I
L’individualisme subversif des femmes à Barcelone, années 1930
mis en ligne le 9 novembre 2008 - Michael Seidman
La société révolutionnaire était incapable d’intégrer ces nombreuses femmes non-militantes qui ont défié sa discipline sociale. À cause de la recherche des identités collectives de classe et de genre, l’individualisme des femmes prolétariennes a été ignoré. Au lieu de négliger ou de condamner le personnel, les historien-nes doivent essayer de comprendre comment l’exploration des variétés d’individualisme subversif - la résistance à la discipline sur le lieu de travail, l’opportunisme et la petite fraude - peut étendre les frontières de l’histoire sociale et aider à contribuer à une théorie de l’Etat.
L’individualisme féminin ne doit pas être identifié exclusivement avec le conservatisme et la réaction, l’échec des femmes à se sacrifier pour la révolution ne signifie pas qu’elles étaient pro-Franco ou qu’elles formaient une « cinquième colonne » [1] féminine. En fait, les régimes autoritaires et fascistes ont également été forcés de s’y confronter et de contrôler l’individualisme subversif, mais sa persistance et sa croissance pendant la révolution à Barcelone suggèrent qu’un projet social fondé sur la propriété collective et la participation de l’ouvrier avait peu d’attrait pour beaucoup de femmes. L’individualisme subversif s’apparente à ce que Alf Ludtke a appelé Eigensinn [2]. Ces deux concepts explorent les aspects de vie quotidienne, comme la résistance au travail, l’indiscipline et le chapardage. En fin de compte individualisme et Eigensinn sont profondément distincts. Ce dernier n’englobe pas le conflit entre l’individu et la société. En effet, Ludtke implique que l’Eigensinn pourrait avoir été la base d’un socialisme plus inclusif et libéré. L’individualisme subversif résulte, d’autre part, de la contradiction entre l’individu et la société et rappelle ainsi la tradition négligée de l’anarchisme stirnerien dans lequel les besoins personnels et les désirs ont la priorité sur le travail salarié, qu’il soit capitaliste ou socialiste. La persistance de l’individualisme pendant la fin des années 1930 à Barcelone démontre l’incapacité de la société socialiste à surmonter la scission entre l’individu et la collectivité. La répugnance des femmes à se sacrifier est une critique implicite de l’anarcho-syndicalisme et de la vision révolutionnaire marxiste, que beaucoup de femmes ont ressenti trop souvent comme un renoncement personnel au profit du social.
De manière assez ironique, la militance collective féminine pourrait avoir été plus commune avant qu’après la révolution, dans la période de troubles précédant et suivant immédiatement l’établissement de la Deuxième République en avril 1931. En ce temps-là, et tout au long de la décennie, les femmes ont défendu leur niveau de vie et leurs sources de revenu. Bien que les émeutes pour l’alimentation semblent rares, les femmes ont activement participé à la grève des loyers de 1931, patronnée par la CNT (Confederacion Nacional de Trabajo) contre la rapide augmentation des dépenses de logement. Pendant les années 1920, la population de Barcelone avait grandi de 62,43 % et cette immigration massive avait élevé les loyers à une hauteur jamais atteinte auparavant. Après l’établissement de la Deuxième République en avril, la CNT exigeait des réductions de loyer de 40 %. En juin et juillet, les meetings du comité de grève des loyers attiraient de nombreuses femmes. Des propriétaires, la plupart d’entre-eux ne possédant que de petites propriétés, réagirent en organisant leurs propres réunions. Cependant, la grève se montra efficace et réveilla la participation de peut-être 100 000 personnes dans une ville de plus d’un million. La solidarité de voisinage rendait les expulsions difficiles, sinon impossible. Dans certains cas, les voisin-es menacèrent de lyncher ceux qui appliquaient les ordres du tribunal. Des masses de femmes et d’enfants ont entravé les expulsions de locataires. Le gouvernement réagit par la répression. Il emprisonna les leaders des grévistes, envoya la police pour assurer les expulsions et agit généralement dans l’intérêt des propriétaires.
Les femmes participaient aussi aux luttes sur le temps de travail. Quand une loi interdisant le travail de nuit pour les femmes a été changée, ce changement de programme « n’a pas été bien accueilli par les ouvriers » qui ont alors fait la grève. Les Femmes voulaient que la prohibition du travail de nuit s’applique aux heures entre 23h00 et 5h00 « au lieu de 22h00 à 4h00 », refusant de venir une heure plus tôt. Les femmes travaillant dans une usine textile de Badalona refusèrent la proposition patronale que la moitié d’entre elles travaillent trois jours par semaine, et l’autre moitié, trois autres jours. Les femmes préféraient une semaine de travail durant les mêmes trois jours pour chacune. L’Union Textile de la CNT anarcho-syndicaliste exigeait que les femmes enceintes reçoivent un congé de maternité de quatre mois et que les établissements de plus de 50 ouvrières fournissent des centres de garderie.
Les femmes se battaient collectivement pour la hausse des salaires. Des entrepreneurs textiles affirmaient que leurs ouvrières avaient refusé de contribuer aux fonds de maternité, et quand les industriels essayèrent de déduire la part des femmes de leurs paies, entrainant « des conflits sérieux en raison de la résistance des ouvrières ». Le gouverneur civil indiqua que salariées et employeurs devaient obéir à la loi, qui exigeait de leur part des contributions approximativement égales, mais les femmes continuèrent la grève pour empêcher la retenue sur leur paie. Selon le Gouverneur, elles refusaient de comprendre que l’assurance maternité leur permettrait de recevoir des indemnités qui excéderaient énormément leur contribution. Il envoya la Garde civile dans les villes castillanes de Berga et de Pobila de Lillet où « le syndicat » faisait de l’agitation en faisant circuler des « prospectus séditieux ». Les autorités craignaient que les ouvrières puissent réagir en volant des produits finis ou même des pièces de machines, et elles ordonnèrent à la Garde civile d’évacuer les usines pour empêcher une grève avec occupation. Finalement, les femmes acceptèrent les déductions sur la paye, complétant la loi de 1907, qui avait accordé six semaines de congé maternité avant et après la naissance.
Les femmes défendaient aussi leurs emplois et leurs sources de revenu. Pour protester contre une fusillade, elles participèrent à une des grèves les plus sanglantes de la période. Le 2 octobre, 760 ouvriers sortent d’une usine métallurgique sous contrôle étranger, qui emploie 1100 ouvriers dans Badalona. Deux jours plus tard, la police arrête et emprisonne deux ouvriers pour avoir violé le droit du travail. Les autorités arrêtent également quatre femmes, dont la militance et la solidarité avec les grévistes provoquent un traitement brutal de la part des Gardes civils. Les ouvriers métallurgistes protestent contre ces arrestations et chargent la police, qui s’occupait du chargement et du déchargement, agissant comme des briseurs de grève. Le 24 octobre, le syndicat patronal de Badalona consent à rétablir les ouvriers licenciés, mais affirme le droit de l’employeur de licencier le personnel pour « des motifs justifiés ». En outre, les patrons interdisent aux délégués syndicaux d’agir à l’intérieur de l’usine, mais promettent de ne pas licencier les ouvriers qui avaient une année d’ancienneté. Les ouvriers doivent retourner travailler le lundi suivant, mais, sans le notifier aux autorités, ils continuent leur grève « illégale ».
La tension monte le 29 octobre, quand les grévistes désobéissent à une sommation de se disperser, ordonnée par la police montée armée de sabres. La Garde arrête quatre femmes qui portent des pierres, et cinq hommes. Le jour suivant, 250 « jaunes », selon les mots du Gouverneur, entrent dans l’usine. Quand un camion, accompagné par des policiers, quitte l’entreprise, des grévistes, « vraisemblablement du Sindicato Unico [CNT] », attaquent le véhicule avec des armes légères. Ceux qui sont dans le camion, peut-être des gardes, tirent en réponse et tuent deux grévistes. Le jour suivant, le Gouverneur répond aux morts des ouvriers en emprisonnant les présidents des syndicats du transport et de la construction de Badalona. Pendant les obsèques des grévistes, la Garde civile « a été forcé de charger [la foule] ».
Mais les jugements concernant la participation des femmes dans les organisations militantes doivent être mitigés. La plupart des femmes avaient moins de raisons que les hommes de rejoindre et de mener les syndicats, à cause de leur place marginale sur le lieu de travail. En 1930, les 1 109 800 travailleuses espagnoles constituaient 12,6 % de la main-d’oeuvre totale et 9,16 % de la population féminine. Seules 43 000 à 45 000 ont rejoint les syndicats, et 34 880 à 36 380 d’entre elles appartenaient au mouvement syndical catholique. On peut expliquer cette relative réserve face aux syndicats par l’importance de l’emploi provisoire féminin. Certaines commençaient le travail entre 12 et 14 ans, mais le quittaient immédiatement après avoir été épousées, d’habitude entre 25 et 30 ans. Si elles devenaient veuves, elles pouvaient retourner sur le marché du travail. En 1922, les industriels de Barcelone affirmaient que la plupart des ouvrières avaient quitté leur emploi pour se marier et que presque aucune n’avait travaillé jusqu’à l’âge de la retraite. Dans les années 1930 - peut-être à cause de la dépression économique - des mères et des filles se sont engagées dans le travail salarié. En 1930, 65,6 % des ouvrières étaient célibataires, 19,29 % étaient mariées et 14,26 % étaient veuves. À Barcelone, 65 % de la population active féminine, qui composaient approximativement 30 % des salarié-es, travaillaient dans l’industrie.
Les obligations familiales, dont les femmes contrôlaient le budget, auraient pu refroidir la militance collective. Dans certaines familles, qui voulaient acquérir un petit commerce ou un lopin de terre, les femmes contrôlaient le budget familial. Ces femmes devaient être peu disposées à voir leurs maris se joindre à des grèves sauvages. Certaines travailleuses, qui bossaient pour un salaire complétant les gains des autres membres de la famille, étaient aussi récalcitrantes quant à la grève. Les femmes des classes moyennes appauvries, travaillant pour garder les apparences, pouvaient aussi résister à la participation aux mouvements militants. En juillet 1931, 560 ouvrier-es - principalement le personnel de bureau et les réparateurs - se sont battu-es contre la société téléphonique, et les jeunes femmes semblent avoir été parmi les premières à retourner travailler. Pendant le conflit, trois grévistes masculins - probablement des membres d’une filiale de la CNT - sont arrêtés par la police pour avoir traîné trois senoritas non-grévistes. La grève a abouti « à l’échec », peut-être à cause du manque d’appui féminin. Les chiffres disponibles montrent que les hommes étaient beaucoup plus partants pour faire grève que leurs homologues féminines, qui recevaient souvent la moitié des salaires masculins.
Pendant la Deuxième République, particulièrement pendant le Bienio negro (1934-1935), l’adhésion syndicale a baissé, au moment où l’Etat et les employeurs ont pris des mesures répressives contre les organisations ouvrières. Au début de la révolution, de nombreux-ses salarié-es - particulièrement des femmes, la plupart d’entre-elles n’ayant jamais appartenu à aucun syndicat avant juillet 1936 - se sont assemblé-es dans la CNT et, dans une moindre mesure, à l’UGT marxiste (Union General de Trabajadores). Il faut souligner que de nombreux-ses ouvrier-es n’ont pas rejoint les syndicats pour des raisons idéologiques, mais pour des raisons personnelles : la vie dans le Barcelone révolutionnaire était très difficile sans une carte syndicale. Pour manger un repas dans une cuisine collective, bénéficier d’une aide sociale, obtenir ou conserver un travail, intégrer un centre de formation technique, obtenir un logement, être admis dans une clinique ou à l’hôpital, pour voyager à l’extérieur de Barcelone, pour être exempté du service militaire, etc., une carte syndicale était souvent désirable, sinon nécessaire.
Selon les propres chiffres de la CNT, elle représentait seulement 30 % des ouvrier-es industriel-les catalan-es en mai 1936, un mois avant la révolution, beaucoup moins que les 60 % en 1931. Ainsi, « des dizaines de milliers », dont beaucoup de femmes, avec une faible « conscience de classe » ou une faible adhésion aux buts de la Gauche, sont entré-es dans l’un ou l’autre syndicat à la recherche d’une protection sociale et d’un emploi stable. Un cadre de la CNT au pouvoir pensait que :
« Une des principales erreurs des syndicats était de forcer les ouvriers à rejoindre l’un d’entre eux. Nous ne sommes pas vraiment sûrs d’un nombre énorme des nouveaux membres, bien qu’il ne soit pas souhaitable de discuter de ceci à l’extérieur du syndicat ».
En juin 1937, H. Rudiger, un représentant à Barcelone de la Première Internationale ressuscitée (AIT), a écrit qu’avant la révolution, la CNT avait seulement 150 000 à 175 000 membres en Catalogne. Dans les mois après le début de la guerre, l’adhésion à la CNT catalane avait bondi à presque un million, desquel-les, « Quatre-cinquièmes sont, ainsi, de nouvelles personnes. Nous ne pouvons pas considérer une grande partie de ces gens comme des révolutionnaires. Vous pourriez prendre n’importe quel syndicat comme un exemple de cela. Beaucoup de ces nouveaux membres pourraient être dans l’UGT ».
Ce fonctionnaire de l’AIT ressuscitée en concluait que la CNT ne pouvait pas être « une démocratie organique ». Dans le syndicat rival, la situation était peu différente. Un militant officiel de l’UGT affirmait que la Fédération catalane de l’UGT avait 30 000 membres avant le 19 juillet et 350 000 à 400 000 après. Il recommandait une nouvelle organisation du syndicat puisque beaucoup de filiales manquaient d’expérience. Bien que les responsables syndicaux n’aient pas fait des remarques sur le sexe de leurs nouveaux membres, il semble probable que, particulièrement dans le secteur textile, il y avait un nombre disproportionné de femmes. Quelques syndicats CNT ont découragé l’élection de membres arrivé-es après le 19 juillet 1936 aux postes de responsabilité dans l’organisation ou dans les collectifs, à moins que ces nouvelles/aux membres n’aient été unanimement approuvé-es. Cette règle doit avoir eu pour effet l’exclusion de la plupart des femmes des positions de direction. Donc, le grand afflux de nouveaux membres dans les syndicats et partis politiques catalans n’était pas une indication de conversion idéologique à l’anarcho-syndicalisme, au socialisme, ou au communisme, mais une tentative de la base ouvrière, particulièrement des femmes, de défendre leurs propres intérêts du mieux qu’elles pouvaient dans une situation révolutionnaire. Pendant la révolution, les syndicats se sont intégrés dans l’Etat. Ils ont donc perdu leur statut d’organisations indépendantes dont la première priorité était de défendre les intérêts immédiats des ouvrier-es et de protéger les salarié-es insatisfait-es. Au lieu de cela, ils sont devenus responsables de l’efficacité de la production.
Au début de la révolution, les syndicats ont collectivisé les grandes usines et ont encouragé le contrôle ouvrier dans les ateliers plus petits. Cependant, même après que la collectivisation ou le contrôle ouvrier aient été institués, beaucoup de salarié-es étaient peu disposé-es à participer aux activités collectives sur le lieu de travail. Illes ont individuellement évité d’aller au conseil d’usine, aux réunions syndicales ou de payer des cotisations syndicales. En fait, les activistes prétendaient souvent que la seule façon d’obtenir des ouvrier-es qu’els suivent les assemblées était de les tenir pendant les heures travaillées et donc aux dépens de la production. Dans une grande entreprise métallurgique, seul 25 % du personnel a participé activement aux assemblées. Les ouvriers les plus actifs avaient plus de 30 ans, avaient au moins cinq ans d’ancienneté et une compétence technique. Nous pouvons supposer qu’ils étaient généralement des hommes. La plupart du temps, les assemblées ont simplement ratifié des décisions prises en petits groupes de militants ou de techniciens. Certain-es ouvrier-es - à nouveau, probablement beaucoup de femmes - se sont senti-es mal à l’aise et peu disposé-es à parler, et plus encore à protester, pendant les réunions. Par exemple, seules 29 des 74 ouvrières dans une société de vêtements dominée par l’UGT, une branche où les femmes étaient une écrasante majorité, ont suivi l’assemblée en octobre 1937. A d’autres réunions, même quand la base était présente, elles arrivaient souvent tard et partait tôt. Le personnel téléphonique UGT - apparemment pas intéressé par le double fardeau féminin du travail domestique et du travail salarié - critiquait les collègues femmes - la majorité d’entre elles ayant rejoint le syndicat après le 19 juillet - parce qu’elles n’avaient jamais suivi une seule assemblée. Quelques activistes ont, sans succès, proposé des amendes pour les membres qui n’étaient pas venu-es aux réunions.
Même quand les syndicats ont amélioré les conditions de travail, ils ont dû affronter l’individualisme des ouvrières. Au début de la révolution, un certain nombre de collectifs ont aboli le travail à la pièce dans le secteur. En conséquence, quand la productivité des salariées femmes a baissé, les militants masculins se sont trouvés à « sermonner les ouvrières ». Le journal CNT, Solidaridad Obrera, prétendait que les femmes qui faisaient les uniformes dans les nouveaux ateliers de couture de la CNT étaient contentes et montrait le contraste entre l’espace, l’éclairage et les machines des ateliers de la Confédération avec les conditions peu hygiéniques qui prévalaient avant la révolution. La CNT exposait chaque jour fièrement : « nous organisons certains ateliers avec le même système qu’aux Etats-Unis ». Même en juin 1937, la Junte centrale des tailleurs critiquait « la majorité immense » des ouvriers qui comprenaient mal la révolution. La base ne s’était pas encore rendu compte qu’elle devait se sacrifier et, en conséquence, les plans pour la collectivisation de l’industrie de la couture durent être remis à plus tard.
Différents rapports ont montré que les femmes non-militantes étaient peu disposées à se sacrifier pour la révolution, et ont parfois exigé d’être payées pour le travail « volontaire ». Le Sindicato de Vestir UGT avait invité quatre hommes et femmes à rassembler des vêtements pour les troupes. Les volontaires n’avaient pas « compris » qu’illes ne seraient pas rémunéré-es pour leurs services, et exigèrent leurs salaires. Comme dans d’autres révolutions sociales, la disparition des classes fortunées a privé un nombre considérable des domestiques féminins de leurs sources de revenu. Ces domestiques étaient souvent concerné-es par leurs problèmes personnels plutôt que par les besoins collectifs. Avec l’approbation du gouvernement régional catalan, la Generalitat, les comptes bancaires qui appartenaient aux employeurs avaient été gelés et employés pour payer le personnel de ménage. Les ancien-nes domestiques, cependant, gonflaient parfois la somme de leurs salaires en retard. Il se peut que leurs fausses revendications aient reflété l’individualisme des domestiques et des autres ouvrier-es qui étaient en contact personnel avec les employeurs. L’individualisme, cependant, ne s’est pas limité aux anciennes bonnes. Au lieu de faire grève pour la sécurité de l’emploi, comme c’était arrivé avant la révolution, les ouvrier-es étaient connu-es pour passer d’un syndicat à un autre pour trouver l’organisation qui serait la plus compatissante envers leurs demandes. Par exemple, quand l’Union Métallurgique de la Confédération refusa un travail à deux femmes membres de la CNT, elles essayèrent d’acquérir des cartes UGT.
S’adonnant à la pratique pré-révolutionnaire de participation aux grèves de loyer, de nombreuses familles refusèrent de payer leur loyer, ainsi que les factures de gaz et d’électricité. Plusieurs semaines après que la révolution ait éclaté, le Comité de contrôle du gaz et de l’électricité choisit d’employer les Milices antifascistes pour recouvrer les dettes « des éléments qui profitent des circonstances présentes pour éviter de payer leurs factures ». Deux mois plus tard, le comité s’est plaint à un représentant de l’Union de la construction CNT que beaucoup de consommateurs étaient malhonnêtes, « en essayant toujours de trouver une façon de récupérer des kilowatts libres. Malheureusement, des camarades prolétaires sont parmi les fraudeurs. Si nous attrapons un fraudeur de classe supérieure, nous lui donnons ce qu’il mérite, mais nous ne pouvons rien faire aux ouvriers puisque beaucoup plaident le fait qu’ils n’ont pas de travail. »
Les militant-es se sont demandé-es pourquoi, malgré l’achat de tous les fourneaux électriques disponibles, aucune augmentation de la consommation n’avait été enregistrée, impliquant que les ménages - vraisemblablement avec le consentement féminin - falsifiaient leur consommation. À la fin de l’année, le Comité étudia une proposition pour établir une section spéciale consacrée à la lutte contre la fraude. Les membres suggérèrent que les consommations de gaz et électriques ne soient plus séparées, mais rassemblées. Une lecture commune économiserait non seulement le travail, mais menacerait aussi les fraudeur-euses potentiels de l’interruption des deux sources d’énergie. Le Comité voulait prendre des mesures fortes pour forcer les consommateur-ices qui avaient déménagé pour éviter de payer les factures à leur ancienne adresse. Un militant demanda à la Commission de logement de ne pas louer à quelqu’un qui n’avait pas présenté le reçu d’une facture d’électricité récente. Quand la Gauche a commencé à perde en 1937, le désir de se sacrifier avait encore plus reflué et beaucoup d’ouvrières du textile semblent avoir diminué leurs efforts. Les syndicats ont répondu en essayant de réprimer les résistances individuelles au travail. Le comité de contrôle CNT-UGT de la société Rabat, où les femmes étaient majoritaires, avertit que n’importe quelle camarade qui manquerait le travail sans être malade perdrait sa paie ; on expliqua aux ouvrières de cette société que la désobéissance pourrait mener à des amendes et peut-être à la perte de travail, dans une industrie où - il faut le rappeler - malgré la mobilisation des hommes en temps de guerre, le chômage était élevé. On a exigé que toutes les ouvrières de Rabat suivent les assemblées sous la menace d’amendes. Seules les conversations concernant le travail étaient autorisées pendant des heures de travail. D’autres collectifs dans l’industrie de l’habillement, qui avait sans succès demandé aux ouvrier-es d’augmenter la production, mirent aussi en application des règles interdisant les conversations, le retard et même la réception d’appels téléphoniques.
Plutôt que de s’organiser pour des salaires plus élevés, comme cela s’était passé au début des années 1930, des femmes ont pris individuellement des vacances non autorisées pendant la révolution. Celles qui travaillaient dans des bureaux CNT ont ignoré le slogan, « pendant la guerre, il n’y a aucune vacance ». Les militant-es se sont senti-es contraint-es de prendre des mesures disciplinaires contre une dactylo qui avait refusé de travailler le dimanche. Ils ont craint que si la contrevenante n’était pas été sanctionnée, « beaucoup de camarades [femmes] manqueraient le travail le dimanche ». Une entreprise occupée avertit une employée que si elle continuait à manquer le travail pour « faire la fête », elle serait remplacée ». En termes semblables, le comité des ouvrier-es de la Casa Alemany, a menacé deux autres femmes qui avaient pris un « congé illimité ». Même les Mujeres Libres - le groupe des femmes de la CNT qui voulait intégrer les femmes dans le processus productif – se sont senties contraintes de réprimer l’individualisme. Elles accusèrent une de leurs militantes d’absences injustifiées, d’indiscipline et d’immoralité et prirent des mesures disciplinaires contre elle.
Les actions répressives des syndicats et de leurs organisations satellites sur le lieu de travail trouvaient un parallèle à un niveau plus élevé, par la reconstruction d’un Etat puissant. Dès mars 1937, quand la CNT participait au gouvernement, tou-tes les citoyen-nes entre 18 et 45 ans (à l’exception des soldats, des fonctionnaires et des invalides) durent posséder un « certificat de travail ». Les autorités pouvaient demander cette carte « à n’importe quel moment » et assigner ceux et celles qui ne la portaient pas au travail de construction des fortifications. « Si des fraudeurs étaient trouvés dans des cafés, des théâtres et d’autres lieux de distraction, ils pourraient être emprisonnés durant trente jours ». Dans les colonnes du quotidien CNT, Solidaridad Obrera, le socialiste Luis d’Araquistain louait la Confédération pour avoir reconnu « la nécessité de l’Etat comme un outil de consolidation des conquêtes révolutionnaires. Quelle joie pour un Socialiste de lire [...] le programme de la CNT. ». En mars 1938, la CNT se mettait d’accord avec l’UGT sur le fait que l’Etat devait jouer le rôle principal dans la direction des affaires militaires, économiques et sociales. En même temps, l’UGT et le CNT affirmaient que :
« Un salaire lié au coût de la vie et qui tienne compte des catégories professionnelles et de la productivité doit être établi. Dans ce sens, les industries contrôlées par [les syndicats] défendront le principe de "meilleure et plus importante est la production, plus grande sera la paie" sans distinction au sexe ».
L’échec des syndicats à se montrer à la hauteur de ce principe, et par conséquent, la persistance du salaire et de la discrimination au travail est peut-être partiellement responsable de l’indiscipline féminine et de l’indifférence. Les femmes se sont moins identifiées que les hommes au lieu de travail, à cause des paies basses et du travail sans intérêt. La révolution, quoique nivelant partiellement les différences de salaire, n’a détruit ni les salaires féminins inférieurs à ceux des hommes, ni la division sexuelle traditionnelle de travail. Quand la Fédération locale de l’UGT a eu besoin de secrétaires ou de personnel d’entretien, elle a naturellement cherché des femmes. A la Comedor Popular Durruti, tous les serveurs, les cuisiniers et les plongeurs étaient des hommes. Les deux premières catégories gagnaient 92 pesetas et la troisième 69 pesetas ; tandis que les sept femmes de ménage gagnaient 57,5 pesetas. A la grande usine Espanya Industrial, où plus de la moitié du personnel était féminine, les femmes gagnaient 45 à 55 pesetas par semaine ; tandis que les hommes en recevaient 52 à 68. Dans un grand collectif métallurgique, les femmes dans la même catégorie professionnelle que leurs homologues masculins gagnaient une paie inférieure. Le salaire minimal proposé pour des employés du téléphone était de 90 pesetas ; pour les femmes, 70. Quand les employés du téléphone UGT se sont assemblés pour discuter de la formation militaire, ils ont été d’accord - avec le consentement des participantes féminines - pour que les femmes reçoivent l’instruction comme infirmières, pas comme soldats.
Les syndicats étaient parfois insensibles aux besoins des femmes. Quand les fabricant-es de caisses ont rencontré des problèmes économiques, les militant-es CNT ont approuvé un mouvement pour ne pas payer des travailleuses, « qui avaient d’autres moyens d’appui ». Dans d’autres cas, certaines sociétés ont continué à fournir des cantines séparées par sexe, institutionnalisant efficacement la coutume d’avant-guerre qui - par exemple - a eu tendance à interdire aux femmes certains espaces sociaux. Dans un autre cas, les syndicats se sont sentis contraints de rationaliser l’industrie textile catalane arriérée pour augmenter son efficacité. La rationalisation a signifié que la main-d’oeuvre, surtout féminine, a dû travailler à l’usine et abandonner la maison, où elle exécutait le travail à domicile ou, comme on l’appelait, trabajo un domicilio. Les femmes ont donc eu un moindre contrôle de leur programme de travail, et les mères ont été forcées de prendre de nouvelles dispositions pour la garde des enfants.
La situation économique de plus en plus dure à Barcelone a rendu des femmes de moins en moins enclines à avoir le temps ou l’envie de se sacrifier ou même à travailler pour la révolution. Les femmes ont continué à porter le double fardeau du travail salarié et du travail domestique sans, bien sûr, l’aide d’appareils électroménagers modernes. Ces fardeaux ont augmenté avec détérioration rapide de la situation économique de la ville. L’inflation en temps de guerre a certainement aggravé le mécontentement, puisque des prix de gros ont été multipliés par 2,5 pendant la révolution. A la fin de 1936 et au début de 1937, les femmes ont manifesté contre le manque de pain. Les divers partis politiques, particulièrement les communistes, ont tenté d’employer le mécontentement causé par l’inflation pour augmenter leur popularité. En effet, les célèbres journées de mai 1937, quand les hommes communistes se sont battus contre les anarcho-syndicalistes et la gauche anti-stalinienne, pourraient avoir été causées, en partie, par le mécontentement féminin sur la hausse des prix et le manque d’approvisionnement. En tout cas, le 6 mai 1937, des manifestantes ont montré leur esprit de rébellion par l’action directe. Reprenant la tradition barcelonaise de saisie populaire des vivres, « un large groupe de femmes est descendu sur le port de Barcelone où elles ont pillé un certain nombre de camions remplis d’oranges ». Des produits alimentaires de base ont été rationnés et les ménagères ont été forcées d’attendre en longues files. En 1938, le lait, le café, le sucre et le tabac étaient très mal approvisionnés. Aucune mort de la faim n’a été annoncée en 1936 et seulement 9 en 1937, mais en 1938 le chiffre est monté à 296. La faim a continué à inciter d’autres manifestations de femmes à propos des produits alimentaires. Il n’est pas étonnant qu’en ayant à faire survivre elles et leurs familles, les femmes aient eu peu de temps pour les réunions des collectifs ou les autres affaires publiques.
Même dans des circonstances aussi difficiles, les révolutionnaires ont fait une tentative sincère pour réaliser certaines demandes féminines. Ils ont essayé de socialiser le travail domestique féminin en organisant des centres de garderie, qui, de manière assez prévisible, ont employé seulement des ouvrières. Cependant, les parents des travailleuses (généralement les mères ou les belles-mères) ont probablement continué à porter la principale responsabilité de la garde d’enfants. Les militants se souciaient parfois des enfants de compañeras [3] pour qu’elles puissent suivre les réunions syndicales. Les activistes ont légalisé l’avortement et ont rendu la contraception plus librement disponible. Ils ont simplifié les procédures de mariage et ont permis aux responsables des partis et des syndicats de certifier de facto les mariages, ou ce que les libertaires ont préféré appeler des « unions libres ». La révolution a favorisé l’amélioration de la retraite, de la santé et des assurances maternité.
Quand on compare à la situation d’avant-guerre, les révolutionnaires ont réduit les inégalités de salaire et ont offert plus d’emplois. En novembre 1937, de nouveau avec l’aide du gouvernement, les organisations catalanes ont participé à l’établissement d’un lnstituto para la Adapcion Profesional de la Mujer qui a permis à des femmes de maîtriser des compétences non seulement en secrétariat et en cuisine, mais aussi en ingénierie, en électricité et en chimie. Les Mujeres Libres, soutenues par la CNT, ont fait campagne pour réduire le taux d’analphabétisme élevé parmi les femmes et ont essayé de créer une école technique, qui fournirait aux femmes une formation pour leur permettre de remplacer les hommes mobilisés. Les militantes de cette organisation ont offert « de parcourir les usines et des ateliers stimulant les ouvriers à produire le maximum » et les encourager à se porter volontaire pour le travail de fortification et le front.
Le désir d’intégrer les femmes dans le processus productif était aussi l’objectif de la campagne contre la prostitution. En condamnant les hommes qui fréquentaient les prostituées, les activistes anarcho-syndicalistes et les membres des Mujeres Libres ont argumenté en faveur d’une réforme des membres de "la plus ancienne profession" par la thérapie par le travail. Elles ont voulu copier le modèle soviétique qui, pensaient-elles, avaient éliminé le trottoir. Federica Montseny, la ministre CNT, a affirmé que la révolution avait offert aux prostituées la chance « de changer leurs vies et faire partie de la société ouvrière ». C’était plutôt ironique, car il y a maintenant des preuves qu’avant la révolution, certaines femmes se prostituaient précisément pour éviter le travail productif et les conditions de travail miséreuses. La campagne anti-prostitution a reflété un certain puritanisme parmi les militant-es. Bien que, comme mentionné, l’avortement ait été légalisé et l’information sur la régulation des naissances rendue disponible, certains activistes ont recommandé que la sexualité et les naissances soient retardées à la fin la révolution, « quand les outils entonneront la symphonie du travail ». La sexualité et la prostitution ont sans aucun doute persisté, d’autant plus que les domestiques féminines, qui avaient perdu leurs emplois à cause du départ des classes fortunées, avaient rejoint les professionnelles.
La campagne de l’UGT pour adapter les femmes au lieu de travail était couronnée de plus de succès que les efforts contre la prostitution. Le syndicat marxiste voulait coopérer avec la CNT pour enseigner aux apprenties féminines comment produire les matériaux nécessaires pour la guerre. Selon le secrétaire général de la Fédération UGT de Barcelone, « les femmes catalanes démontraient toujours un amour du travail et une grande capacité sur le lieu de travail ». Il exigea que certains collectifs en finissent avec leur pratique de payer les femmes moins que des hommes même quand elles exécutaient le même travail. Il pressa également les syndicats de promouvoir des femmes aux positions de direction dans leurs organisations. Dans quelques ateliers, les femmes commencèrent à mener une campagne en faveur de l’égalité des salaires. Dans d’autres, les mères reçurent un congé payé de maternité de douze semaines, et trente minutes quotidiennes pour les soins. En août 1938, une dirigeante UGT demanda aux membres des syndicats d’étudier les possibilités d’embaucher plus de femmes. Les réponses des dirigeants syndicaux révèlent à la fois l’état de l’industrie catalane et une gamme d’attitudes masculines envers les travailleuses. Le Secrétaire général de l’Union des travailleurs du bois répondit que le manque de matières premières et d’énergie électrique empêchait l’intégration des femmes dans sa branche. Il affirmait aussi que les femmes ne possédaient pas les compétences pour se substituer aux travailleurs du bois, dans ce secteur toujours non-standardisé. De plus, ce leader UGT sexiste pensait que « avec des exceptions honorables », les femmes étaient qualifiées uniquement pour des tâches « simples », comme le vernissage, pas pour les travaux lourds ou dangereux. Le syndicat UGT des travailleurs de la santé publique prétendait que le monopole du travail CNT l’a empêché d’embaucher plus de femmes, qui étaient pourtant « biologiquement » mieux adaptées pour les services médicaux.
Dans d’autres secteurs, les besoins de la guerre ont amené des changements dans la division traditionnelle du travail. Dans les bureaux de poste ruraux, les femmes ont occupé les places de parents masculins mobilisés ou décédés, et dans les villes, elles ont commencé à travailler comme transporteurs de courrier. Malgré le souvenir de briseuses de grève au début des années 1930, le responsable UGT des syndicats postaux recommanda que les femmes servent aussi dans les bureaux. Le Secrétaire général du syndicat UGT du Papier pensait qu’avec une formation appropriée, les femmes seraient capables d’exécuter la plupart des emplois dans la production de papier, mais pas dans la fabrication de carton qui exigeait plus de force brute. Le syndicat du Papier était fier de son record d’emploi féminin, dans les usines et dans le syndicat lui-même. Le syndicat de l’Imprimerie citait un exemple où deux imprimeuses produisaient aussi bien que leurs homologues masculins. Dans l’industrie textile, 80 % des 250 000 ouvrier-es étaient des femmes, mais seul le manque de matières premières et la perte des marchés a empêché l’emploi de plus de femmes encore.
Ainsi, malgré des efforts sincères pour intégrer les femmes dans un projet social collectif, l’individualisme féminin a persisté et a peut-être augmenté, comparé à la situation pré-révolutionnaire. Autrement dit, la conscience féminine menait sans doute tout autant à des actions individuelles pour défendre ce que l’historienne Temma Kaplan a nommé l’objectif de « préservation de la vie », qu’elle favorisait une défense collective du rôle "nourricier". L’individualisme féminin a reflété l’aliénation des organisations qui ont prétendu représenter le prolétariat. Cette indifférence envers les partis et les syndicats démontre la priorité immédiate que beaucoup de femmes ont accordée aux questions personnelles. Le travail pour une société socialiste ou libertaire éloignée était un but secondaire. En outre, les femmes avaient moins de raison de se sacrifier. Les mâles ont continué à dominer les organisations révolutionnaires, et même si les opportunités pour les femmes se sont étendues pendant la révolution, il était clair, que les hommes continueraient à régner même si la Gauche était victorieuse. Les militants masculins et les soldats ont été sûrs de souffrir si la République était perdue, mais les femmes, pour leur part, pouvaient trouver plus simple d’éviter de s’identifier comme « rouges », et s’épargner ainsi l’emprisonnement ou la mort.
Il ne s’agit pas de soutenir que les femmes prolétaires étaient crypto-franquistes, mais plutôt qu’elles opposeraient une résistance à n’importe quel régime - de gauche ou de droite, qui empiéterait sur leurs propres intérêts personnels sur le lieu de travail, dans les rues, ou à la maison. Des historiens sociaux ont négligé l’individualisme pour plusieurs raisons. Par sa nature même, l’histoire sociale implique l’étude des groupes, pas des individus, Bien que son centre se soit éloigné des partis et des syndicats vers les mouvements populaires et le genre, elle continue d’examiner des ensembles. De plus, l’individualisme est presque toujours associé au capitalisme libéral, voire à la réaction. L’individualisme, cependant peut avoir un aspect critique et même subversif. Le refus de travailler et de se sacrifier s’oppose à la vision révolutionnaire sociale des marxistes et des anarcho-syndicalistes. Beaucoup de femmes n’ont pas trouvé de satisfaction sur le lieu de travail collectivisé et elles ont refusé de se consacrer à une révolution dont le but était de les transformer en bonnes travailleuses salariées. Pour combattre leur résistance à la discipline sur le lieu de travail, l’opportunisme et la petite fraude, les anarcho-syndicalistes ont institué un ordre répressif dans les collectifs et ont collaboré avec les socialistes et les communistes pour construire un Etat puissant capable de contrôler les individualismes subversifs. Les héritiers des traditions anarchistes et marxistes ont échoué à surmonter la division entre les individues féminines et la société.
[1] Note de l’éditeur (ainsi que les notes suivantes) : En 1936, les forces nationalistes espagnoles convergeaient en quatre colonnes vers Madrid, demeurée aux mains des républicains. La radio fasciste annonça que leur cinquième colonne était déjà sur place. Cette manœuvre de guerre psychologique désorganisa la défense en faisant régner la suspicion. L’attaque nationaliste sur Madrid échoua cependant (Wikipédia).
[2] En allemand, littéralement : entêtement, obstination.
[3] Camarades femmes, en castillan.
Texte original paru dans International Review of Modern History, n° XXXVII (1992), avec des notes et une bibliographie abondante, non traduites.
Traduction : Nico, pour le Cercle social (légèrement retouchée pour cette réédition).
Michael Seidman est un historien américain.
Ce texte a notamment été publié en 2004 sur :
http://www.mondialisme.org/
http://cnt-ait.info/
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Réédité à Grenoble en 2008.
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