A


Alternatives au flicage basées sur la justice handie

mis en ligne le 1er mars 2025 - The Abolitionist and Disability Justice Coalition

Nous saluons et soutenons les mouvements pour la justice transformatrice et handie qui ont rendu possible ce travail.

Sommaire

Criper l’abolition
Principes fondamentaux basés sur la justice handie
Nous devons refuser :
Glossaire

Criper l’abolition

L’abolition ne se résume pas a mettre fin aux espaces et aux pratiques d’incarcération et de flicage. Fondamentalement, l’abolition consiste a réinventer de meilleures conditions de vie, de sorte qu’il devienne impensable d’avoir recours aux prisons et au flicage. Agir face aux dommages et aux conflits dépasse largement la prévention et la gestion de crise. L’abolition concerne tous les espaces qui produisent des dommages et les érigent en conditions de vie normale.

S‘en remettre aux professions du travail social et de la psychiatrie, qui servent les intérêts de l’Etat, c’est occulter que le complexe institutionnel de santé mentale, comme présenté une “alternative” a la police et aux prisons, perpétue en réalité la surveillance, l’enfermement et la répression de l’Etat avec une impunité assurée par des silences sédatés et structurels.

Ces systèmes de flicages "plus doux" contraignent les personnes handicapées et neurodivergentes a subir violence, incarcération et discrimination, tout en les excluant des prises de décisions impactant directement leurs vies.

Les abolitionnistes ont créé le terme “complexe carcéro-industriel" pour souligner que le problème ne se limite pas aux prisons, puisque le système économique capitaliste est structuré par des institutions punitives. Parallèlement, nous devons aussi mettre fin au complexe médico-industriel, structuré par le profit. Ainsi, une perspective abolitionniste ancrée dans la justice handie doit aussi être anticapitaliste. Nous ne devons pas reproduire les systèmes que nous tentons d’abolir. Les solutions nécessaires exigent de centrer les besoins, les idées et les témoignages des personnes les plus vulnérables afin de créer les communautés pleines de vie que nous désirons et méritons.

Nous méritons un monde ou nos expériences et nos identités ne sont pas médicalisées, marchandisées, pathologisées et criminalisées.

Nous méritons un monde où chaque personne est encouragée et soutenue dans sa résilience et son développement. Nous luttons pour que notre valeur et notre humanité soient reconnues. Alors que les révoltes et les appels a abolir toutes formes d’incarcération et de flicage se poursuivent, nous devons saluer les contributions des personnes organisatrices et survivantes noires, autochtones, non-blanches, queers, trans, intersexes et non-binaires, immigrées, migrantes et réfugiées, handicapées et neurodivergentes, femmes et fems, jeunes ou âgées, dont la résistance et la résilience nous ont permis de vivre ce moment.

Alors que se diffuse l’appel des organisateurs, des organisatrices et des mouvements noirs a définancer la police et a investir dans les communautés noires, une question émerge : comment assurer notre sûreté collective ?

Nous sommes des abolitionnistes survivant’es de la psychiatrie, des personnes handicapées et leurs complices. Nous pensons qu’il est nécessaire de dénoncer les stratégies aux racines validistes et psychophobes. Elles reposent sur la médication et l‘institutionnalisation forcées, la surveillance et le contrôle.

Ainsi, certaines propositions sont inquiétantes parce qu’elles suggèrent de remplacer le flicage et les prisons par du travail social, des traitements de santé mentale et des hospitalisations. Le problème étant que l’incarcération médicale et psychiatrique font partie du système global de flicage et d’incarcération que nous devons démanteler.

Le flicage est fondamentalement négrophobe, anti-autochtone, raciste, validiste, anti-pauvre, patriarcal, anti-queer, anti-trans et anti-immigration. Il fonctionne comme prévu. Il n’y a rien à réparer ; il faut y mettre fin.

Principes fondamentaux basés sur la justice handie

Notre tâche est d’imaginer et de construire un monde où chaque personne est en capacité de mener une vie épanouissante sans craindre le flicage, la discrimination, la violence ou l’isolement. Notre participation a tous et toutes est nécessaire si nous voulons construire des communautés durables aux tempêtes à même de survivre politiques, environnementales et sociales qui nous entourent dans le monde entier. OU nous n’aurons plus a craindre d’être entièrement nous-mémes.

L’appel "We keep us safe" nous rappelle que les solutions proposées doivent permettre a tout le monde, y compris aux personnes handicapées et neurodivergentes, d’exercer leur autodétermination dans les meilleures conditions. Nous méritons tous et toutes les ressources, le soutien et les savoirs nécessaires pour s’aimer et se protéger, individuellement et collectivement. Nous proposons de suivre les principes de la justice handie pour élaborer des alternatives au flicage et a l’incarcération.

Justice handie : une perspective de libération qui vise la fin du validisme en lien avec la fin de toutes les autres formes d’oppression. Les principes de la justice handie ont été définis par Sins Invalid, un collectif de performance et de justice handie, centré sur les personnes handicapées non-blanches, queers, non binaires et trans, qui est basé dans la Baie de San Francisco.

Les personnes les plus touchées mènent le mouvement

1. Les personnes les plus touchées par les systèmes de flicage et de contrôle doivent mener le processus d’élaboration des politiques, des pratiques et des principes.

2. Aucune intervention ne doit forcer les personnes a être sous traitement contre leur gré lorsqu’elles ont besoin de soutien, de soins ou d’apaisement.

3. Chaque dispositif doit être accessible, quelles que soient sa langue, sa culture ou son identité.

4. Le rôle décisionnel, l’expérience, la volonté et les besoins des personnes neurodivergentes et/ou handicapées doivent être pris en compte avant ceux des professionnel’les.

5. Les financements doivent aller en priorité aux ressources et aux projets créés et menés par des personnes ayant une expérience vécue. Y compris pour le travail éducatif et culturel.

6. Chaque personne doit être au centre de ses soins. Les soins doivent être accessibles et fondés sur nos besoins et nos identités spécifiques.

Soutien et intervention centrés sur la communauté - se former

1. Tout le monde doit avoir accès à l’éducation permettant d’acquérir les compétences indispensables a sa sureté. L’éducation doit être gratuite, inclusive et accessible.

2. Les personnes neurodivergentes et/ ou handies doivent a la fois être en mesure d’enseigner et d’apprendre.

3. Les alternatives doivent privilégier les stratégies de sûreté proactives, et non les stratégies réactives fondées sur la punition.

Privilégions les solutions qui maintiennent et stabilisent les gens dans leur communauté a travers des ressources d’entraide, des réseaux de relations sociales et d’associations, et un accès au logement, au travail et à l’espace public.

4. Diffusons des outils accessibles tels que les Mad Maps, les plans de sûreté, les POD maps et les T-Maps.

Fournissons des ressources directes aux gens

Tout le monde, en toute circonstance, doit avoir accès a du soutien, des services, une éducation et un logement dans sa communauté.

Priorisons l’accès a un logement abordable et accessible, aux services de garderie, aux soins de santé, aux transports et a l’alimentation — en tant qu’éléments essentiels a la sûreté et au bien-être collectifs.

Ils doivent être accessibles et éviter d’imposer des valeurs culturelles.

Tous ces soutiens et ces services ne doivent pas causer de dommages supplémentaires.

Ils doivent mettre en avant le rôle décisionnel des personnes noires handicapées. Ils doivent aussi encourager le rôle décisionnel des personnes autrement marginalisées.

Ils doivent être fournis de façon à s’adapter aux gens et a respecter leur choix.

Tout le monde peut vivre dans la communauté, quel que soit son handicap ou toute autre condition.

Démanteler le validisme et décriminaliser nos vies

1. Les alternatives ne doivent pas être empreintes de validisme/psychophobie, un système qui détermine quels corps et quels esprits sont considérés comme normaux, acceptables et valables. Nous devons remettre en question et changer cette norme néfaste.

2. Privilégions la réduction des risques. Décriminalisons l’usage de drogue, le travail du sexe, la mendicité et supprimons les politiques de "tolérance zéro" qui impactent de façon disproportionnée les personnes handicapées et sans logement.

3. Finançons et développons des projets proposant des ressources et des formations en pratiques de médiation, de restauration et de responsabilisation, afin de soutenir le rétablissement et la réintégration dans la communauté.

4. Décriminalisons et dèstigmatisons le suicide. Le signalement obligatoire et la criminalisation du suicide empêchent de nombreuses personnes d’accéder au soutien dont elles ont besoin. Nous devons pouvoir parler du suicide et le dèstigmatiser afin d’offrir aux gens le soutien nécessaire.

NOUS DEVONS REFUSER :

 Les réformes qui remplacent le flicage et la criminalisation par des services sociaux ou médicaux obligatoires.

 Les réformes qui exigent d’accepter des médicaments ou tout autre traitement pour éviter l’incarcération / L‘hospitalisation ou pour avoir accès a d’autres services.

 Les réformes qui augmentent le budget des services sous contrainte tels que les hôpitaux psychiatriques, les visites obligatoires, ou la psychiatrisation en général.

 Les réformes qui reposent sur l’usage de contentions ou de punitions corporelles, comme le taser.

 Les réformes qui imposent un fichage, un contrôle, ou une surveillance.

 Les réformes qui reposent sur le signalement obligatoire.

 Les réformes qui reposent sur l’extension des services de protection des majeurs et des services de protection de l’enfance.

 Les réformes qui fondent l’éligibilité au logement ou a d’autres services sur la sobriété, l’acceptation du traitement, l’absence d’automutilation ou d’autres critères restrictifs.

 Les réformes qui isolent et ségrèguent davantage les gens.

Glossaire

Abolition : Perspective politique visant a créer une société qui élabore des réponses aux dommages et aux conflits sans recourir a la punition et l’incarcération.

Complexe carcéro-industriel : Chevauchement d’intérêts gouvernementaux et industriels utilisant la surveillance, le flicage et l’emprisonnement pour répondre aux problèmes économiques, sociaux et politiques.

Complexe médico-industriel : Réseau d’entreprises fournissant des services et des produits de santé pour faire du profit, au détriment du soin et du bien-être.

Mad Maps : Documentation de santé a créer par soi-méme pour favoriser son bien-être en mettant en évidence ses objectifs, ses valeurs, ses signes de difficultés et ses stratégies.

Validisme : Oppression subie par les personnes handicapées, ou pergues comme handicapées et/ou les personnes qui ne correspondent pas aux définitions officielles de la normalité.

Ni murs, ni Cages, libérez nos Camarades !

Plus d’informations, dont le texte intégral, des ressources et des traductions, disponibles sur :

https://abolitionanddisabilityjustice.com/

Des questions ou des suggestions ?

Envoyez-nous un e-mail à : abolitionanddisabilityjustice@gmail.com

Conçu par Euree Kim



ce texte est aussi consultable en :
- PDF par téléchargement, en cliquant ici (6.2 Mio)
- PDF par téléchargement, en cliquant ici (6.2 Mio)