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Contre le publisexisme

mis en ligne le 6 mars 2004 - Collectif antipatriarcat de Lille , Collectif antipub 59

Vous croyez que la pub ne nous touche pas ?

Pourtant, de notre domicile à notre lieu de travail, de loisirs,
d’activités, 2500 pubs croisent notre regard en moyenne chaque jour.
Sans compter celles que nous entendons à la radio, à la télé, dans les
transports ou celles que nous sentons (boulangerie au métro gare de
Lille Flandres). Les publicités sont des formes de pollutions visuelles,
auditives et olfactives qui nous sont imposées.
Comment croire que ces images puissent ne pas s’imprimer dans nos
esprits ?
Les messages publicitaires (ou non) que nous percevons s’ancrent dans
notre inconscient. Vu leur quantité, comment ignorer les réflexes que
les publicités peuvent créer dans nos attitudes au quotidien. Certaines
d’entre elles s’adressent à des enfants de 2 ans. Ceux-ci ne pourront les
reconnaître qu’à partir de 6 ans.

Vous pensez que la pub c’est gratuit ?

Pourtant, nous participons au paiement de la pub chaque jour : les
entreprises investissent des sommes énormes dans ce secteur (sachant
bien qu’un profit sera réalisé en retour). Ces sommes qui sont issues
des richesses que nous produisons dans nos entreprises, il nous faut
encore les payer au travers du prix d’achat des produits que nous
consommons.

Vous pensez que la pub ne nous fait pas acheter davantage ?

A force d’entendre et de voir des messages qui nous présentent
certaines facettes d’un produit, on finit par vouloir posséder ces
facettes, voire tous les produits, et le corps « parfait » et fictif qui y est
souvent associé. La publicité augmente ainsi notre besoin de posséder,
donc de consommer. Pire elle renforce l’idée selon laquelle pour être un
homme il faut être puissant et avoir une grosse voiture.
On en finit par oublier que nous n’avons pas besoin de consommer
autant pour être heureux-se, que nous n’avons pas besoin d’acheter
pour exister. La pub ne s’adresse qu’à des consommateur-rice-s. Nous
sommes avant tout des êtres humain-e-s.

Vous pensez que la publicité c’est créatif ?

La publicité est une construction rationnelle et stratégique dont
chaque détail est minutieusement étudié par des psychologues et des
spécialistes graphiques dans le but de manipuler nos actes et nos pensées. Les publicitaires s’assimilent à des créateurs voire à des
sociologues ; ainsi, les remettre en cause reviendrait, selon eux, à
exercer une censure sur la création ou à bâillonner la liberté
d’expression. Or la publicité vise avant tout la manipulation mentale.

Vous pensez que la publicité laisse la place à une diversité d’opinions ?

Malgré leurs différences de formes et de couleurs, les messages
publicitaires véhiculent toujours les mêmes idées :

 Consomme !
 Sois belle-beau !
 Sois clean !
 OBEIS !
 Sois égoïste, rends service aux autres !!...

A travers des présentations trompeuses ou des livrets soit-disant
informatifs, les grandes entreprises cherchent à vendre leurs produits
en utilisant des formes traditionnellement réservées à l’information.
Pire, la publicité utilise des grands thèmes tels que la protection de la
nature, l’amour, le respect, la misère, les violences faites aux femmes...
ainsi que des valeurs humanistes afin de vendre des produits ou des
services mais aussi un seul mode de vie. Elle contribue ainsi à une
déresponsabilisation des gens et entretient l’illusion d’exister en tant
qu’individu alors qu’elle a pour unique but de nous manipuler. Cette
pseudo information devient de la désinformation au service d’un
discours conservateur et unique. Ainsi, la publicité parodie les discours
féministes et contribuent à les discréditer. Tel est la cas de ce slogan
d’une marque de sous-vêtements : « Boléro soutient les femmes dans
leur lutte... contre les courants d’air ». Quelle serait les réactions devant
une publicité qui tournerait en dérision l’anti-racisme !
Suivant la logique du modèle américain, la publicité commence à faire
irruption dans les écoles .
Elle occupe progressivement tous les espaces
publics et de manière souvent illégale. (30% illégale, 100% illégitime).

Vous pensez que la publicité et sa norme de beauté ne sont pas violentes ?

La publicité véhicule des stéréotypes qui imposent une seule norme
de beauté. Les corps sont rallongés, découpés, bronzés, gonflés ou
dégonflés. Ils deviennent des objets au service du culte de la maigreur,
de la virilité et de la perfection. L’obligation de cette beauté unique et
irréelle est une norme qui peut conduire les femmes à s’infliger des
violences corporelles banalisées (la chirurgie, l’épilation, les régimes, le
fitness, les talons, ...) et qui peut avoir des conséquences tragiques tels
que les complexes physiques, la boulimie, l’anorexie et le suicide...Cette
norme conduit aussi au refuge et au suivisme d’autres normes
génératrices elles aussi de soumission.

Vous pensez que la publicité ne favorise pas le sexisme ?

Traditionnellement, les femmes sont montrées comme des
ménagères (ce qui ne change rien au fait que les femmes travaillent
gratuitement environ 40 heures par semaine pour accomplir les tâches
domestiques contre à peine 03 heures pour les hommes). Si parfois les
publicités de produits ménagers (lessive, javel, etc..) ou alimentaires se
montrent plus subtiles, il n’en reste pas mois que le message reste
assez clair. : les femmes à la maison. Parfois on les déguise en mégères
« branchées », « ultra maquillées », « sexy » qui dominent un homme
ou un groupe d’hommes. En résumé, les seules choix possibles sont la
soumission ou la domination mais en aucun cas l’égalité.
Par ailleurs, les femmes sont souvent offertes au regard dans des
positions passives et suggestives. Ces corps transformés montrent les
femmes comme des objets sexuels passifs : les femmes sont dénudées
pour flatter les fantasmes masculins. Elles se retrouvent mises en
compétition en ayant pour juges les hommes. A l’inverse les hommes
apparaissent « virils », « solides », « dynamiques » et agissant.
Majoritairement si les hommes sont montrés comme des acteurs dont la
beauté est normée, les femmes sont réduites à l’apparence et à des
corps. L’homme peut être aliéné mais reste dans le monde des
dominants tandis que la femme doit être belle et se taire. Ainsi dans la
pub Bleu Foret, la femme est dépossédée de son humanité et réduite à
un corps par l’homme auquel elle se confie. Elle est d’ailleurs d’autant
plus dépossédée d’elle-même que l’homme capture son image.
Pire les images de violences faites aux femmes sont banalisées.
Cette banalisation de ces images de violence participe de l’acceptation
des agressions à l’égard des femmes.

Vous ne voyez aucun lien entre la publicité et le patriarcat ?

Le patriarcat est un terme utilisé pour parler de la soumission des
femmes ici et maintenant. Il s’agit par là de désigner un système où le
pouvoir politique, économique et social est organisé par et pour les
hommes. Il se caractérise par la mise sous tutelle, la dépendance, la
discrimination et l’oppression des femmes et dans une moindre mesure
des hommes qui ne participent pas ou mal à cette oppression.
Nos personnalités et le rôle que nous occupons dans le couple, dans la
famille, à l’école, au travail, avec les amis n’est pas le fruit du hasard.
Nous sommes le fruit d’une histoire où justement l’école, la famille,
l’église et la société marchande participent de manière importante à
notre construction. Or toutes ces institutions tout comme la publicité
contribuent à véhiculer et à perpétuer des normes sexistes.

On ne naît pas fille ou garçon on le devient : le social crée des
différenciations considérées comme biologiques. Tel est ainsi le cas des
qualités prétendument féminines que sont la beauté, la douceur, le don
de soi qui s’opposent à des valeurs dites masculines (force, virilité,
réfléchi) et qui sont largement mises en avant par la publicité. La
répétition d’images de femmes soumises, réduites à des corps ou à des
ménagères participe de la domination masculine, tout comme la
glorification de la puissance (virilisme) dans les publicités.
L’omniprésence de la publicité renforce un phénomène pernicieux
qui est l’adoption par les dominées (ici les femmes) des valeurs des
dominants (les hommes) :
L’image de la femme moderne largement reprise et mise en avant
dans les pub étant la femme sexy qui arrive à concilier tant le travail
domestique que le travail à l’extérieur tout en restant « fraîche » et
« belle ». Quelle femme ne s’est pas un jour réclamée de ce trio
 ?

L’accomplissement des femmes

 Sexy : Etre belle et à l’écoute de l’homme
 Travail domestique : Travailler gratuitement à la maison
(tâches ménagères et éducation des enfants)
 Activité salariée : Etre subordonnée et moins rémunérée

En envahissant tous les domaines de la vie, à travers un processus
répétitif et abrutissant, la publicité impose un format qui légitime notre
mode de vie actuel en pays riche, pourtant insoutenable, tant des
points de vue écologique (promotion des 4x4 et des vols charters) que
social (vision sexiste et individualiste) et culturel (une
beauté/uniformisation).

VOILA POURQUOI NOUS PENSONS QUE LA PUB EST DANGEREUSE !!
NI A PRENDRE NI A VENDRE, LES FEMMES NE SONT PAS DES
OBJETS ! RENDONS AUX PUBLISEXISTES LEURS COUPS DE PUB !

Collectif antipub et Collectif anti-patriarcat.
Pour nous contacter :
Antipat@ml.free.fr
Antipub59@no-log.org
Ne pas jeter sur la voie publique



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