S
S’armer jusqu’aux lèvres !
mis en ligne le 17 mai 2016 - Auto-défense gynéco
S’ARMER JUSQU’AUX LÈVRES !
Comment affronter une consultation gynécologique ?
NUDITÉ - CONSENTEMENT - DOULEUR - ANORMALITÉ - CHOIX - SEXUALITÉS - ASEXUALITÉ - PEUR - EXAMENS - DÉPISTAGES - NORMES SOCIALES - OBLIGATIONS - VIOLENCES - ABUS - INTERROGATIONS - AUTO-GYNÉCO - PALPATION DES SEINS - PERSONNES DE CONFIANCE - INJONCTIONS
Pourquoi s’armer ? On est en guerre ?
En 2014, un gynécologue [1] renommé dans notre coin (les Cévennes) est mis en examen pour des viols et des agressions sur plusieurs de ses patientes dans son cabinet. Lorsque que la suspension d’activités qui avait été prononcée contre lui est levée après trois semaines seulement et qu’il reprend son activité, nous explosons. Nous entendons quantité de témoignages sur ses comportements maltraitants en consultation et nous apprenons que, pourtant, les personnes qui ont osé porter plainte sont elles-mêmes traînées en justice pour diffamation, alors même que l’instruction du médecin est encore en cours. En même temps, nous nous rendons compte que de très nombreuses femmes sont obligées d’avoir à faire à lui puisqu’il est un des rares gynécologues-obstétriciens de garde à l’hôpital public. Nous comprenons que ces viols sont noyés dans un océan de complaisance et de mépris de la part du monde médical. Encore pire, la justice et l’hôpital, qui autorisent le gynécologue à reprendre ses consultations, semblent nier que le viol est un acte grave, et ce d’autant plus s’il se produit dans le contexte médical. Au nom de l’ordre social – l’autorité du médecin qui sait, qui décide ce qui est juste et moralement acceptable, qui est renommé – on soupçonne les plaignantes d’exagérer, d’avoir donné un consentement implicite au gynécologue, on les accuse de séduction, d’hystérie, etc. Cela signifie tout simplement qu’une voix féminine vaut moins que celles du médecin et de l’institution. Elle vaut moins pour ce qui concerne son propre corps, jusque dans l’expression de ses souffrances. Une femme n’est pas censée savoir ni décider ce qui est bon ou mal pour elle. L’institution a tout intérêt à faire croire aux femmes à leur ignorance. Ainsi, elle les maintient dans une forme de peur qui les rend dépendantes de ses décisions. Tout le monde valide que le médecin est un super-héros qui a tous les droits sur le corps de ses patient-es.
L’immensité du pouvoir médical est telle qu’il peut, en toute légitimité, nous soumettre à des pratiques dégradantes et humiliantes, tout en nous maintenant dans l’ignorance de notre propre corps et en nous refusant l’intuition de nos ressentis. Qui d’entre nous ne s’est jamais sentie faible, désarmée, idiote, en face de l’expert praticien ? Sous l’alibi de soigner ou d’ausculter, la médecine gynécologique est un outil de contrôle du corps des femmes qui nous affaiblit et nous dépossède de notre autonomie, de notre confiance en nous [2].
Comment faire en sorte de ne plus subir tout cela ? En n’allant plus du tout chez le gynéco, peut-être. Mais ce n’est pas toujours facile. Ou en y allant moins, en trouvant des astuces de grands-mères, de copines, de sorcières, pour se faire du bien. Quand on n’a pas le choix, on peut peut-être essayer de se renforcer pour moins subir la pression du médecin tout puissant. On peut aussi être soutenue en étant accompagnée par quelqu’un-e en qui on a confiance. Ce guide est là pour nous aider, nous les femmes qui voulons nous sentir plus fortes face à l’institution médicale, nous qui nous méfions radicalement de tous les gynécologues, qui devront faire longuement leurs preuves pour que nous baissions un peu notre garde (et notre culotte !).
LE FAIT D’AVOIR UN VAGIN ET UN UTÉRUS NE FAIT PAS DE MOI QUELQU’UN-E DE MALADE OU DE PARTICULIÈREMENT FRAGILE.
MON CORPS N’APPARTIENT NI À L’ÉTAT, NI À LA SCIENCE, NI À UN-E GYNÉCOLOGUE, NI À MES PARENTS, NI À MON/MA CONJOINT-E, NI À PERSONNE D’AUTRE QUE MOI
JE SUIS CAPABLE D’APPRENDRE DE NOUVEAUX MOTS ET COMMENT ME PALPER LES SEINS SI ON VEUT BIEN ME L’EXPLIQUER.
N’hésitez pas à faire tourner ce texte et/ou à le lire avec des potes, à le compléter avec de nouvelles idées, des stratégies que vous avez mises en place, etc. Bonne lecture !
Ce texte est dédié aux amies et aux sœurs qu’on aime tant. Merci à elles d’être passionnantes et inspirantes.
Janvier 2016
SOMMAIRE
– 1. Pourquoi on est si souvent mal à l’aise ?
S’INTERROGER : un guide pour tenter de comprendre ce qu’on veut bien accepter et ce qu’on souhaite refuser lors d’une consultation gynéco
P.8-31
– 2. Comment se renforcer ?
S’ÉQUIPER : stratégies pour que les consultations gynéco soient moins pénibles
p. 32-42
– 3. J’aimerais bien essayer d’être plus autonome
SE DÉBROUILLER : des tuyaux pour aller moins souvent chez le-la gynéco, comprendre quelques trucs pour ne pas prendre tout ce qu’il/elle dit au pied de la lettre
p 43-59
– Ça nous inspire !
AUTRES RESSOURCES : des bouquins, des brochures, des sites internet, des films
p 60-63
1. S’INTERROGER
un guide pour tenter de comprendre ce qu’on veut bien accepter et ce qu’on souhaite refuser lors d’une consultation gynéco
L’AUTO-QUESTIONNAIRE : Comment s’est passée la consultation gynécologique ?
Ce questionnaire propose de s’interroger soi-même AVANT ET APRÈS la consultation gynécologique. S’est-elle bien passée, a-telle correspondu à nos attentes ? En effet, on sort souvent d’une consultation avec un sentiment de malaise qu’on n’arrive pas toujours à s’expliquer. Il est question de détecter les endroits de nos refus et de nos consentements. Et peut-être de trouver un moyen de les formuler.
AVANT la consultation :
Dans l’ensemble, comment est-ce que je me sens (inquiète, détendue, etc.) ?
De quoi pourrais-je avoir besoin pour que la consultation se passe bien ?
Est-ce que j’ai confiance en ce que je ressens ?
Pourquoi est-ce que je souhaite rencontrer un gynécologue ?
Est-ce moi qui ai décidé de prendre ce rendez-vous ?
Ai-je des questions précises à lui poser ?
Est-ce que je pense qu’il est nécessaire que je subisse un examen, un toucher vaginal, une palpation des seins, un frottis ?
Comment est-ce que je me sens par rapport à la nudité ?
Ai-je peur d’avoir mal lors des examens ?
Ai-je déjà une idée de ce que j’attends, des examens ou des traitements que je souhaite ?
Ai-je déjà entamé des démarches personnelles de soin ou de prise en charge de ma santé gynécologique (avec d’autres soignant-es ou des plantes médicinales ou d’autres moyens) ?
Est-ce que je me sens à l’aise pour parler avec ce/cette gynécologue sans avoir peur d’être jugée ?
Et APRÈS la consultation :
Dans l’ensemble, comment est-ce que je me sens ?
Qu’est-ce que je comprends de cette consultation ?
Ai-je eu l’impression d’avoir été écoutée et d’avoir pu poser les questions que j’avais en tête ?
Les réponses que j’ai obtenues ont-elles été suffisamment claires ?
Est-ce je m’attendais à ce que le/la gynécologue observe, touche, examine mon vagin ? Mes seins ?
Ai-je trouvé que les examens pratiqués étaient nécessaires ?
Ai-je eu mal lors des examens, lors de la pose du spéculum ou d’un autre outil ?
Si le/la gynécologue m’a prescrit un traitement, comment m’a-t-il/elle informée de son utilité, de son action, de ses effets indésirables et s’il existe d’autres traitements qui pourraient convenir à ma situation ?
Comment le/la gynécologue a-t-il/elle fait en sorte de savoir si j’étais d’accord ou prête avant de pratiquer un examen ?
Par rapport à mes choix de vie, ma manière de m’occuper de mon corps, comment le/la gynécologue m’a-til/elle accueillie ?
De quelle manière le/la gynécologue a-t-il/elle répondu à mes questions et à mes observations ?
Est-ce que, dans l’ensemble, je me suis sentie suffisamment à l’aise et respectée pour avoir envie de revoir ce/cette gynécologue ?
Est-ce que je pense conseiller ce/cette gynécologue ou ce service gynécologique à des amies ?
POURQUOI EST-CE IMPORTANT DE SE POSER TOUTES CES QUESTIONS ?
CONSENTEMENT ET ABUS
Je me demande si le/la gynécologue s’est assuré-e de mon consentement avant de pratiquer tel ou tel acte sur mon corps, s’il/elle a attendu que je sois d’accord, et que je sois prête, avant d’agir. Je me demande si je me suis sentie assez à l’aise pour exprimer tout cela. Aucun examen n’est obligatoire et tout geste pratiqué sur notre corps doit être consenti et expliqué clairement pour que le consentement soit possible (c’est dans la loi [3] et le serment d’Hippocrate (hypocrite ?) prononcé par tous les médecins). On a donc le droit de dire qu’on n’est pas d’accord, de refuser un acte, de quitter la salle de consultation à tout moment, de changer de médecin.
Cependant, s’il y a des abus, il n’est pas toujours évident de les détecter, et d’y résister. Il n’est pas facile de dire non à une personne qui exerce un grand pouvoir sur notre corps et notre santé. La confrontation à un médecin est délicate. On n’est pas toujours en mesure de s’opposer à lui sans qu’il soit écrasant ou qu’il ne néglige, en réaction, la prise en charge ou le soin dont on a besoin. S’il y a eu des abus, je peux être en colère. Je peux adresser cette colère à ce soignant et à qui je veux. Je ne suis pas coupable d’avoir été abusée, d’autant plus que je n’ai pas vraiment été en position de me défendre.
DOULEURS ET DÉSAGRÉMENTS
Je n’ai pas à être traitée de douillette ou de trop coincée ou de trop tendue (ou je ne sais encore quelle insulte sexiste), si je ne veux pas être entièrement nue, si un examen me fait mal, si je refuse qu’un instrument rentre dans mon corps. Un examen ne doit pas faire mal normalement.
Un speculum pourrait ne pas être trop froid, mal lubrifié, introduit dans la force. Il est tout à fait légitime de dire qu’on a mal ou même qu’on a peur d’avoir mal. Qu’on a peur tout court. Un-e soignant-e qui fait mal lors des examens de routine est une personne soit incompétente, soit volontairement maltraitante. Il existe d’ailleurs des soignant-es qui utilisent des techniques de relaxation très douces pour permettre de surmonter des actes pénibles comme la pose d’un stérilet par exemple. Il existe aussi une réflexion, y compris dans le corps médical, sur des positions qui pourraient être plus adaptées, moins gênantes, selon nos besoins. Par exemple, des personnes proposent qu’on insère soi-même le speculum. On peut aussi être examinée sans étriers, sur le côté (position dite « à l’anglaise » ou « en chien de fusil »).
NUDITÉ
« Le mythe de l’examen « complet » est un mythe persistant, mais qui n’a pas de fondement.` L’examen clinique approprié est celui qui est guidé par le patient. Et comme un médecin est sensé SUIVRE un patient, il peut l’examiner « entièrement » en plusieurs fois. De plus, même s’il fallait examiner les gens complètement, il ne serait pas nécessaire de les faire mettre à poil ! Une femme qui vient pour frottis et examen des seins peut parfaitement enlever le bas, le remettre et enlever le haut pendant que le médecin range le frottis et les instruments. Elle ne sera jamais toute nue mais l’examen sera fait. Obliger les gens à se déshabiller entièrement est humiliant et inutile [4]. »
AUTO-EXAMEN DES SEINS, OBSERVATION DES SIGNES
Le soignant peut aussi m’expliquer comment me palper toute seule les seins et détecter des différences de consistance, des grosseurs inhabituelles. S’il m’explique comment m’observer les seins ou le sexe un peu régulièrement, je pourrai plus facilement et plus rapidement reconnaître si un signe particulier doit m’alerter.
Malheureusement, il ne me fait pas souvent confiance et pense que s’il me laisse un peu d’autonomie, j’en ferai n’importe quoi. Il ne doit pas se dire que je vais tout de suite paniquer et diagnostiquer une maladie gravissime si je me connais mieux. Au contraire cela renforce mes capacités à détecter quelque chose d’important. En effet, nous sommes toutes différentes et c’est en nous connaissant mieux que nous observons que nos seins ne sont pas comme avant, que nos sécrétions vaginales ont une texture, une abondance ou une odeur différentes de l’ordinaire.
VACCINS ET DÉPISTAGES
Vaccins, dépistages du HPV et d’autres microbes, frottis annuels, mammographies : la vie des femmes est ponctuée d’actes médicaux "obligatoires", relativement désagréables. Comme si leur corps était tout le temps malade ou risquait de l’être à tout moment. Il semble clair que ces rendez-vous permettent au corps médical d’exercer un contrôle permanent de nos sexualités, de nos fécondités. On n’a pas souvent le recul nécessaire par rapport à l’effet de ces actes sur nos corps, mais chaque époque révèle de nouvelles nocivités, concernant tel vaccin ou telle pratique médicale. Concernant les dépistages, frottis vaginaux ou du col de l’utérus, on peut faire confiance à une patiente qui dit qu’elle n’a pas eu de symptômes gênants depuis tant de temps. Par exemple, il faut savoir qu’on peut poser un stérilet sur une personne nullipare (qui n’a jamais accouché par voie basse) sans lui faire un tas d’examens culpabilisants et décourageants. Pour autant, certaines questions peuvent (et doivent) être posées. Par exemple, il est nécessaire de s’interroger sur les difficultés de circulation sanguine d’une personne avant de lui prescrire la pilule et c’est rarement fait.
D’ailleurs, si nous ne faisons pas confiance aux gynécologues, c’est surtout parce que nous avons eu l’impression qu’aucun n’a fait confiance à ce que nous disions et ressentions sur notre propre corps
PAPILLOMAVIRUS
Le traitement et la prévention du human papillomavirus (HPV), virus très à la mode depuis le début d’une campagne de vaccination délirante ces dernières années, ont été critiqués dans une brochure publiée en 2015 par le collectif lillois de réflexion critique sur la gynéco et la médecine. Le parcours de combattantes à qui on a dépisté un HPV est décrit comme un exemple spectaculaire de la manière dont l’institution médicale, par le biais des soignants, qui pourtant ignorent souvent à quoi ils ont à faire, parvient à contrôler, moraliser et maltraiter les femmes.
En effet, un des seuls éléments dont on peut être sûr, c’est que le HPV apparaît sous des formes très diverses, qui peuvent évoluer vers le cancer tout autant que disparaître sans aucun traitement. Nombreux soignants sont aussi paumés que leurs patientes par rapport aux connaissances sur les différentes formes de ce virus et sur les raisons du développement des symptômes ou de leur disparition. Pourtant un dépistage positif donne souvent lieu à un protocole très invasif (traitement au laser...), et on préconise aujourd’hui la vaccination de toutes les adolescentes.
Ce n’est qu’un exemple de la manière dont le corps médical, main dans la main avec l’État et les labos pharmaceutiques, utilise, voire fabrique, régulièrement, de nouveaux outils pour exercer son emprise sur la sexualité et le corps des femmes.. .
« En 2006, est apparu le vaccin contre le HPV. Présenté à tort comme le vaccin du cancer du col de l’utérus, son lancement a fait l’objet d’une campagne publicitaire agressive et mensongère. Les décès liés au cancer du col de l’utérus étant rares dans nos pays, […] il n’est pas sûr que les avantages de ce vaccin dépassent ses inconvénients. Son efficacité serait de seulement 20% et ses effets secondaires rares mais sérieux (décès sur choc anaphylactique et réactions liées aux adjuvants dont l’aluminium, myofascite, sclérose en plaque). Ce vaccin au coût élevé semble surtout intéressant pour les multinationales qui le produisent que réellement pour la santé publique. » Dans Mamamélis, de Rina Nissim.
MÉDICAMENTS, TRAITEMENTS, INTERVENTIONS
De manière générale, avant d’accepter un traitement, surtout s’il est lourd ou inquiétant, s’il peut avoir des conséquences importantes, il est nécessaire de demander un ou plusieurs autres avis, auprès d’autres soignant-es. Il peut y avoir d’autres solutions qui conviendront mieux. Le médecin ne connaît pas tout et peut être de mauvaise foi ou influencé par sa formation, la pression des laboratoires pharmaceutiques, des idées reçues, des statistiques foireuses, de nouvelles modes au sein du monde médical, etc.
OUI, les gynécologues mentent, se trompent, sont influencé-es par des éléments non objectifs et ont rarement une éthique irréprochable.
Pour ne citer que quelques exemples, le laser, les traitements invasifs, chirurgicaux, les anti-fongiques, les antibiotiques à répétition, la prise d’hormones de synthèse, les radiographies, l’hystérectomie [5] comportent réellement des risques pour la santé et les soignant-es qui le nient sont de mauvaise foi. On ne peut accepter un traitement que si on a vraiment toutes les informations nécessaires pour faire un choix. On n’a pas nécessairement besoin d’être à tout prix rassurée, surtout au prix d’une manipulation. C’est faux de dire que la pilule est inoffensive, que le stérilet en cuivre ou l’avortement rendent stérile, que la péridurale est la seule solution. Ce sont des croyances qui servent des intérêts politiques et économiques, et non pas des vérités absolues. En étant bien informée, on est capable de choisir en toute conscience de prendre la pilule, poser un stérilet, se faire enlever l’utérus et, enfin, accoucher sous péridurale.
GROSSESSE, EXAMENS, ÉCHOGRAPHIES
Si on ne va pas s’étendre ici sur la grossesse [6], il est nécessaire de dire que les obligations médicales imposées aux femmes enceintes sont très lourdes, souvent culpabilisantes, et par conséquent peuvent être responsables de grossesses difficiles et d’accouchements dans de mauvaises conditions. On maintient souvent les femmes enceintes dans l’ignorance et dans la peur, comme si le bébé qu’elles portaient était a priori en danger d’être dans leur corps, le refus de tel ou tel examen constituant un acte totalement irresponsable, voire criminel. Les obligations de touchers vaginaux, de contrôles, de radios, de dépistages sont en outre la source de nombreux abus.
Les obligations d’échographie par exemple doivent être prises avec beaucoup de prudence. Par exemple, contrairement à ce que certains gynécologues équipés d’un matériel très moderne le prétendent, l’échographie par voie vaginale est très rarement nécessaire [7]. Si vraiment l’échographie par voie vaginale s’avère indispensable, elle ne doit jamais faire mal, ni être exercée en tapant fort sur le col de l’utérus, ni provoquer de saignements ou encore des décollements placentaires (expériences vécues par plusieurs femmes enceintes).
De toute façon, il n’est ni nécessaire ni bon de faire des échographies tous les mois (l’exposition trop fréquente et prolongée aux ultra-sons pourrait avoir des effets indésirables pour les nouveaux-nés, tels que l’augmentation des risques de reflux et de brûlures gastriques, etc.). De même, l’examen du col de l’utérus ne devrait se pratiquer qu’exceptionnellement car il comporte des risques de développer certaines infections vaginales. De plus, il peut provoquer des contractions utérines inopportunes. Même si le toucher vaginal est doux et pratiqué dans de bonnes conditions d’hygiène, il est, comme les échographies trop fréquentes dites « de plaisance » pratiquées pour faire plaisir au/à la soignant-e ou à la personne enceinte, un geste intrusif et dérangeant pour le bébé et la mère pendant la grossesse. Rappelons qu’il n’est pas nécessaire d’être déshabillée entièrement pour subir une échographie. La pesée systématique des femmes lors des visites gynécologiques, les remarques qui l’accompagnent (« Faites attention ! », « Vous avez déjà pris tant... »), et le dépistage du diabète gestationnel, sont encore d’autres examens dont on peut interroger l’utilité, et surtout le sens, sachant à quel point ils sont normatifs, culpabilisants, et donc dangereux pour une grossesse et un post-partum (les suites de l’accouchement) dans des conditions optimales. Comment en effet se remettre de ses couches quand l’enjeu premier est de retrouver sa ligne et la fermeté de ses muscles vaginaux (dans un but d’efficacité lors de la pénétration), dans la bouche des soignant-es autant que dans les magazines féminins ?
La maternité est d’ailleurs un des grands moments de contrôle des corps et des esprits par la peur de la part des institutions médico-sociales. Pour ne donner que quelques exemples, on culpabilise les femmes refusant d’allaiter, on les affole quant au poids de leur enfant (« Il est en sur-poids, il faut réduire ses biberons. », « Il risque le rachitisme si vous ne lui donnez pas de compléments alimentaires (lait en poudre, vitamine D...). »), ou encore on les accuse de maltraitance si elles souhaitent dormir avec leur bébé ou lui mettre une couverture et un doudou dans son lit. À ce sujet la « mort subite du nourrisson » est un bon exemple de culpabilisation terrorisante. Elle consiste à dire aux jeunes parents : « Si vous ne suivez pas exactement les normes de la pédiatrie et de la puériculture françaises, votre enfant va mourir. Oubliez donc tout ce que vous savez et remettez-vous-en aux institutions (hôpital, PMI, pédiatre, crèche, école, etc.). C’est plus sûr. »
On finit alors par considérer que le médecin et internet savent mieux que toutes nos mères, grands-mères, sœurs, tantes, ami-es comment on s’occupe d’un bébé.
CONTRACEPTION AUTOMATIQUE
La contraception n’est pas forcément la première chose à laquelle je pense dans ma vie sexuelle. Il n’y a pas d’évidence à ce que j’aie besoin de contraceptif. Non seulement je n’ai peut-être pas de vie sexuelle, mais peut-être n’ai-je pas de rapports sexuels avec des hommes. Peut-être que j’en ai mais qu’aucune de mes pratiques sexuelles ne comporte de risque de grossesse. Peut-être que je me débrouille avec d’autres moyens. En tout cas, si je n’ai rien demandé au/à la gynécologue, pourquoi devrait-il m’en parler ? Le/la soignant-e peut m’informer, me proposer des idées ou des conseils, mais c’est moi qui choisis ma vie et qui accepte les conséquences de ces choix sur mon corps.
Je n’ai ni à répondre à des questions qui me gênent sur ma vie sexuelle, ni à recevoir un jugement dénigrant ou infantilisant du type : « Vu votre manière irresponsable de gérer votre sexualité, je vous ordonne de porter un implant contraceptif. » Si on a des relations hétérosexuelles avec pénétration et qu’on n’a pas envie de tomber enceinte, la question de la contraception se pose évidemment. Dans ce cas-là, on doit pouvoir faire un choix éclairé, adapté à ses besoins, à son mode de vie.
Il est utile de rappeler que la liste des moyens pour ne pas tomber enceinte lors des rapports sexuels est longue :
– préservatifs internes et externes et autres méthodes barrières (diaphragme et cape cervicale qui demandent un accompagnement pour apprendre à les utiliser),
– stérilet au cuivre (pour information, le stérilet peut être posé en contraception d’urgence après un rapport sexuel comportant des risques de grossesse, et toute femme peut le demander, par exemple immédiatement après un avortement, qu’elle ait déjà eu des enfants ou pas),
– contraceptions hormonales (pilule, implant, patch, anneau, stérilet aux hormones, injections, contraceptif d’urgence ou « pilule du lendemain »),
– pratiques sexuelles imaginatives non fécondantes (la pénétration par un pénis n’est pas obligatoire pour ressentir du plaisir sexuel),
– méthodes de calculs et d’indices corporels multiples indiquant la période d’ovulation,
– ovules et crèmes spermicides, souvent couplées avec d’autres méthodes,
– contraceptions non-définitives destinées aux hommes : injections hebdomadaires de testostérone, slip chauffant (ou « remonte-couille toulousain » [8]),
– contraceptions définitives (ligatures des trompes ou vasectomie pour les hommes).
Toutes les méthodes comportent des risques et des avantages, aucune n’est infaillible et il est important de pouvoir bénéficier d’informations claires pour les envisager.
LES INFECTIONS SEXUELLEMENT TRANSMISSIBLES (IST)
Les infections dites « sexuellement transmissibles » se traitent et ce n’est ni honteux, ni dramatique d’en rencontrer une ou plusieurs dans sa vie. Je n’ai pas à être moralisée ou à recevoir un regard méprisant, jugeant, sexiste, maternant ou autoritaire si je viens consulter pour des symptômes qui me font souffrir ou me gênent.
Nous sommes très nombreu-ses à en avoir, elles sont très répandues et plus ou moins visibles, plus ou moins gênantes. Si je viens me renseigner ou demander un accompagnement pour me soigner, je n’ai pas à répondre à des questions intimes sur ma vie sexuelle qui me mettent mal à l’aise.
À l’opposé, quand j’ai des demandes précises, pour un dépistage ou un soin, mes questions et propositions sont légitimes, parce que je suis quand même la personne qui connaît le mieux mon corps. De même, si j’interroge le soignant sur le besoin de traitement de mon/ ma partenaire sexuel-le (en ce qui concerne mon affection sexuelle), cette question ne devrait pas être occultée, comme on l’observe fréquemment.
Quantité d’idées et d’outils existent pour se protéger de ces infections liées à des virus, des bactéries, des champignons et autres microbes qui circulent entre nous.
Il est nécessaire d’avoir des informations sur les pratiques susceptibles de transmettre des infections et sur les vecteurs de transmission. Le ou la gynécologue est censé-e non seulement connaître ces informations, mais aussi pouvoir nous donner des explications sans nous terroriser ou nous humilier. Pourtant, on est souvent mieux informé-e dans un planning familial ou auprès de nos copa-ines.
QUELLES OBLIGATIONS ?
Si je ne ressens pas de gêne ou si je n’en éprouve pas le besoin, je n’ai pas de raison de subir un examen, voire de côtoyer un soignant. Aucun homme ne se fait toucher le sexe ou la prostate s’il n’a pas de symptôme spectaculaire ou douloureux. Les femmes n’ont pas par nature plus de problèmes que les hommes. La présence d’un vagin n’est pas une maladie. Et la grossesse n’en est d’ailleurs pas non plus une.
Encore Winckler : « L’examen des seins comme le toucher vaginal sont sur-imposés, en particulier aux femmes jeunes, et on ne devrait jamais les faire quand aucun signe ou symptôme évoqué par la femme ne le justifie.
À mesure que j’avançais dans le métier, j’examinais de moins en moins spontanément, mais seulement quand la femme le demandait expressément (ça arrive et c’était pour être rassurée) ou quand, après avoir discuté avec elle, il nous apparaissait à tous les deux que ça pouvait être utile. Mais je n’ai jamais imposé un examen des seins ou un toucher vaginal à une femme qui n’en voulait pas. Ces deux examens ne devraient jamais être « systématiques ». La palpation systématique des seins chez les femmes jeunes est considérée comme un examen trompeur, angoissant et source de radiographies et d’irradiations excessives – et donc de sur-diagnostic et de traitements excessifs. L’examen gynéco, lui, n’a pas beaucoup d’intérêt médical en dehors de la grossesse et de l’accouchement (et même là, on en fait trop). »
On retient ici qu’être rassurée par le soignant peut être une des raisons pour lesquelles on choisit d’aller à un rendez-vous médical. Évidemment on subit beaucoup de peurs, de pressions et on réagit comme on peut à tout cela.
C’est une question d’équilibre : une consultation dont on sort sans ordonnance et sans avoir été examinée n’est pas une consultation inutile. Peut-être le soignant a-t-il été honnête avec moi et a considéré, en faisant confiance à ce que je lui ai dit, que l’échange était suffisant. Une consultation dans laquelle on partage uniquement de la parole peut être très positive, rassurante et renforçante. Je peux pour autant avoir envie de faire un frottis de temps en temps pour savoir où j’en suis. En effet, je n’ai pas à avoir honte de m’inquiéter excessivement, ou être traitée d’hypocondriaque si ce monde me fait flipper.
FRÉQUENCES DE CONSULTATION
Dans l’ensemble, je ne suis pas obligée d’aller chez le/la gynécologue. Les fréquences imposées par les on-dit, les autres femmes autour de nous ou les soignants que l’on rencontre sont des idées reçues. Le patriarcat, le sexisme ambiant, le système économique, l’organisation du travail salarié dans un schéma de carrière toute dévouée à la société capitaliste qui nous régit, nécessitent que les individu-es rentrent dans un cadre normatif très contraignant. Avoir une vie sexuelle comme-ci, des relations à tel âge, un poids normal, un nombre défini d’enfants qui seront éduqués dans un certain cadre. Les gynécologues, pour la plupart, semblent être formé-es pour s’adapter à une femme imaginaire dans une norme très spécifique. Ils/elles sont bourré-es d’idées reçues et de morale sur la manière dont on doit se comporter et vivre pour être en « bonne santé » et surtout bien intégrée dans ce monde.
Je ne suis pas obligée d’aller tous les ans chez un médecin si je suis une « femme ». Je ne suis pas obligée d’y aller du tout. Certaines femmes y vont deux fois dans toute leur vie parce qu’elles ont envie d’un dépistage de quelque chose. D’autres n’en croisent aucun avant d’avoir besoin d’un avortement. D’autres ont envie d’y aller régulièrement pour se rassurer. Tout est possible et rien n’est irresponsable ou immoral.
POURQUOI ILS ME FONT SI PEUR ?
Le mythe du risque zéro, qui nous fait croire qu’en laissant notre corps aux mains de ceux qui savent on pourrait détecter absolument toutes les maladies, est un moyen employé depuis des siècles pour contrôler la sexualité des femmes et leur fécondité.
Il s’agit non seulement de nous maintenir dans l’ignorance mais en plus de nous terroriser. On se rend compte du manque de légitimité des normes oppressantes quand on observe qu’on les applique uniquement parce qu’on a peur et non parce qu’on est convaincue de manière sereine par des informations complètes et sérieuses.
Pour autant, je ne suis pas coupable de me sentir vulnérable et effrayée. Souvent j’ignore vraiment ce que mon corps exprime, et on ne m’aide pas à être plus forte, plus informée, plus autonome. Par exemple, les informations sur le fonctionnement de notre corps, de nos cycles hormonaux sont transmises au compte-goutte, avec une grosse dose de morale, de propagande et de peurs, dans des cours de SVT au collège au milieu d’une trentaine d’élèves qui pouffent de rire. Comment peut-on s’approprier ces connaissances et retenir autre chose que les légendes urbaines et les risques spectaculaires auxquels on s’expose en devenant adulte ?
C’est pourquoi il ne serait pas inutile qu’un soignant qui prescrit une pilule contraceptive ou un autre moyen de contraception fasse un petit point sur le fonctionnement du cycle et sur les effets du traitement. Il pourrait, à cette occasion, m’expliquer par exemple que la prise d’hormones contraceptives en continu donne un message à mon corps que je suis tout le temps enceinte. Il pourrait aussi m’expliquer tout un tas de choses qui me permettrait de choisir ce qui me convient le mieux sans avoir peur. Je suis peut-être ignorante mais pas incapable d’acquérir des connaissances si on veut bien me les transmettre.
NORMES SOCIALES ET SEXUELLES
Je ne suis pas anormale si je n’ai pas ou ne veux pas de relations hétérosexuelles, si je ne veux pas d’enfants ou si j’en ai un à 16 ans, si je ne supporte pas la pilule, si je ne veux pas raconter ma vie à un-e gynécologue. Je n’ai pas à être moralisée (« Vous êtes inconsciente », « irresponsable », « Vous risquez la vie de votre enfant », etc.). Dans l’imaginaire de beaucoup de soignant-es, nos sexualités sont casées dans des catégories bien définies :
À 16 ans, visite gynéco, vaccins et pilule obligatoire parce que je suis sûrement une écervelée qui va tomber enceinte au premier regard.
À 25 ans, il va peut-être falloir se caser et avoir un partenaire régulier...
À 30 ans, ben alors, c’est pour quand les enfants ?
À 45 ans, hormones pour supporter l’horrible ménopause et mammographies qui m’écrasent les seins toutes les 5 minutes.
À 60 ans, quoi j’ose avoir l’indécence de parler encore de sexe ? ... À partir de là, je n’ai plus qu’à attendre sagement la descente d’organes.
Si je vis une situation difficile, un avortement, une pathologie douloureuse ou très gênante, j’ai besoin de bienveillance et de compréhension. Ce n’est pas avec une leçon de morale ou étant culpabilisée que je vais me détendre et que mon col sera plus facile à examiner.
ET LE PLAISIR DANS TOUT ÇA ?
Si j’essaye de parler à un-e gynécologue de mes problèmes sexuels, il m’enverra sûrement chez un psychologue sans autre forme de procès. Souvent cela ne l’intéresse pas du tout (à part quelques cas où il se met à poser plein de questions sur un mode voyeur ou moralisateur). L’odeur et la couleur de mon sexe, il/elle peut bien en parler mais à quoi il me sert, pas moyen. La question du plaisir, des douleurs lors de certaines positions sexuelles, tout cela a l’air d’être complètement en dehors de son métier. Il faudrait donc avoir une sexualité hyper normée et sans plaisir pour faire plaisir à son/sa gynécologue. Parfois, des kinés un peu spécialisé-es en post-partum (soin des femmes après l’accouchement) ou en urologie sont moins réticent-es à parler du plaisir sexuel. Des sages-femmes et d’autres personnes qui se sont un peu intéressées aux muscles du périnée, à son fonctionnement, à comment on le tonifie, on l’assouplit, on l’adoucit, auront souvent aussi des approches beaucoup plus intéressantes sur la question. Bon, il faut quand même dire qu’un médecin n’est pas forcément la meilleure personne avec qui en parler. Certaines personnes préfèrent garder une distance froide avec le/la soignant-e pour être plus à l’aise. Mais parfois cela pourrait aider que la santé et la sexualité ne soient pas complètement déconnectées l’une de l’autre par les tabous et le mystère.
JEUNES FEMMES
En particulier, il paraît nécessaire de signaler aux jeunes femmes, aux adolescentes et aux adultes qui les accompagnent que l’entrée dans la sexualité peut se faire sous des formes multiples. Qu’un médecin nous dise dès notre plus jeune âge comment nous comporter nous enferme complètement dans une norme oppressante et abîme nos imaginaires. Nos corps sont vite colonisés par les réflexes sociaux qui nous figent dans un genre, dans des modes de vie, des obligations qui sont contre nous et contre notre développement individuel. Il est difficile de résister aux on-dit et à la parole d’un médecin. Il est aberrant qu’on nous vende la première visite gynécologique comme un privilège – voire un cadeau – parce que « ça y est, on est une femme », qu’on a nos règles ou qu’on a eu un rapport sexuel.
Rappelons encore une fois qu’il n’est pas urgent de voir un-e gynécologue, qu’il n’est pas urgent de se faire une idée de la sexualité auprès de personnes qui considèrent qu’un rapport sexuel c’est simplement un coït, qu’il n’est pas urgent de prendre une contraception ou de surveiller son poids. Une jeune femme peut avoir une immense imagination et découvrir tranquillement ce qui lui conviendra, comment elle aura envie de prendre soin de son corps et de sa sexualité.
Parler entre femmes, entre ami-es, entre proches, est bien plus riche que de rentrer dans un cadre médical étroit et moralisateur. Alors, il serait bon de se faire plus confiance et d’aider aussi les jeunes personnes qui entrent dans le « monde adulte » à prendre confiance en elles et à savoir comment trouver les informations dont elles ont besoin.
2. S’ÉQUIPER
des stratégies pour que les consultations gynéco soient moins pénibles
Puisque parfois on n’a pas le choix, essayons de réunir les conditions pour vivre nos consultations dans de meilleures conditions.
– Je peux venir accompagnée [9] d’un-e proche. Cela demande d’être bien accompagnée, et de s’être mise d’accord avec la personne, si elle intervient ou pas, et comment elle le fait, si elle assistera à l’entretien, à l’examen médical, etc. Elle peut m’aider à poser les bonnes questions et à résister à la pression du/de la soignant-e si besoin. Cela suppose d’être en confiance et pas sous pression avec cette personne. Ce ne sera pas nécessairement mon/ma partenaire sexuel-le ou ma mère qui me tranquilliseront le mieux. Il est important de penser à quelqu’un qui ne va pas m’écraser, qui sera un-e allié-e pour me renforcer et que je pourrais pourquoi pas avoir envie d’accompagner dans ses démarches médicales si besoin. La personne qui m’accompagne peut plus facilement prendre des notes et m’aider à me remémorer la consultation. À ce sujet, une brochure sur le Human Papilloma Virus (HPV) écrite par un collectif lillois développe de manière très intéressante l’idée de la consultation accompagnée [10].
– Je cherche une bonne adresse qui me convient selon ma situation spécifique. Je peux demander à des amies des conseils d’adresses qui ne seront pas forcément les mêmes selon ce dont j’ai besoin (si j’ai une MST, si je souhaite avorter, si je veux juste un frottis, etc.). Un nouveau site internet, GynAndCo, a commencé a répertorier des soignants dans de nombreuses villes en France selon leur approche accueillante en fonction de situations spécifiques (médecins accueillant-es avec les personnes qui veulent poser un stérilet en cuivre, avec les personnes qui veulent avorter, avec les personnes transsexuelles, avec les personnes qui ont une sexualité non-normée, etc.). Cela permet ainsi de savoir à l’avance un peu sur qui on va tomber, si c’est quelqu’un-e qui va me faire la morale ou pas.
– Je préfère parfois une sage-femme. En effet, depuis quelques années, les sages-femmes peuvent assurer le suivi gynécologique courant de toutes les femmes même en dehors de la grossesse. Elles peuvent être consultées pour des questions de contraception comme pour les affections les plus fréquentes. La formation et la pratique des sages-femmes est ancrée dans une approche dite « physiologique ». Leur objectif est de rester dans le fonctionnement naturel du corps et de ne pas le voir comme potentiellement malade (notamment parce que s’il « tombe » dans la pathologie, ce seront les gynécologues qui devront légalement prendre le relais). Les sages-femmes ont souvent plus de temps, de capacité d’écoute et de considération pour les personnes.
– Je me demande si je préfère avoir à faire à une femme ou à un homme. Voire si je préfère une personne d’un certain âge ou d’une certaine expérience. Cela ne garantira pas que ce soit quelqu’un-e de confiance mais cela peut me mettre dans des conditions favorables.
– J’essaye de dire que je ne veux pas ceci ou cela, et de faire des demandes ou des propositions. Une demande originale (observer son sexe dans un miroir, par exemple) pourrait ainsi par hasard rencontrer un accueil favorable, et, au moins, incitera le/la soignant-e à s’interroger (« Tiens, je pourrais peut-être faire autrement ? »). En particulier, des positions plus favorables (la position dite « à l’anglaise », ou « en chien de fusil », par exemple, permet d’être examinée sur le côté) peuvent mettre plus à l’aise. Je peux en parler avec le/la soignante. Sur le site de Martin Winckler, des techniques différentes sont abordées.
– J’essaye de mettre la pression au/à l gynécologue pour obtenir des explications et pour qu’il/elle sollicite mon consentement avant de pratiquer un acte sur moi. Parfois le menacer peut être nécessaire. Mais évidemment, avant la menace, qui n’est évidemment pas confortable et peut avoir des conséquences sur la qualité du soin (si le médecin est vexé, il aura tendance à négliger la prise en charge), je peux essayer de poser un maximum de questions. Que va-t-il me faire, pourquoi et comment cela va-t-il se passer ? Parfois, cela suffit à l’amadouer et cela l’engage pour les prochaines fois à plus expliquer ses gestes.
– J’arrive avec des notes écrites, que j’aurais préparées à l’avance (éventuellement avec de l’aide), pour le cas où je perdrais un peu mes moyens devant le/la médecin (ce qui est très courant vue la position de domination écrasante qu’il/elle maintient souvent face à nous, pauvres petites créatures ignorantes). Ces notes peuvent lister les questions que je me pose, les points que j’ai envie d’aborder, etc. Je peux même les lire devant le ou la gynéco.
– Je me rappelle et me répète que je suis légitime à dire NON à un-e soignant-e, quelque soit sa réaction. Je peux dire « non » dans de nombreuses situations : quand il/elle décide seul ce qu’il/elle va me prescrire sans m’expliquer pourquoi et quels effets secondaires je vais devoir subir ; quand il/elle me fait mal ; quand il/elle veut faire un examen sans m’en expliquer l’intérêt ; quand il/elle me demande d’être entièrement nue ; quand il/elle ne prend pas le temps que je sois prête à subir un acte qui me met mal à l’aise ou m’inquiète ; quand il/elle me pose des questions ou me fait des remarques qui débordent du cadre de ce que je lui ai strictement demandé... La liste est longue évidemment. La manière de lui dire non est évidemment délicate. C’est pourquoi être accompagnée peut aider souvent.
– Je quitte le cabinet dès que je sens que le-a soignant-e ne me respecte pas ou me met mal à l’aise.
– Je change de soignant-e si il ou elle ne me convient pas. Je n’ai pas à me justifier ou à avoir honte de ne pas vouloir revoir la même personne. Je ne dois rien à personne. Il s’agit encore de mon corps.
– Je demande un ou plusieurs avis, à différent-es soignant-es, avant d’accepter un traitement quelconque qui me fait peur ou qui peut avoir des conséquences importantes. Il y a souvent des solutions diverses et certaines me conviendront mieux.
– Je mens au/à la gynécologue si c’est plus confortable pour moi. Parfois, je parviens à être combative pour affirmer ce que je crois être juste. Parfois, je ne me sens pas suffisamment sereine ou à l’aise, ou bien je n’ai pas le temps, ou encore je ne peux pas prendre le risque d’être rembarrée ou mal soignée. Dans ces cas-là, je n’ai aucun scrupule à dissimuler des choses, à ne pas tout dire, voire à mentir au/à la gynécologue. Pour éviter une leçon de morale ou un soin négligé, je suis parfois obligée de le faire.
– Avant une consultation, je peux me laver mais il est inutile que je me récure trop fort. Déjà, ce n’est pas bon pour son vagin mais en plus le/la soignant-e a besoin de voir comment il fonctionne naturellement. Il n’est pas non plus nécessaire que je m’épile intégralement ! Si ce n’est pas mon habitude, je peux mettre des sous-vêtements pour ne pas être mal à l’aise.
SI JE VEUX AVORTER, À QUELLE SAUCE VAIS-JE ÊTRE CROQUÉE ?
Malgré une bataille acharnée qui a duré des décennies [11], il est encore très courant de subir le parcours de la combattante pour avorter dans de bonnes conditions. C’est pourquoi nous avons envie d’en parler un peu plus longuement.
Décider...
Décider de mettre fin à une grossesse non désirée est un moment difficile. Avant tout, c’est un moment où l’on peut se sentir plus vulnérable, éprouver des difficultés à faire des choix et où l’on va devoir en plus se confronter à des blouses blanches souvent moralisatrices et/ou inquisitrices. Il donc important de « paraître » sûre de soi et de tenir un cap face à l’institution (« Je suis sûre de ne pas vouloir d’enfant maintenant. »), même si ce n’est pas encore si clair pour soi. Le délai pour avorter étant parfois un peu long, il vaut mieux entamer les démarches quitte à se désister, même au dernier moment. Pour prendre ou confirmer cette décision de ne pas poursuivre une grossesse, on peut rencontrer des conseillers-ères dans des plannings familiaux, mais aussi (et c’est parfois vraiment plus agréable) en parler à des ami-es, des proches qui peuvent nous aider davantage à être sereine que le milieu hospitalier. Avorter n’est pas une maladie ni une faute et il serait temps qu’on en parle plus librement et sans avoir peur d’être stigmatisée.
Environ une grossesse sur cinq aboutit à une IVG (Interruption volontaire de grossesse) en France. On évalue à peu près à 220 000 le nombre d’avortements par an et une femme sur trois a recours à l’IVG une fois dans sa vie. Tout cela pour dire que ce n’est pas exceptionnel d’avorter, que nous sommes nombreuses à avoir besoin d’un accueil dans de bonnes conditions.
Que l’on ait un doute ou que l’on soit sûre d’être enceinte, on peut s’orienter vers les plannings familiaux (associations indépendantes, différentes des « centres de planification familiale » intégrés aux hôpitaux publics) où le personnel soignant et accompagnant est la plupart du temps plus à l’écoute, moins jugeant et de meilleur conseil qu’ailleurs pour orienter vers un service adapté. Souvent, on peut y obtenir des prescriptions pour les échographies, des tests de grossesse gratuits, voire parfois des ordonnances pour des médicaments abortifs (et également, d’ailleurs, pour la pilule du lendemain). Un numéro anonyme et gratuit (0 800 08 11 11) permet, depuis peu, de s’informer sur les sexualités, la contraception et l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Géré par le Planning familial, le numéro est ouvert 6 jours sur 7, le lundi de 09h00 à 22h00 et du mardi au samedi de 09h00 à 20h00.
Avant l’avortement : test sanguin et échographie obligatoires
Dans un deuxième temps, quand la décision d’avorter est prise, il faut que la grossesse soit confirmée, souvent par un test sanguin et obligatoirement par une échographie. Cette échographie, souvent effectuée par voie vaginale, permet de dater le début de la grossesse et peut être pratiquée par un cabinet indépendant ou extérieur à l’hôpital qui procédera à l’avortement. Ce moment peut être assez traumatisant car des échographes anti-avortement en profitent pour faire écouter les battements du cœur du fœtus ou montrer l’écran alors qu’on n’a rien demandé. Si on ne veut pas voir ni entendre, il est donc important de le préciser avant pour ne pas se faire surprendre, et on peut demander qu’il soit inscrit sur l’ordonnance de l’échographie « sans son, ni image ».
Jusqu’à l’automne 2015, un délai de 7 jours de réflexion était obligatoire même si la décision était déjà prise et assumée. Une loi récente supprime cette obligation (youpi !) et autorise les sages-femmes à prescrire les médicaments abortifs (c’est aussi pour nous une bonne nouvelle de ne pas être obligé-es de passer pas un-e gynécologue). Un rendez-vous avec une conseillère est proposé mais pas obligatoire. Il peut cependant être utile quand on a besoin d’informations sur les moyens de contraception, etc.
Tout au long de ce parcours, rappelons-nous que nous n’avons pas à nous justifier de notre choix, de nos pratiques sexuelles ou encore d’un refus de contraception malgré les pressions et les tentatives de culpabilisation. Si le mensonge ou la dissimulation de certains éléments sont plus confortables pour éviter une leçon de morale, il ne faut pas hésiter, nous n’avons aucun compte à rendre (« Ma capote s’est déchirée encore une fois. », « Cela ne m’arrive jamais de ne pas me protéger, je ne sais pas ce qui m’est arrivée. »).
Techniquement et légalement, il existe deux manières d’avorter :
Par voie médicamenteuse, jusqu’à 7 semaines de grossesse ou 9 semaines d’aménorrhée. Par méthode chirurgicale, c’est-à-dire par aspiration (et parfois curetage), jusqu’à 14 semaines d’aménorrhées (jusqu’à 12 semaines de grossesse). Si on a dépassé ces durées, des pays proches ont des délais beaucoup plus longs : en Angleterre et aux Pays-Bas, on peut avorter jusqu’à 24 semaines d’aménorrhées (environ 5 mois), en Espagne jusqu’à 14 semaines [12] avec pas mal d’exceptions. On peut demander à certains plannings familiaux un coup de main pour organiser un voyage d’avortement hors-délai. Il semble que près de 6000 femmes chaque année vont avorter hors de France.
NB : Les délais sont calculés à partir des dernières règles et non de la date de la conception. Par exemple, si je suis tombée enceinte il y a 5 semaines, mes dernières règles ont dû avoir lieu deux semaines avant, c’est-à-dire il y a 7 semaines. Il sera donc noté sur tous les papiers médicaux pour dater la grossesse 7 semaines d’aménorrhée (qui veut dire « période sans règles »).
L’avortement médicamenteux ou chirurgical
Ensuite, on a un rendez-vous avec le/la gynécologue qui devrait procéder à l’avortement. Si l’on choisit la voie médicamenteuse, il faut bien s’informer des effets secondaires et savoir que cette méthode n’est pas sûre à 100%. Cette méthode se fait en deux étapes à plus ou moins 2 jours d’intervalle. On prend un premier médicament (un anti-progestérone, le RU 486 ou mifépristone), qui tue le fœtus, provoque l’ouverture du col et stimule les contractions d’expulsion [13] (il pourrait fonctionner seul mais souvent ne suffit pas). 2 jours après, un deuxième médicament (le misoprostol, connu sous les appellations Cytotec [14] et Gymiso, est une prostaglandine de synthèse) soutient l’action du premier médicament et provoque les contractions et l’expulsion si elles n’ont pas encore eu lieu. La prise de misoprostol (souvent 4 cachets à ingérer ou introduits directement dans le vagin), pourra être renouvelée quelques heures après si l’expulsion n’a pas encore eu lieu. Certains services proposent que la prise de misoprostol se fasse à la maison (ou ailleurs, dans un coin de nature sympa par exemple), quand l’IVG a lieu avant la 7ème semaine d’aménorrhée (5ème semaine de grossesse), ce qui peut être parfois plus confortable, et permet d’être éventuellement accompagnée par les personnes de son choix. Un encadrement médical peut cependant nous rassurer.
On peut refuser cette technique et choisir la méthode chirurgicale directement. Dans certains services, on nous demandera d’attendre la 7ème semaine d’aménorrhée pour avoir accès à la méthode chirurgicale (il a été entendu quelques fois qu’avant ce délai l’aspiration marche moins bien). Légalement, il est possible de se faire aspirer avant la 7ème semaine. Tout cela se prévoit avec le/la gynécologue.
La méthode chirurgicale : Selon les services, on peut choisir de la subir soit sous anesthésie locale (où l’on reste consciente de ce qui se passe) ou générale (plus lourde en effets secondaires. On peut d’ailleurs demander à recevoir les plus faibles doses et des temps d’endormissement les plus courts possibles). Il faut essayer de choisir ce qui nous paraît plus confortable psychologiquement et physiquement. L’anesthésie locale se fait par une piqûre sur le col de l’utérus qui peut être plus ou moins douloureuse. On aura donc souvent un rendez-vous avec un-e anesthésiste avant l’opération.
L’intervention, qui dure environ 15 minutes, nécessite de provoquer la dilatation du col de l’utérus (à l’aide d’un médicament) puis d’introduire une canule dans l’utérus et d’y aspirer l’œuf. La plupart du temps l’aspiration seule est suffisante. Cependant, surtout quand elle n’a pas fonctionné une première fois toute seule, il faut l’associer à un curetage de l’utérus : une curette en mousse, sorte de petite cuillère, est utilisée pour racler la muqueuse utérine sur l’ensemble de sa surface et vider entièrement l’utérus par aspiration. Dans le cas du curetage, la dilatation du col peut être effectuée à l’aide de laminaires (algues séchées) ou de fibres synthétiques qui se dilatent avec l’eau. La dilatation est censée être douce et peut prendre quelques heures.
Cette méthode reste la plus efficace. Il arrive cependant que certains médecins commencent l’opération avant que l’anesthésie ne fasse effet. Pendant l’anesthésie locale, on peut demander quels actes sont pratiqués sur notre corps, poser des questions tout au long de l’opération. Parfois, les personnes qui pratiquent l’opération expliquent d’elles-mêmes les étapes (et là, tu es bien tombée ! Sauf dans le cas où tu ne voulais rien savoir...).
On nous prescrira la plupart du temps un antibiotique avant et/ou à la suite de l’opération pour éviter les risques d’infection qui peuvent arriver. Pour les femmes dont le rhésus est négatif, lorsque le fécondeur est d’un rhésus positif, une injection de Rhophylac (anticorps anti-D) est prescrit après l’avortement (ou une fausse-couche). Cette injection est effectuée de manière préventive, en vue d’une 41 future grossesse. Il s’agit en quelque sorte d’un vaccin pour éviter qu’une prochaine grossesse ne soit rejetée par le corps dans l’avenir. En effet, le corps pourrait considérer un fœtus d’un rhésus positif comme un corps étranger et le rejeter systématiquement.
Après l’avortement
Dans tous les cas, il est normal d’avoir des saignements après qui peuvent durer plus ou moins longtemps. Mais en cas de saignements (on dit qu’ils ne devraient pas dépasser 15 jours, mais cela dépend un peu des femmes), de douleurs ou de fièvre qui nous paraissent trop importants, il ne faut pas hésiter à retourner dans le service qui a réalisé l’avortement ou, s’il s’est mal passé, aller voir un-e autre gynéco. Il est parfois nécessaire d’insister si l’on sent qu’on a besoin d’un examen, d’une échographie, d’un traitement, etc. En effet, plusieurs personnes, en particulier après un avortement médicamenteux, mais aussi après une aspiration sans curetage, convaincues que tout n’était pas expulsé, ont du insister lourdement pour être crues par les soignant-es et être prises en charge.
Après avoir été enfin examinées, il s’est avéré que des morceaux de placenta, voire de fœtus, étaient encore dans l’utérus et pouvaient provoquer des douleurs insupportables, des saignements et/ou des infections de l’utérus potentiellement graves. Il ne faut pas forcément imaginer le pire mais se faire confiance si on ressent des gênes ou qu’on a des inquiétudes, il ne faut pas se gêner à exiger un examen complémentaire avant la visite de contrôle.
Une visite de contrôle doit effectivement de toutes façons être effectuée (elle n’est pourtant pas toujours proposée, il faut parfois la demander) 15 jours après, éventuellement dans un autre service ou auprès d’un-e autre gynécologue.
Pour information, un avortement en France est en principe pris en charge à 100%, mais certaines visites ne sont pas toujours entièrement remboursées. Dans certains plannings familiaux, les consultations sont gratuites.
La pression sur la contraception :
Durant toutes ces étapes, la question de la contraception est très présente car il y a quand même cette idée qu’on a agi de manière irresponsable pour en arriver à devoir avorter. Réfléchir avant si l’on veut ou non une contraception et de quel type peut éviter des discussions pénibles. Il est souvent proposé de profiter de l’anesthésie pour poser un implant ou un stérilet. Il faut surtout se dire qu’il existe de très nombreux moyens de se protéger avant de faire un choix. Il peut être opportun de rappeler au médecin que c’est nous qui assumons les conséquences d’un avortement et pas lui. En tous cas, si on veut refuser une contraception, on peut aussi dire au/à la gynécologue qu’on a besoin d’un temps de réflexion de quelques semaines pour faire son choix après avoir digéré l’avortement qui est, pour le moment, la principale préoccupation. Ou bien, pour ne pas subir une leçon de morale pénible, on peut toujours accepter une prescription de pilule et la mettre à la poubelle à la sortie.
Pendant cette période, il est important de se faire du bien, d’être à l’écoute de son corps, de choisir quelqu’un-e de confiance pour être accompagnée. Son/sa partenaire sexuel-le ou sa mère ne sont pas forcément les meilleures personnes. En tous cas, quand des personnes proches se sentent concernées et nous soutiennent de manière bienveillante, cela fait du bien !
Pouvoir partager ses doutes, ses sentiments, est très important. Ne pas se laisser effrayer par des mythes totalement infondés (du type « L’avortement rend stérile. »). J’ai le temps et le droit de penser tranquillement à être mère ou non dans l’avenir même si j’avorte aujourd’hui. Un avortement peut très bien se passer, on peut l’assumer pleinement et ne pas en être traumatisée à vie. Mais il se passera d’autant mieux si on est bien informée et qu’on ne laisse pas le pouvoir médical prendre le contrôle de notre corps.
3. (Essayer de) SE DÉBROUILLER
des tuyaux pour aller moins souvent chez le/la gynéco, comprendre quelques trucs pour ne pas prendre ce qu’il/elle dit au pied de la lettre
Tout d’abord, pas de panique ! Même si on nous a habitué-es à courir chez un docteur dès que notre sexe picote ou que son odeur dérange mon/ma partenaire ou moi-même, il faut essayer de ne pas s’affoler parce qu’on peut tenter quelques petites choses simples. Cela peut éviter le réflexe trop systématique des gynécos de nous faire avaler des antibiotiques ou des antifongiques, qui tuent respectivement les bactéries (les bonnes et les mauvaises) et les champignons, et qui peuvent aggraver la situation, surtout s’ils sont pris à répétition ou sans une solution qui soutienne la flore vaginale après le traitement.
Pour comprendre un peu ce qui se passe, il faut savoir notamment que le vagin a un équilibre bien particulier, lié à une flore spécifique qui permet qu’il soit bien lubrifié, qu’il s’auto-nettoie et que les sensations soient agréables. Il est composé en grande partie de bactéries lactiques (les bacilles de Döderlein) qui lui permettent de maintenir cet équilibre et un pH relativement acide (entre 3,8 et 4,5). Il se lubrifie également en produisant différentes sécrétions lors de l’excitation sexuelle et, en dehors de l’excitation, à différents moments du cycle menstruel.
Par exemple, les sécrétions vaginales ont une texture particulièrement abondante, transparente et fluide (comme du blanc d’œuf) pendant quelques jours avant et pendant l’ovulation (au milieu du cycle). Il s’agit de la « glaire cervicale », qui permet de reconnaître le moment où l’ovulation va se produire. Elle est sécrétée par le col de l’utérus et elle sert à accueillir et nourrir les spermatozoïdes, et leur permettre de venir plus facilement dans l’utérus rencontrer un ovule.
Toutes les femmes ont des sécrétions différentes, plus ou moins abondantes, plus ou moins épaisses, avec des odeurs différentes. Le mythe de l’odeur infecte du vagin est un mythe sexiste et hygiéniste véhiculé par des personnes qui en fait n’aiment pas les vagins.
La plupart du temps, avec ses armes naturelles, le vagin se défend très bien des « événements » qui pourraient provoquer une inflammation, une démangeaison ou autre désagrément. Il peut ainsi rencontrer des bactéries, des germes, des champignons assez fréquemment et s’en protéger sans problème. La plupart des microbes les plus courants ne se développent d’ailleurs pas en dessous d’un pH de 5. Donc, en théorie, si on parvient à maintenir le pH bien acide, on se protège de pas mal de soucis.
Cependant, parfois, cet équilibre est plus fragile. On observe de temps en temps une augmentation du pH et une moins grande résistance du vagin pour se défendre. De nombreux facteurs peuvent en être la cause : fatigue, alimentation insuffisante ou déséquilibrée, stress, d’autres affections du corps, absorption de certains médicaments (antibiotiques, hormones), pratiques d’hygiène fragilisantes (trop de savon ou de sprays en tout genre). Mais certains moments du cycle peuvent également provoquer un déséquilibre : après les règles, ou encore au moment de l’ovulation, par exemple. C’est dans ces moments-là que peuvent se développer plus facilement des sensations désagréables.
Quand le sexe gratte, pique, brûle et/ou que des sécrétions inhabituelles sortent du vagin, que l’odeur ou la couleur de ces sécrétions sont différentes de l’ordinaire voire désagréables, ce sont des indications utiles pour détecter que le sexe est déstabilisé. On appellera ce trouble généralement une vaginite ou une vulvite. Ce sont des inflammations du vagin pas forcément graves. On en rencontre souvent, et parfois elles passent très vite toutes seules ou juste avec un peu d’huile apaisante. Parfois, il faut s’en préoccuper davantage pour qu’elles nous gênent moins.
Elles sont liées à de multiples facteurs : à une flore vaginale déséquilibrée comme on vient de l’expliquer, à des irritations liées aux sous-vêtements, aux règles, à la fatigue, au stress, à un changement de partenaire sexuel-le, de fréquence de rapports ou de pratiques sexuelles, à certains champignons, à certaines bactéries, à une immunité un peu fragile, etc. Les vaginites qui deviennent chroniques nécessitent souvent de s’interroger aussi sur les habitudes alimentaires, sur des situations de vie inconfortables (la sensation d’être envahie par exemple), sur son mode de contraception peut-être (il semble que la pilule est un des facteurs aggravants des vaginites chroniques).
Les odeurs et les sécrétions différentes que l’on observe sont des signes de déséquilibre souvent liés à la réaction de défense du corps, comme l’augmentation de globules blancs dans les sécrétions pour protéger le corps d’une infection. Ces signes nous alertent mais sont aussi des moyens de défense. Il ne faut pas chercher à tout prix à les éliminer brutalement, comme en récurant vivement le vagin.
Petits conseils au quotidien
– Essayer d’aimer son vagin (parfois c’est plus facile à dire, c’est sûr), de le regarder et de le cajoler (un peu d’huile ou une parole sympathique peuvent lui faire du bien, le détendre).
– S’observer régulièrement pour essayer d’évaluer les changements de texture des sécrétions, les changements d’odeur, de couleur, etc.
– Éviter les savons trop chimiques (préférer le savon d’Alep par exemple) et de laver trop fort ou trop souvent le vagin (il se défendra moins bien si on lui enlève toutes ses bonnes bactéries). Ou pas de savon du tout.
– Se laver d’avant en arrière (du vagin vers l’anus et non l’inverse, le vagin étant vulnérables aux bactéries anales).
– Éviter les vêtements trop serrés ou qui ne respirent pas assez (qui créent un climat de serre chaude et humide très favorable à tous les germes qui ne sont pas les bienvenus) et de garder trop longtemps des vêtements mouillés (maillot de bain par exemple).
– Porter plutôt des sous-vêtements en coton voire pas de sous-vêtements (une nuit sans culotte peut déjà améliorer bien les choses quand on commence à se grattouiller !).
– Pendant les règles, éviter les serviettes hygiéniques en plastique, très irritantes et ne pas abuser de l’usage des tampons (qui assèchent le vagin). Si possible, préférer des matières en coton et/ou les coupes menstruelles. Se rincer et changer de protection régulièrement. Les règles et les quelques jours qui suivent sont un moment où le terrain vaginal est plus fragile, il faut alors ménager son sexe !
– Éviter les anti-fongiques et antibiotiques à répétition. Si une vaginite revient souvent, cela peut être le traitement qui empire les choses en détruisant toute la flore sans la laisser se reconstituer. Dans le cas où on utilise des anti-fongiques ou antibiotiques (même naturels comme l’ail), penser à réensemencer ensuite sa flore avec des bactéries lactiques (voir plus loin pour des idées).
– Essayer d’apprendre à s’auto-examiner le sexe, seule ou avec des ami-es si on a un doute sur quelque chose ou par curiosité, pour mieux le connaître [15]. D’ailleurs, il est aussi possible d’apprendre facilement avec les conseils de quelqu’un (par exemple un-e gynéco) à s’auto-palper les seins et de choisir de le faire régulièrement pour vérifier si des modifications de texture ou des grosseurs apparaissent (dans ce cas, pas de panique, mais il serait intéressant de demander conseil à une sage-femme, et éventuellement à un-e gynécologue bien choisi-e).
– Lors des rapports sexuels, essayer d’éviter que les bactéries du rectum ne viennent trop dans le vagin (par exemple, en lavant tout ce qui passerait de l’anus au vagin : mains, sexe, objets...). Ce n’est pas que l’anus est sale, c’est juste que ce n’est pas le même milieu biologique ni le même pH que le vagin !
– Ne pas hésiter à utiliser du lubrifiant (la salive, du gel d’aloe vera, autres lubrifiants non irritants) si c’est plus confortable. Si on n’est pas suffisamment lubrifiée, par période ou en général, le lubrifiant peut éviter des irritations et un déséquilibre vaginal et être, par ailleurs, très agréable.
– S’interroger sur ses relations intimes, comment on s’y retrouve, si elles sont plaisantes. Si nous nous forçons, si nous sommes gêné-es pour parler des difficultés ou des envies qui nous traversent, notre corps en souffrira et nous le signalera.
Et en cas d’irritation, de picotement, de sensation de brûlure, de rougeur, de gonflement, d’odeur ou de sécrétions inhabituelles
Voici quelques idées qui ne demandent pas forcément de faire un diagnostic très approfondi mais, attention, il est important de ne pas laisser traîner trop longtemps une vaginite. Si on a essayé quelques trucs pendant quelques jours, et que cela empire, il va sûrement falloir se demander si on est sur la bonne piste et peut-être... argh... consulter !
– Déjà, aérer son sexe (si possible pas de culotte la nuit au moins).
Éviter de se laver trop souvent, surtout avec des savons agressifs. Le vagin doit pouvoir reconstituer une flore pour se défendre de l’inflammation. Si on lui enlève aussi ses outils naturels, cela ne l’aidera pas. Se rincer juste à l’eau peut être déjà agréable. Selon les situations, l’eau froide, tiède ou chaude pourra soulager la gêne.
– Se rincer (avec une poire à lavement ou juste avec la main si on a pas de matériel) à l’eau citronnée (ou au vinaigre de cidre de bonne qualité dilué dans l’eau, ou encore au bicarbonate de soude, dilué également). Le citron permet de soutenir le rétablissement de l’acidité naturelle et suffira parfois à repousser les microbes intrus et à aider le vagin à se remettre tout seul.
– Le gel d’aloe vera (le plus pur possible) ou une bonne huile adoucissante en cas d’irritation peuvent avoir un effet très agréable et réparateur. Nous avons une petite préférence pour l’huile de calendula (qui aide à la circulation et au drainage) mais d’autres huiles adoucissantes font bien l’affaire.
– L’ail est utilisé en gousse entière épluchée mais non coupée (sinon cela brûle) qu’on introduit dans le vagin. On s’en sert quand on sent qu’on a besoin de son pouvoir antibiotique et antifongique, quand on peine à se débarrasser d’une vaginite qui s’incruste. Si on veut utiliser l’ail, changer une à deux fois par jour la gousse d’ail. Ne pas la garder forcément en continu. Par exemple, en mettre la nuit et pas la journée ou inversement. Elle se retire plus facilement quand on s’accroupit et qu’on détend ses abdominaux. Si on craint d’avoir du mal à la retirer juste avec les doigts, on peut l’entourer d’une compresse et y accrocher un fil qui dépasse du vagin qu’on pourra tirer pour la retirer.
– On peut alterner ail, huile adoucissante, rinçage à l’eau citronnée. l’argile verte en cataplasme sur le sexe (mettre une très grosse couche et l’enlever avant qu’elle soit sèche) a été testée et fait beaucoup de bien.
– Des bactéries lactiques, en renfort de sa flore vaginale, aident bien le vagin à se remettre et à en reproduire à nouveau tout seul et repousseront donc très bien de nombreux germes, bactéries ou champignons indésirables : du yaourt contenant des ferments lactiques, c’est à dire du yaourt au bifidus ou du yaourt frais non pasteurisé (vivant !) introduit dans le vagin (ce qui n’est pas forcément facile mais qui se fait bien avec une petite cuillère ou mieux une grosse seringue par exemple. Le mettre le soir avec une protection parce que ça coule) ou des capsules vaginales de bactéries lactiques [16].
– Éviter parfois un peu les contacts génitaux trop irritants pendant quelques jours (en touchant par exemple tous les autres endroits de son corps). Les contacts génitaux doivent être très doux et bien lubrifiés. Une excitation sexuelle et/ou un orgasme peuvent aider à soigner une inflammation s’ils ne provoquent pas une irritation supplémentaire. Il est utile d’en parler avec son/sa/ses partenaires sexuelles. C’est souvent un bon moyen pour les décoincer un peu et pour leur faire mieux comprendre nos réactions. Il est important de ne pas se sentir honteuse et d’affirmer ce qui nous fait du bien et pas du bien dans ces moments, en termes de touchers, de paroles, de respect.
– Il peut être nécessaire de répéter ces opérations au cycle suivant, si on n’arrive pas complètement à se débarrasser des symptômes et qu’ils reviennent après les règles suivantes. Dans le cas où les vaginites deviennent chroniques (ou se répètent très régulièrement), il peut être nécessaire de s’interroger sur des causes plus globales comme son alimentation [17], des pratiques sexuelles qui ne nous conviennent pas, des situations affectives déstabilisantes ou un moment de vie difficile à surmonter. Peut-être notre rythme de vie, les espaces que nous habitons, nos activités, nos interactions, génèrent en nous des stress ou des souffrances difficiles à formuler. Notre corps nous parle ! Il n’est pas notre ennemi mais tire parfois des sonnettes d’alarme.
– Penser que certaines affections peuvent se transmettre à nos partenaires sexuelles. Ne pas hésiter à leur en parler et à se renseigner.
Les infections urinaires (ou cystites)
Leur signe principal est une sensation de brûlure très forte au moment où on urine (souvent à la fin). Parfois la douleur au niveau du sexe ou de la vessie est en continu et pas uniquement quand on urine. Elles sont très désagréables. Elles se produisent quand des bactéries s’introduisent dans la vessie par le conduit urinaire (depuis l’extérieur, par le trou du pipi ou « méat urinaire »).
En cas d’infection, il faut boire beaucoup d’eau, encore mieux de l’eau avec du citron pressé dedans. On peut se rincer le sexe avec de l’eau citronnée. Le jus de canneberge (si possible de bonne qualité), à boire en grande quantité, se trouve assez facilement et a bien fait ses preuves également.
Si on aime les tisanes, la bruyère en décoction (bouillie au moins 20 minutes) est une très bonne boisson contre les infections urinaires. Une bouillotte d’eau chaude (ou une bouteille d’eau chaude dans une chaussette !) posée sur le sexe atténue bien la douleur. Attention ! La cystite prolongée peut se transformer en une infection des reins (pyélonéphrite) très douloureuse et vraiment risquée pour les reins. Il faut donc surveiller si de la fièvre apparaît ou du sang dans les urines. Des antibiotiques seront souvent prescrits si cela s’installe.
Si les douleurs ou les sensations sont vraiment très intenses ne pas traîner avant de consulter un-e soignant-e. En effet, l’atteinte des reins peut être assez rapide et le traitement sera certainement long et pénible.
En prévention, surtout quand les cystites deviennent chroniques, quelques idées peuvent être conseillées lors des rapports sexuels : faire bien attention à éviter les transferts de germes entre l’anus et le vagin (les germes des cystites viennent de l’extérieur !), penser à uriner juste après une excitation intense (avec jouissance ou non, pénétration ou non) et éventuellement se rincer le sexe.
La cystite est souvent un signe qu’on se sent envahie, qu’on a peur ou eu peur de quelque chose...
Quelques pistes sur les difficultés liées aux règles.
Il y a quelques précautions à prendre pour atténuer les symptômes douloureux d’avant et pendant les règles (seins gonflés et très sensibles, douleurs au ventre, vertiges, problèmes de sommeil, déprime, maux de tête, etc).
Si on connaît un peu son cycle, une ou deux semaines avant les règles, on peut essayer de manger moins de sel et moins de protéines animales (pas trop de soja sous toute forme non plus !), consommer moins d’alcool (la bière en particulier), de café, de produits laitiers [18] et, de manière générale, essayer de soulager, soutenir l’activité de son foie. C’est lui qui permet d’évacuer toutes les hormones du corps. En particulier, entre le moment de l’ovulation et les règles, on produit une quantité très importante d’hormones dans le but notamment d’accueillir une éventuelle grossesse. Quand cette production chute à l’arrivée des règles, le foie, lui, est encore en pleine activité de dégradation. S’il est en plus saturé par une alimentation qui lui demande trop de travail, les déchets resteront et auto-intoxiqueront le corps. C’est ce qui explique ces signes douloureux ou désagréables qu’on ressent au moment des règles.
Pour soutenir son foie, on peut manger par exemple des carottes, de l’avocat, des artichauts, du radis noir, du pamplemousse, du pissenlit en salade, de la chicorée, des aliments amers, du romarin (en tisane quotidienne, c’est assez efficace), etc. Tous ces aliments sont connus pour purger le foie et donc le soulager.
Pendant les règles, les conseils les plus importants seraient de s’écouter, de se reposer si on souffre, de mettre une bouillotte sur son ventre et de ne pas hésiter à dire qu’on souffre pour cette raison, cela soulage aussi.
Que ce soit pour les vaginites, les règles et quantité d’autres difficultés qu’on peut rencontrer, un certain nombre de plantes (en tisane, en huiles essentielles, etc.) peuvent donner un bon coup de main. Sur ce sujet, la grande référence est le livre Mamamélis, manuel de gynécologie naturopathique à l’usage des femmes, de Rina Nissim.
Bonus ! Un peu d’anatomie et de fonctionnement hormonal
dans la brochure des shémas du cycle et des organes internes et une petite explication :
Dans ces différents schémas, on observe la production d’hormones par le cerveau, et plus spécifiquement l’hypophyse (LH et FSH), qui stimule la production des hormones ovariennes et utérines (l’oestrogène ou oestradiol et la progestérone) et leurs conséquences sur le cycle menstruel. On constate que les unes et les autres s’influencent fortement dans tous les sens. Les unes ne fonctionnent pas sans les autres. Les hormones vont être des messagers qui vont indiquer aux cellules de se comporter dans tel ou tel sens.
Par exemple, l’oestrogène va notamment stimuler la maturation du follicule ovarien, future ovule fécondable. Le pic de production de LH va provoquer la libération de l’ovule (le moment de l’ovulation). La progestérone, produite surtout à partir du moment de l’ovulation, est une hormone qui a notamment le rôle de dire au corps de se préparer à accueillir et nourrir une ovule fécondée. Elle est par ailleurs responsable d’une légère augmentation de la température du corps.
Pour clore cette brochure comme on claque une porte, une de nos amies nous offre son hémorragie rageuse, qui l’a elle-même surprise, sur la question quelque peu épineuse (ou jamais assez) de la virginité.
Nous ne sommes pas vierges
La virginité est un mythe aussi dégueulasse que celui qui lorgne dessus.
Aussi dégueulasse que la façon dont je considère mon propre sexe depuis que j’ai compris qu’il fallait le cacher. Et le toucher sans en parler, coupable et mortifiée, allant jusqu’à craindre que les fantômes de mes ancêtres ne m’épient. Depuis ce moment où j’ai appris à avoir honte de mes désirs pour ne pas être traitée de putain. La virginité n’est qu’un bâton dans les roues pour celle qui se la trimbale, et qui doit la préserver, aussi précieuse qu’encombrante, jusqu’à ce qu’un heureux élu s’en empare, investi d’une mission initiatrice dont il s’honore de suffisance. Faut-il rappeler qu’il n’y a qu’un homme pour nous la ravir, cela semble aller de soi dans cette ambiance hétéro écrasante. La virginité est un concept qui existe pour que d’entrée de jeu, nous en soyons dépossédées, contraintes de leur céder cette primordiale « valeur ajoutée » par principe éphémère, par rebond sacrificielle, et que nous puissions dire adieu à notre belle innocence, celle qu’il nous faudra ensuite feindre ou piétiner, le choix est rude. Cela signifie pour moi que cette fameuse « première fois », nous ne donnons rien à ce premier venu, car ce qu’il prend il l’avait déjà conquis, rien qu’en nous laissant croire que nous perdrons quelque chose en ouvrant notre corps.
Nous ne sommes pas vierges de toutes ces histoires qui se disent à demi-mots, se lisent entre les lignes, de celles qui retentissent à grands coups de silence dans nos charmantes familles, où les sexes se murent-murs, tant qu’ils ont des oreilles, pas vierges de ces histoires qui se rejouent inlassables et si bien dissimulées au grand jour de leur quotidienne banalité.
Pas vierges de tout ce que les contes radotent, de ces histoires de princes, qui d’un baiser n’en finissent pas de nous réveiller de nos sommeils chroniques, pour nous faire beaucoup d’enfants à la fin. Nous ne sommes pas vierges de ces jugements qui nous façonnent dès le berceau, des moqueries qui bientôt claquent comme des gifles, pas vierges non plus des compliments qui nous ligotent au pied de la lettre, qui nous cintrent et nous corsètent, étriquant nos corps comme sont étriqués les regards qu’il nous faut séduire pour exister.
Pas vierges non plus de toutes ces avances que l’on accepte à reculons, mais quand même qu’on accepte souvent, prêtes à tout pour croire se débarrasser enfin de ce fardeau initial, pour s’immoler à cœur perdu dans le rôle univoque qu’on a prévu pour nous, dont l’interprétation qui nous est laissée se décline entre maternage à la chaîne et prostitution conjugale. Loin d’être vierges, d’avoir déjà tant vu nos aînées contraintes de s’y appliquer avec la même dévotion.
Nous ne sommes pas vierges des sacrifices de nos mères, de leurs vies passées à s’effacer, à l’ombre de leur si douce domesticité, pas vierges de leurs colères qui ne parvenaient qu’à fondre en larmes, de leurs silences, garants serviles de leurs vaines crédulités à devoir astiquer encore le mythe poussiéreux du grand amour.
Nous ne sommes pas vierges non plus de l’autorité que nos pères ont déjà ancrée en nous, aussi « naturellement » dit-on que nous nous soumettrons, souple et serviable, souriante à toute épreuve. À celle de nos instituteurs, professeurs, prêtres des temps modernes, faiseurs des modes et mœurs en vogue, face à cette myriade d’esthéticiens et stylistes dévoués à corriger éternellement les écarts de nos corps plastiques, face à ses projections publicitaires missionnées d’en garantir le faire-valoir marchand. Depuis quel âge voyons-nous la marionnette de la top modèle s’exhiber glorieuse sur le miroir grossissant de nos points noirs sur la gueule et de nos kilos en trop ? Depuis quel âge avons-nous si bien compris que nos corps devaient être livrés tout crus aux prédicateurs de la bonne santé physique et mentale ? Nous sommes bien loin d’être vierges de ce ridicule qui s’empare de nous face à ceux qui se prénomment médecins ou gynécologues, nous nous sentons souillées rien qu’à voir se pavaner la blancheur de leur blouse sur les balbutiements de nos ignorances, et avant même de nous déshabiller nous sommes déjà nues et grelottantes de honte, déjà vulnérables, malsaines ou immorales. Déjà sous l’emprise d’un rapport où sans conteste ce sera toujours ce corps médical qui fera autorité sur le nôtre, par-delà les connaissances franchement nauséabondes qu’il distille sur cet objet fragmenté, disséqué, recousu, maintenu en état de marche forcée, ainsi nommé femme.
Nous ne sommes pas vierges des colonisations millénaires qui se jouent encore dans notre ventre, ce ventre au terreau fertile pour le meilleur et pour le pire, ce joyau de leurs plus tendres conquêtes, où se sème la relève docile de leurs chairs-à-canon et chères-à-tout-faire, ce ventre qui s’investit à la mesure d’ambitions démographiques, à la hauteur des déploiements industrieux et des pillages qui s’y justifient. Vraiment pas vierges de toutes ces dépossessions qui se racontent dans l’histoire souterraine de ce ventre, cette matière première indispensable pour que se réalise une hégémonie purement fantasmée, au sein de laquelle nous ne trouvons notre place qu’à l’ état de victime.
Vous conviendrez que mon regard ne fait pas dans la dentelle, et que ma plume acerbe taille dans le vif de ce texte turbulent, en fait, il se trouve que j’en ai marre de prendre des pincettes pour m’emparer de ce qui depuis si longtemps nous maintient la tête dans l’étau de notre propre sexe. J’en ai marre d’être conciliante et mesurée, marre de faire preuve de patience, d’être cet exemple de délicatesse et de parcimonie, marre de croire autant que je propage des mythologies qui ne servent que ceux qui en tirent un privilège. Marre d’être là où on m’attend, marre de retourner contre moi-même la violence qui m’est faite, et de me flageller de garder si bien le silence, tant on m’a répété que ce serait bien pire si j’ouvrais ma gueule.
C’est bon de voir une plainte déborder en colère.
Ce qui nous inspire !
BOUQUINS
– Pour aller un peu plus loin sur une approche naturopathique de la gynécologie : Mamamelis : manuel de gynécologie naturopathique à l’usage des femmes, Rina Nissim, 2011, 5ème édition, éditions Mamamélis.
– La Ménopause, Rina Nissim, 2006. Une vision plaisante de la ménopause qui ne fait pas de nous des sous-merdes frigides si on a passé la cinquantaine.
– Notre corps, nous-mêmes, Boston Women’s Health Book Collective, issu du Mouvement self-help des années 60 et 70, 1977.
– L’auto-examen : un geste de santé, Caroline Larue, 1986, Éditions du Remueménage et le Centre de santé des femmes, Montréal (Québec).
– Caliban et la Sorcière, Femmes, corps et accumulation primitive, Silvia Federici, 2004, traduit de l’anglais en 2014 aux éditions Entremonde et Senonevero, 2004.
– Des experts et des femmes, 150 ans de conseils prodigués aux femmes, Barbara Ehrenreich, Deirdre English, édition du remue-ménage,1982.
– L’Arraisonnement des femmes, Paola Tabet dans Essais en anthropologie des sexes, textes réunis par Nicole-Claude Mathieu. Paris, Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 1985.
– Avorter : Histoires des luttes et des conditions d’avortement des années 1960 à aujourd’hui, collectif IVP, éditions Tahin Party, 2009.
– Mon corps est un champ de bataille, tome 1 et 2, éditions Ma colère, 2009.
– Red Shoes, texte/spectacle de Christine Aventin, publié chez Maelström en 2012 et ses « outils d’accompagnement ».
– Journal du Cancer, Audre Lorde, éditions Mamamelis, 1998.
– Rêver l’obscur. Femmes, magie et politique, Starhawk, collection Socières des éditions Cambourakis, 2015 (1ère édition 1982).
– Peau, à propos de sexe, de classe et de littérature, Dorothy Allison, collection Socières des éditions Cambourakis, 2015 (1ère édition 1994).
Autres auteures féministes qui nous inspirent, pour le plaisir même s’elles n’ont pas un rapport direct avec la gynécologie, elles aident à se renforcer : Elsa Dorlin, Christine Delphy, bell hooks.
ROMANS
– Le Choeur des femmes, Martin Winckler, 2009.
– Zami, une nouvelle façon d’écrire son nom, Audre Lorde, éditions Mamamelis, 1998.
– Pourquoi être heureux quand on peut être normal ?, Jeanette Winterson, éd. de l’Olivier, 2012.
– L’Œuvre de dieu, la Part du diable, John Irving, 1985.
BROCHURES
– La grossesse et l’accouchement, histoire d’une maladie pas comme les autres, Béatrice Cascales et Laëtitia Négrié, 2014.
– Papillomavirus. De la prévention au cabinet médical. Récit d’un contrôle de nos corps et de nos sexualités. Par le collectif de réflexion critique sur la gynéco et la médecine de Lille, mars 2015.
– Vers une santé autonome, Adréine Bel, 2006-2008, articles trouvables sur internet.
– Le viol, c’est quoi ?, Des féministes libertaires nantaises et Narjo KKG, 2007.
– Transcare de Jacoby Ballard traduit par le collectif Translation. Quelques conseils phyto et alimentaires pour accompagner les opérations chirurgicales pratiquées dans un processus de transition.
– Sorcières, sages-femmes et infirmières (une histoire des femmes soignantes) de Barbara Ehrenreich et Deirdre English, 1973.
REVUE
– Sorcières. Sous-titrée « Les femmes vivent », revue littéraire, artistique et féministe, créée par Xavière Gauthier en 1975 et disparue en 1982. 24 numéros.
SITES
– Le site GynAndCo, pour trouver des adresses qui correspondent à nos besoins, nos réalités. Des soignant-es qui accueillent un peu plus chaleureusement des féministes, des lesbiennes, des asexuelles, des trans, des sexualités insolites, des personnes qui en ont ras-le-bol de se faire maltraiter par le gynécologue du secteur.
– Le site de Martin Winckler.
– Le site psysafeinclusifs.wix.com peut être une aide pour trouver un-e praticien-ne de santé psy accueillant toutes les différences, s’attachant à ne pas reproduire les oppressions systémiques existantes dans le champs social (racisme, patriarcat, validisme, classisme, âgisme, homophobie, transphobie, etc.). Sur recommandation des patient-es elleux-mêmes.
FILMS
– Regarde, elle a les yeux grand ouverts, de Nicole Grand et Yann Le Masson, avec le MLAC de Aix-en-Provence, 1980.
SONS
– Jenny Dahan, album Mon cul, 2014. Parce qu’on l’adore...
– Radiorageuses.net, site d’émissions radiophoniques féministes.
ASSO
– L’échappée, créée depuis 4 ans à Lille par un collectif de luttes contre les violences sexistes et sexuelles. Une des seules en France à proposer un accompagnement et un soutien spécifique aux victimes de viols et agressions sexuelles, qui lance actuellement un appel à soutien financier pour pouvoir continuer d’exister.
Pour d’autres idées, pour fabriquer peut-être un épisode 2, ou pour des commentaires, etc. : maltraitancesgynecos@@riseup.net
Que pulullent et tournevoltent les outils d’auto-dépanne, que ce soit en mécanique, en élec ou en gynéco !
Texte copiable et diffusable comme bon nous semble.
4ème de couverture :
Je mens tout le temps à mon gynécologue
J’ai l’impression que mon sexe n’est pas normal
J’ai une vie sexuelle très mouvementée
Je ne veux pas me déshabiller entièrement
J’ai un truc bizarre mais je veux pas qu’on me touche
J’ai peur des maladies
Je suis en pleine transformation
Je vois pas du tout pourquoi le gynécologue me demande de me peser
Je m’en fous du sexe
Je ne veux pas prendre la pilule
Je n’ai pas envie de raconter ma vie à un médecin
Je n’ai pas de vie sexuelle
J ’ai peur d’avoir mal
Mais pourquoi mon sexe ne sent pas comme d’habitude ?
Est-ce qu’il peut au moins me filer des capotes gratuites ?
[1] Voir le texte « Le gynécologue mis en examen pour viol exerce toujours à l’hôpital d’Alès », disponible notamment sur le site https://tardigrada.noblogs.org et sur infokiosques.net. Il s’agit du docteur Maurice Cohen, qui exerce en cabinet privé et à l’hôpital public d’Alès comme gynécologue obstétricien. à lire également : « Pourquoi faut-il parler du docteur Hazout ? », dans la revue Sans Remède (disponible sur internet), concernant un gynécologue parisien condamné pour le même type de faits.
[2] à ce sujet, pour comprendre comment les femmes se sont fait arracher, par une violente répression qui a duré plusieurs siècles, par les hommes du clergé, de l’État et de la science, les savoirs qui leur permettaient un peu d’autonomie dans le soin de leurs corps, dans la gestion de leur fécondité et dans leur vie quotidienne, n’hésitez pas à lire la brochure (disponible sur internet) Sorcières, Sages-femmes, Infirmières (et l’ouvrage Des experts et des femmes). Et aussi le passionnant Caliban et la Sorcière de Silvia Federici. Voir la bibliographie.
[3] Art. 1111-4 du code de santé publique : « Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. » Évidemment, plein de limites légales sont posées à ce principe de base, comme dans le cas des obligations de soin ou encore des situations d’urgence. Mais dans le cabinet d’un gynécologue, dans une situation plutôt courante, cela peut avoir un certain effet de mettre le médecin face à ses obligations légales et éthiques.
[4] Martin Winckler, un médecin et romancier qui propose pleins d’idées et d’arguments contre la médécine gynécologique « traditionnelle » sur son blog martinwinckler.com. C’est plutôt insolite mais toutefois pratique que des arguments et témoignages contre les violences banales subies en consultations gynéco viennent d’un médecin homme qui a pignon sur rue. Son blog est très intéressant sur plein de sujets. Dernièrement, il répertorie les soignants qui acceptent de pratiquer la stérilisation volontaire.
[5] Sur cette question, Rina Nissim, naturopathe gynécologue (voir bibliographie), alerte les personnes à qui on suggère de subir un retrait de l’utérus : c’est une opération parfois nécessaire mais très lourde qu’on associe trop souvent à une ablation préventive des ovaires alors que cette dernière n’est pas systématiquement indispensable. Or, les conséquences physiologiques et psychologiques de l’hystérectomie seule sont déjà bouleversantes. Le maintien des ovaires permet que le déséquilibre hormonal qui s’en suit soit moins violent.
[6] Sur la question de la grossesse une brochure : « La grossesse et l’accouchement, histoire d’une maladie pas comme les autres », qui se trouve sur infokiosques.net, nous explique qu’on n’est pas plus fragile et plus tarte que n’importe quelle vache qui met bas, et que de nombreux accouchements se passeraient vraiment mieux sans toutes les interventions du personnel médical.
[7] L’échographie par sonde vaginale est utilisée dans deux cas : elle permet d’une part d’observer le col de l’utérus, ce qui est nécessaire si la patiente le demande, quand elle se plaint de contractions importantes ou si on connaît des risques spécifiques ; et d’autre part, pour mieux voir et mesurer la tête du bébé. Parfois, la tête est en effet très basse dans l’utérus, surtout en fin de grossesse. Cependant, c’est assez rare et si, comme par hasard, le gynécologue craint systématiquement un problème au col et ne voit jamais la tête avec l’échographie externe, c’est qu’il est incompétent ou tordu. L’argument du « c’est pour voir si tout va bien » sans symptôme alarmant est un argument bidon.
[8] Voir le documentaire instructif Vade Retro Spermato.
[9] Encore un peu de droit pour en boucher un coin à un médecin qui prétendrait que la consultation est confidentielle ou qui blablaterait sur la vie privée, alors qu’il ne la respecte lui-même absolument pas. Le dispositif de l’article 1111- 6 du Code de santé publique permet à toute personne usagère du système de santé de désigner une « personne de confiance » qui l’accompagne dans ses démarches, peut assister aux entretiens médicaux, etc.
[10] Voir encadré sur le HPV page 15
[11] Voir le très bon livre sur l’histoire de l’avortement en Europe, AVORTER : Histoires des luttes et des conditions d’avortement des années 1960 à aujourd’hui, collectif IVP, éditions Tahin Party, 2009.
[12] La loi espagnole autorise l’avortement jusqu’à 12 semaines en cas de viol, 22 semaines en cas de malformation et sans aucun délai en cas de danger grave pour la santé mentale et physique de la mère. Or la « santé mentale », concept flou, est invoquée dans l’écrasante majorité des cas, permettant à n’importe quelle femme d’avorter dans des cliniques privées, quel que soit l’avancement de la grossesse.
[13] La progestérone, une des hormones les plus présentes dans le processus de la grossesse, a en particulier pour effet de maintenir le col de l’utérus fermé et d’empêcher les contractions utérines, pour préserver la grossesse. Le RU, un stéroïde de synthèse aux propriétés anti-hormonales, en inhibant l’action de la progestérone, va permettre au corps d’évacuer la grossesse en stimulant les prostaglandines naturelles qui, elles, au contraire, provoquent les contractions. En empêchant le développement de la progestérone ce médicament va aussi en quelque sorte affamer l’oeuf, le tuer la plupart du temps et souvent provoquer son expulsion.
[14] Le Cytotec est un médicament prescrit au départ comme anti-inflammatoire digestif. Son effet abortif était une des raisons pour lesquelles il était contre-indiqué pour les femmes enceintes. Aujourd’hui, il est essentiellement utilisé pour provoquer les contractions et l’expulsion lors d’un avortement. Il a de nombreux effets secondaires connus ; la plupart du temps, il provoque d’importants troubles digestifs (grosses diarrhées, nausées, douleurs, etc.). Le Gymisio a à peu près la même composition mais n’est prescrit que pour l’IVG. Ils contiennent tous les deux de l’huile de ricin, qui a des effets laxatifs.
[15] Voir la brochure québequoise sur l’auto-examen, inspiré par le mouvement féministe de « self-help ». Le livre américain « Notre corps, nous-même ». Des brochures des 70’s du MLF sur l’auto-examen aussi.
[16] Gynophilus, par exemple, est la marque d’une ovule qui ne contient pas trop d’autres cochonneries. Elle contient principalement les bacilles de Döderlein qu’on recherche. D’autres marques de probiotiques vaginaux sont parfois mélangées avec des hormones, ce qui ne semble pas souhaitable.
[17] En particulier, plusieurs des bactéries et champignons qui nous gênent adorent le sucre. Il est donc conseillé de réduire au maximum les sucres et l’alcool pendant qu’on essaye de se débarrasser de ces intrus !
[18] Les produits laitiers ont tendance à épaissir les sécrétions, et, en l’occurrence, le sang qui aura plus de mal à passer par le col pour s’évacuer, ce qui pourrait être la cause de contractions douloureuses pendant les règles.
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