris-Athènes ont été brutalement stoppés aux environs de Nis, et chaque fois une trentaine de voyageurs en sont descendus et ont disparu dans l’obscurité nocturne.
Le journal Vecernye Novosti de Belgrade raconte un incident qui s’est produit également en décembre en Dalmatie.
Un train de voyageurs avait été arrêté cinq fois sur un trajet de 20 km. Le conducteur, dans un accès de colère, est descendu du train, a détaché les wagons et a poursuivi le chemin vers Zadar avec la locomotive, abandonnant les voyageurs. Ceux-ci, selon le journal, se sont vengés en démolissant les wagons.
Yougoslavie, 1970 (La Lanterne)

Colères-express
Mécontentement après la reprise du travail. Plusieurs centaines de métallos mettent à sac les locaux des centrales syndicales UGT et des commissions ouvrières contrôlées par les communistes.
Pays basque, 15 avril 1978 (Libération)

Mise en coupe réglée par ses employés sous-payés, une banque de Memphis a bien failli déposer son bilan.
États-Unis, 28 février 1977 (Le Nouvel Observateur)

Lundi dernier, tout le cheptel animal destiné aux laboratoires de M. Renoult (57 chiens !) a disparu... C’était une opération soigneusement préparée.
France, Yonne, 15 juin 1979 (Libération)

Dans la ville-satellite d’Alexandra, des groupes de Noirs ont systématiquement mis le feu aux bâtiments publics.
Johannesburg, 19 juin 1976 (Le Soir)

Se surnommant “lords”, “rois” ou “chevaliers”, les pirates des ondes russes s’interpellent d’un bout à l’autre du territoire soviétique et perturbent gravement les émissions officielles.
URSS, 1er avril 1978 (La Meuse)

Les occupants de la cave vinicole d’Aléria ont riposté à coups de fusil quand la police a donné l’assaut : deux CRS tués.
Corse, 23 août 1975 (La Lanterne)

Les musiciens de la fanfare du Vatican, mal payés, menacent de jouer des airs communistes pendant les cérémonies.
Rome, 1970 (La Walonie)

A Portlaoïs, vingt détenus s’évadent en faisant sauter la porte de la prison.
Irlande, 19 août 1974 (Le Jour)

Au nez et à la barbe de 70 gardes mobiles, les membres de l’“Association contre le Bruit” envahissent de nuit l’aérodrome de Cherbourg-Maupertus et détruisent totalement les installations d’éclairage de la base.
France, 1970 (La Métropole)

Malmené par des anarchistes, le père Sbardella de Milan a dû défiler tout nu devant le Vatican en brandissant un drapeau noir confectionné avec sa soutane et en scandant : « Il peccato è il papa » (« Le péché, c’est la papauté »).
Italie, 16 juin 1970 (Ciné Revue)

Les Indiens en colère de Wounded Knee ne veulent plus négocier : « Nous réglerons cela sur le champ de bataille, avec des fusils ! »
Dakota, 6 mars 1973 (La Meuse)

Des contribuables mécontents avaient emmuré leur percepteur.
Toulouse, 19 février 1977 (La Libre Belgique)

Mis à feu par des “Acratas”, le doyen de l’Université de Barcelone n’a été éteint que de justesse par les appariteurs.
Espagne, 1969 (La Lanterne)

Des milliers de paysans brésiliens en guenilles, affamés par la sécheresse, pillent les trains et marchent vers les villes.
Brésil, 1971 (Le Jour)

Deux magistrats et deux policiers mexicains qui tentaient de pratiquer une saisie dans le village de Temoac (État de Morelos), près de la station balnéaire de Cuernavaca, ont été attaqués mardi par des habitants du village, enfermés dans la prison locale et brûlés vifs, annonce mercredi le journal Ultimas Noticias.
Mexique, 1974 (Le Soir)

LES ENFANTS TERRIBLES

Ceux qui ont vu de près les révolutions de Paris savent que les enfants armés sont capables des plus atroces méfaits.
L’abbé Lamazul (La Place Vendôme et la Roquette, 1873)

Les enfants sont armés, et sont bien décidés
A zigouiller toutes les autorités.

Bérurier Noir (L’Empereur Tomato-Ketchup, 1987)

Il faut démolir les écoles, étrangler les maîtres, et le monde ira de l’avant.
Somerset Maugham (Le Fil du rasoir, 1945)

Tous les enfants feront tout ce qu’ils voudront ; ils se passeront des films interdits, et y’aura plus d’écoles ; ils pourront jouer à l’eau ; et se mettre les doigts dans les trous de nez, et ils pourront manger leurs crottes de nez (...) et dire aux vieux tout ce qu’ils pensent d’eux ; roter, pisser, péter et chier à la figure de qui ils veulent ; pis dessiner des cochonneries partout virgule, faire des virgules virgules, sur tous les murs virgule, avec leurs excréments !... Faire des pâtés de sable avec le sang coagulé de leurs parents.
Nicole Bley (Lèche mon cul, camarade, 1972, Pauvert)

Si un jour, rien n’était interdit... (1977)
Si un jour rien n’était interdit j’irais tous les jours à la foire du trône, mais avant j’irai cambrioler une banque (la BNP). Je monterais tout le temps dans les trains fantômes et dans les auto-tamponneuses. Je casserais des carreaux et j’irais à la boulangerie pour prendre des gâteaux et bonbons. (...) J’irai pas à l’école. Je ferez plein de blagues.
Un jour Martial et Bernard était dans une ville ou on avait droit de tout faire. Quand on avait fain on allait à l’agora avec notre lance-pierre et quand a voullé une boulangerie on tira sur le carreau et on ouvri la porte, on mangé des gâteaux à la crème au chocolats et après nous allons voir le garagiste et nous lui demandons une ford mustang il ne voulu pas alors on lui cassa ses dents, on pris la voiture est on parti. Nous arrivons devant une maison elle était très jolie, alors on rentre dans la maison et les propriétaires nous metent à la porte alors nous rentrons de force et ils nous donnent un coup de point. Alors on alla chercher une mitrailleuse.
A l’école, je decoré à la peinture les murs, les portes, les fenêtres, les tables, les chaises, le plancher, les radiateurs ex ex. Je me serai déchénée sur les maîtres je l’eur lancerai des pétards des bombes puantes dans leur mouchoir.
Je me déguiserai en indien. Je casserai les vitres des voitures et je briserai les sonettes d’alarmes. Je ferai des croche pâtte à tous le monde. Je déclancherai des incendis. J’irai dans les boulangeries patisserie confiserie glacerie et je prenderai tout ce qu’il y a et après je partirai en courant sans payer. Je ferai des farce au docteur et aux hommes politiques. Je marcherai à reculons avec des ressors au pied.
(Libération)

Trois désastres angéliques

Deux écoliers de douze et treize ans ont dévasté une maison familiale en construction, mais presque terminée, faisant ainsi pour plus de 50 000 F de dégâts. Ils ont aspergé de peinture les sols et les murs, déchiré les tapisseries, tenté de mettre le feu à la maison en versant de l’essence de térébenthine.
Les enfants ont déclaré aux enquêteurs qu’ils avaient fait cela parce que l’architecture de la maison ne leur plaisait pas...
Berne, 6 août 1976 (La Dépêche)

En rentrant le soir, M. et Mme Charoy eurent une première surprise désagréable en apercevant leur voiture, garée devant leur pavillon, totalement bosselée, avec des éraflures.
Ensuite, en pénétrant chez eux, ils trouvèrent dans toutes les pièces des débris d’objets fragiles : vaisselle, bouteilles, qui jonchaient le sol, et un morceau de la moquette brûlée.
Le cerveau du “commando” semble être une des petites filles, âgée de 5 ans, qui s’était disputée avec la fille des Charoy, et qui avait menacé son amie en disant : “Nous reviendrons casser tous tes jouets”.
Bar-le-Duc, 5 août 1976 (La Meuse)

Deux garçons de 13 ans ont démoli à l’aide d’un bulldozer une maison toute neuve que l’on avait édifiée sur leur terrain de jeu favori, à Reno, aux États-Unis.
Ils ont attendu que les ouvriers du chantier soient partis pour la nuit et sont alors allés chercher un bulldozer dont ils avaient repéré la présence à un kilomètre de là. Avec cet engin, ils ont passé à quatre reprises sur la maison neuve.
Lorsque les ouvriers sont revenus le lendemain matin, ils n’ont plus trouvé que des gravats.
Reno, 8 février 1973 (La Libre Belgique)

Les Mémoires d’un cancre (1979)
A la maternelle déjà, je haïssais les maîtres. En face d’eux, j’étais un gamin tout sourire, charmant et naïf. Aussitôt hors de vue, je pilais les craies dans les encriers, gravais des obscénités sur les belles tables cirées et répandais de l’encre sur la chaise des maîtresses aux jolis froufrous.
Au lycée, en 4e, je fondais avec deux voisins de fronde le groupe “Arsène Lupin”, dont la malfaisante activité était la guerre aux professeurs et aux pions. Dès les premières semaines nous savions à quoi nous en tenir sur le noble caractère de notre chiourme. Nous la classions en trois catégories : les “peaux de vache”, les “faux-culs” et les “concons”. Avec les peaux de vache, tous les coups — clandestins — étaient permis : clous rouillés sur la chaise, tableau pesant effondré en plein cours, insultes blessantes et anonymes, “vache qui rit” collées au plafond tombant en débris mous, pneus lacérés, chapeau plein de merde. Face aux faux-culs nous étions plus ouvertement ignobles. S’ils se vengaient sans pitié pendant les conseils de classe ou nous livraient au Censeur, ils devaient subir ensuite notre vengeance et nos farces monstrueuses. Nous venions au cours avec dix de ces petites boîtes qui imitent à la perfection le meuh ! gras d’une vache, et donnions une heure de concert alpestre. Dès qu’une boîte était découverte, une autre hurlait de plus belle dans la travée d’à côté. Et ainsi de suite. Nous attendions que notre faux-cul craque. Nous étions méchants et cruels. Prétextant sa mauvaise haleine, toute la classe lui tournait soudain le dos ou se protégeait le visage avec une moue dégoûtée. Nous déclenchions après cinq minutes de leçon la sonnerie de la fin des classes, un magnétophone caché dans un sac, et sortions en hurlant dans la cour. Le faux-cul était savonné par la direction. Avec les “concons” enfin, espèce des plus rares, nous étions toujours absents et trichions sans vergogne.
Deux années plus tard, en seconde au lycée Hector Berlioz, le grand clapier bleuté et vitrifié de la place Bérault, nous nous sommes livrés à quelques-uns à la frénésie trouble de la casse pour la casse. Fini le touche-pipi avec les professeurs, l’heure était à la destruction. Le lycée lui-même ne devait pas s’en relever.
Nous étions quatre parmi les plus effroyables planteurs de merde du lycée, avertis, collés, cognés, virés. Une douce nuit de mars nous pénétrons par une fenêtre brisée dans nos modernes locaux avec l’idée arrêtée de les rendre inutilisables pour la journée du lendemain, jour d’examen trimestriel. Aussitôt dans la place, nous filons au dernier étage, où se déroulent habituellement nos cours.
Dès la première salle nous avons détruit tout ce qui pouvait l’être : tables, bureaux, fenêtres, radiateurs, poignées de porte, lampes. Nous retournions les estrades, pissions dans les tiroirs, chiant partout. Dans les WC, finis les robinets, les éviers, inondations, cuvettes brisées. Tout au long des couloirs, arrachées les sonnettes, pétés les porte-manteaux. Je courais au désastre dans les salles de géographie, cisaillant les grands rideaux, cartes en confettis (sauf celles que je volais), archives lacérées. A côté, classe de physique-chimie, une insupportable soupe soufrée, puante jonchait le sol. Mes compères s’acharnaient sur les bocaux, la verrerie, les éprouvettes. Ils massacrèrent tout. Seule une petite cuve de magnésium en réchappa.
Après ce cyclone, nous visitons en tapinois les loges des surveillants généraux. Là où sont déposés les carnets de notes et d’absence. Sabbatique dégueulasserie. Joie de triturer ces belles écritures, ces pleins et ces déliés, ces annotations doctes. Shraac ! les belles feuilles, les belles colonnades, les appliqués programmes. Adieu jolis horaires soulignés, encre rouge, stylo quatre mines. Tous éparpillés sous la chasse, éventés par les fenêtres, anéantis. Plus rien. Nous laissions des pièces de cauchemar, les quatre fers en l’air, gravées de grosses bites cramoisies. Si nous n’avons pas mis le feu, c’est par peur d’être pris.
(Vrai Art Nouveau)

« Il faut mettre le terme aux maîtres »
(Pierre Desproges)

En France, il ne se passe pas de semaine, que des jeunes de quatre à dix-huit ans ne saccagent une classe ou détruisent une école. Il ne faut pas sourire, des gosses de quatre-cinq ans réalisent spontanément ce que le mouvement étudiant-lycéen n’a jamais osé en mai 1968 : la fin de l’école. (...) Il y a des incendies dont on a moins parlé que celui du CES Pailleron. En 1977, Denis et Claude étaient respectivement condamnés à deux ans de prison dont un avec sursis et à trois ans avec sursis pour l’incendie du lycée de Meaux (Seine-et-Marne). (...)
Afin qu’on ne nous soupçonne pas de pyromanie exclusive, citons le cas du lycée de Coutances (Manche), inondé en mai 1978 à l’aide de lances à incendie maniées par un groupe d’élèves (dix millions de dégâts et une signature : No Future).
Yves Le Bonnier et Claude Guillon (Ni Vieux ni Maîtres, 1979)

Au Pakistan
Les étudiants pakistanais luttent pour avoir le droit de tricher aux examens et la bataille est sanglante.
Les étudiants, à coups de crosses de hockey, ont mis hors de combat M. Motahar Ah Mallick, professeur de mathématiques qui, le bras gauche brisé, a dû être admis à l’hôpital de l’école de médecine de Dacca. Il avait refusé de les laisser copier sur leurs livres au cours d’un examen à leur collège, à 102 kilomètres au nord-est de Dacca.
« Les gens responsables des examens ne perdront pas leur travail mais ils perdront certainement la tête s’ils veulent accomplir convenablement leurs tâches », a déclaré un examinateur anonyme à un journal de Dacca. Il a décrit au journal un examen dans lequel tous les étudiants “copiaient” ou s’arrangeaient pour consulter des gens se trouvant en-dehors de la salle. Un comité de vigilance des étudiants, pendant ce temps, “surveillait” les examinateurs : « Ni le secrétaire du centre des examens, ni les surveillants n’ont eu le courage moral de signaler un seul cas », a-t-il précisé.
Les candidats aux examens ont mis à sac l’école de médecine de Dacca parce qu’ils n’ont pas pu “copier”.
Un professeur de bengali, M. Motiur Rahman, du collège d’Anada Moham, à 64 km de là, a également terminé la journée d’examens à l’hôpital de l’école de médecine, blessé à la tête. Il avait été entouré et bousculé par les étudiants alors qu’il annotait les copies de l’un d’eux qu’il avait surpris en train de tricher.
(Le Soir, 7/8/1971)

Aux États-Unis
Les enfants avaient coutume, du moins certains d’entre eux, de dire qu’ils haïssaient tel ou tel professeur. Maintenant, c’est absolument tous les enseignants qu’ils tendent à mépriser en les rouant périodiquement de coups ou en jouant du couteau contre eux.
Jacques Barzun, principal de l’Université de Columbia, octobre 1966

Au Japon
En fait, le principal problème de la rentrée reste celui de la violence dans les écoles. Les élèves se sont mis à faire la loi en domptant leurs professeurs par la force. En 1982, mille huit cent quatre-vingt professeurs ont dû être hospitalisés suite à des violences de leurs élèves.
On ne compte plus les enseignants soignés pour dépressions nerveuses. Certains n’osent plus réprimander les élèves qui lisent des bandes dessinées ou fument dans les classes (au Japon, la loi interdit de fumer ou de consommer de l’alcool avant l’âge de la majorité).
D’autres, plus rusés, promettent des diplômes aux troubleurs s’ils s’abstiennent de venir en classe.
(Libération, 16/9/1983)

En Italie
Dans le quartier Cep de Palerme, en 1976, les enfants d’une école ont apporté des chiens en classe ; ils les ont lâchés sur les enseignants, puis ils ont saccagé les locaux.
Jean Lesage (L’italie des enlèvements, 1978)

Pour imposer le « six politique pour tous parce que l’école est une merde », des commandos casqués et armés ont répandu le chaos dans le système éducatif de l’Italie. Les proviseurs, directeurs, enseignants qui refusaient de donner automatiquement au moins six à toutes les copies furent injuriés, passés à tabac, séquestrés, menacés de mort, parfois leurs voitures furent incendiées et leurs biens détruits. (...)
A la suite d’un ras-le-bol, les enseignants de plusieurs lycées ferment leurs établissements. L’enquête révèle que, depuis des années, leurs élèves font régner la terreur par les moyens contestataires que voici : poser une bombe devant l’appartement d’un professeur et tirer sa sonnette pour qu’il vienne ouvrir et que la bombe lui éclate au nez ; cogner les enseignants et les menacer de les jeter par la fenêtre ; incendier les copies d’examen.
En janvier 1978, après avoir subi au cours des deux dernières années l’incendie de la salle des professeurs, puis la mise à feu des voitures de certains enseignants, puis deux attentats au plastic, puis le spectacle de leur proviseur giflé à deux reprises et roué de coups de bâton, puis un autodafé fait avec les compositions de mathématiques, puis une tentative d’incendie de l’appartement du vice-proviseur, les soixante pédagogues du lycée scientifique Polo Scarpi de Rome ont enfin rendu leur serviette.
Suzanne Labin (La Violence Politique, 1978)

FLAMME-FLAMME

Les données qu’on recueillit pendant tous ces procès démontrèrent que les femmes furent souvent les principales initiatrices des complots et des crimes, qu’elles travaillaient à fanatiser les révoltés et dirigeaient même parfois les entreprises du monde révolutionnaire, qu’elles prenaient souvent personnellement part aux attentats les plus hardis : en un mot, que c’était les femmes qui jouaient un rôle des plus marquants dans l’histoire des agissements nihilistes en Russie.
(La Chronique du mouvement socialiste en Russie 1878-1887, sous la conduite de l’adjoint du ministre de l’Intérieur Schebeko)

A l’audience d’un tribunal anglais, une jeune fille tire avec un fusil à canon scié sur la cour et sur le jury.
(La Lanterne, 2/2/1973)

Depuis hier, il n’est pas rare de rencontrer dans les quartiers excentriques de Paris des bataillons de femmes, marchant deux par deux, vociférant, hurlant, le sabre au jupon et le chassepot sur l’épaule. _ C’est hideux et grotesque. Il n’est pas d’injures, de menaces et d’obscénités que ne vomissent ces créatures. Il paraît qu’elles ne se bornent pas malheureusement à arpenter militairement la rue et à se mêler à la boue du trottoir ; elles montent carrément dans les appartements que désigne la vengeance ou la cupidité et pillent à belles mains !
Lettres de Paris”(Le Gaulois, 20/4/1871)

USA
A plusieurs reprises, les WITCH (c’est-à-dire les adeptes de la “Conspiration Internationale Féministe de l’Enfer”), habillées de simarres de sorcières et à cheval sur des balais, se sont mises en noir dans les locaux de “power centers” comme la Bride Fair de Madison Square Garden, et la Chase Manhattan Bank. Le jour où les maquerelles ont envahi la Bourse de New York en chantant sataniquement, toutes les valeurs cotées ont dégringolé de cinq points.

La Libre Belgique : « Dans les bureaux de poste, les affiches “Wanted” ressemblent de plus en plus à des posters de pin-ups : des filles souvent jeunes, parfois jolies, toujours dangereuses. Elles dévalisent, volent avec effraction, attaquent à main armée. Elles tuent : au couteau, à la bombe, au revolver. Le FBI les considère comme plus redoutables que les hommes. Les experts les croient capables de crimes parfaits, souvent impunis. »

Japon
Télé-Moustique du 5/2/1976 : « Une femme a-t-elle été abandonnée sans ressources par son mari ? Le groupe coiffé de casquettes roses (...) fait le siège de l’entreprise de l’époux et mène un tel tintamarre que celui-ci s’empresse d’obtempérer avant d’être complètement ridiculisé devant ses collègues. Les Panthères Roses en sont à leur quatre centième victime. »

Pologne
La Meuse (1961) : « Pour protester contre la hausse des prix et la pénurie de certains produits, des ménagères ont saccagé un self-service de Katowice, ville où, pourtant, les salaires sont généralement plus hauts et l’approvisionnement meilleur qu’à Varsovie. »

Mexique
Le Jour du 26/5/1979 : « Plus de cinq cents femmes armées de pistolets, de machettes et de gourdins ont investi la ville de Texmico, à une centaine de kilomètres au sud de Mexico, et elles ont menacé de tuer l’adjoint au maire s’il reparaissait dans la cité. »

Danemark
Les “Roede Stromper” formaient il y a peu encore de véritables commandos de “gredines brigandines” pour dissuader les gros hommes de payer leur place dans les bus et pour déculotter les gardes de la reine en bonnet à poil.

Espagne
La Meuse du 2/5/1975 : « Un médecin madrilène qui refusait de prescrire la pilule à une de ses patientes a été rossé d’importance par la dame (nez cassé, côtes froissées). En quittant le cabinet, l’irascible a lancé au médecin : “Et si j’ai un enfant, je vous jure que vous serez le parrain !”. »

Italie
Le 1er juillet 1977, « une bombe a fortement endommagé l’église du Sacré-Cœur, à Florence (...). Un message découvert dans une boîte à lettres voisine précisait que des milliers d’églises et édifices religieux subiraient le même sort si le gouvernement italien ne libéralisait pas l’avortement » (Le Soir)
Le 2 mars de la même année, des fées Carabosse de Seveso ont atterri avec des flambeaux ardents dans le rectorat de l’université catholique : « Aujourd’hui, les sorcières n’attendent pas qu’on les rôtisse sur un bûcher, ce sont elles qui mettent le feu ».

LES FURIES TUMULTUAIRES

Levant le front et redressant le torse,
Las d’implorer et de n’obtenir rien
Je ne veux plus compter que sur la force
Pour me défendre et pour reprendre mon bien.

Gaston Couté (Nouveau Crédo du Paysan, 1911, inspiré par la révolte des vignerons champenois de l’Aube)

Les nobles arrivèrent par la route de Paris qui donnait sur la rue du Heaume, très en pente. Des chariots munis de faux avaient été disposés à son sommet ; les hommes s‘étaient embusqués derrière les portes des maisons, les femmes placées aux fenêtres du premier étage, munies de chaudrons d’eau bouillante. Les nobles demandèrent à entrer. On les laissa faire. Tout à coup, les chariots dévalent la rue et culbutent les chevaux. Les femmes jettent leur eau bouillante sur les chevaliers empêtrés dans leurs armures, pendant que leurs maris s’en prennent aux hommes à pied...
Gilles Ragache et Cie (Les Jacques, dans Les Paysans, 1974)

Ne quittez pas le front, continuez la lutte contre les galonnés d’or, et exterminez vos commissaires sur place. La paysannerie révolutionnaire et les ouvriers extermineront à leur tour à l’arrière les parasites suspendus à leur cou.
(Tract de l’armée insurrectionnelle d’Ukraine (makhnoviste), le 9 mai 1920)

Ce n’est qu’avec horreur et effroi que je pense à l’époque où ces sombres iconoclastes parviendront à la domination : de leurs mains calleuses, ils briseront sans merci toutes les statues de marbre de la beauté si chères à notre cœur, ils détruiront mes bois de laurier pour y planter des pommes de terre. (...) Hélas ! je prévois tout cela, et je suis saisi d’une indicible tristesse en pensant à la ruine dont le prolétariat vainqueur menace mes vers qui périront avec tout l’ancien monde romantique.
Henri Heme (Lutèce, 1855)

Les Pitons de Saintonge (1548)
Depuis le Coronnal nommé Puimoreau, vint avec sa troupe en la ville de Saintes un dimenche douzième jour d’Aoust, passant ès lieus de Besgne, Jonzac, Barbezieus, Archiac et autres ; et faisoient le nombre d’environ de seize à dix sept mille hommes de canaille de Commune, ambatonnez de harquebuzes, arbalestes, fourches de fer, piques et faux emmanchées à l’envers, et saccagèrent les maisons du Lieutenant general et Procureur du Roy à Saintes et d’un fort riche marchant nommé la Chuche, d’un commis à la recepte du Roy, et quatre autres, lesquelz ils disoient estre tous Gabeleurs. Davantage rompirent les prisons et laschèrent tous les prisonniers, tant ceus des basses fosses que autres. Quant au Receveur de la gabelle, lequel estoit détenu prisonnier pour les deniers du Roy, il fut mené devant Puimoreau Coronnal, lequel pria la Commune lui sauver la vie, à la charge qu’il porteroit une de leurs Enseignes, qui lui fut mise en la main : mais un vilein yvrongne lui vint bailler sur la teste d’une faux emmanchée à l’envers et lui fendit une grand partie de la teste, au moyen de quoy il tomba quasi mort. Adonq les Capiteines lui demandèrent pourquoy il faisoit telle cruauté et il respondit telles parolles : Par le cordi ouet un meschan, qui me fit tresné à la queue de son cheval, ô ni ha pas quinze jour pour m’amener en quelle prison. Le dit Receveur fut lors prins par cens de Pons, qui le portèrent en l’aumonerie de l’Abbaye de Saintes, n’estant encore mort, où vint un Prestre de ladite Commune : lequel lui donna plusieurs coups de dague au sein, ainsi qu’il estoit couché sus un lit, et l’acheva de tuer, et le despouilla en chemise, emportant un misérable butin, qui fut un merveilleux acte de Prestre chrétien.
(G. Paradin)

Les Croquants du Maine (1661)
Mathurin Leroux, huissier a esté esgorgé le 15e du mois de may dans un bois sur le grand chemin de La Flèche à La Roche Simon, où il se transportoit pour le recouvrement des contraintes des taxes de l’affranchissement des droits de francs fiefs...
Les coupables de cet assassinat.., et autres gens de leur caballe au nombre de quarante à cinquante.., tiennent journellement les grands chemins et vont de bourg en bourg où ils apprennent que les huissiers se transportent afin de les assassiner et mettre aussy à mort, et, de fait, ayant appris que les huissiers auroient le 23 juin dernier fait deux exécutions aux environs de la ville de Sablé... et qu’ils auroient mené vingt bestiaux en dépôt en la ville de Sablé à l’hostellerie de l’Escu en attendant le jour de la vente, ils seroient allés le 25e ensuivant suivis d’environ trente hommes de cheval armés d’espées, fusils, mousquetons et pistolets, le nommé Dubuc marchant à la teste comme capitaine, en ladite hostellerie sur les deux heures après midy, et non contens d’avoir pris et enlevé par force tous lesdits bestiaux, ayant rencontré Pastreau, huissier, l’auroient griefvement excédé, traisné de sa chambre où il estoit par le degré sur le pavé de la grande rue comme un homme mort jusques sur les ponts pour le jetter dans la rivière après luy avoir osté l’argent qu’il avoit receu et pillé ses rolles, papiers et armes, et delà l’auroient conduit entre des hommes de cheval marchant deux à deux estroitement lié et attaché de cordes pour le mener, ainsy qu’ils disoient, pendre à Lavai, après lui avoir au sortir de la ville donné un grand nombre de coups d’estrivières... disans hautement qu’ils cherchoient ainsy tous les maltotiers pour les exterminer et qu’il falloit mettre sur eux main basse partout.
(Le Fermier du Droit de Franc-Fief)

L’Armée de Souffrance de Basse-Normandje (1639)
Les élus examinaient comme à l’accoutumée les menus procès sur les tailles inscrits à leur rôle ; ils tenaient leur audience sans se douter de rien :
Le peuple des faubourgs attaque en plein auditoire les officiers de l’élection qui estoient tout en sceance à rendre justice et, après leur avoir demandé où estoient les paquets de la gabelle qu’ils s’imaginoient estre entre leurs mains, ils firent greler tant de coups de pierre et de baton sur le sieur de Sarcilly, président, qu’il demeura comme mort sur la place, ses autres confrères s’estant sauvés par les fenêtres.
Ensuite la foule des émeutiers va épuiser sa colère dans l’assaut et le pillage de quatre maisons d’officiers de l’élection. Tous leurs papiers, où l’on veut reconnaître des signes des impôts détestés ou redoutés sont jetés par les fenêtres, rassemblés dans les rues pour y nourrir des feux de joie.
(Y.-M. Bercé et un témoin des faits)

L’“armée de souffrance” s’attaque surtout aux officiers de finances, aux “financiers” et aux gens accusés de travailler pour eux. Vingt-huit personnes furent ses victimes : un lieutenant particulier au bailliage de Coutances, Bernard Poupinel, accusé d’apporter l’édit sur la gabelle ; un lieutenant particulier au bailliage de Mottain, Fortin de Beaupré, accusé d’avoir participé au traité de la Cour des Aides de Caen pour 29 000 livres ; cinq officiers des Elections ; le président de l’Election de Vire, Philippe de Sarcilly ; deux lieutenants en l’Election d’Avranches, Delabarre et Gosselin ; deux élus d’Avranches, Basilly et Alibert ; quatre receveurs des tailles accusés de participer aux traités pour les subsistances, Nicolle à Coutances, Ameline et Angot de La Bretesche à Avranches, Jouvin à Vire ; deux fermiers du quatrième du sel, Vaugueboust et son commis Blascher ; deux intéressés à la ferme des Aides, à Vire, Perlier et Vincendière, etc. Neuf “bureaux” des Aides furent pillés, celui des cinq grosses fermes à Pont-Saint-Gilbert ; celui des quatrièmes du sel à Saint-Leonard, etc. Parmi les victimes, deux furent tuées, Poupinel et Coaslin, beau-frère de Nicolle, receveur des tailles à Coutances, “traisné pendant deux ou trois jours à la queue d’un cheval pour veoir mettre le feu à toutes ses maisons, puis tiré de deux coups de pistolet”. Trois furent laissés pour mort “à coups de pierre et de bastons.” Les autres furent menacés de mort mais atteints par le pillage et l’incendie de leurs maisons. Le sieur Delabarre souffrit de neuf maisons détruites, dont celle de sa résidence et encore de la ruine de “sept petites maisons de louage”.
(R. Mousnier)

Les Glaiseuses de la Planèze (1848)
Voici Tanavelle, un bourg perché dans la Planèze, où un huissier est arrivé le 1er août 1848 pour demander les 45 centimes. Les femmes du village envahissent son auberge, s’emparent de lui et le conduisent sur la grand-route aux dernières maisons du bourg, le poursuivant de cris et de pierres. On menace l’huissier des pires supplices s’il veut revenir instrumenter dans le lieu ; il sera, lui dit-on, brûlé avec ses registres, enterré vivant (Lectourois) ou coupé en deux (vallée de la Neste).
(Y.-M. Bercé)

Les Culs Pailleux d’Angoumois (1636)
Depuis cette révolte, ils en ont fait mourir dix ou douze et entre autres à Saint-Savinien exercèrent une si horrible rage contre un de ces pauvres commis, natif de Paris, qu’il fut taillé tout vivant en petits morceaux dont chacun prenait sa pièce pour attacher à la porte de sa maison où il s’en veoit encore.
Ils décidèrent d’envahir Angoulème pendant la grande foire royale du 22, 23, 24 mai et d’y exécuter tous les agents du fisc, élus, receveurs, huissiers et sergents, commis des fermiers d’impôts, et au besoin les magistrats du Présidial, s’ils entreprenaient de les protéger.
(R. Mousnier et un témoin des faits)

Les Tanneurs de Rouen (1633)
Une révolte des quartiers éclate la même année à cause d’une taxe sur les cartes et tarots. Le commis Trottart, venu pour percevoir la taxe est attaqué par la foule, jeté à la Seine. Repêché, il est porté à moitié mort au prieuré de Bonne-Nouvelle. Le prieuré est immédiatement investi d’une foule d’hommes, de femmes, d’enfants, qui veulent achever le commis et menacent les religieux.
(R. Mousnier)

Les Sans Aveu de Rennes (1675)
La suite des événements nous est rapportée par Maître Duchemin dans son journal privé :
« Environ les deux heures de l’après-midi, certaine canaille inconnue et gens ramassés qui n’étaient point du pays, s’étant émus, seraient allés au bureau où se vendait le tabac, situé au Champ-Jaquet, en la maison de Me Jacques Hervagault, huissier, qui rend du côté des halles, auraient enfoncé les portes et fenêtres, pillé et emporté tout le tabac, même les meubles qui étaient dans le parembas, et fouillé dans les caves, pillé le vin et cidre y étant, jeté plusieurs pierres et cassé toutes les vitres et fenêtres du haut en bas ; puis seraient allés à l’autre bureau du contrôle et affirmations situé audit Champ-Jaquet, dans la maison de M. de Tizé, rompu aussi les portes et fenêtres, pillé ce qui était dans les salles basses, jeté les registres et cahiers dans le feu par eux allumé au Champ-Jaquet, même brûlé quelques-uns des registres du greffe des insinuations qui étaient dans les mêmes en bas, et pillé plusieurs meubles dans les étages d’en haut ; et voulant les sieurs du Margat Cochet et de La Chauvelière Louvel, connétables de cette ville, empêcher ces mutins, ils les auraient fort maltraités. Cette canaille serait ensuite allée au haut de la Filanderie à un autre bureau du Domaine, où ils auraient encore fait plusieurs désordres ; lors de quoi, un nommé Jean Bernier, tourneur et vendeur d’oranges, fut tué d’un coup de fusil ; dans ladite rue, le valet de la Petite Harpe aussi tué, et cinq autres blessés à mort, depuis décédés, et plusieurs autres encore blessés. De plus, cette populace aveugle, étant allée dans la rue aux Foulons, à dessein de piller le grand bureau des Devoirs, ils y furent tellement repoussés qu’il y en a été tué ; et seraient aussi allés au Palais, au bureau du timbré, et auraient rompu toutes les presses et pillé tout le papier et parchemin timbré.
« Ces fripons vouloient aller brûler tous les gens d’affaires chez eux pour voler leur argent, comme MM. Ferret, de Montaran, La Fuye Cotton, des Plantes Avril, les Pupils, et même le premier président. »
(Maître Duchemin)

Les Chasseurs de prêtres-suppôts-de-gabelle de Léon (1675)
Le dimanche septième du mois de juillet, à l’issue de la grande messe,... il fut accueilli et attaqué par quantité d’habitants de ladite paroisse, de l’un et l’autre sexe, de paroles insolentes avec blasphèmes, lui demandant tumultuairement la gabelle. A quoi ayant humainement répondu qu’il ne savait de quoi on lui parlait, ils se voulurent jeter sur lui et le poursuivirent jusques dans la sacristie où il s’était évadé, où à peine avait quitté son surplis que ces mutins le prirent au corps, l’arrachèrent et le traînèrent indignement hors de l’église, le tenant par le collet de sa soutane, qu’ils déchirèrent par lambeaux, et ainsi traîné jusques au presbytère. Ils y rompirent portes et fenêtres, fouillèrent toute sa maison, enfoncèrent et burent deux barriques de vin qu’ils trouvèrent dans sa cave, pillèrent son argent, meubles et bibliothèques et papiers qu’ils y trouvèrent, déchirèrent insolemment les tableaux et autres images de dévotion qu’il avait dans sa maison, et n’ayant pas trouvé cette prétendue gabelle qu’ils disaient vouloir avoir, l’arrachèrent hors de sa maison, le traînant et foulant entre leurs pieds, lui baillant infinité de coups, l’ayant retenu entre leurs mains exposé au soleil, tête nue et chemise coupée, cinq heures durant dans la place dudit Commana, outragé de temps en temps d’une infinité de coups, terrassé trois à quatre fois et réduit de demander inutilement l’extrême-onction, les uns disant qu’il le fallait pendre à sa porte, les autres qu’il le fallait lapider ou tirer par les armes, les autres qu’il le fallait monter au haut du clocher de ladite paroisse et précipiter une pierre au col, et lui faire premièrement serrer les doigts dans un trou pour qu’il eût avoué s’il avait publié ladite gabelle ou non, et où elle était, et les autres sonnant en même temps le tocsin, et qu’enfin un particulier l’ayant tiré de leurs mains et l’ayant traîné dans ladite église, il y logea toute la nuit dans les affres d’une violente mort ; et le lendemain matin s’étant sauvé chez Alain Martin, il y fut le même jour, la nuit et la plus grande partie du jour subséquent, caché dans un muilon de foin, d’où s’étant enfin fait transporter dans cette ville, il a été depuis gisant entre les mains des médecins, apothicaires et chirurgiens de cette ville pour tâcher de trouver sa santé et guérison des mauvais traitements qu’il a eus desdits paroissiens.
(L. Le Guennec, recteur de Commana)

Les Brise-images de Valenciennes (1566)
C’était un samedi, jour de la Saint-Barthélémy. Au cours de la matinée, les images du Christ, de la Vierge, des saints furent “abbatues, traînées, vilipendées, brisées et brulées”... Tous les récits détaillent les éléments du saccage, les orgues rompues, les autels, les fonts baptismaux brisés, ainsi que les “verrières”, mais aussi les vêtements sacerdotaux, “chappes, chasubles”, les pièces d’orfèvrerie, les “courtines, nappes, serviettes et autres linges servant à l’office divin”. Bien entendu également les ciboires, les calices, les reliquaires, dont les églises étaient particulièrement bien dotées. Simon Le Boucq, dans son Histoire ecclésiastique de la ville de Valenciennes, les évoquait tristement “ces saintes reliques de la chapelle de Notre-Dame-des-Miracles qui furent bruslées publiquement l’an 1566 par les brise-images, ennemys de nostre saincte foy”, parmi lesquelles on pouvait trouver, entre autres, “des os des saints innocents martyrs, de sainte Anne, (...) du voile de sainte Gertrude, du chef de saint Victor martyr, (...) de la Table ou Nostre Rédempteur feist sa cène, (...) un grand os de saint Pierre l’apostre, (...) de la pierre sur laquelle NS s’assit quand il prescha ses apostres, (...) de la barbe de saint Makarie (...), une dent, du sang et des cheveux de saint Christophe”...
(L’un des plus “beaux” récits d’iconoclasme que nous possédions concerne précisément celui qui se produisit à Crespin, petite localité située à quelque sept kilomètres de Valenciennes : pendant toute la journée du 26, une troupe, évaluée à quatre ou cinq cents personnes, dont une douzaine d’hommes à cheval, y exerça ses talents, avec un zèle infatigable, d’abord dans le cimetière, où la première victime fut un “Dieu de pitié” mis en morceaux, puis dans l’église paroissiale, dont les autels et les images furent mis à mal — l’on descendit les statues, avec des cordes, on tira à balles sur un crucifix —, à l’intérieur du monastère enfin, dont moines et prieur s’étaient enfuis ne laissant sur place qu’un malheureux portier, qui dut assister au saccage de l’église abbatiale, des chambres, de la bibliothèque, le tout entrecoupé par le chant des psaumes et la prière vers sept heures du soir, et spectaculairement accompagné de feux de joie (un témoin en compta dix-huit), allumés dans la nuit).
(S. Deyon, A. Lattin et S. Le Boucq)

Les Iconoclastes des Flandres (1566)
En Flandre, l’on dit qu’aux gibets prévus pour pendre les malfaiteurs et fauteurs de troubles, “les hérétiques, à l’automne 1566, ont accroché des statues de saints”. A Zuytberquin, Jean Druck “a pris une chasuble au choeur de Saint-Nicolas, l’a coupée en morceaux disant qu’elle servirait de jarretière”. A Laventie, l’on a vu Mahieu Baiaert se livrer joyeusement à des facéties sur une statue de saint, et lui « copper (...) sa barbe à la gueuse ». A Limbourg, un nommé Mathieu se vante d’avoir rompu les images et « cuit sa jotte avec les jambes desdites images ».
A Limbourg, un des témoins interrogé lors du procès de 1569 accuse Isabeau Blancheteste, qui avait revêtu de chaux les murs de l’église, d’avoir « faict son urine eus les gobelets en lesquels l’on est accoustumé mectre le vin pour sacrifier avec » !
(N’est-ce pas un comportement de meurtrier par exemple, que celui de ce Jan van Heyde, accusé d’être entré dans l’église d’Adinkerque, en août 1566, armé d’une hache, et d’y avoir coupé en deux une statue ; celui de G. Zuelhof, qui, près de Bergues trouvant une image du Jugement dernier par terre, a tiré son couteau et l’a passé à travers le corps du tableau ; celui de Robert de Ruycke, qui, dans le cloître de Saint-Winoc, a brisé lui-même plusieurs statues qu’il lançait de haut en bas ; celui de Jean Gherstcooren, à qui l’on reproche d’avoir, l’été 1566, arraché et détruit avec un bâton, dans l’église de Ghivennchove, plusieurs statues, enlevé celles des apôtres qui se trouvaient devant le doxal ; aidé à arracher le crucifix ; et de Lambert Housseau, que l’on entendait crier continuellement aux briseurs : « Avant, avant ; couraige, couraige, tirez tout jus » (c’est-à-dire jetez tout par terre) ; et de cet autre, Mahieu Tahoen, accusé d’avoir « coupé le nez et aultrement défiguré plusieurs images » de l’église paroissiale de Westoutre !)
(S. Deyon, A. Lattin, F. Lemaire et A.L.E. Verheyden)

Les Nus-Pieds de Creil (1358)
Pour l’heure, mais tout va se jouer en heures, à peine en jours, avant de traverser les siècles en épopée décriée et désordonnée, pour l’heure, ce n’est à travers la campagne creilloise que groupes sans maître, lâchés comme chiens de meute. Mais les chiens sont devenus enragés et courent sus aux veneurs.
Ils sont cent, bientôt mille, bientôt cinq mille. Ils vont en groupes désordonnés et hurlants, couverts de poussière, bientôt de suie, bientôt de sang. Gesticulant, ils s’excitent les uns, les autres. « Ils disent voir, ils disent voir », répète le chroniqueur, leur prêtant son lyrisme : « Honnis soit cil par qu’il demourra que tous les gentilzhommes ne soient destruits. »
Les destructeurs de gentilshommes brandissent des armes de misère. Ils vont mener, dit le chroniqueur, « la guerre des non-nobles contre les nobles », et dans cette négation tout est dit. Ils vont semer l’effroi, récoltant ainsi leur nom. Et, dans l’épouvante qu’ils inspirent, ils surpasseront ces bandits des grandes compagnies qui les épouvantaient eux-mêmes. Car ils ne respectent pas les règles des jeux cruels de ce temps. Ce que les reîtres des compagnies font par appétit de l’or, les Jacques le feront par soif de vengeance.
S’ils terrorisent, ils ne rançonnent pas. S’ils détruisent, ils ne pillent pas, du moins pas de manière organisée. S’ils massacrent, ils ne le font pas par plaisir mais par fureur. Leur violence n’est pas décision froide mais colère aveugle, déchaînement de masses, non de bandes. Leurs armes, ce sont les instruments de la terre : bêches, fourches, socs de charrue, faux, cognées, pioches. Ou bien les instruments d’une guerre de pauvres : la pique, le bâton ferré, le couteau. Et puis la torche.
Car, juste image de ces misérables justiciers, ils vont porter l’incendie et la destruction. Ils vont mettre le plat pays à feu plutôt qu’à sang, ne serait-ce que parce que les seigneurs et leurs familles auront généralement le temps de s’enfuir devant ces hordes désordonnées, précipitant par là les rumeurs d’un effroyable mouvement. Annoncé par les cloches, répandu par les fuyards, le mouvement des Effrois sera propagé par les incendies.
Pour ces Hurons ayant follement déterré la hache de guerre, un but : le château. Il ne s’agit pas de le prendre et de l’occuper, ni de le piller, il s’agit de le détruire. Ils n’ont ni machines de siège, ni armes d’offensive, ni tactique d’assaut, ils n’ont que leur fureur et leur folie, et leur nombre. Avec des béliers improvisés, avec leurs cognées de bûcherons, leurs marteaux de forgerons, leurs pioches et leurs bêches d’agriculteurs, ils vont franchir les fossés, briser les chaînes des ponts-levis, renverser les grilles, fracasser les lourdes portes. Si le seigneur et ses gens d’armes sont restés se défendre contre ces va-nu-pieds, déversant flèches et boulets du haut des tours et des créneaux, qu’est-ce que cela peut faire ? Une vague hurlante remplace la vague abattue.
(A.-M. Casalis)

Les Chouffliqueurs [1] de Lyon (1539)
En avril 1539 éclate à Lyon une grève particulièrement dure. Les compagnons y ont “tous ensemble laissé leur besogne” après s’être concertés et organisés en vue de la grève. Le mot TRIC leur sert de cri de ralliement et de signal : « pour lequel et incontinent après la prononciation d’icelui, ils délaissent leur ouvrage pour faire quelque débauche ». Sitôt que ce cri a été lancé, les compagnons quittent les ateliers, parcourent les rues et, portant leurs armes (des dagues, des poignards), pourchassent les maîtres et les agressent. Le procureur du roi les accuse « d’avoir battu le prévôt et les sergents jusques à mutilation et effusion de sang ».
(A. Delale, G. Ragache et cie)

Les Maillotins de la rive droite (1382)
Le petit peuple se souleva à Paris. A l’origine de cette révolte il y eut une marchande des quatre saisons, parce qu’un percepteur voulait saisir sa marchandise pour la perception de la gabelle sur les fruits et légumes. _ Elle se mit à crier : “A bas les impôts”, c’est-à-dire la gabelle. C’est pourquoi tout le peuple se souleva et courut aux maisons des percepteurs de la gabelle : il les pilla et les tua. Et comme ledit peuple était sans armes, un des leurs les guida jusqu’au nouveau Châtelet où messire Bertrand du Gueslin, jadis connétable de France, avait fait mettre trois mille maillets plombés qu’il avait fait faire en vue d’une bataille contre les Anglais. Ils enfoncèrent les portes de la tour où étaient ces maillets, et c’est pourquoi on les appela les Maillotins. Ayant pris ces maillets, ils s’en allèrent par les rues de la ville en pillant les biens des officiers du roi et en tuant beaucoup.
(Buonaccorso Pitti)

Les Tuchins de Béziers (1381)
Dans presque tout le pays la vague ne cessait de s’en enfler au point que les membres des cours royales, les seigneurs temporels et les autres bonshommes du pays et des villes étaient en grand péril de mort, d’autant plus que les populaires des divers lieux criaient : « Tuons, tuons, tous les riches, faisons comme ceux de Montpellier et de Clermont ! »
« Craignant à juste titre, que si l’infâme insolence de ces populaires de Clermont n’était pas rigoureusement réprimée, le pire pourrait s’ensuivre... »
Le 8 septembre 1381, tandis que consuls et conseillers délibéraient sur les mesures à prendre pour accueillir le duc de Berry, des “gens de mauvais esprit” s’assemblèrent, enfoncèrent les portes de l’Hôtel de ville, et mirent le feu à la tour, brûlant plusieurs bourgeois ou les obligeant à sauter, et à s’écraser sur le sol. Puis ils se répandirent dans la ville, pillant et tuant.
(M. Wailet, Ph. Wolf et le seigneur de Clermont Déodat Guilhem)

LES GUÉRILLEROS DE LA FARCE-ATTRAPE

Pour venir en aide à un certain M. Husson, marchand de quatre saisons et père de huit enfants, qui venait d’être expulsé, Georges Cochon mobilisa quelques compagnons de son syndicat. Des maçons, des menuisiers, des charpentiers, des couvreurs. En grand secret, ils préparèrent les éléments d’une maison préfabriquée et s’entraînèrent à la monter dans les plus brefs délais. Une nuit, en l’espace de treize minutes, ils l’installèrent au beau milieu du Jardin des Tuileries. Puis ce furent la cour de la Chambre des Députés, l’Hôtel de Ville, la caserne du Château d’Eau, à l’assaut de laquelle Cochon partit à la tête de 15 000 fédérés, le fort de Montrouge, la Madeleine et jusqu’à la cour de la préfecture de police, sous les fenêtres mêmes de son mortel ennemi, le préfet Lapine.
Thierry Gandillot (Georges Cochon, le squatter magnifique, dans le Libération du 5/8/83)

La plèbe n’a pas d’armes pour affiner son rire jusqu’à le faire devenir instrument contre le sérieux des pasteurs qui doivent la conduire à la vie éternelle et la soustraire aux séductions du ventre, des pudenda, de la nourriture, de ses sordides désirs. Mais si un jour quelqu’un (...) amenait l’art du rire à une forme d’arme subtile, si la rhétorique de la conviction se voyait remplacée par la rhétorique de la dérision, si la topique de la patiente et salvatrice construction des images de la rédemption se voyait remplacée par la topique de l’impatiente démolition et du bouleversement de toutes les images les plus saintes et vénérables — oh ce jour-là toi aussi et toute ta science, Guillaume, vous serez mis en déroute !
Umberto Eco (Le Nom de la Rose, 1985)

Au bal des officiers de la cavalerie, des paysans enchaînés débarquent. Ils vont assister à un étonnant spectacle : ils ont fait envoyer parmi les cotillons un colis rempli d’abeilles en folie.
Yves Frémion (Les Orgasmes de l’histoire, 1980)

Imaginons que, chaque matin, les commerçants parisiens d’aujourd’hui, en quittant leur domicile, en ouvrant leur magasin, trouvent le numéro de leur maison modifié, la plaque de leur rue remplacée par celle de l’avenue voisine et qu’ils apprennent, par un écriteau fixé sur la devanture, la fusion de leur affaire avec un négoce d’un secteur totalement différent, par exemple le mariage d’une boucherie chevaline avec une teinturerie-pressing. Nous aurions une faible idée des surprises matinales des bourgeois du XIVe siècle.
Au cours de leurs équipées nocturnes, les écoliers qui se respectent vont décrocher les enseignes des boutiquiers et artisans et les assemblent les unes aux autres. Plus le rapprochement est saugrenu, plus ils se réjouissent (...).
Les petits facétieux ont plus d’un tour dans leur sac pour empêcher les trouble-fête d’approcher et de les prendre en flagrant délit. Ils répandent sur le sol une traînée de poudre le long de la rue où les hommes du guet sont sur le point de s’engager — ils connaissent tous les itinéraires possibles des rondes de nuit —, ils y mettent le feu dès que les sergents apparaissent et ils « prennent leur passe-temps à voir la bonne grâce que les gens du prévôt ont en s’enfuyant ». Du haut de la Montagne, ils ont acquis la technique pour faire dévaler de lourdes charges jusqu’à la Seine. « A l’heure que le guet monte par là, raconte un témoin, ils baillent le branle à un tombereau, le ruant de grande force en la vallée et ainsi mettent tout le pauvre guet par terre comme porcs. »

André Coutin (Huit siècles de violence au Quartier latin, 1969)

A propos du chansonnier d’actualité Henri Grégeois :
«  Un jour, notamment, pour mystifier un officier ministériel venu le saisir, il avait remplacé les meubles énumérés sur l’acte de saisie par des meubles de poupée. Ne pouvant instrumenter, le fâcheux n’avait même pas pu sauver la face en se retirant dignement, car ses chaussures étaient collées au sol sur lequel Grégeois avait si insidieusement répandu de la glu. »
Michel Herbert (La Chanson à Montmartre, 1967)

L’internationale du poil à gratter
(Alice Pleasance-Liddell, 1972)

Juger les juges, espionner les espionneurs, exécuter les exécuteurs, mystifier les mystificateurs, perquisitionner les perquisitionneurs, psychanalyser (sauvagement !) les psychanalyseurs, interner les interneurs, censurer les censeurs, exproprier les expropriateurs, percevoir les percepteurs, et ainsi de suite... la vieille tactique défensive du “coup pour coup” réactivée, généralisée et appliquée diablotinement à tous les domaines réprimés du vécu, pourrait vite rendre impraticable le métier d’oppresseur.
Révolutionnaires impatients du monde entier, faites voir la vie en noir-cafard à toutes les goules dirigeantes et à toutes les sociales-sangsues en devenant d’horribles petits sacripants ! Rebelles guillerets de tous les pays, plutôt que de vous rire des armes, armez donc votre rire !

Contre le théâtre
Octobre 1971, Québec. (...) Dans un théâtre du Québec où l’on joue "Sans attendre Godot", de Samuel Beckett, le rideau se baisse dix minutes après le début du spectacle lorsque Godot arrive réellement avec ses tartines et un litron de rouge.

Mars 1972, Bruxelles. A l’affiche du Palais des Beaux-Arts : "La ville dont le prince est un enfant", d’Henry de Montherlant, interprété par le Théâtre du Rideau. Sur scène, un curé confesse un lycéen dans une chambrette lorsqu’un jeune inconnu toque à la porte, entre et s’exclame avec conviction :
« — M’sieur ! M’sieur ! Le proviseur est malade ! Il dit : réalisez tout de suite vos désirs les plus insensés. Il ajoute : il faut balayer le spectacle car il n’a pour but que de médiatiser policièrement toute la branlée des rapports sociaux. Les premières cibles seront les avant-gardes culturelles. Mais les archaïsmes à la Montherlant ne seront pas pour autant épargnés. La preuve. Quant aux spectateurs de cette cornichonnerie, qu’ils retournent à leur misérable résignation quotidienne. La représentation est terminée. »
Et le “satyre du Rideau” de plonger dans la salle, dûment pourchassé, avant que de fondre dans la nuit.

Contre la TV
Janvier 1972, USA. Lauréat de “Phffft”, quiz télévisé célèbre aux States, le video-guerillero Aristide Beck accuse en direct Hal Gardner, le présentateur de l’émission, de lui avoir communiqué sous le manteau les bonnes réponses. Esclandre national. Gardner est mis à pied. “Phfffi” est supprimé. Et on ne réalise la fourberie d’Aristide que lorsque quelques jours plus tard celui-ci convie tout bonhommement les autres gagnants de radio-télé-jeux à entacher eux aussi à tort et à travers l’honneur des principaux anchormen en exercice, histoire de « faire la nique au spécialisme idiot sanctifié par les media, et de se bidonner à toute vapeur ». Gardner est réintégré dans ses fonctions, mais “Phffft”ne revoit pas le jour.
Comme quoi, le maniement offensif brindezingue de la calomnie ouvre des horizons tactiques insoupçonnés à la subversion.

Contre le cinéma
Avril 1970, Londres. Le metteur en scène luxembourgeois André Turdulle invite dans une salle privée de cent cinquante places de nombreuses personnalités à la première de son court métrage burlesque, "L’Arroseur arrosé" 1970. A l’instant le plus attendu du film, lorsque l’arroseur est aspergé par son propre tuyau, Turdulle, qui avait bien mijoté son coup, fait passer un authentique jet d’eau à travers un orifice percé dans l’écran et arrose perfidement la distinguée assemblée.

Contre les hauts fonctionnaires d’Etat
Septembre 1970, Pampelune. Dans le vif d’un festin de la haute cour militaire, un puissant laxatif est perfidement versé dans la sangria d’honneur inaugurant la rencontre. Et les sanisettes des lieux d’être bientôt brutalement assiégées dans la cohue la plus attristante.

A plusieurs reprises en 1971, USA. Le secrétaire américain à la Défense, Melvin R. Laird, entertainer numéro un de l’espionnage, est à son tour espionné vingt-quatre heures sur vingt-quatre par de têtus galopins, attifés à la Dick Tracy (limousines impressionnantes, chapeaux mous, imperméables et lunettes noires, flashes, longues vues...). Il en perd bientôt le sommeil et l’appétit, avoue-t-il.

Contre l’armée
1969, USA et RFA. (...) Dans une base militaire américaine, on remet à des centaines de marines des pantalons dont les jambes sont cousues entre elles ; dans une autre garnison, ce sont des fusils aux canons inexorablement bouchés qui sont distribués. En Allemagne, dans des casernes occupées par les forces belges ou US, des drapeaux nationaux sont détrônés par des pavillons pirates. Tous les officiers d’un cantonnement manquent, un matin, à l’appel ; les serrures de leurs quartiers ainsi que les diverses issues ont été méthodiquement cimentées. Une unité de blindés, réquisitionnée pour des manœuvres nocturnes, échoue dans des marécages, les clignotants balafrant une route barrée ayant été subtilisés. Un aumônier pousse un cri en plein office : le vin de messe a été supplanté par du sang authentique.

Automne 1970, Los Angeles. Grâce à une conjuration de bureaucrates antimilitaristes, près de dix mille bourgeois, choisis parmi les familles les plus aisées de la cité, trouvent dans leur boîte aux lettres un ordre officiel de marche pour le Vietnam.

Contre le racket hôtelier
En divers coins des USA. Une fausse notice de la direction est adressée matinalement à tous les pensionnaires de palaces :
« Notre établissement étant tenu de fermer ses portes pour cause de faillite, nous sommes contraints de vous prier d’avoir l’obligeance de dégager votre chambre aujourd’hui avant midi. Inutile de protester ou d’exiger des explications supplémentaires, nous sommes trop débordés par la situation pour avoir la possibilité d’y donner suite. Si les événements nous acculent à adopter si abruptement ces mesures, croyez bien que nous en sommes les premiers désolés. En guise de dédommagement, et pour que vous ne gardiez pas un souvenir trop déplaisant d’elle, la direction vous dispense de régler votre note d’hôtel, quel qu’en soit le montant. Votre courrier suivra à votre adresse courante. Croyez, M. ou Mme, en nos sincères regrets. »

Contre la police
Octobre1970, Lima. Ayant appris que des vaches, qui viennent de s’échapper de leur étable, provoquent des embouteillages inextricables à Miraflore, un radio-amateur porté sur la pasquinade ne peut résister à la tentation. Sur la longueur d’ondes des services de police, il lance un appel insidieux aux représentants de l’ordre du district, en imitant acceptablement la voix de leur supérieur principal qu’il sait être absent : « Veuillez vous dépêcher d’arrêter ces vaches et de les incarcérer ! »
Une heure plus tard environ, dix-neuf bovidés sont bouclés dans les geôles du commissariat central pour « entrave à la circulation
 ».

Octobre 1969, Stockholm. Des facétieux d’âge mûr, accoutrés en policiers, réveillent au crépuscule un banquier réputé et sa famille. Cautionnés par un mandat de perquisition bien entendu truqué, ils fouillent le domicile du sous-sol au grenier, mettant toute la maison sens dessus dessous avec une nonchalance iconoclaste : murs dégarnis, meubles renversés, frigidaire, bibliothèque et armoires saccagés, bouteilles de vieux vin vidées l’une après l’autre dans l’évier... Sous la menace de leurs armes, les pseudo-flics passent ensuite en revue l’anatomie intime des membres de la famille et de leur personnel. Le maître de céans, qui s’indigne, reçoit un douloureux coup de pied dans le tibia qui le fait choir sur le sol. Les canailles farfouillent alors dans ses papiers d’affaires et confisquent une bonne moitié d’entre eux qu’ils jugent suspects. Interrogé, ensuite, avec un nerf de boeuf, sur sa vie privée, le banquier avoue devant sa femme et ses enfants une liaison extra-conjugale. Après quoi, les inquisiteurs prennent le large en grommelant :
« Nous n’avons rien trouvé cette fois-ci mais ne vous réjouissez pas trop vite, nous reviendrons bientôt. »
Dix minutes plus tard, les larrons téléphonent au financier mal revenu encore de son calvaire pour lui dire :
« Tout ce que nous venons de faire chez toi, ordure, c’est exactement ce que tous les flics du monde font chaque jour chez des gens qui, souvent, ne peuvent même pas être soupçonnés, eux, de filouter qui que ce soit. »

Septembre 1971, San Francisco. De faux inspecteurs en civil font évacuer une perception, prétextant une alerte à la bombe. Puis, dès que l’immeuble est “vidangé”, ils incendient paisiblement tous les dossiers administratifs y séjournant.

Contre la religion
Octobre 1971, Paris. Pendant que le “directeur de conscience” attendu est appelé d’urgence à l’autre bout de la ville au chevet d’un de ses paroissiens mourants (...), un imposteur prend sa place dans un confessionnal et explique aux pécheurs qui s’y succèdent pourquoi la religion est bien l’opium du peuple. En guise de pénitence, il ordonne à chacun de ses visiteurs de céder sans manières à toutes ses tentations.

Contre les partis
Août 1969, Liège. (...) Principe du détournement de tracts : imiter le format et le style des communiqués d’organisations politiques spécifiques pour les discréditer le plus réalistement possible. Modèle historique : le tract signé par le PC belge, applaudissant l’invasion russe de la Tchécoslovaquie. Distribué à la sortie des grandes usines de Seraing, il invitait les travailleurs à un meeting de soutien aux forces d’intervention devant le local du parti. Le soir même, de violentes bagarres éclataient sur le quai de la Batte entre ouvriers indignés et militants communistes complètement dépassés en l’occurrence.

Contre les maisons de fous
Novembre 1971, Londres. Le directeur d’un asile psychiatrique est assailli chez lui par de faux infirmiers qui, après l’avoir introduit dans une camisole de force, lui font subir une douche glacée, puis le séquestrent jusqu’au clair de lune, en le menaçant de le traiter à l’électro-choc s’il ne mémorise pas, et ne leur récite pas sans erreur au bout du délai, tous les passages du code civil ayant trait aux collocations.

Contre le fisc
Septembre 1969, Paris. En l’espace d’une semaine, deux polyvalents retrouvent leurs belles voitures là où ils les ont parquées, certes, mais... emballées, en pièces détachées, dans un gros paquet.

Avril 1972, Bordeaux. Simultanément, les vingt-deux heures passées, trois contrôleurs des contributions se font contrôler à domicile par de singuliers ronds-de-cuir. Ces derniers, revolver à la main, viennent récolter l’“impôt sur la perception” voté la veille par le Front de Libération du Contribuable. Cette fois, le tribut ne s’élève qu’à 50 000 francs anciens, mais on annonce à nos fonctionnaires qu’il sera augmenté d’une somme identique chaque fois qu’ils taxeront un nouvel infortuné.

Contre le syndicalisme
Octobre 1970, banlieue de Londres. Surprise vespérale pour M. Frank Mannering, délégué syndical. A peine a-t-il pénétré dans son living-room qu’il se retrouve dans les WC. Affolé, il court dans la pièce voisine, un petit salon. Las, c’est encore dans un WC qu’il aboutit. Livide, il se retranche dans la cuisine. Mais c’est toujours dans un WC qu’il débouche. A moitié anéanti, il court jusqu’à sa chambre, ou plutôt son ex-chambre car elle s’est transformée, elle aussi, en WC. M. Mannering, en désespoir de cause, veut appeler Police Secours, mais là où devait se tapir le téléphone, il ne déniche qu’une chasse d’eau. Il ne reste plus alors au délégué syndical qu’à tourner de l’oeil pour fuir la cauchemardesque réalité dans un autre cauchemar. Le lendemain, un inspecteur de Scotland Yard découvre le pot aux roses : pour le châtier de sa collusion félone avec le patronat, des dockers en colère ont profité de ce que sa maison était isolée pour la piller de fond en comble, en chargeant tous ses meubles dans des camions, et en agençant narquoisement des cabinets désaffectés dans les pièces vides.

Juin 1971, Turin. Alors qu’un meeting anti-gauchiste se tient dans la grande salle de la maison syndicale de la ville, des turlupins font parvenir des tracts anarchisants à l’assistance par un canal jusqu’alors inédit dans l’histoire de la propagande : celui des propres défécations de leur récepteur. Effectivement, ce sont de larges nappes mobiles d’excréments qui propagent à travers l’immeuble les circulaires factieuses. D’excellents plaisants ont tout simplement déversé des kilos de levure dans les cuvettes des latrines du bâtiment, déclenchant ainsi une gigantesque éruption fécale. Et les flots merdiques, couverts de tracts, ont progressé impavidement dans les dédales syndicaux, prêts à affronter tous les Vladimir Ilitch de la contrée.
(Actuel)

AUTRES TOURS PENDABLES

Contre les banques
1971, France (“La Guérilla pour tous”). Une récente affaire (cambriolage en douceur de la banque Rothschild) nous a rappelé que personne d’autre que son titulaire (même un flic) n’a le droit d’ouvrir un coffre en banque. Louez-en donc un sous un faux nom et mettez-y un reste de poisson. Laissez fermenter le tout. L’odeur qui s’en dégage petit à petit oblige normalement la banque à fermer ses portes. A la place du poisson on peut mettre du fromage ou encore une bombe à retardement : il y a différentes façons de faire sauter une banque.

Contre l’enseignement tarte
Novembre 1968, Liège (“La Wallonie”). Vendredi matin, comme chaque vendredi, le professeur Marcel De Corte (dont les idées conservatrices sont bien connues) donnait son cours à l’université de Liège aux élèves de deuxième candidature de Philosophie et Lettres, lorsque deux mystérieux individus firent irruption dans l’auditoire. Tous deux étaient revêtus d’un tablier blanc, transportaient brosses, seaux, marteaux et sifflotaient "L’Internationale". Pendant que M. De Corte contemplait, interdit, les intrus, l’un d’eux monta sur la chaire et entreprit d’enfoncer un clou dans une paroi située juste derrière le professeur. Celui-ci s’exclama alors d’une voix forte : « N’abîmez pas le matériel universitaire. » A quoi l’un des perturbateurs réplique : « Le matériel universitaire aux ouvriers ! » M. De Corte empoigna alors son interlocuteur qui, se dégageant, brandit son seau au-dessus de la tête du professeur en disant :
« Faites votre travail d’intellectuel, si vous voulez, mais laissez-nous aussi faire le nôtre, parbleu ! » Sur ce, toute l’assemblée applaudit alors que l’inconnu commençait à déverser le contenu gluant de son seau sur le professeur. Se ressaisissant, celui-ci projeta en l’air le seau qui échoua sur le matériel pédagogique étalé sur le bureau avant de couler, en larges nappes, sur le sol. Tout en martelant rageusement de coups son agresseur, M. De Corte s’écria notamment : « Dehors, prolétaires, votre place n’est pas ici ! »

Contre la censure
10 mars 1969, Paris (“internationale situationniste”). A 19 heures, au moment même où commençait une “grève générale” d’avertissement soigneusement limitée à vingt-quatre heures par l’ensemble des bureaucraties syndicales, la statue de Charles Fourier était remise, place Clichy, à Paris, sur son socle, resté vide depuis que les nazis en avaient enlevé sa première version. En présence de cent badauds qui ne s’étonnèrent pas. Une plaque gravée à la base de la statue en disait l’origine : « En hommage à Charles Fourier, les barricadiers de la rue Gay-Lussac. » Jamais encore la technique du “détournement” n’avait touché un tel domaine. La statue, réplique exacte de la précédente, était en plâtre mais finement bronzée. A vue d’oeil, on la croyait vraie. Elle pesait quand même plus de cent kilos. La police s’avisa peu après de sa présence et laissa une garde autour d’elle durant toute la journée du lendemain. Elle fut enlevée à l’aube du surlendemain par les services techniques de la Préfecture. D’après un témoin, cité par France-Soir du 13, « huit jeunes gens d’une vingtaine d’années sont venus la déposer à l’aide de madriers. Une jolie performance si l’on sait qu’il n’a pas fallu moins de trente gardiens de l’ordre de la paix et une grue pour remettre le socle à nu. »

Contre l’argent et les tribunaux
1975, Copenhague (“Vrai Art Nouveau”). Soixante Pères Noël débarquent à Copenhague par bateau et traversent toute la ville en distribuant aux enfants du chocolat chaud et des tickets de bus gratuits pour être accompagnés dans leur odyssée. Avec outils et machines, il commencent à démanteler l’immeuble de la Cour de Justice des Travailleurs (qui arbitre les conflits du travail). Personne n’y croit et ils ont le temps, avant que la police n’intervienne, de faire un énorme trou dans la façade que l’on peut encore admirer aujourd’hui. Plus tard, ils occupent une usine qui devait fermer ses portes, l’aménagent pour la rouvrir avant d’en être chassés manu militari. La semaine se termine sur cette action, fort célèbre d’ailleurs : soixante-dix Pères Noël surgissent brusquement et magiquement dans un grand magasin style Samaritaine (ils s’étaient changés dans les toilettes) pour distribuer à tous les marchandises innombrables. Cette scène épique se termine par un méchant matraquage au milieu des cris hystériques des enfants.

LES JACQUERIES VAMPIRIQUES

«  Nous étions à la merci des instincts de la multitude égarée, violente et sanguinaire, déclare le révérend Henry Newcome.
— Si on n ‘arrête pas cette populace, elle va boire le sang de tous les vertueux, acquiesça Baxier
. »
Christopher Hill (Le Monde à l’envers, 1972, à propos des émeutes anti-enclôturales de 1659)

Un beau jour, ce dernier (Francisco Ferrer) reçut du type en question (l’anarchiste antisyndical Paraf-Javal) une lettre où il lui déclarait qu’il venait de trouver la solution exacte de la “question sociale” : qu’il serait heureux de l’en entretenir s’il voulait bien faire le voyage de Barcelone à Paris. Sans prendre le temps de refléchir, Ferrer prend le train, arrive à Paris, et file chez Paraf.
— La solution de la question sociale, pontifia Paraf c’est bien simple. Combien avez-vous de bourgeois en Espagne ?
— Je ne sais pas, dit Ferrer. Aux environs de tant.
— Combien d’ouvriers ?
— Je ne sais pas au juste. Mais environ tant.
— Alors ! C’est bien simple ! Vous avez plus d’ouvriers que de bourgeois. Que chaque ouvrier mange un bourgeois, et la question sociale sera résolue !

Jean Grave (Le Mouvement libertaire sous la Troisième République, 1930)

« Faisons ruisseler les entrailles des seigneurs aux doigts blancs ! »
(cantilène anonyme, c. 1899)

Oh ! les manants ! L’heure a sonné,
La brute enfin a raisonné,
La haine fait parler la force,
Oh ! les manants au poitrail nu
Notre jour est enfin venu,
Le chêne a fendu son écorce.

Oui, la haine a grincé dans l’air,
C’est comme un ciel lourd où l’éclair
Darde une flèche éblouissante ;
C’est un coup de pied dans les nids
Des parias et des bannis ;
C’est la révolte menaçante !

Le sang coule par les sentiers
Des villages, des bourgs entiers
Croulent dans un reflux de flamme,
Les drapeaux noirs flottent au vent,
Et tout se fond, tout fuit devant
L’âpre revanche qu’on acclame.

O vieille haine au regard clair,
Ronge les os, mâche la chair,
Fais litière des grugeurs d’hommes
Les oppresseurs sont aux abois,
Hurlons par les monts et les bois,
Bêtes féroces que nous sommes !

A coups de trique, à coups de poing
Tapons ; les maîtres ne sont point,
Eventrons châteaux et murailles.
Broyons les seigneurs aux doigts blancs,
Et par les accrocs de leur sang,
Faisons ruisseler leurs entrailles.

Et mordons à même, en vieux loups,
Nos ongles, durs comme des clous,
Se crisperont dans la chair fraîche,
Et buvons le sang à plein goulot,
Et qu’il mousse, qu’il coule à flot,
Sur nos langues à la peau sèche !

LES MARTINS-PÊCHEURS DU SABOTAGE

Quelques exemples de sabotage réalisés par les saboteurs : fermer l’eau des valves intermédiaires, laissant ainsi griller les électrodes des soudeuses électriques, bloquant l’atelier pendant plusieurs heures.
Bloquer les chaînes de montage à l’aide de tournevis.
Court-circuiter les ordinateurs, désorganisant ainsi tout le travail de la journée.
Attaques directes contre des chefs (jets d’objets ou une bonne raclée) et les ingénieurs particulièrement répressifs (...).
Une fois, nous sommes allés jusqu’à abattre un pylone de force électrique, privant une usine d’électricité pendant deux jours (dans la région de Valles), et aussi bien à saboter la conduite amenant l’eau dans une résidence d’un capitaliste.
Coordination des Groupes Autonomes d’Espagne

(Appels de la prison de Ségovie, 1980)

L’expérience clandestine, la subversion anonyme offrent à ceux qui craignent les “supérieurs” hiérarchiques — non par lâcheté mais parce qu’ils savent assez qu’un propriétaire d’autorité, si ridicule soit-elle, dispose de pouvoirs d’ennuis et de répression — l’occasion de reprendre assurance, de mesurer la duperie des rôles, de se découvrir comme subjectivité originale. (...) Nous sommes des milliers à découvrir, en confirmant nos propres possibilités, une révolution dont nous voulons goûter le plaisir au point d’en courir les risques.
Raoul Vaneigem (Terrorisme ou révolution, 1972)

Le mieux, c’est encore de verser une livre de sucre dans le réservoir de sa voiture quand il a le dos tourné, comme ça il ne peut pas venir fouiner autour de votre maison. De mon temps, on commençait toujours par sucrer l’essence des gardes avant une expédition. (...)
— Qu’est-ce que ça fait, le sucre ? demandai-je.
— Le diable m’emporte ! Ça gomme tous les cylindres, dit Charlie Kinch.
Il faut démonter tout le moteur pièce par pièce
après un traitement pareil »

Roald Dahl (Dany, le champion du monde, 1975)

Un bon révolutionnaire ne doit s’emporter que lorsque l’heure H est venue. Jusque-là combattons l’ennemi par les moyens fielleux et perfides dont nous disposons.
Boris Vian

Des boîtes d’essieux graissés à l’émeri au dévissage des tire-fonds, du truquage des jauges d’huile à l’incendie des garages, les communications par voie ferrée et par route offrent une prise énorme à l’action des passants malintentionnés.
Camille Rougeron (La Prochaine Guerre, 1948)

Le Sabotage (1897)
Pour en revenir au sabottage, les Anglais l’ont pigé chez les Écossais — car les Écossais sont cossards — et ils leur ont même emprunté son nom de baptême : le Go canny.
Dernièrement l’Union internationale des chargeurs de navires a lancé un manifeste prônant le sabottage, afin que les dockers se fichent à le pratiquer, car jusqu’ici, c’est surtout dans les mines et les tissages que les prolos anglais ont sabotté.
Voici le manifeste en question :
« Qu’est-ce que Go canny ?
« C’est un mot court et commode pour désigner une nouvelle tactique, employée par les ouvriers au lieu de la grève.
« Si deux Écossais marchent ensemble et que l’un court trop vite, l’autre dit : « Go canny », ce qui veut dire : « Marche doucement, à ton aise. »
« Si quelqu’un veut acheter un chapeau qui vaut cinq francs, il doit payer cinq francs. Mais s’il ne veut en payer que quatre, eh bien ! il en aura un de qualité inférieure. Le chapeau est une “marchandise”.
« Si quelqu’un veut acheter six chemises de deux francs chacune, il doit payer douze francs. S’il ne paie que dix, il n’aura que cinq chemises. La chemise est encore “une marchandise en vente sur le marché”.
« Si une ménagère veut acheter une pièce de boeuf qui vaut trois francs, il faut qu’elle les paye. Et si elle n’offre que deux francs, alors on lui donne de la mauvaise viande. Le boeuf est encore “une marchandise en vente sur le marché”.
« Eh bien, les patrons déclarent que le travail et l’adresse sont “des marchandises en vente sur le marché” — tout comme les chapeaux, les chemises et le boeuf.
« Parfait ! répondons-nous, nous vous prenons au mot.
« Si ce sont des “marchandises”, nous les vendrons tout comme le chapelier vend ses chapeaux, et le boucher sa viande. Pour de mauvais prix ils donnent de la mauvaise marchandise, et nous en ferons autant.
« Les patrons n’ont pas le droit de compter sur notre charité. S’ils refusent même de discuter nos demandes, eh bien ! nous pouvons mettre aux voix le Go canny — la tactique de “travaillons à la douce”, en attendant qu’on nous écoute. »
Donc, voilà le sabottage bien défini : à mauvaise paye, mauvais travail !
Ce qui serait chouette c’est que ce fourbi entre dans nos moeurs, afin que les patrons se fourrent bien dans le siphon que, désormais, cette tuile est constamment prête à leur tomber sur la hure.
Emile Pouget

Le Merdier chez Renault (1975)
Notre plus beau coup, le coup royal, a été d’intervertir des étiquettes sur des caisses de documents destinés à un client à l’étranger. Les caisses prévues pour le siège social sont allées à l’usine (distante de 1.500 km) et réciproquement. Le service des postes du pays (tiers-monde) a fait le reste : l’ensemble de l’envoi s’est perdu. Tout gain pour nous : il a fallu refaire trois mois de travail déjà connu. Avec toutes les équivoques et le merdier que ça suppose. (...)
Un truc inoffensif : vous êtes seul dans le bureau du chef et vous intervertissez le contenu de la corbeille “arrivée” avec celle du “départ” ; ou plus astucieusement encore, déplacez seulement un papier d’une corbeille à l’autre. Revenez à votre place et jouissez du spectacle. (...)
On peut aussi semer une belle merde avec quelques déplacements de virgule sur des documents importants, vite fait.
C.B. de Montrouge (Libération)

Comment déglinguer une pointeuse...? (1979)
Dans les vieilles horloges-pointeuses, solides et rodées, j’utilise plutôt du sable épais additionné d’encre pour saloper les cartes.
Ailleurs, au stade électronique, une petite giclée d’acide quotidienne fait très bien l’affaire.
Ce sont là des méthodes définitives mais parfois difficiles à réaliser. D’aucuns bricolent ou fauchent un splendide panneau “Hors d’usage” ou “En panne” qu’ils collent sur la pointeuse. D’autres préfèrent arracher les noms, intervertir les cartes de pointage ou simplement les anéantir. La sortie est amusante.
Vrai Art Nouveau

...et un porte-avions ? (21 novembre 1972)
Entre le 7 juin et le 16 octobre derniers, les enquêteurs de la marine américaine ont relevé au moins une vingtaine d’actes de sabotage à bord du porte-avions “Ranger”, rapporte, lundi, le Los Angeles Times.
Le plus grave de ces actes — la destruction de l’engrenage réducteur du moteur numéro 4 qui a amené l’arrestation et la mise en accusation d’un jeune matelot de 21 ans, Denis Chenoweth — a provoqué l’immobilisation du navire pendant quatre mois dans le port d’Alameda, dans la baie de San Francisco. (...)
Chenoweth est passible de trente ans de prison pour avoir laissé tomber dans l’engrenage deux gros écrous et un racloir à peinture.
La Meuse

Un peu de limaille de fer dans la machinerie des brimades quotidiennes (1972)
Recette pour l’agrément des employés et des fonctionnaires subalternes (banques, perception d’impôts, assurances, ministères, divisions administratives, ...) : destruction de dossiers et d’archives, blocage des transmissions, complication du travail des chefs, incendie de locaux assorti de la critique des secteurs parasitaires, détournements de fonds à la faveur des grèves sauvages, autodéfense contre toute brimade, etc.
Recette pour le plaisir des médecins : dénoncer les asiles et provoquer leur destruction, libérer les détenus, encourager l’absentéisme, expliquer le rôle et la fonction du médecin dans le système dominant, préparer la liquidation de la médecine comme spécialisation, etc.
Recette pour la satisfaction des avocats : favoriser l’évasion des prisonniers et la destruction des établissements pénitentiaires ou de “redressement”, vulgariser les méthodes policières et les moyens d’y répondre, incendier les greffes et les prétoires, préparer la mise en accusation des juges et des procureurs, répandre des libelles contre la marchandise judiciaire, etc.
Recette pour la sauvegarde des ingénieurs techniciens : préparer le détournement de la production lors de l’occupation de l’usine, expliquer le fonctionnement et le disfonctionnement du secteur industriel prioritaire, saboter la transmission des ordres, montrer le ridicule objectif des chefs, apporter toute aide technique nécessaire aux grévistes sauvages, etc.
Recette pour le divertissement des lycéens, lycéennes et professeurs : rendre la survie impossible aux détenteurs d’autorité, détourner l’équipement technique au profit de la diffusion de la théorie radicale, aider à la libération des enfants et étudier le dépassement possible de l’enfance dans l’autogestion généralisée, détruire les locaux construits comme des prisons et des centres de drogue idéologique, ridiculiser objectivement les associations de parents, inventer des techniques d’autodéfense, préparer le réinvestissement de la culture dans la théorie radicale, découvrir la passion de l’amour et la pratiquer dans la perspective fouriériste de l’harmonisation sociale, etc.
Recette pour la jubilation des techniciens des circuits de communication (des gens que privilégie particulièrement la richesse de l’équipement matériel mis en oeuvre par la réduction de la culture au spectacle) : interventions pirates à la radio et à la télévision, en direct ou par bandes magnétiques et films interposés, annotations des linotypistes dans les livres et les journaux qu’ils impriment, etc.
Que chaque profession découvre ainsi ce qui hâtera sa fin chaque fois qu’un travailleur découvre comment il peut détruire tout ce qui s’approprie de lui, pour s’approprier de tout ce qui lui permet de se construire.
Raoul Vaneigem (Terrorisme ou Révolution)

Fichiers vérolés (1975)
On peut discrètement lancer de la limaille de fer, très fine, dans les armoires des unités centrales ou périphériques. Celles-ci se collent sur les circuits électro-magnétiques et les dérèglent durablement.
Une autre solution est de se balader avec un électro-aimant dans la poche près de l’unité centrale, des unités de disques ou de bandes ; une pile de 4,5 volts dont les pôles sont reliés par un fil de bobine traversé par un petit aimant suffit. Les disques et les bandes magnétiques risquent alors d’avoir quelques perturbations. (...)
Il doit être possible de fixer des aimants un peu partout, mais cela risque de se voir si on cherche un peu. Ces deux premières suggestions ont le mérite de ne laisser aucune trace physique et lorsqu’un fichier est “vérolé” on s’amuse alors beaucoup !

DES IDÉES PLUS SIMPLES !

Un bon programmateur connaissant l’Assembleur (pour les machines IBM) et l’IOCS (?) peut accéder à des informations en principe verrouillées par IBM, par exemple celles qui protègent le lecteur et l’écriture d’un fichier-disque et modifier alors une partie du contenu sans que l’on s’en aperçoive.
Un truc plus sioux est d’accéder au disque supportant le système et de modifier une des routines d’entrée-sortie en programmant une erreur apparemment aléatoire (éliminer un enregistrement sur 10 ou 100 chaque fois, par exemple, que le total des chiffres composant la date du jour égale un nombre donné).
Très difficile à réaliser mais possible. De plus, pratiquement impossible à déceler, car il risque de se passer plusieurs semaines avant qu’on s’aperçoive des effets.
Un dernier conseil à l’usage des non-informaticiens mais qui utilisent les bordereaux destinés à un traitement informatique : faites systématiquement des erreurs (qui devront en apparence être involontaires...), perdez des données de temps en temps, multipliez vos envois, ne payez que par petites sommes.
Il faut savoir que le gros problème de tous les fichiers n’est pas de le constituer, mais de le mettre à jour, c’est-à-dire d’effectuer le remplacement des données qui changent (ex : adresse, situation familiale...). En boycottant le niveau de la saisie des données, on peut très vite rendre un fichier inexploitable.
Vrai Art Nouveau

Recette du magasin flambé (1973)
Préparation : 1 minute. Cuisson : 3-4 h.
1 l d’essence, 1 l d’acide sulfurique, 1 livre de désherbant, des petites boîtes d’allumettes et des tubes à essai (voir France Soir 24-25-26/1/74).
1. Verser dans une éprouvette (15-20 cm de hauteur) 3/4 d’essence pour 1/4 d’acide sans remplir à ras bord. Mettre un papier d’emballage pour boucher. Remplir une petite boîte d’allumettes de chlorate et percer un trou assez grand pour y faire tenir l’éprouvette.
2. Renverser le tout. L’acide perçant le papier au bout d’une ou deux minutes environ entre en contact avec le chlorate et enflamme l’essence. Placer la préparation dans un rayon désert et rempli de produits inflammables.
L’inconvénient des bombes et des grenades est d’être trop souvent “impartiales”, c’est-à-dire de détruire le lanceur et la cible tout à la fois. Cette préparation est par contre inoffensive pour celui qui s’en sert. De plus, le retardement permet de se tirer facilement. Enfin, dans les magasins sans étages (supermarchés), elle permet aux “consommateurs” de s’en sortir mais pas à la marchandise.
Ce qu’on ne peut détruire de cette façon, on peut le faire sauter avec des explosifs qu’on trouve dans les mines, les carrières ou sur certains chantiers.
La Guérilla pour tous

LES RÉVOLTES ESPATROUILLANTES

Un de moins ! Un patron boulanger de Tarbes se chamaillait ces jours derniers avec un de ses ouvriers nommé Lacaze, un zigue de vingt ans. Emmerdé par son singe, l’ouvrier lui a sauté à la gueule et lui a tellement serré le ki-ki que le patron en est mort. Ça prouve, nom de Dieu, qu’il n y a pas besoin de chercher midi à quatorze heures — la bonne volonté suffit.
Emile Pouget (dans Le Père Peinard du 22/12/1889)

Camarades, nous n’avons plus de journaux. Ceux qui les faisaient sont en prison ou en exil. Nous ne pouvons parler, nous ne pouvons penser. Le temps d’écrire est passé. Il nous reste encore nos couteaux, nos revolvers et du poison, sans compter la dynamite.
(Octave ?) Chambon (d’après Le Petit Journal du 10/8/1894)

Le 19 février 1894, la même lettre parvint au commissariat du faubourg Saint-Martin et à celui de la rue Saint-Jacques :
« J’ai décidé de me suicider. Qu’on n’accuse personne de ma mort. » Signées toutes deux Etienne Rabardy, mais avec deux adresses différentes, adresses d’hôtels meublés, où la police se rendit aussitôt. Les portes étaient fermées à clé. « Au nom de la loi, ouvrez ! » (Les portes sont enfoncées. Boum !)

Georges Blond (La Grande Armée du drapeau noir, 1972)

Je me vengerai comme je pourrai, n’ayant pas les moyens de faire un grand coup, comme le sublime compagnon Ravachol. Mon arme choisie sera mon outil de travail ; mais qu’importe ? Ce sera encore une délicatesse que j’apporterai en crevant un bourgeois avec l’arme qui m’aura servi à produire ce que celui-ci consomme à mes dépens.
Léon Léhautier (Lazagne, 12/11/1893)

Les Pièges à condés
Deux policiers en voiture de patrouille répondent à l’appel d’une vieille dame. Quand ils sortent de leur véhicule, devant la maison d’où émanait l’appel à l’aide, ils se font descendre de plusieurs balles dans le dos. Deux autres policiers en auto-patrouille prennent en chasse une voiture en infraction au règlement de la circulation. Arrivés à la hauteur du véhicule en infraction, ils se font mitrailler par un de ses occupants. Bref, en moins d’une semaine, les policiers new yorkais sont victimes de cinq attaques armées.
New York, 1970 (La Libre Belgique)

Siège social
Depuis trop longtemps, le Sicilien de Seraing, 69 ans, obtenait la même réponse de l’employé du consulat d’Italie auprès de qui il se renseignait sur sa demande de pension : « Toujours rien ». Le Sicilien a vu rouge, s’est emparé d’une chaise qu’il a abattue sur le crâne de l’employé (deux points de suture) avant de sortir, très digne.
Belgique, 7 mai 1975 (La Lanterne)

Pape à frire
Épidémie d’attentats anarchistes pendant la visite du pape :
 Un incendie d’origine criminelle a ravagé dimanche matin les bureaux de l’hebdomadaire religieux "La Croix du Midi" à Toulouse. D’autre part, les policiers du SRPJ ont arrêté deux militants anarchistes qui s’apprêtaient à mettre le feu à la cathédrale Saint-Etienne avec de l’essence au chlorate de potassium et à la colle épurée.
Au même moment, toujours à Toulouse, des inconnus ouvraient le feu sur l’imprimerie de l’Institut Catholique en laissant un message derrière eux :
« Demain le pape, pan-pan-pan-pan ».
 A Lourdes même, sur le chemin de croix, la statue en bronze de Ponce Pilate, haute de deux mètres, a volé en éclats. La paternité de l’explosion a été revendiquée peu après par le groupe “Arrêt Curés” : « Nous revendiquons l’attentat à Lourdes à l’occasion de la venue du PDG de la multinationale Vatican en visite à la SARL Soubirous. D’autres actions anti-soutanes auront lieu ce week-end. Alea jacta est. »
Toulouse et Lourdes, 16 juin 1983 (La Lanterne)

Cela ne s’était jamais vu lors des vingt-cinq précédents voyages que JeanPaul II a effectués jusqu’à présent à l’étranger : sa tête a été mise à prix aux Pays-bas, où il arrive ce matin, ainsi qu’en Belgique, où il achèvera sa visite pastorale aux trois pays du Benelux. Les affiches représentent le visage du Saint Père cerclé des traits rouges d’une cible de tir et offrent, à Amsterdam, une prime de 15 000 florins à qui abattra ce « membre d’une organisation criminelle et fascistoïde » (il s’agit de l’Église catholique) « coupable depuis des siècles de tortures, d’exactions contre les pauvres et de persécutions contre les Juifs. »
Amsterdam, 19 avril 1985 (Le Monde)

Voie d’eau à la maison Poulaga
Arrêté pour avoir mis le feu à un édifice public, un jeune Hollandais a changé de spécialité en cellule : il a arraché les tuyauteries d’amenées d’eau du commissariat.
Bilan : trois étages inondés, quatre plafonds effondrés.
Pays-bas, 28 novembre 1975 (La Meuse)

« Infectons le vin de messe ! »
Acide chlorhydrique et vin de messe : ce nouveau mélange n’a pas réussi à deux évêques et trois prêtres ouest-allemands victimes dernièrement à Dort¬mund d’un début d’empoisonnement après avoir absorbé ce breuvage pendant un office. L’un des ecclésiastiques se trouve encore à l’hôpital et a dû être soumis à des lavages d’estomac intensifs.
RFA, 10 mai 1977 (La Meuse)

« Fichons à cul les ordinateurs barbouzes !... »
Les groupes “communistes combattants italiens” partent en guerre contre l’informatique : après deux ou trois timides tentatives, ils ont réussi, dimanche à l’aube, un de leurs plus beaux coups : la destruction des ordinateurs de la direction générale de la motorisation civile, concentrés dans un local à la périphérie de Rome. Les appareils électroniques chargés de mémoriser les permis de conduire et de circulation de tous les véhicules civils qui sillonnent la péninsule ont fondu sous les flammes, réduisant leur mémoire à néant. Impossible pour le moment de chiffrer les dégâts mais les experts avancent d’ores et déjà des sommes qui se montent à des milliards de lires.
Rome, 5 décembre 1978 (Libération)

« ... mais aussi les radars you-you !. »
Un inconnu a mis hors service à coups de carabine le plus important centre de contrôle radar en RFA, dissimulé près de l’autoroute Cologne-Francfort. Quelque 60.000 personnes par an sont victimes des caméras du centre Elzer Berg qui contrôlent la vitesse des automobilistes, limitée à 100 km/heure sur 1,5 kilomètre de l’autoroute. _ Visiblement motivé par la vengeance, le malfaiteur a tiré vingt-cinq balles contre les deux caméras qui ont été complètement détruites.
Les dégâts s’élèvent à dix millions de FB.
Bonn, octobre 1982 (La Lanterne)

« Atomisons les pougnassons pro-nucléaires ! »
Un attentat singulier, inédit, et qui ouvre des perspectives assez effrayantes vient d’être commis à La Hague, près de Cherbourg. Les pièces métalliques hautement radioactives avaient été dissimulées sous le siège de la voiture d’un cadre de l’usine de retraitement des déchets nucléaires de l’endroit. Un acte de vengeance atomique qui laisse loin derrière lui tous les moyens pour tuer.
Normandie, 27 avril 1979 (Le Soir)

« Allons faire un tour de promenade chez les expropriateurs ! »
Sous le prétexte de livrer un bouquet de fleurs, cinq personnes ont sonné hier matin, peu avant 10h, à l’appartement du directeur de l’urbanisme de la ville de Paris, Pierre-Yves Ligen, dans le quatorzième arrondissement. Introduites par la femme de ménage, elles ont alors bombé des slogans sur les murs, sur la table ronde en marbre, sur les portes des placards, le long de l’escalier qui mène à la chambre, sur la tenture du salon et dans la chambre de la petite Ligen. « Espace libéré », « Guerre aux expropriations », ou encore « Non à la déportation », tels sont les messages qu’ont laissés les visiteurs pour protester contre les expulsions de squatters. Ils ont ensuite coupé le fil du téléphone et enfermé les occupantes de l’appartement à clé après avoir peint une dernière inscription sur la porte d’entrée : « Appart’ exproprié ».
Dans un communiqué signé “Honneur de la Racaille”, les auteurs expliquent qu’« aujourd’hui, urbanistes, architectes, promoteurs et politiciens accélèrent le processus de déportation de la force de travail dans les stalags de la banlieue morne en vidant notamment les squats pour satisfaire une politique du logement au profit des riches. (...) Nous sommes venus tirer les oreilles à l’une de ces crapules. Nous invitons tous ceux qui veulent résister à l’urbanisme de maintien de l’ordre à imiter notre exemple. »
Paris, 26 octobre 1982 (Libération)

Tétons armés
Une femme enfermée dans une cellule du commissariat de police de Nuremberg est parvenue à mettre en fuite deux agents de police en se servant d’une arme éminemment féminine.
Dénudant brusquement un sein, elle « le braqua sur les fonctionnaires et les aspergea de lait maternel », lit-on dans le rapport de police. Non préparés à une agression aussi imprévue, les deux agents n’ont vu d’autre issue que la fuite.
Nuremberg, 1970 (Le Jour)

Terrorisme posthume
Mineur de 55 ans, Jean Pica habitait un appartement de Beaurecueil (Bouches-du-Rhône). Il ne l’entretenait pas. Le logement était devenu un véritable taudis. De plus, Pica ne payait pas son loyer. Aussi la propriétaire décida de le faire expulser. Pica, en effet, avait été prévenu au début de la semaine. Il devait partir avant la fin du mois. Persuadé que le maire de la commune, M. Julien Gautier, était à l’origine de la décision, jeudi, Pica prit un revolver et tira sur Gautier, le blessant grièvement. Ensuite, il se suicida.
Le lendemain, la propriétaire, accompagnée de deux gendarmes et d’un serrurier, voulurent pénétrer dans l’appartement. A peine le serrurier avait-il ouvert la porte qu’une violente explosion eut lieu. Les deux gendarmes et la propriétaire furent tués sur le coup. Le corps du serrurier ne fut retrouvé que quelques heures plus tard dans les décombres. La maison est totalement détruite.
Marseille, 13 novembre 1977 (La Meuse)

Jean Pica aura laissé une vengeance posthume “en épisodes” diaboliquement orchestrée. Avant de disparaître, il avait piégé également son cyclomoteur pour que l’utilisateur possible saute sur l’engin.
Marseille, 23 novembre. 1977 (Le Soir)

Crotte crotte codak
Deux Irlandais ont semé la panique à la chambre des Communes en lançant des sacs de crottin de cheval sur les députés du haut de la galerie du public.
Presque tous les parlementaires ont réussi à échapper aux projectiles, mais M. Denis Skinner a été touché à la tête.
Le député écossais Tam Dalyell, qui était debout pour prendre la parole, a poursuivi son allocution, remarquant avec flegme : « Si je me rasseyais, ce serait dans les saletés. »
Irlande, 10 juillet 1978 (La Lanterne)

Comment asseoir la magistrature
Le juge O’Regan de la Cour Suprême néo-zélandaise de Wellington a perdu sa sérénité coutumière lorsqu’il s’est assis pour présider un procès. Il lâcha un gros mot qu’on n’entend jamais dans le prétoire. Et pour cause !... Trois longues aiguilles d’acier avaient été plantées dans son fauteuil. La police recherche toujours le coupable.
Nouvelle-Zélande, 15 décembre 1976 (Le Soir)

Histoires belges
Du café empoisonné servi par un prisonnier à deux gendarmes. Liège, 14 juin 1979 (Le Soir)
« J’aurais tiré sur n’importe qui en uniforme », déclare le soldat belge meurtrier de deux policiers allemands.
Arnberg, 1er août 1979 (La Libre Belgique)
Le clochard à ses juges : « Je suis méchant et je n’aime pas travailler. » Bruxelles, 7 août 1979 (La Dernière Heure)
Trois mois de prison (sursis) pour Victoria (63 ans) et sa fille Gilberte (43 ans) qui avaient vidé un seau de soude caustique sur l’échevin qui voulait faire empierrer leur chemin. Mons, 29 novembre 1973 (La Meuse)
Le boucher qui a abattu par derrière l’huissier venu saisir : « Si j’avais eu une mitraillette, je l’aurais transformé en passoire... Pas pour le tuer... simplement pour lui faire mal. » Chênée, 18 mars 1972 (La Lanterne)
Quand les gendarmes étaient venus chez elle, Anna avait pris une pioche et avait démoli leur camionnette. Ensuite, elle s’était troussée. « Il faut le faire », a dit le juge. Familleureux, 15 septembre 1972 (Le Jour)
« Je n’ai rien contre les prêtres quand ils restent chez eux », a expliqué l’Italien qui a poignardé le chanoine Heyen en plein centre de Liège. Liège, 1969 (La Métropole)

TRACTS SACCAGEURS

Le travail ne rend pas beau.
Honoré de Balzac

Les lâches seuls travaillent.
(Slogan des grévistes de l’usine de Dion, Puteaux — 1906)

Je veux tout, tout de suite.
Jean Anouilh (Antigone, 1944)

Qu’importe que la conscience soit vivante si le bras est mort.
Alfred de Musset (Lorenzaccio, 1834)

Urinez dans les urnes !
Maurice Blanchard (1953)

Tout ce qui vous écoeure sur votre passage, détruisez-le !
(Tract du Quartier général de Rebelles du Hasch, Berlin, 1969).

Tuez vos chefs et vos officiers !
(Manifeste du Comité central du Parti Communiste de San Salvador, 1932)

Quand vous trouvez par terre un CRS blessé, achevez-le !
(Graffiti de mai 68)

Les soldats de l’armée ennemie appartiennent à la classe ouvrière, et cela nous incite à les convier à passer dans le camp de la révolution. Pour leur faire connaître notre vœu, nous rédigeons un tract. Après de longues réflexions, nous parvenons à trouver un moyen pour le leur faire parvenir qui nous paraît excellent : on prépare un bidon plein de tracts, avec une certaine quantité de dynamite commandée par une mèche de dimension bien calculée. On attache ce bidon sur un âne, convenablement bâté, et dirigé vers le front ennemi. Tout est mijoté de manière à ce qu’à l’arrivée de notre “émissaire” aux positions ennemies, le bidon fasse explosion et distribue nos tracts aux soldats (...). Mais au milieu du trajet, nôtre âne fait demi-tour et s’en retourne vers nous, si bien que le bidon éclate non loin de l’endroit où nous nous trouvons. _ Cette triste expérience nous oblige à renoncer à la propagande parmi les soldats ennemis.
Un combattant du front de Campomanes (1934, in L’insurrection des Asturies, de Manuel Gossi)

Coup pour coup
Dans les luttes, une violence nouvelle apparaît :
- A Saint-Dié, les ouvriers de l’infâme Boussac ont montré à tous qu’un député, surtout s’il est UDR, ça peut se lyncher.
- A Lavai, les ouvriers séquestrent durant six heures leurs patrons.
- Dans le Maine-et-Loire, un peu partout se lisent des inscriptions menaçantes contre les gros, des clôtures sont arrachées, des abreuvoirs, appartenant à des cumulards, pollués avec du mazout, 600 pieds de vigne d’un gros négociant en vins sont sectionnés.
- A Lyon, des petits commerçants s’emparent d’un flic du fisc et, renouant avec les traditions de la Résistance, ils l’abandonnent nu et ligoté dans une forêt.
Partout, le sens de cette violence nouvelle est semblable :
Pour chaque misère, chaque humiliation imposées, il faut faire payer en nature. Coup pour coup. (...)
- A Citroën, des partisans attaquent avec des bouteilles incendiaires le parc des voitures de luxe ; quinze voitures totalement hors d’usage, deux très endommagées ; 30 millions de dégâts pour Bercot.
- A Caterpillar, ce sont deux bulldozers qui sont mis hors service.
- A la SEB, deux bateaux coulés ; là aussi, une trentaine de millions perdus pour les patrons. (...)
Il faut frapper les oppresseurs dans les hochets de leur luxe, dans leur or, et il faut aussi désormais les écorcher comme des porcs qu’ils sont.
Dans la soirée du 22 octobre, ouvertement, casqués, armés de barres et de cocktails, cinquante jeunes partisans attaquent,au coeur du dispositif policier, des cars de porcs des Brigades d’intervention ; quatre sont grièvement blessés, l’un qui a reçu le portail dans le groin, flanche comme une résine.
Cette action a montré la voie.
(France, 1970)

Contre le capital, lutte criminelle
Les détenus en révolte ne prétendent à rien de moins qu’à l’abolition de la prison et exigent la liberté pour les actes qu’ils ont commis.
Ils n’ont commis aucun délit.
Le vol, le braquage, les déprédations, les pillages sont de bonnes choses en ce sens qu’elles constituent l’instrument que le prolétariat adopte pour exproprier les expropriateurs.
Ce n’est pas par hasard si la révolte éclate dans les prisons au moment où reprend la lutte contre le travail à la Fiat de Mirafiori, prison quotidienne de 60 000 prolétaires ; les uns comme les autres refusent leur statut d’esclave imposé par le travail, la consommation forcenée, et la non-vie organisée comme seule et unique forme de survie.
Ça suffit ! Nous autres prolétaires nous n’avons pas à rester inertes devant cet état de choses, nous devons réagir violemment, pillant et nous appropriant tout ce qui peut nous servir et aboutir à la négation de cet État. Détruisons tout concept de bien ou de mal, laissons à la bourgeoisie son puant moralisme :
Devenons tous criminels ; il n’y a pas d’autres moyens pour se montrer vraiment solidaires des camarades emprisonnés ; et cela pas seulement en intensifiant notre activité anti-sociale, pas seulement en la répandant vers d’autres — il est absurde que les étudiants achètent les livres quand il est possible de les voler, que les masses payent des marchandises quand il est possible de piller les supermarchés — mais en la rendant réellement révolutionnaire et donc bien collective pour la destruction de tous ceux qui veulent nous foutre en taule, pour la fermeture des écoles, des familles, des usines, de tout autre système ou n’importe quelle autre putasserie.
Les détenus ne veulent pas autogérer leurs taules, comme les prolétaires ne veulent pas autogérer cette société de merde, mais la détruire : Tous, nous voulons vivre une liberté absolue que l’on ne peut arracher que par une révolution violente et armée.
Organizzazione Consigliare (Turin, 1969)

On en tuera jamais assez !!!
On en tuera jamais assez, disait un général versaillais commandant les massacres de 71 sur les Parisiens vaincus.
Dupuy comme tout bon bourgeois avait la même pensée en dirigeant les assommades de la semaine dernière.
Ces honnêtes et modérés sont féroces lorsqu’ils voient leurs privilèges menacés.
On en tuera jamais assez, dites-vous ? Eh bien soit ! Tant mieux !
Que la situation soit bien tranchée ; que le travailleur comprenne enfin à qui il a affaire ; la férocité de la classe dirigeante a tué chez nous la pitié et la sensiblerie.
Nous nous rappelons ce qu’a coûté de sang le règne du capital, et, à notre tour, disons :
Nous n’en tuerons jamais assez !
N’écoutons pas ces fumistes élus qui viennent prêcher le CALME lorsqu’on nous assomme, c’est-à-dire de mettre les mains dans nos poches afin que la police puisse nous frapper à son aise.
A la force répondons par la force.
Ces scélérats osent encore nous parler de Fête ?
Croient-ils que nous avons le coeur à danser sur les Cadavres des Nôtres ?
Ils voudraient bien voir la plèbe s’étourdir pour oublier sa misère et son esclavage, mais il n’en sera pas ainsi, non seulement nous ne pavoiserons pas, mais nous arracherons tout le décor officiel.
Nous ne ferons fête que le jour de la Révolution sociale, où, enfin heureux et libres, on dansera sur les ruines fumantes de la Société capitaliste et gouvernante.
Alors en Anarchie ce sera la Fête du Bonheur !!!
(Le groupe La Jacquerie, France, 1893)

L’incendie du vieux monde
L’anéantissement des écoles prévu au projet révolutionnaire passe par l’incendie volontaire et la liquidation des maîtres. Quand la révolte devient une force matérielle les écoles brûlent leurs suppôts avec. Les profs du CES Edouard Pailleron ont subi leur sort historique.
Ces actes sont incompréhensibles à la fausse conscience de l’impalbable et en réalité inexistante opinion publique. Elle attribue la mort de vingt élèves à P. et M. alors qu’il ne s’agit que d’un des nombreux crimes crapuleux de l’idéologie. La véritable cause de leur mort est dans la violence première de l’État. Finissons-en avec la dangereuse existence des Écoles.
(Paris, 1977)

« Vive les incendiaires de la rue Edouard Pailleron (le regretté auteur du "Monde où l’on s’ennuie") ! Vive le vote des enfants ! »
Marcel Mariën (La Licorne à Cinq Pattes, 1987)

Petits enfants...
Petits Enfants,
― Saint Nicolas et le Père Noël n’existent pas. Ce sont vos parents ou d’autres grandes personnes qui se déguisent en Saint Nicolas et en Père Noël, et qui vous donnent des cadeaux si vous êtes bien sages. Accusez tout à l’heure vos parents de se faire passer pour Saint Nicolas ou le Père Noël. Ils devront avouer que c’est vrai et qu’ils vous ont toujours menti.
Si Saint Nicolas et le Père Noël n’existent pas, le petit Jésus non plus. C’est encore un vilain mensonge que vous font les grandes personnes. C’est pourtant mal de mentir. Grondez les grandes personnes qui vous mentent ! Tirez-leur les oreilles !
― Vos parents et vos professeurs vous disent qu’il faut être bien sage et bien obéissant. C’est idiot de dire ça. Car les gens sages et obéissants sont toujours bêtes et chiants. Voulez-vous aussi devenir bêtes et chiants ? Non ? Alors, ne soyez jamais sages et n’obéissez jamais à personne ! Faites seulement tout ce que vous avez envie de faire : jouez tout le temps ! amusez-vous ! goinfrez-vous ! faites des farces ! rigolez ! Et si quelqu’un vous enquiquine parce que vous faites tout ce que vous avez envie de faire, fâchez-vous sur lui et insultez-le !
― Vos parents et vos professeurs vous disent qu’il faut bien étudier et avoir de bonnes notes. C’est faux. Étudier ne sert à rien. Quand on est un bon élève et un frotte-manche, on devient toujours une andouille. Les bons élèves sont des andouilles. Moquez-vous d’eux ! Faites-leur des crocs-en-jambe ! Lancez-leur des billes ou des encriers sur la tronche ! Et s’ils vous dénoncent au maître, flanquez-leur une raclée.
Si vos parents et vos professeurs vous frappent, frappez-les aussi. Il ne faut jamais se laisser faire. Y a que les lâches qui se laissent faire. Quand une grande personne vous fesse ou vous gifle, donnez-lui des coups de pied sur le tibia ou dans le bas-ventre, ou tapez-lui sur les doigts, avec un marteau. Ça lui apprendra à vous faire mal. Faites bobo à tous ceux qui veulent vous faire bobo !
― Vous n’êtes pas assez gloutons. Soyez beaucoup plus gloutons encore. Mangez tout ce qui vous fait plaisir. Exigez tout le temps des gâteaux, des jujubes, du chocolat, de la crème glacée, des grosses tartes. Et si on ne veut pas vous en donner à tout bout de champ, volez-les ! Entrez dans les pâtisseries et enfuyez-vous avec des bobonnes ! Et si quelqu’un vous attrape, mordez-le, mordez-le très fort pour qu’ils vous lâche et vous fiche la paix.
― Connaissez-vous le jeu du zizi-cucul ? C’est un jeu très marrant. Pour y jouer, il faut d’abord que tous vos petits camarades enlèvent leur caleçon et se mettent le pèpèt tout nu. Et puis, si vous êtes un garçon, il faut fourrer votre zizi dans leur trou de cul, et l’y enfoncer le plus loin possible. Si tout d’un coup votre zizi coule, si un liquide tout blanchâtre et tout gluant en sort, applaudissez et faites-vous applaudir, c’est que vous jouez très bien. Après quoi, demandez à vos copains de fourrer à leur tour leur zizi dans votre trou du cul. Et de se dandiner. Mais n’écartez surtout pas les filles du jeu. Elles peuvent y jouer aussi en remplaçant la quèquète qu’elles n’ont pas par leur langue. Une langue dans un trou de cul, c’est aussi bidonnant qu’un zizi.
― Quand un adulte est vraiment méchant avec vous, allez dans sa maison quand il n’est pas là et cassez tout. Ou mettez de la mort-aux-rats dans les plats qu’il va manger.
― Et puis, et puis enfin, mes chers petits diablotins, faites un gros tas dans la cour de l’école avec tous vos livres, tous vos cahiers, tous vos journaux de classes et tous vos bulletins. Ensuite, brûlez le gros tas en chantant autour du feu :
« Vive les vacances,
Plus de pénitences,
Les cahiers au feu
Et les profs au milieu ! »
Et quand les maîtres arriveront en courant pour vous punir, jetez-les vraiment dans le feu.
(Belluno, Cortina d’Ampezzo, Genova et Firenze, 1970)

Moyens à employer par les soldats décidés à aider la révolution, quel que soit leur nombre
1.- A la première nouvelle de l’insurrection, chaque soldat révolutionnaire devra incendier la caserne où il se trouvera pour cela il se dirigera vers les points où seront accumulés les bois, les pailles et les fourrages. Dans tous les cas il devra mettre le feu aux paillasses en ayant préalablement pris le soin d’en vider une pour donner plus de prise à l’incendie.
Pour mettre le feu, il pourra se servir d’un mélange de pétrole et d’alcool, de pétrole seulement ou même d’une simple allumette selon le cas.
Dès que le feu aura commencé à prendre, il faudra éventrer quelques tuyaux de gaz dans les corridors et dans les chambres.
2.- Au milieu de la confusion qui se produira nécessairement dès que l’incendie se sera propagé, il faudra pousser à la révolte et frapper impitoyablement les officiers jusqu’à ce qu’il n’en reste plus un seul debout.
3.- Les soldats devront alors sortir de leurs casernes embrasées et se joindre au peuple en emportant leurs fusils et des munitions pour aider les ouvriers insurgés à écraser les forces policières.
La préfecture et tous les postes de police devront être incendiés immédiatement, ainsi que tous les édifices où pourraient se rallier des forces gouvernementales.
4.- Outre le pétrole seul, qui a le défaut de ne pas s’emflammer instantanément, le mélange par moitié de pétrole et d’alcool est préférable, et l’éventrement des tuyaux de gaz. On peut se servir aussi d’une préparation qui s’enflamme d’elle-même après qu’elle a été répandue sur une matière inflammable. Cette préparation qui peut être versée secrètement se compose de sulfure de carbone ou d’essence de pétrole saturé, de phosphore blanc. Le phosphore se dissout à froid.
5.- Dans le cas où on n’aura sous la main aucune des substances indiquées, on devra se contenter d’éventrer les tuyaux de gaz et de mettre le feu avec une allumette.
6.- En mettant séparément dans deux bouteilles de l’essence de thérébentine et de l’acide sulfurique non éventé, et en attachant ensuite les deux bouteilles l’une contre l’autre on n’a qu’à lancer le paquet contre un corps dur pour obtenir un embrasement immédiat produit par le mélange des deux liquides à l’instant même où les deux bouteilles sont brisées.
Cet engin peut être employé non seulement pour incendier, mais encore contre les troupes qui marcheraient contre le peuple ; il suffirait de le lancer sur elles pour les couvrir d’éclaboussures de feu.
7.- Des bouteilles épaisses entourées de linge ou de papier, pour les empêcher de se briser en tombant sur le sol, et remplies de poudre ordinaire et de plomb de chasse forment des bombes très efficaces pour la bataille des rues. Lancées après qu’on a mis le feu à la mèche dont elles doivent être pourvues, elles peuvent mettre promptement hors de combat des escouades entières en criblant de projectiles les jambes des assaillants.
Le plomb de chasse employé avec des fusils ordinaires et en visant à hauteur du visage est d’un résultat décisif dans les combats à courte distance, spécialement contre la police.
(France, 1882)

Le Crachat sur l’offrande !
Camarades,
La fureur de vivre qui déferla sur le Quartier Latin a jailli dans l’histoire comme une de ces prodigieuses bouffées de joie qui prennent à la gorge un monde où la garantie de ne plus mourir de faim s’échange contre la certitude de crever d’ennui. Le sang des flics enivre, et précieux sont les moments où la vie émerge si intensément des cloaques de l’inauthentique, pour moucher avec élégance plus d’un baveux humaniste. Enfin libérés de la gangue des contraintes et de l’esseulement, nos désirs par trop longtemps inassouvis s’y sont payé là une belle tranche de plaisir. Ceci n’est qu’un début, qu’on se le dise ! (...)
Livrée à l’impitoyable jeu subversif, la machine sociale regorge de ressources passionnantes à exploiter. Sabotages, falsifications, détournements, fraudes, boycotts : ... que la créativité en liesse se donne libre cours — tempête démoniaque des jouissances illicites — et nombreux sont les goûts ou talents qui vont s’y révéler ! Tout finira bien un jour par redescendre dans la rue.
Grèves sauvages et saines furies, quand elles surviendront, auront à se reconnaître dans leurs cristallisations les plus éthérées. Beau comme un pavé dans la gueule d’un flic, le meurtre, en dernier ressort, s’épanouit aux confins de la sublime efficacité. Quant aux pillages et autres jolies initiatives de passer outre, ils doivent être tenus pour les hauts faits de notre lutte vers le dépassement effectif du monde de la marchandise et des rapports sociaux réifiés. Face aux vitrines — miroirs déformants où notre image humaine s’est perdue, roidie par l’argent — le regard n’a trop souvent rencontré que les choses et leur prix.
Finissons-en !
(Montgeron, 1968)

« En trahissant vos maîtres, vous vous servez »
Bruxelloises, Bruxellois !
Les mercenaires d’un pouvoir étranger à nous-mêmes OCCUPENT l’Université de Bruxelles. Demain, ils occuperont nos quartiers et nos usines.
Le produit de notre travail sert les banques à s’alimenter et à payer ainsi les mercenaires du pouvoir étranger.
- En fermant les banques, nous nous donnons l’occasion de ne plus payer nos traites, nos téléphones, nos loyers, etc., et donc de ne plus entretenir l’armée qui en notre nom nous occupe.
- En fermant les banques, nous nous donnons à nous-mêmes le crédit que jusqu’à présent celles-ci nous distillaient à partir de notre propre travail.
Les banques investissent non de l’argent, mais notre temps, et spéculent sur l’emploi de nos énergies.
- En fermant les banques, nous nous ouvrons à nous-mêmes pour organiser notre subsistance sans leur intermédiaire, ni celui de leurs troupes.
- En fermant les banques, nous mettons fin au HOLD-UP de notre temps par le monde des affaires.
En notre nom, ils détournent notre travail et en retournent le produit contre nous : les armes de la FN, les factures, les huissiers, les flics, etc.
A nous de nous retourner contre eux.
En servant vos maîtres, vous vous trahissez.
En trahissant vos maîtres, vous vous servez.
(Bruxelles, 1968)

« Forçats de tous ordres, égorgez vos patrons ! »
La Justice ou la Mort,
Aux Travailleurs,
Vous qu’on exploite et qu’on vole journellement ; vous qui produisez toutes les richesses sociales ; vous qui êtes LAS de cette vie de misère et d’abrutissement, révoltez-vous !
Forçat du travail, flambe le bagne industriel ! Étrangle le garde-chiourme ! Assomme le sergot qui t’arrête ! Crache à la gueule du magistrat qui te condamne ! Pends le propriétaire qui te jette à la rue aux heures de purée !
Forçat de la caserne, passe ta baïonnette à travers le corps de ton supérieur !
Boucher du peuple ! futur maître assassin ! Forçats de tous ordres, égorgez vos patrons !
Sortez de vos poches le couteau libérateur ! Pillez ! Incendiez ! Détruisez ! Anéantissez ! Purifiez !
Vive la révolte ! Vive l’incendie, mort aux exploiteurs !
(Le Havre, 1888)

Aux désespérés
Vous qui êtes arrivés au bout du dégoût et que rien ni personne ne peut plus soustraire à la plus tragique issue, faites donc couic-couic puisque telle est votre volonté.
Mais puisque vous prenez cette peine, ne prendriez-vous pas celle aussi, tant que vous y êtes, d’emporter dans votre grand voyage l’une ou l’autre gratture notoire ? Ce serait là un très royal petit cadeau d’adieu.
Vous n’auriez, par exemple, à n’avaler votre capsule de cyanure qu’après avoir tranché la carotide du député avec qui vous sirotez le vin d’honneur, qu’à brûler la cervelle d’un préfet de police juste avant la vôtre, qu’à dégoupiller votre grenade au mess des officiers, qu’à flécher au curare le poignet de l’archevêque qui vous administre la dernière communion, qu’à entraîner sous les roues le délégué syndical qui attend le métro à vos côtés ou qu’à généraliser votre hara kiri dans le vestiaire des juges du Palais de Justice.
C’est qu’à la vérité, il devrait suffire que quelque vingt pour cent des suicidés inflexibles de chaque pays associent mêmement leur dernier soupir à celui d’un infâme potentat pour que la planète finisse par se réveiller artisanalement purgée des principales mères cacas qui la programment, et pour que, vu les risques croissants encourus, et l’impossibilité d’y remédier, on n’arrive bientôt plus à recruter le moindre candidat à la moindre dignité.
Au train où s’accélèrent urbi et orbi les cadences d’auto-suppression, les statistiques en attestent, il n’y aurait fort vite plus besoin que d’une croquignolette émeute de rien du tout (requérant, disons, le douzième à peine de l’énergie dépavée en mai 68) pour que toutes les formes de pouvoir s’effondrent comme des capucins de cartes et cèdent la place à une recréation de Tout par Tous.
De grâce, de grâce dès lors, grands désespérés des cinq continents, ayez bon coeur une toute dernière fois, ne crevez plus désormais qu’en tandem (ou sur un mode combinatoire plus recherché) !
(Lausanne, 1987)

LES PARFAITS VOYOUS

Il faudra détruire !
Nous serons cruels et impitoyables avec tous les souteneurs de l’Ordre dominant.

Jules Celma (L’Educastreur, 1971)

En même temps qu’elle enculera le système, pillera, bousillera les couples, détruira et tuera, SCUM recrutera. Ce sera le rôle de son corps d’élite — le noyau dur des activistes (les enculeurs, les pillards et les vandales) et de l’élite de l’élite — les tueuses.
Valérie Solanas (SCUM Manifesto, 1967)

Ce n’est pas une révolution qui s’annonce à nouveau mais un crime énorme, sans égards, sans pudeur, sans conscience, et sans honte.
Marx Stirner (L’Unique et sa propriété, 1844)

Nous disons aux ouvriers : « Massacre ! Pille ! Assomme ! Pas besoin de professionnels ! Pas besoin d’organisation d’aucune espèce ! Massacre, pille et assomme ! »
Guerchkouhch, meneur de jeu des insurgés anars d’Odessa (1905)

Que le peuple détruise d’abord, il verra bien ce qui est nécessaire de faire ensuite.
Léon Cladel, interviewé par L’Egalité (1890)

Soyons méchants
La méchanceté c’est autre chose. Elle tient du vice et du plaisir. C’est la casse pour le frisson. La joie de détruire. Je suis seul une seconde, je pète un outil. La casquette du contremaître m’horripile, je la souffle de merde. Il est pas content, je me fous de sa gueule. Être méchant, c’est un état, une seconde nature. Rien ne trouve grâce à mes yeux. Tout est si con, si laid au travail que les nerfs s’aiguisent, l’esprit se tord, une nouvelle conscience surgit, mal faire, faire mal, prendre prétexte de tout. _ La méchanceté se rumine, se mange froide et chaude. Elle est gratuite et ne démord jamais. A peine entrée dans l’atelier ou le bureau, la voilà qui choisit ses cibles, se charge de haine au contact des objets familiers, invente mille gestes pour déplaire, pour détruire. Le méchant n’est jamais content, le consensus entre l’employeur et lui n’est jamais satisfaisant. Il vit son travail comme une torture et le fait sentir. La méchanceté s’exerce sans témoin dans la satisfaction de la solitude ravageuse. Elle s’attaque aussi bien aux hommes qu’au matériel. Quand elle prend quelque chef en grippe, celui-ci la sent sourdre autour de lui. Elle fleurit en insultes personnelles sur les murs, circule par ragots, laideurs, accidents inexplicables. Elle ne respecte rien du matériel, du sacro-saint outil de travail. Elle ne sabote pas pour “souffler” mais pour rayer, pour saloper, rendre inutilisable, faire payer. Elle lance des concours absurdes de qui abîmera le plus. Des paris stupides d’ampoules détruites et de gaines électriques arrachées. La méchanceté se nourrit d’elle-même, elle se dédouble sans cesse. Elle n’a pas de but, de justification.
Jules Van (1979)

La Honte de la famille
Le faux cousin de M. Giscard d’Estaing s’intéressait aux congrégations religieuses en France, en Belgique et en Espagne.
Utilisant son faux nom, il n’avait aucun mal à se faire ouvrir les portes des abbayes et prieurés. Il invoquait le prétexte d’une retraite méditative.
C’était alors l’enfer pour ses compagnons de retraite et pour le clergé. Ainsi, à l’abbaye Saint-Nicolas de Verneuil-sur-Havre, près d’Evreux, il avait agressé une religieuse pour lui dérober la clé de la chapelle. Il s’y était ensuite enfermé, cassant tout ce qui lui tombait sous la main : crucifix d’autel, bénitiers de marbre, prie-dieu, etc.
De retour à la bibliothèque de l’abbaye, il s’acharnait enfin sur les livres qu’il déchirait en morceaux avant de s’enfuir en volant la montre en or, sertie de diamants, d’une pensionnaire, d’une valeur de plus de 200 000 FB.
(Le Soir, 6/2/1978)

Ça saigne dans les écoles américaines
Les vols de matériel scolaire, les incendies commis au sein des écoles et les actes de vandalisme ont coûté en 1978 à la ville de New York près de dix millions de dollars. (...) D’après les statistiques publiées par l’Association nationale pour l’Education, chaque année, environ 60 000 professeurs sont victimes d’agressions perpétrées par les élèves. (...) De véritables stocks d’armes ont été découverts dans les cartables des élèves. En 1978, les professeurs de la ville de New York ont ainsi trouvé 31 pistolets, 2 fusils et 126 poignards. (...) A San Diego, une jeune fille de 16 ans s’est emparée “pour blaguer” d’un fusil et a ouvert le feu sur l’école. Elle a tué le recteur. (...) A Los Angeles, des élèves mécontents de leurs notes ont enflammé la chevelure d’une enseignante.
(La Libre Belgique, 8/5/1979)

Les Altruistes félons
La municipalité de Trente (Haut-Adige) en Italie, a armé sans le savoir des groupes de vandales. Plusieurs groupes de jeunes gens (une soixantaine au total) se sont présentés spontanément à la mairie pour proposer de déblayer gratuitement les soixante-dix centimètres de neige qui recouvraient les rues de la ville.
Ravi, le maire a aussitôt mis à la disposition de ces charmants jeunes gens des pelles et des pioches. Mais les volontaires se sont répandus dans la ville, cassant des vitrines, attaquant des automobilistes et brisant les vitres des bus... avec des outils fournis par la municipalité.
(Presse-Océan, 14/2/1978)

[1Chouffliqueurs : mauvais ouvriers.


)



ce texte est aussi consultable en :
- PDF par téléchargement, en cliquant ici (995.8 ko)
- PDF par téléchargement, en cliquant ici (676.1 ko)