V
Vulvatomique
Petit traité d’auto-gynécologie sur les micro-habitants.x.tes du Vagin et de la Vulve
mis en ligne le 26 août 2022 - Rosae canine
’’La flore est l’ensemble des espèces végétales présentes dans un espace géographique ou un écosystème déterminé. Par extension de sens par analogie, le terme « flore » ou « microflore » désigne aussi l’ensemble des micro-organismes présents en un lieu donné. On parle de flore intestinale ou de flore cutanée pour les bactéries présentes dans l’intestin ou à la surface de la peau, par exemple. Le terme de flore est scientifiquement incorrect et fait référence à l’époque où les bactéries étaient classées dans le règne végétal. La communauté scientifique l’a ainsi rebaptisé microbiote qui évoque, sémantiquement, davantage des micro-organismes vivants (grec bios, « vie ») qu’un monde végétal suggéré par le mot flore. ’’
Giulia Enders, Le charme discret de l’intestin : tout sur un organe mal-aimé, Actes Sud, 2015, p. 87
Nous sommes des écosystèmes. Notre peau, nos intestins, notre bouche, notre vagin… sont les lieux d’une diversité de vies.
Ces microbes qui nous peuplent communiquent entres individus de la même espèce mais aussi de manière inter-espèces, aux travers de mécanismes complexes et même de signaux électriques. Au même titre que les arbres peuvent communiquer entre eux, grâce au mycélium enfoui sous terre : nos bactéries échangent, vivent, se battent.
Nous vivons en symbiose avec celles-ci sans même remarquer leurs existences.
Nos sociétés internes, nos microbiotes.
De belles plantes sauvages à l’intérieur de nous.
Entretenir sa flore serait donc un véritable jardinage intime, un passage logique d’apprentissage, pour se faire fonctionner, pour se cultiver.
Se soigner c’est adopter des techniques d’équilibrage de ces milieux bactériens.
Antibiotique de par son étymologie grecque veut littéralement dire : anti-vie. L’idée durant son utilisation est donc de tuer. Tuer les bactéries à l’origine d’une invasion dans le corps. Il y a des antibiotiques à spectre réduit, qui ciblent leur victime à coup de poignards, et d’autres à spectre large qui explosent façon Fukushima.
Choisir sa technique de soin, c’est un peu comme si on choisissait d’entretenir son jardin à la main ou à la tondeuse : selon la gravité de l’infection, on sélectionne, on essaye, on consulte, on s’écoute, on apprend. Parfois, nous avons besoin d’armes mortelles de destruction massive, parfois pas. On peut juste se défendre en inséminant des allié·es, en ajoutant plutôt qu’en enlevant : en envisageant les Probiotiques.
Un vagin acidulé !
Les microbiotes de la bouche, intestinaux et vaginaux sont majoritairement composés de bactéries du genre Lactobacillus issus de différentes espèces : Lactobacillus crispatus, gasseri, jensenii, iners… entre autres. Il en existe plus de 200 différentes. La variété des bactéries change d’une personne à l’autre : chaque personne héberge plusieurs espèces de Lactobacilles différentes.
Il existe une réserve de Lactobacillus dans le rectum qui cheminent vers le vagin en cas d’absence ou manque de ceux-ci, à travers le film hydrolipidique de la peau (Il y a en revanche, des bactéries dans le colon qui ne doivent pas se retrouver dans le vagin !).
Le microbiote du vagin possède des caractéristiques particulières : les lactobacilles transforment les gros sucres, appelés glycogènes, sécrétés par les cellules de la muqueuse vaginale, en acide lactique. On peut directement faire l’analogie avec la fermentation de certains yaourts, ou même de lactofermentation.
Nos bactéries acidifient le milieu en maintenant un pH de 3,8 à 4,5 dans le vagin. A part les lactobacillus et les candida, aucun germe ne peut prétendre se développer en quantité à cette acidité : c’est un moyen de défense et de prévention très efficace contre les I.S.T (Infections Sexuellement Transmissibles) et germes pathogènes.
Plus subtil que le vagin aux dents acérées du film Teeth sortie en 2007, notre minou fait dans l’arme chimique : certaines lactobacilles sont capables de produire des antibiotiques naturels ou même de l’eau oxygénée carrément toxique pour le Virus de l’Immunodéficience Humaine (VIH) ou le papillomavirus.
D’où l’intérêt de prendre soin de nos bactéries internes !
N.B : Malgré cette auto-défense aidante, il est évidemment recommandé de se protéger contre les I.S.T à l’aide de digues ou/et de préservatifs !
AUTO-DIAGNOSTIC
Les Lactobacilles conservent le Ph acidulé du vagin : un pH plus haut veut donc dire : une absence de ces bonnes bactéries au profit d’autres.
Si le Ph est anormalement basique, cela indique souvent une infection. Il est facile de s’auto-diagnostiquer avec des bandelettes pH trouvables en pharmacie ou dans des boutiques de confection de cosmétiques maison. Comme les languettes contiennent des produits chimiques : il est préférable de récupérer le liquide de la muqueuse vaginale à l’aide d’un coton-tige ou d’un bâtonnet en bois. On étale alors le prélèvement sur une bandelette test qui va changer de couleur. Il suffit de regarder l’échelle colorimétrique fournie pour lire le résultat.
Attention : le Ph du sang et du sperme est plus alcalin et peut troubler les résultats du test.
Faire attention s’il y a présence de signes de menstruations ou de tout autre saignement ou si moins de 12 heures se sont écoulées après une relation sexuelle ou une douche vaginale.
• Acide (3,5 à 4,5) : suffisamment de lactobacilles ;
• < 4,5 Déséquilibre de la flore, sans symptômes : on peut prévenir des infections potentielles en prenant des probiotiques ;
• < 4,5 Déséquilibre de la flore, avec symptômes : pertes, odeurs, brûlures, irritations… Il vaut mieux faire un prélèvement vaginal qui indiquera l’origine de la pathologie et consulter et/ou se soigner.
N.B : Ce n’est pas parce qu’on a le vagin assez acide qu’on a pas forcément de I.S.T !
Écosystème vaginal
Comme vu plus haut, le vagin est habité par des bactéries capables de le défendre.
Il n’y a pas de méchantes ou de bonnes bactéries, c’est plus complexe. Le penseur Murray Bookchin exprime l’idée que le mutualisme, et non la prédation, aurait été le principe directeur de l’évolution vers des formes de vie aérobies éminemment complexes, devenues courantes aujourd’hui.
C’est une question d’équilibre et d’ensemble : les bactéries sont capables de communiquer entre elles et sont interdépendantes. Une flore vaginale en bonne santé sera riche d’espèces très différentes qui se côtoient sans soucis mais dans les bonnes proportions.
Peuplent habituellement le vagin une majorité de Lactobacilles ou Flore de Doderlein mais aussi une diversité d’espèces pouvant être à l’origine d’infections comme le Candida ou le Gardnerella, en petite quantité. Celles-ci, quand le corps est en bonne santé ne vont pas proliférer, elles font parties intégrantes du microbiote !
Dans cette idée de mutualisme, les bactéries si différentes qu’elles soient, cohabitent en harmonie. Si le milieu change pour X raisons, cet équilibre change aussi, d’autres bactéries se déploient et des symptômes peuvent se déclarer.
La flore vaginale n’est pas manichéenne, et demande qu’on s’y intéresse avec subtilité, ce sont des sociétés internes à comprendre avant de s’aventurer dans l’auto-soin.
Il est important de comprendre la cause du changement de milieu pour pouvoir agir dessus.
En 2017, une étude sur les micro-organismes montre que les bactéries d’une même espèce sont capables de créer des “biofilms” : sorte de remparts nécessitant un nombre important d’individus. Les bactéries communiquent entres elles par l’intermédiaire de molécules spécifiques appelées “quorum sensing” (détection du quorum) capables de détecter si le nombre de leur concitoyen est assez élevé, si c’est le cas, les bactéries sont capables de résister aux antibiotiques, alors qu’isolées elles étaient terrassées par ces médicaments.
Il est donc important de ne pas laisser s’installer des affections chroniques où les bactéries vont tisser des liens forts et devenir beaucoup plus dures à déloger.
Il convient de dire qu’on a pas besoin de se laver à l’intérieur du vagin. Des mécanismes sont mis en place à partir de l’adolescence pour le nettoyer. Des sécrétions sont produites sur les parois vaginales : la perline et dans l’utérus, au niveau du col, le liquide cervical. Ces flux peuvent changer de consistances à différents moments du cycle menstruel, ils sont généralement blanchâtres et deviennent plus transparents et liquides à l’ovulation. Les observer, les sentir (et même les goûter de temps en temps !) nous permet de repérer les éventuelles infections qui modifient leurs consistances.
Rina Nissim, naturopathe suisse, préconise des douches vaginales acides pour rééquilibrer le pH. Ceci peut être cohérent si l’on a plus du tout de Lactobacilles qui peuplent le vagin. Si cette méthode est utilisée sur une flore plus équilibrée il y a un risque de modification inutile de la flore. Il est donc judicieux d’employer cette méthode seulement si on est sûrs·x·es que la flore est totalement dépeuplée. On peut le savoir grâce à des prévèlements vaginaux en laboratoire.
Score de Nugent, kesako ?
Le score de Nugent est un résultat d’examen gynécologique permettant de vérifier le nombre de Lactobacilles présents dans la flore vaginale. On prélève la flore dans le vagin à l’aide d’un écouvillon. Réalisable soi-même en laboratoire, gratuitement sur ordonnance.
Les résultats du test se présentent sous forme d’une échelle allant de 0 à 10 : plus le score est élevé, moins il y a de lactobacilles.
Résultats :
– Si le score obtenu est compris entre 0 et 3, on est en présence d’un vagin sain et d’une flore équilibrée ;
– Entre 4 et 6, il s’agit d’une flore intermédiaire susceptible d’évoluer dans un sens comme dans l’autre ;
– Au-delà de 7, les risques de vaginose bactérienne sont très probants, flore altérée.
Ecosystème vulvaire
A contrario du vagin, la vulve n’a pas de système auto-nettoyant. Les pH observés s’étendent de 4,8 à l’entrée du vagin jusqu’à 6 ou 7 au niveau des frontières externes des lèvres.
Les poils constituent un vrai rempart aux infections. D’abord de manière mécanique : ils protègent des frottements des vêtements. Mais ils permettent aussi l’hydratation de la muqueuse vulvaire et la préservation du film hydrolipidique de la peau (nous avons vu plus haut que les Lactobacilles se déplacent par ce film du rectum au vagin). Sans poils, on note que les envahisseurs s’engouffrent plus facilement dans l’épiderme.
Il convient donc aussi de se laver, si on le souhaite, avec des produits qui ne sèchent pas trop la peau afin de préserver le microbiote cutané et vulvaire.
Les tatouages et piercings n’ont pas d’influence sur la flore vulvaire (mais peuvent toutefois entraîner des infections ou allergies selon les personnes).
TRANSITION DE GENRE /POST – OP
Pour les personnes ayant reçu une hystérectomie (ablation d’une partie ou de l’intégralité de l’utérus), le vagin va parfois cesser de s’autolubrifier en fonction des parties retirées. La prise de Testostérone peut aussi modifier la composition de la flore vaginale. Comme énoncé plus haut, les cellules de la paroi du vagin sécrétent la perline avec l’apport d’oestrogènes : si le taux d’oestrogènes baissent cela a donc un impact direct sur la flore.
Dans le cas d’une vaginoplastie, les parois du vagin ne sont pas constituées de cellules capables de produire de la lubrification interne, la flore se rapproche donc de celle de la peau. Néanmoins, une lubrification interne peut s’opérer grâce au liquide pré-séminal et la prostate.
AUTO – WASH ! ! !
Voici une liste de recommandations, trouvable dans divers livres sur le confort vaginal ou la gynécologie naturopathique qui se rejoignent plutôt :
• Se laver la vulve avec la main plutôt qu’avec un gant (nid à microbes) ;
• Ne pas avoir recours aux douches vaginales pour ne pas éliminer les bactéries de la flore ;
• Se nettoyer d’avant en arrière (de la vulve à l’anus) et non l’inverse ;
• Ne pas porter de vêtements trop serrés ou en synthétiques qui ne laissent pas respirer votre mistigri : préférez des vêtements et culottes en coton que l’on pourra repasser ou laver à haute température en cas d’infection ;
• Éviter les milieux chauds et humides, le port d’une tenue de bain trempée au contact de la vulve ;
• Pendant les règles : bien stériliser ses protections en tissu et les changer régulièrement. Préférez des matières naturelles aux tampons chimiques contenant des agents blanchissants ;
• Attention durant des rapports sexuels, à être bien lubrifié·x·e : le frottement lors d’une pénétration peut irriter et provoquer des vaginites ou faciliter le développement d’infections ;
• Ne pas se retenir d’uriner et uriner systématiquement avant/après chaque rapport sexuel ;
Pour le lavage de la vulve les avis divergent un peu. C’est un casse-tête pour la plupart des personnes de devoir choisir un produit safe, efficace et respectueux des différentes flores dans cette région. Rina Nissim, p.74 de Mamamélis, nous préconise un savon acide car le savon alcalin “diminue l’acidité du vagin”.
D’autres médecins gynécologues, par exemple Jean-Marc Bohbot, moins underground et engagé que notre chère Rina, proscrivent les savons de Marseille ou d’Alep trop agressifs. L’eau claire est également décriée car “inefficace pour éliminer les germes présents” (p.178 du livre Prenez-soin de votre microbiote vaginal). Il redirige vers des produits d’hygiène intime de grandes marques pharmaceutiques ou bien vers les pains dermatologiques sans savon.
Ma gynécologue, jeune et féministe, me recommande de ne pas me laver la vulve avec du savon car j’ai une flore fragile qui pourrait se déséquilibrer : je reste donc à l’eau claire.
Un consensus (au moins un !) semble exprimer un rejet des savons parfumés, saveurs cancer. Les gel douches, douches vaginales et autres déodorants, trop agressifs, seraient un facteur aggravant les affections chroniques et une source de perturbateurs endocriniens à éviter.
A vous de vous faire une idée personnelle de la chose la plus adaptée à votre physiologie.
Ça fait quoi à ma flore ? -Causeries possibles de déséquilibres internes.
Changement d’alimentation
Il est possible que des déséquilibres surviennent durant des changements de mode de vie alimentaire, pendant un long voyage dans une autre région du monde par exemple.
Une copaine me disait qu’ielle avait de grosses douleurs au niveau de l’utérus depuis un voyage en Asie dans sa vingtaine : on peut faire l’hypothèse que l’alimentation à base de soja, qui contient beaucoup d’oestrogènes, n’y est pas forcément pour rien (même si on ne peut pas en être sûr). Notons que selon notre lieu de naissance, nous avons une certaine alimentation depuis l’enfance : la fille d’une gynécologue me disait que sa mère avait remarqué que beaucoup de jeunes femmes vegan ayant changé d’alimentation brutalement subissent des dérèglements hormonaux, surement dûts, selon elle, à l’absorption de soja et d’avoine en compensation de la viande, qui sont oestrogènes like.
Le Tabac
On retrouve des particules de nicotine dans le vagin des fumeureuses qui seraient potentiellement à l’origine d’une diminution de la qualité du métabolisme cellulaire.
Les personnes qui fument régulièrement ont également un taux d’oestrogènes plus bas, ce qui a pour conséquence la sous production de glycogène par les cellules vaginales, donc moins de nourriture pour les lactobacilles. Le tabac peut donc être un facteur aggravant le déséquilibre de la flore.
Le stress
Il est utile sur le court terme pour répondre à une sollicitation mais peut devenir handicapant s’il devient chronique. Le stress induit une surproduction de cortisol et d’adrénaline : hormones produites dans les glandes surrénales. Ces hormones monopolisent le corps pour s’adapter à la situation stressante jusqu’à épuiser le système immunitaire en nous rendant plus vulnérable aux infections.
L’étude “The association of psychosocial stress and bacterial vaginosis in a longitudinal cohort” exécutée en 2006, a proposé à 3614 femmes non enceinte de 15 à 44 ans de s’étudier pendant un an : elle devait évaluer leur stress sur une échelle de 1 à 5. Selon les résultats de l’étude, la présence de vaginose bactérienne a l’air de corréler avec l’impression globale de stress.
Prises d’hormones
Les prises de Testostérone peuvent modifier la flore vaginale.
Les contraceptifs hormonaux modifient aussi considérablement les taux d’hormones dans le sang. Ils ont forcément un impact sur le corps. S’il y a modification du milieu vaginal après un changement de contraceptif, cela peut être un facteur de modification du milieu.
Antibiotiques
Certains antibiotiques sont une arme massive de guerre pour notre flore. Il convient de faire une cure de probiotiques après leur prise pour ne pas subir un dérèglement facheux.
Pénétration
Les rapports sexuels avec pénétration peuvent modifier le milieu. Par frottements, dûts à un manque de lubrification mais aussi, si la personne munie d’un pénis éjacule à l’intérieur du vagin. En effet, le sperme a un pH bien moins acide que la flore.
PROBIOTIQUES KESAKO ? ? ?
Des probiotiques peuvent être utilisés afin de rééquilibrer la flore. Deux voies d’administration sont possibles pour les infections gynécologiques.
Les Lactobacillus par voie vaginale empêchent la croissance des bactéries invasives sur certaines dysbiose par le biais de deux mécanismes principaux : l’inhibition de l’adhérence d’agents pathogènes et la production de composés antimicrobiens tels que le peroxyde d’hydrogène, l’acide lactique et les bactériocines.
Dans sa thèse sur la vaginose de 2017, la chercheuse Adeline Delalande nous explique que la voie vaginale semble être la voie la plus évidente mais l’idée de coloniser le vagin par des lactobacilles administrés par voie orale émerge dans les années 90. L’important selon certains·x·es chercheureuses, est d’avoir une sélection de souches capables de résister à la digestion puis capable de migrer vers le vagin depuis le rectum. En effet, le côlon constitue un réservoir important de lactobacilles (mais aussi de germes pathogènes qui pénètrent le vagin), un probiotique administré par voie oral fait donc un détour considérable dans l’organisme, ce qui augmente son risque d’être modifié le long de son parcours jusqu’au tractus génital. Cependant la voie orale peut être préférée pour diverses raisons. Le tout est de ne pas se forcer si on aime pas la pénétration. A vous de choisir ce qui vous va le mieux !
Des études récentes sur certaines dysbioses comme la vaginose, démontre une efficacité relative des probiotiques et prébiotiques. En synergie avec certains antibactériens, il y a tout de même une réduction des récidives notables. Les causes des dérèglements de flore récurrents étant sûrement multifactoriels, il est difficile de les déterminer précisément.
Les probiotiques semblent être une aide précieuse même si on ne peut pas leur accorder de résultats miracles. A noter que les probiotiques intestinaux et vaginaux ne sont pas tous les mêmes. Certaines bactéries de l’intestin ne se retrouvent pas dans le vagin et vice et versa.
Dans une vision holistique, on peut du coup, se demander si la flore intestinale n’a pas une conséquence sur la flore vaginale ? Et si tout n’a pas une conséquence sur tout ? Comme nous l’avons vu précédemment, le chemin est long jusqu’à l’appareil génital : cependant, il existe des manières de prévenir certaines affections par l’alimentation, on sait par exemple qu’un régime dispensé de sucres préviendra et/ou traitera les mycoses. En atelier d’auto-gynéco, j’ai entendu des témoignages de personnes ayant guéri des affections récidiventes avec l’ingestion oral de yaourt bio non pasteurisé tous les jours pendant quelques mois. Il est impossible de dire si la guérison de cette vaginose est dût à cette cure par modification de la flore vaginale, mais c’est encourageant ! En tout cas, porter une attention à nourrir notre flore intestinale et avoir une alimentation équilibrée ne peut qu’être bénéfique !
Lesquels utiliser ?
Il existe plusieurs marques dont les principales trouvables en pharmacie en France, et montrant des résultats encourageants, sont Physioflore, Gynophyllus mais aussi le laboratoire Pileje.
On peut être allergique à des adjuvants présents dans les différentes marques, ce qui peut nous pousser parfois à changer.
Il existe des probiotiques aux oestrogènes : les laboratoires en rajoutent parfois car ils stimulent la production de glycogènes par les parois du vagin. Il faut avoir conscience, dans ce cas, que l’on introduit des hormones de synthèse dans le vagin. Les probiotiques sans oestrogènes sont
généralement bien suffisants !
Certaines doulas utilisent du yaourt bio introduit dans le vagin à l’aide d’un spéculum et d’une cueillère ou d’un piston en plastique : même s’ils acidifient le milieu ce ne sont cependant pas tout à fait les mêmes lactobacilles que l’on trouve dans le vagin.
Il est difficile de trouver des probiotiques à bas coût. On cherche encore comment s’en procurer sans devoir dépenser tout notre argent ou les voler dans les pharmacies. (Si tu connais des collectives ou des laboratoires indépendants qui en produisent n’hésites pas à nous écrire.)
Quand et comment les utiliser ?
Les Probiotiques s’utilisent en cure. Plusieurs marques ont des formats de gélules à mettre dans le vagin avec des libérations à temps différents. Certaines marques s’utilisent tous les jours, d’autres à libération prolongée.
En cas de premiers signes d’affections, c’est, pour nous, le premier réflexe de soin à avoir avant de penser à des plantes ou médicaments antibiotiques. Les probiotiques peuvent nous sauver au début des premiers signes désagréables d’une mycose ou d’une vaginose.
Après une prise d’antibiotiques il est important de penser à se faire une cure courte pour pallier à la « trop grande efficacité » du traitement.
Dans le cas d’affections récurrentes, on peut avoir de bons résultats pour certains·x·es, en cure, à répéter pendant quelques cycles. De mon expérience, il est plus judicieux de commencer la cure à la fin des menstruations car c’est un moment de vulnérabilité pour le vagin. Le pH du sang est plus élevé (pH 7) et modifie sensiblement le milieu.
« J’ai eu une vaginose chronique qui s’est installée depuis quelques années. L’odeur putride du gardnerella qui m’habitait était devenu presque habituelle et ma flore était complètement dépeuplée de Lactobacilles. C’était un calvaire dans ma vie sexuelle et affective qui me causait beaucoup de soucis. Après des cures de probiotiques vaginaux, à raison de 7 jours à chaque début de règles pendant quelques cycles qui améliorait la situation, j’ai pu oscillé pendant 1 an avec des résultats plus ou moins positifs mais l’amélioration était provisoire et je commençais à désespérer.
De plus, à l’époque je baisais assez régulièrement avec un couple dont la copaine avait aussi une vaginose chronique, ce qui ne devait rien arranger.
Après 2 ans de confinement et de vie passée sous mon nez à laisser trainer, j’ai pris 1 semaine d’antibiotiques allopathiques en voie vaginale et voie orale à dose de cheval pour éradiquer toute ma flore, suivi d’un traitement de probiotiques oral et vaginal. 1 mois de cure à l’oral (1 comprimé avec des Lactobacilles crispatus et un comprimé avec des Lactobacilles pour refaire ma flore intestinale) et 1 semaine en voie vaginale (Lactobacillus crispatus) à renouveller à chaque début de cycle pendant quelques cycles.Depuis ces traitements, toujours en cours, l’odeur de ma flore a changé et son goût est lairement plus acide. C’est très encourageant même si j’ai du mal à m’y habituer : comme si la maladie avait fait partie de moi tellement longtemps que je n’arrive pas à croire à sa guérison. En fait, si j’avais capté le fonctionnement de ma chatte plus tôt, je n’aurais sûrement pas eu recours à ces antibiotiques si puissants. J’aurais pu, ne pas laisser s’installer un déséquilibre petit à petit jusqu’à ce qu’il me constitue. »
PREBIOTIQUES -OU COMMENT ENTRETENIR SON JARDIN ?
Les prébiotiques sont la nourriture des probiotiques. ils sont des substances alimentaires composées généralement de glucides complexes connus sous le vocable d’oligosaccharides et de polysaccharides à courte chaîne, ils peuvent également être des polyphénols ou des acides gras polyinsaturés. On les appelle aussi plus vulgairement « les fibres ». Les prébiotiques sont généralement considérés comme non digestibles par l’humain et ne sont digérés que par les microorganismes de l’hôte, le plus souvent en acides gras à chaine courte. Ces composés échappent à la digestion dans l’intestin grêle et sont des substrats potentiels pour la fermentation par les bactéries intestinales. Les bifidobactéries et les lactobacilles sont les microorganismes du microbiote intestinal (flore intestinale) les plus fréquemment ciblés. Tout comme pour le côlon, l’utilisation de prébiotiques par voie orale permet de rééquilibrer la flore vaginale et de lutter contre les agressions. Ils peuvent ainsi être utilisés pour diminuer le risque de mycoses vaginales, de vaginites ou de vaginoses (infections vaginales bactériennes).
Les prébiotiques peuvent se retrouver naturellement dans les fruits, les légumes, le miel et dans le lait maternel. L’inuline, le plus connu tire son nom du genre botanique Inula auquel appartient la Grande Aunée - Inula helenium - qui en contient beaucoup. Elle est particulièrement abondante dans la racine de chicorée – Cichorium intybus dont elle est extraite industriellement. On la trouve aussi dans d’autres végétaux appartenant à la famille des Asteraceae tels que l’artichaut – Cynara scolymus ou le pissenlit – Taraxacum officinale , les topinambours - Helianthus tuberosus , la bardane – Arctium lappa et l’échinacée - Echinacea. En fin de saison, lors des premières gelées, l’inuline subit une réaction chimique qui entraîne une baisse de son rendement.
D’autres espèces comme l’oignon – Allium cepa ou encore l’Asperge - Asparagus officinalis contiennent également des prébiotiques. Les céréales qui en contiennent le plus sont les grains d’orges - Hordeum vulgare et le Seigle - Secale cereale, jeunes.
antibiotiques – EN LUTTE
Les antibiotiques peuvent être utilisés dans certaines pathologies. Dans ce cas nous faisons appel à des plantes anti-bactériennes comme le Thym – Thymus vulgaris ou la Sariette – Satureja hortensis ou encore le Genévrier – Juniperus communis. Les hydrolats ou les tisanes de ces dernières vont très bien fonctionner, en interne, à l’oral, sur des cystites par exemple.
En voie vaginale, il existe des préparations d’ovules à l’argile, dosées au peigne fin en teintures-mères et en huiles essentielles, afin de ne pas irriter les muqueuses. Ces recettes sont trouvables dans le Manuel de Gynécologie Mammamélis de Rina Nissim. Il est préférable de ne pas utiliser la fameuse méthode huile de coco/Huile essentielle d’arbre à thé qui peut paraître efficace mais qui, souvent peu gérée en terme de proportions en huile essentielle, peut être dangereuse. Elle n’est, par ailleurs, pas écologique. Il existe de nombreuses plantes locales dont l’efficacité n’est pas mise sur le devant de la scène par les laboratoires alors qu’elles sont formidables. Les fleurs de Soucis – Calendula officinalis et la Lavande – lavandula vera sont, ,par exemple, de puissants anti-viraux et anti-mycosiques.
RECETTES SAUVAGES ! ! !
Recettes sauvages presque gratuites et à base de culture de lactobacilles, pour améliorer la digestion et favoriser l’entretien du microbiote intestinal par voie orale. Ce sont des bases que l’on peut modifier à loisir !
On peut utiliser toutes les plantes comestibles possibles et n’importe quelle épice en fonction des goûts et indications de soins.
Pissenlit lactofermenté à l’ail et au miel
Délicieuse préparation, elle permettra de consommer des plantes toniques, stimulantes du foie en réduisant leur amertume.
Ingrédients : Feuilles et/ou inflorescence de pissenlit, sel, miel, Ail
1. Récolter et hâcher des feuilles de pissenlit. Les introduire dans un bocal de 250mL.
2. Rajouter 1 cuillère à café de sel, 1 cuillère à café de miel et une gousse d’ail coupée.
3. Recouvrir d’eau et mélanger.
4. Fermer le pot et laisser à température ambiante pendant une dizaine de jours. Plus il fait chaud dans la pièce, plus le processus de lactofermentation est rapide.
5. Ouvrir le pot : s’il fait pscchhhhiiittt ou qu’on remarque qu’il a débordé sous la pression de l’air c’est que le processus de lactofermentation a fonctionné. On reconnaît de plus en plus le goût de la lactofermentation au fur et à mesure des expériences.
6. Déguster sur une salade, nature ou en toast !
Choux croute d’amour lactofermentée
Ingrédients pour un bocal hermétique d’un litre à peu près : ½ Choux, sel, une dizaine de baies de Genevrier- Juniperus communis.
1. Découper le choux finement.
2. Le peser.
3. Rajouter 2 à 3% du poids total en sel.
4. Laisser le choux dégorger une dizaine de minutes.
5. Rajouter une dizaine/quinzaine de baies de Genévrier (pour plus de goût les broyer légèrement).
5.bis Une fois que le choux est comme « mouillé », l’introduire dans un bocal en verre et tasser avec son poing ou ses doigts pour faire dégorger le jus petit à petit, par étage. S’assurer que le niveau du jus dépasse celui du choux, au risque de voir la préparation pourrir.
6. Fermer le bocal et le conserver minimum 1 mois, sans l’ouvrir et à l’abri de la lumière.
7. Ouvrir le pot : s’il fait pscchhhhiiittt, le processus a fonctionné.
Si non, ne pas consommer, la préparation est surement loupé pour X raisons.
Déguster sur une salade, nature ou en toast !
N.B : pensez à utiliser un joint de bocal neuf ou à laver vos joints si réutilisations il y a.
Bibliographie
• B.A.BA du sexe entre meufs et personnes queer, Allison Moon, KD Diamond, éditions Goater, 2020
• Prenez-soin de votre microbiote vaginal, BOHBOT & ETIENNE, 2019
• Gregor Reid, Kristin Verbeke, Patrice D. Cani et Kelly S. Swanson, « Expert consensus document : The International Scientific Association for Probiotics and Prebiotics (ISAPP) consensus statement on the definition and scope of prebiotics », Nature Reviews Gastroenterology & Hepatology, vol. 14, no 8, août 2017, p. 491–502
• La vaginose bactérienne : facteurs de risques endogènes/exogènes et infection au papilloma virus associée, Thèse de Delalande Adeline, 2016/2017
• Le charme discret de l’intestin, Giulia Enders, 2015
• Etude “The association of psychosocial stress and bacterial vaginosis in a longitudinal cohort” de Tonja R Nansel, Margaret A Riggs, Kai-Fun Yu, William W Andrews, Jane R Schwebke et Mark A Klebanoff, faite en 2006
• De Cuypere, G., T’Sjoen, G., Beerten, R., Selvaggi, G. De Sutter, P., Hoebeke, P., Monstrey, S. & Vansteenwegen, A. (2005). Sexual and Physical Health After Sex Reassignment Surgery. Archives ofSexual Behaviour, 34, 6, 679-690.
• Mamamélis, Rina Nissim, 2001
• Témoignages d’amiEs, de doulas et de gynécologues
Collective Rosae Canine
rosecanine@@@riseup.net
Version papier imprimée aux Tanneries de Dijon
Juillet 2022
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