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Comparution immédiate : outil de justice expéditive

mis en ligne le 15 février 2024 - salle 5

INTRODUCTION

La procédure de comparution immédiate est censée être exceptionnelle. En fait il s’agit d’une mesure banalisée, qui permet de traiter rapidement et quotidiennement des dossiers sans faire d’enquêtes. Au tribunal de Grenoble, des comparutions immédiates ont lieu sur 3 demi-journées chaque semaine en salle 5. Record d’utilisation en Guyane, où elles représentent 20% des procédures.

Elle est censée permettre le désengorgement des tribunaux alors que la loi évolue pour judiciariser de plus en plus de monde et de plus en plus vite.

De plus, elle accompagne l’expansion du système carcéral et l’emprise de la justice sur nos vies : 70 % des personnes jugé.es sont envoyé.es en détention. C’est la procédure qui enferme le plus.

Les affaires jugées sont très rapides, autour de 40 minutes. Les personnes qui comparaissent sont la plupart des hommes, presque tous racisés, pauvres, dans une situation de vie précaire. Beaucoup ne parlent pas français. Les affaires les plus fréquentes concernent des vols, des violences, des affaires de stupéfiants, des violences conjugales.

Lors d’une comparution immédiate, on demande au prévenu d’être jugé immédiatement ou plus tard ; dans ce cas on lui accorde un délai qui permettra de préparer mieux sa défense. Dans nos observations, une majorité des prévenus accepte de passer tout de suite en comparution, les personnes qui demandent un délai sont quasiment toujours envoyées en détention provisoire dans l’attente de leur jugement.

Nous voulons montrer par ces extraits de comptes-rendus d’audiences la violence des mots prononcés par la justice. Faire sortir du tribunal des jugement hâtifs, souvent sans preuve, qui condamnent d’abord la personne, ses conditions de vie, ses origines et non ses actes. Visibiliser le mépris et le paternalisme des juges.

Nous avons choisi des extraits plutôt courts qui ne rendent pas compte de l’ensemble d’une affaire, parce que les juges et les procureurs se répètent beaucoup.

Nous donnons quelques éléments de contexte au début, et avons choisi de ne pas trop mettre l’accent sur « les éléments de personnalité », pour ne pas stigmatiser encore plus ces personnes et déballer leur vie ; éléments qui prennent pourtant une grande place dans le jugement des prévenu.es puisqu’on les condamne avant tout pour ça.

Après délibération des juges, les condamnations sont quasiment toujours les mêmes que ce qu’a demandé le procureur.

***

à propos des violences conjugales

On a fait le choix de ne pas lire d’affaire concernant ce sujet.

D’une part, les violences sexistes constituent un sujet largement instrumentalisé par le féminisme carcéral, institutionnel, et de plus en plus par les mouvements identitaires qui se disent féministes.

D’autre part, on est parfois touchées personnellement par certaines affaires, de par nos vécus de meufs/minorisées de genre.

On s’est demandé comment sortir de l’émotion immédiate pour construire une réflexion critique sur ce sujet.

Dans les faits, la plupart des femmes qui subissent des violences ne se tournent pas vers le système judiciaire, peu portent plainte. Elles ne veulent pas que la justice se mêle de leur vie. Au final, la plupart des hommes ne seront pas condamnés, c’est toujours la même minorité qui se retrouve incarcérée. Et le fait de les enfermer en prison ne change pas le système patriarcal.

Longtemps ce type de violence n’a pas été pris en charge par l’état et par la justice, alors que les mouvements féministes se sont toujours mobilisés pour visibiliser ces violences.
Tant qu’on reste dans un système patriarcal et judiciaire, pensé par des hommes cis pour des hommes cis, qui s’appuie sur la domination des femmes et minorisé.es de genre, et sur la société du viol ; des petites réformes ne suffiront pas.

Ce n’est pas parce qu’on traite plus d’affaires de violences sexistes au tribunal qu’on s’attaque au fond du problème.

La comparution immédiate n’est que le reflet exacerbé du racisme, de patriarcat, du classisme, qui participe à la création de « monstres ».

Dans le texte Open letter to the antirape movement écrit en 1977, Mariame Kaba rappelle : « La prison n’est pas féministe. L’oppression et la domination sont les principales caractéristiques du complexe industrialo-carcéral […] Comment un féminisme qui cherche à mettre fin à la domination et à résister à l’oppression peut-il adopter la prison comme stratégie de base pour éradiquer la violence ? » (publié dans le livre Abolir la police, 2021)

On sait que les violences conjugales sont présentes dans tous les milieux, pauvres, riches, toutes les classes et toutes les cultures ; mais en comparution immédiate, on ne les voit que par un seul prisme : c’est toujours les mêmes « profils » créés par le système judiciaire qu’on retrouve.

Des réflexions se forgent, des écrits sont lus, pour penser et lutter contre ces violences intrafamiliales hors de la sphère médiatico-judiciaire.

Une brève histoire de la comparution immédiate

Le point de départ est difficile suivant ce que l’on entend par début et ce l’on veut faire ressortir. Pour changer on va s’inspirer de personnes qui prennent la définition de la flagrance comme point de départ. [1]

On prend ici, comme idée de base, la volonté de rapprocher « l’acte du jugement » comme fondement d’une justice expéditive. Pour cela, on va suivre l’évolution des différents « code pénaux » et de l’idéologie judiciaire.

De la naissance de la flagrance au flagrant délit

1670 - sous Louis XIV l’ordonnance criminelle (de Colbert) est appliquée ; 1ere codification du droit qui doit homogénéiser les décisions judiciaires par l’ordre royal, prenant le pas sur les autre types de rendu (seigneur, communautaire, etc).

Elle définit la flagrance qui est un délit pris sur le fait, qui cible particulièrement les vol, racolage, marché noir.… C’est aussi le début de l’enfermement comme peine.

1789 - Après la Révolution bourgeoise, la justice se transforme, les législateurs prétendent créer une nouvelle justice, censée rompre avec la justice royale [2].

1808 - on remplace « l’ordonnance criminelle » par un code d’instruction criminelle

Du flagrant délit à la saisine directe

1820 - le flagrant délit est créé, et est appliqué de manière officieuse dans un tribunal à Paris (puis dans d’autres grandes villes).

28 avril 1832 – loi réformant le Code pénal et le Code d’instruction criminelle qui étend le domaine d’application des "circonstances atténuantes" à l’ensemble des crimes, rompant ainsi avec l’habitude prise par les jurés d’acquitter plutôt que de prononcer une peine trop lourde (en résumé elle permet de prononcer plus de peines "moins lourdes" évitant trop d’acquittements)

1863 - cette nouvelle pratique sera officialisée dans les textes de loi, après un demi-siècle de condamnations officieuses, et ce malgré les critiques de l’opposition législative. La procédure va alors se généraliser dans la grande majorité des zones urbaines.

1880 - émergence de la criminologie [3]

27 mai 1885 - une loi condamnant les multirécidivistes (notamment la petite délinquance, vagabondage...) à la relégation à vie (les envoyer en exil) en Guyane ou en Nouvelle-Calédonie [4]

20 mai 1953 - loi sur le flagrant délit prévoyant que les prévenus arrêtés étaient immédiatement conduits devant le procureur qui les interrogeait, les traduisait sur le champ devant le tribunal correctionnel ou les plaçait lui-même sous mandat de dépôt dans l’attente de leur jugement à l’audience du lendemain.

1958 - Cette loi sera abrogée à la suite de la promulgation du code de procédure pénale

1970 - le thème de l’insécurité monte sur la scène politique avec Giscard

2 février 1981 - « loi sécurité et liberté » qui élargit les contrôles d’identité et prolonge les gardes à vues.

Le délit de flagrance change de nom pour ce nommer saisine directe. Concrètement, c’est un retour à la loi de 1953. Ce qui change, c’est qu’en plus des affaires prise en flagrance, il sera désormais possible de juger via cette procédure « les affaires en état d’être jugées », c’est-à-dire les affaires qui ont fait l’ objet d une enquête préliminaire par les services de police, jugée suffisante par le parquet.

1981 - Mitterrand, conformément à ses promesses de campagne, abroge en partie la « loi sécurité et liberté ». En revanche ne sont pas abrogées certaines dispositions relatives aux délais de prescription et aux droits des victimes ; de même la procédure de saisine directe est conservée sous le terme de comparution immédiate, tout en prévoyant un élargissement des droits des prévenus.

… à la comparution immédiate

Le thème de l’insécurité et de la violence continue à s’installer dans l’espace médiatique.
1983 - l’état profite d’une émeute [5] pour mettre en œuvre la loi sécurité et liberté jusque là en suspens, la saisine directe est alors rebaptisée comparution immédiate. Les gouvernements qui se succèdent modifient tour à tour la loi, mais la procédure de comparution reste en place. En 1986, le gouvernement de Chirac rétablit le texte de 1981, en l’accompagnant de nouveaux éléments. Les délits doivent être passibles d’au moins 2 ans d’emprisonnement et au maximum de 5 ans. Il devient possible de faire comparaître un.e prévenu.e le lendemain de l’arrestation ou le jour suivant, étendant le délai de 24 à 48h.

Années 90 - un nouvel arsenal législatif se met en place , destiné à répondre plus vite et de manière plus expéditive aussi bien dans la rue que dans les tribunaux. Cet arsenal accompagne le début de la mise en place du « traitement en temps réel » (TTR) de la justice

février 95 - les peines allant jusqu’à 7 ans ferme peuvent être traitées en comparution immédiate (plafond augmente de 5 à 7 ans)

juin 99 - invention des procédures de troisième voie pour éviter des procès pour des infractions peu graves, de mesures telles que le rappel a la loi, l’injonction thérapeutique, ou la médiation pénale, pour offrir au procureur une nouvelle procédure pénale

septembre 2002, loi perben I : désormais toutes les peines encourues égales à 1 an (6 mois en cas de flagrant) et ne dépassant pas 10 ans (ce ne serait alors plus des délits mais des crimes) peuvent être poursuivies en comparution immédiate.

Cela vise à faire passer en procédure rapide des délits qui ne l’étaient pas, principalement au sujet de la drogue, des incendies de véhicule, des outrages et rébellion

2 nouvelles procédures : la composition pénale et l’ordonnance pénale délictuelle
mars 2004, loi Perben II qui met en place de la mesure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) aussi appelée mesure de « plaider-coupable » qui bafoue le droit à la présomption d’innocence

26 juillet 2007 - lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs : instauration de peine planchée en cas de récidive

2006 l’administration pénitentiaire a recensé que 74 % des prisonniers purgeaient des peines de moins de 6 mois et 4 % des peines de plus de 3 ans soit 96 % purgeaient des peines de moins de 3 ans et qui rentre donc dans le type de condamnation des CI [6] (à suivre)

C’est quoi le problème ?

Une justice expéditive

Les comparutions immédiates sont les héritières des « flag », les « flagrants délits », une procédure rapide qui permet de juger une personne ayant été interpellée pour un délit juste après sa garde à vue (29 % des personnes sont jugées le jour de la fin de la garde à vue, au total 70 % des affaires sont jugées dans un délai inférieur à 4 jours [7]). Cette procédure est officiellement destinée à limiter la détention provisoire, ainsi qu’à désengorger les tribunaux – au mépris des droits des justiciables. Mais le nombre des comparutions immédiates a augmenté en flèche depuis les années 2000, accompagnant la frénésie pénale des différents gouvernements. Ceux-ci ont créé de nouveaux délits, pénalisé de nouveaux comportements et instauré une politique du chiffre qui veut qu’à chaque affaire soit apportée une judiciarisation systématique et une réponse pénale. Ces réponses pénales se standardisent, et les jugements deviennent automatiques. Un cocktail débouchant sur l’enfermement massif en bout de chaîne répressive. La comparution immédiate est une procédure huit fois plus pourvoyeuse de prison que les procédures classiques [8].

Le procureur de la République choisit d’opter pour la comparution immédiate s’il estime que les charges sont suffisantes, que l’affaire est en état d’être jugée et qu’il est nécessaire de le faire rapidement. Il faut que la peine encourue pour le flagrant délit soit de minimum six mois d’enfermement (et de deux ans minimum lorsqu’il s’agit d’un délit plus ancien). La personne prévenue peut choisir de refuser la comparution immédiate, mais risque alors la détention préventive si elle n’a pas de logement ou d’emploi stable. La plupart du temps les avocat.e.s commis.e.s d’office du commissariat poussent à accepter d’être jugé immédiatement, en utilisant cette menace. La constitution du dossier est sommaire, avec une enquête sociale express, et un entretien de quelques minutes avec l’avocat.e. A la sortie de garde à vue, c’est directement l’acheminement en salle d’audience. Le temps pour réunir les garanties de représentation (preuves de domiciliation et d’emploi) est dont très court, et le temps pour les magistrats d’étudier le dossier aussi (au mieux quelques heures avant l’audience, au pire en cours d’audience). A l’audience, en une demi-heure en moyenne [9], dont six minutes pour la défense, l’affaire est pliée. La personne prévenue peut être directement transférée en maison d’arrêt si elle prend une peine ferme avec mandat de dépôt, ce qui est l’issue majoritaire de cette procédure [10]. On peut ainsi se retrouver, le soir même de la commission d’un délit, dans une cellule de prison. Voilà ce que le jargon juridique appelle le « traitement en temps réel ».

Une justice de classe

Ce sont les personnes issues des classes populaires et de l’immigration post-coloniale qui se font le plus contrôler et ont donc le plus de chance d’être prises en flagrant délit – notamment parce que les quartiers populaires sont les zones géographiques les plus surveillées, où les contrôles policiers sont les plus fréquents. Ce sont elles aussi qui sont poussées, par la galère économique, à commettre les délits visés par la répression immédiate (ce qu’on appelle la délinquance : conduite sans permis, trafic de stupéfiant, vol, etc.). Enfin, puisqu’elles n’ont souvent ni pouvoir d’influence ni argent pour payer de bons avocats, ce sont à leur dépens que l’institution judiciaire va gagner du temps et économiser des moyens.

Nous vivons dans un système inégalitaire, notamment sur le plan économique. Le capitalisme est un système économique qui se base sur les inégalités (accumulation de la richesse par quelques-un.e.s aux dépens de beaucoup d’autres), et produit la misère sociale. Dans ce système, l’État, au service des classes dominantes, doit avoir pour rôle principal d’encadrer et de contrôler les classes dominées, dans le but d’assurer la maximisation du capital. Il doit assurer la reproduction d’une main d’œuvre en - relative - bonne santé, tout en réprimant les écarts et les atteintes au bon fonctionnement de la machine économique, c’est-à-dire le refus de la misère (à travers l’économie informelle de subsistance, les émeutes, les luttes organisées, etc.). La police et le système pénal ont pour fonction d’assurer cet encadrement et la répression qui l’accompagne [11]. Les discours politiques sécuritaires, qui ont pour fonction de légitimer la violence d’État et la répression, présentent la délinquance comme un fléau social dont la cause serait la déviance d’individus dangereux, et fournissent des caricatures-types de ces individus : de jeunes hommes de quartiers populaires, Noirs et Arabes. Ils mettent ainsi sens dessus dessous les relations de causes à effet, l’important étant que les classes dominantes sortent gagnantes, et que leurs stratégies électorales soient fructueuses : la peur poussera à voter pour la sécurité, la « protection » d’un État policier, la garantie d’un système pénal intransigeant.

La répression s’abat de manière triplement inégale sur la population : discrimination dans le contrôle, discrimination dans le choix des activités pénalisées, et discrimination dans le traitement des personnes réprimées.

L’encadrement et le contrôle ne s’appliquent pas de la même manière à toute la population : les classes populaires et les personnes racisé.e.s sont systématiquement surveillées, harcelées, interpellées par la police mais aussi par toutes les institutions publiques qui exercent une part de contrôle social et de délation (école, services sociaux, Caf, pôle emploi, bailleurs sociaux, protection de l’enfance, etc.). Les classes moyennes blanches et les classes dominantes, de leur côté, ne vivent un contrôle que ponctuel voire exceptionnel, notamment en cas de participation à des luttes sociales. Leurs chances de subir de la répression pour les mêmes délits sont donc très inégales.

Les classes dominantes et les classes populaires n’ont pas les mêmes moyens de subsistance. Les activités économiques des unes et des autres ne sont pas légalement considérées, jugées et réprimées de la même manière. Les activités de subsistance des classes populaires les plus marginalisées (le travail au noir, la prostitution, les petits trafics et contrebandes, la mendicité, le vol à l’étalage, la « fraude sociale ») vont être empêchées et/ou considérées comme des délits, tandis que les activités qui font la fortune des classes dominantes les plus privilégiées (spéculation financière et immobilière, fabrication et vente d’armes, activités industrielles destructrices de l’environnement et des biens communs, vol massif de données personnelles sur internet, manipulation publicitaire, optimisation fiscale, etc.) ne sont pas considérées comme illégales ou légèrement réprimées, voire au contraire encouragées. Enfin, les classes dominantes vont être traitées dans le strict cadre du droit et de l’institution judiciaire et vont pouvoir se payer de bons avocats, tandis que les classes populaires vont être confrontées aux violences policières, aux violences symboliques et verbales du système judiciaire, à l’affectation d’avocats commis d’office et à un traitement judiciaire expéditif.

Nous vivons dans un système inégalitaire et violent. Ces violences ont des conséquences sociales et psychologiques qui sont aussi contrôlées, par l’enfermement systématique en hôpital psychiatrique ou en prison. Les classes populaires sont une source de rentabilité à tous niveaux : par leur force de travail bon marché et malléable, leur consommation, leurs crédits, leurs loyers, leurs participation aux taxes indirectes… Et lorsqu’elles ne peuvent plus l’être, ou refusent de l’être, elles sont confrontées à la menace de l’isolement et de l’enfermement, et aux violences physiques et psychologiques qui sont la norme dans les institutions disciplinaires et carcérales. Plus le système économique est violent et donc inégalitaire, plus l’enfermement est massif [12]. La prison est un système économique juteux en tant que tel, avec des budgets de 90 à 160 euros par détenu.es et par jour qui sont donnés à des entreprises capitalistes privées.

Les audiences de comparutions immédiates sont majoritairement le reflet de cette répression des classes populaires : elles font défiler à toute vitesse des vies marquées par la galère sociale et encadrées par les institutions répressives depuis le plus jeune âge. Elles sont le plus souvent un sas entre la cellule de garde-à-vue et la prison. Les prévenu.e.s y sont en écrasante majorité de jeunes hommes sans revenus ou avec de très bas revenus, le plus souvent racisés, et vivant dans des quartiers populaires. Ils sont le plus souvent marqués par l’exclusion sociale (économique et raciale) et ses conséquences. Les délits représentés aux comparutions immédiates sont principalement des vols (atteintes à la propriété privée) et du trafic de stupéfiants. Depuis leur pénalisation, on y trouve aussi des infractions routières (conduite sans permis ou avec alcool). Enfin dans une moindre mesure, sont présentés des cas d’agressions, de coups et blessures, de ports d’arme, d’outrages, et des violences conjugales. Derrière ces termes génériques se cache une réalité sociologique : les délits qui sont jugés là sont majoritairement le résultat de difficultés économiques (un tel a volé pour que sa petite sœur puisse manger à la fin du mois, un autre est entré dans le trafic de cannabis à défaut de trouver un emploi, un autre encore conduit sans permis pour travailler en attendant de pouvoir le payer…). Il ne s’agit pas de faire un tableau misérabiliste, mais de rendre compte que les cas jugés, à quelques exceptions près, se sont tous déroulés sur fond d’inégalités économiques et sociales. Pourtant les agressions, les coups, le vol, le port d’arme, les infractions routières et les violences conjugales ne sont pas l’apanage des pauvres, c’est évident. Alors pourquoi ne retrouve-t-on que des pauvres aux audiences de comparution immédiate ?

Une justice raciste

Il n’y a que des pauvres, mais aussi une écrasante majorité de Noirs et d’Arabes, soit des personnes issues de l’immigration post-coloniale. En France, il est toujours interdit d’établir des statistiques dites « ethniques », ce qui ne permet pas d’avoir de chiffres officiels concernant la part des personnes racisé.e.s dans un groupe et les différences de traitement à leur encontre, et donc de révéler le racisme systémique des institutions – en l’occurrence celui des institutions pénales. On reconnaît plus facilement le racisme du système pénal des États-Unis, régulièrement pointé du doigt. Mais pourquoi en serait-il autrement en France ? Parce que les études sont écartées, la réalité est facilement occultée. Pas de chiffres officiels, pas de problème. Pourtant, comment en serait-il autrement, dans un État où le passé colonial a marqué profondément toutes les institutions sociales, politiques et judiciaires ? L’idéologie républicaine française, malgré des discours universalistes qui nient et rejettent la racialisation, est pourtant imprégnée d’une idéologie raciale, dès son origine [13] et jusqu’à nos jours. Et la pratique républicaine en est issue, avec son lot de discriminations systémiques.

Sur le site des Nations Unies, on peut lire d’un côté que « la discrimination raciale est généralisée dans le système juridique américain » [14] , et de l’autre qu’en Europe, « en matière d’élaboration de solutions pratiques et viables à long terme visant à combattre le racisme et la discrimination raciale, [...] toutes les stratégies devraient inclure au moins des mesures législatives, de sensibilisation, d’éducation, de discrimination positive et de participation » [15]. Le racisme est donc présenté, sur le continent colonisateur, comme une posture morale diffuse dans la population et basée sur l’ignorance, tandis qu’en traversant l’Atlantique, il devient un élément systémique traversant les institutions étatiques. Curieux, non ? Il s’agit là simplement du fruit de rapports de force théoriques : en France, la bataille pour faire reconnaître la réalité d’une racialisation de la société et la persistance d’un racisme structurel et étatique n’est pas encore gagnée – y compris dans les organisations militantes à majorité blanche.

En matière pénale, des collectifs et des « observatoires citoyens » ont cependant établi des statistiques en prenant en compte la racialisation apparente des prévenu.e.s. Ils ont montré sans surprise que les jeunes hommes Noirs et Arabes étaient sur-représentés dans les audiences de comparutions immédiates [16]. Là encore, il s’agit d’une continuité historique. Discriminations dans l’accès aux droits politiques et sociaux, discriminations à l’emploi et au logement, quadrillage des quartiers populaires, contrôles au faciès, humiliations et violences policières, conduisent une plus grande proportion de personnes racisé.e.s en garde à vue et en comparution immédiate. Les différences de traitement subsistent ensuite au sein de l’institution judiciaire et de la prison, tout comme aux États-Unis. Les Noirs et les Arabes sont sur-représentés aux audiences de comparutions immédiates, et sont également sur-représentés en prison [17] .

Ce n’est pas seulement parce que l’immigration répond aux logiques de besoins de main d’œuvre du système capitaliste mondialisé, faisant des immigré.e.s dans les centres économiques les personnes les plus exploité.e.s des classes populaires, que les personnes racisé.e.s sont les plus réprimées par la justice « quotidienne » des comparutions immédiates. Il s’agit là du fruit de la persistance d’une idéologie et d’une pratique étatique de discrimination raciale systémique, issue de l’histoire esclavagiste et coloniale. Tant que cette réalité de racialisation sociale structurelle - et de répression racialisée – sera niée, il sera impossible de s’attaquer à la justice inégalitaire.

Quelques chiffres

Comptes-rendus d’audience

Toutes les phrases qu’on va lire ont été prononcées lors des audiences auxquelles nous avons assisté.

Affaire 1 Tentative de meurtre de policiers

juge : — Vous avez le droit de garder le silence, répondre aux questions ou faire des déclarations spontanées.

Je rappelle les faits : H et G se sont soustraits à un contrôle de police, se sont enfuits en voiture et ont été poursuivis par la police pendant plusieurs kilomètres dans Grenoble. Ils auraient ensuite tenté à plusieurs reprises de percuter une des voitures de police.

Monsieur G, vous avez dit à Monsieur H de prendre la fuite quand vous avez vu la BAC. Pourquoi ? et pourquoi vous aussi vous avez fui ?

G. : — j’ai eu peur, je connais la Bac, c’est pas pareil que la police !

juge (agaçée) : — ce sont des agents de police, vous n’avez rien à craindre !
Qu’est ce qu’il s’est passé ensuite ?

G. : —quand les flics sont arrivés, je suis parti, je suis tombé, j’ai levé les mains et j’ai pris des coups de pied partout, dans la tête, ils m’ont sonné !

juge : — Y a pas de certificat médical !

avocat : — il y a des observations ! 

juge : — oui mais pas de certificat médical.
Un agent de police a reçu des coups, que pouvez vous en dire ?

G. : — j’ai essayé de me protéger, j’ai pas donné de coups !

juge : — mais peut-être que respecter la police c’est déjà s’arrêter quand ils vous disent de vous arrêter !
Quels sont vos projets ?

G. : — J’ai très envie de tenir un lavomatic de voitures.

juge (très étonnée) : — d’où vous vient cette idée ? c’est comme ça ?

G. : — ben oui, j’ai envie de faire ça...

***

juge : — On va à présent examiner le dossier de monsieur H. Vous avez eu une dizaine de condamnations passées ce serait assez long de tout reprendre mais pour résumer votre casier judiciaire on pourrait dire : pas mal de faits de violence et pas mal de problèmes de conduite et refus d’obtempérer.
Pourquoi vous avez fui en voyant arriver une voiture de policiers ?

H. : — j’ai paniqué, j’ai vu une voiture noire aux vitres teintées, j’ai eu peur, j’ai fui, ça n’arrivera plus.

juge (énervée) : — A un moment il va falloir vous poser la question de pourquoi vous paniquez à chaque fois que vous voyez des policiers ! 

H. : — J’ai beaucoup travaillé dans ma tête

juge : — et ben y a encore beaucoup de travail à faire !

Avocat partie civile : — il y a des contradictions, au caractère mensonger. Il n’y avait aucune raison de prendre la fuite. La panique, c’est la seule raison invoquée, ça laisse sceptique. On sait que G avait de très bonnes raisons de prendre la fuite !
Pourquoi la panique si on a commis aucune infraction ?
Ils donnaient des coups de volant pour porter atteinte de façon très claire aux agents de police. Ils font preuve d’une extrême dangerosité. C’est un fait de violence caractérisé.
Par rapport à la phrase « nous sommes encore une fois victimes de violence policière » : soyons sérieux !! H ne voyait pas ce qui se passait pour G ! Je demande un dédommagement de 600 euros pour chaque policier.

proc. : — Pour quelqu’un qui panique, monsieur H a fait preuve de sang-froid, la course poursuite a duré 7 kilomètres ! Je veux revenir sur les violences policières car on ne peut pas dire n’importe quoi au tribunal. Monsieur G refuse l’examen médical alors qu’il prétend avoir été dans un état physique inquiétant. Il prétend avoir reçu des coups de plusieurs policiers alors qu’il n’y avait qu’un policier. C’est aussi assez révélateur de positions !
Sur la photo on voit une petite marque sur la tempe qui peut faire penser à une chute. Le contrôle verbal en garde à vue ne fait pas état de violence.
On est plutôt en présence de 2 voyous que 2 campagnards !
Je les déclare tous deux coupables des faits reprochés. On est dans une incapacité à respecter la loi, il y a beaucoup de chemin à faire pour être responsable !
Je demande pour Monsieur H, 8 mois de prison ferme et révocation du sursis probatoire de 6 mois, et Monsieur G 4 mois avec aménagement en DDSE. Ils devront payer 400euros à chaque policier.

Avocate de G. : — il y a quelque chose qui fait défaut au ministère public, c’est la mesure ! Alors qu’on produit des photos, qu’il y a des déclarations des policiers qui ont admis avoir commis des violences volontaires, des coups, on ne peut pas soutenir que la défense dit tout et n’importe quoi alors qu’on n’a encore rien dit !
On ne peut tout prêter à Monsieur G, il est poursuivi pour résistance violente.
Quand un policier porte plainte, c’est en tant que partie civile et pas en tant que policier. Tant qu’il n’y a que la plainte de la partie civile, il ne peut y avoir condamnation. D’ailleurs, un seul des policiers dit avoir entendu des coups donnés à ses collègues mais ne pas les avoir vus ; les 3 autres disent « je n’ai rien vu » !
On a une photo, et Monsieur H dit avoir entendu Monsieur G se faire frapper. Il n’y a aucune poursuite pour outrage, le policier n’a pas de certificat médical mais juste une photo. Ça aurait été intéressant de confronter Monsieur G au policier, on n’a pas tout ça dans ce dossier.
Y a une vraie suspicion de violence policière, le terme est peut-être excessif. Il dit avoir donné à G des coups de poing dans le ventre, au visage. Monsieur G présente des hématomes et des bosses, il a reçu des coups au sol, et des insultes.
Ces violences sont réelles, ont existé. Il y a un comportement démesuré de la part de la police, un comportement de "voyous" qui doit être traité de la même manière. Un policier joue en jeu son métier dans une histoire, forcément il déguise la réalité !
Je ne peux que demander la relaxe, les faits ne sont absolument pas caractérisés.

Avocate de H. : — Il y a beaucoup de zones d’ombres. Monsieur H se soustrait au contrôle, pour une raison inexpliquée et inexplicable. C’était juste un contrôle routier pour un phare dégradé, il n’avait rien à se reprocher ce soir là. On parle de "violence avec arme" alors qu’il n’avait pas d’arme. Il n’y a rien dans le dossier ! D’accord, le refus d’obtempérer est grave, mais il n’y a pas de violence avec arme ! Je demande la relaxe ! On va un peu trop loin, il n’y a rien qui prouve qu’il a voulu percuter les véhicules de police.
Les policiers vont faire des choses qui dépassent leur fonction de policier. Monsieur H a dit que 5 policiers l’avaient interpellé, et pas juste 2. Il n’a pas voulu être examiné par un médecin, des policiers eux même ont ordonné un examen médical, celui ci n’est pas complet, il y a juste eu SOS médecin en pleine nuit, mais qui demande une "surveillance régulière".
On a bien une interpellation qui ne se passe pas de façon normale. J’ai l’impression que c’est nouveau quand on vient à ce tribunal parler de violence policière ! C’est un sujet médiatique, quand il y a des choses pas normales dans une interpellation, c’est le rôle du ministère public de s’en emparer.
Monsieur H justifie de ses soins, son travail, ses dettes, etc. Il a déjà expliqué son parcours compliqué, il a grandi dans la violence. Sa peine de prison a eu le bénéfice de l’avoir fait grandir. La sanction a eu lieu, confronté à ses échecs il entre encore en condamnation.

(H pleure)

La peine requise n’est pas adaptée à la personnalité de H, il a besoin de voir son enfant, sa compagne vient d’accoucher, de garder un travail. L’aménagement de peine en semi liberté n’a jamais été tenté, il n’a rien à faire en prison. Il y a une amélioration énorme depuis 1an à sa sortie de prison, il a besoin d’être accompagné, avoir des preuves de garanties.

H va écoper de 8 mois en prison et révocation du sursis probatoire de 6 mois, et G de 4 mois avec aménagement DDSE (Détention à Domicile sous Surveillance Electronique). Ils devront payer 400euros à chaque policier.

***

Affaire 2Vol de sandwiches

Juge : — Vous avez le droit de garder le silence, répondre aux questions ou faire des déclarations spontanées.

B et K comparaissent pour tentative de vol dans une station service. Ils sont sortis avec des sandwiches et quelques gâteaux.
Que pouvez-vous dire sur les faits ?

B. : — Je sortais de détention, j’avais pas de sous, j’étais sans rien, je pouvais pas travailler, mes papiers étaient confisqués par les gendarmes.

Juge : — Rappelons que vous avez un contrôle judiciaire en cours pour une autre affaire. On peut quand même espérer que quand on sort de prison, ça a un effet dissuasif, là c’est sans fin ! On peut penser que vous allez continuer à commettre des infractions ! Votre père est en prison, vous êtes nourri, logé chez votre mère.

B. : — en fait chez ma mère c’est pas simple, y a rien à manger.

***

Juge : — monsieur K, vous avez été mutique pendant la garde à vue !

K. : — j’suis sorti de prison en 2014, j’ai passé 6 ans dehors, j’ai pas commis de délits. On a rien fait de prémédité, on a volé que des petites choses, on était perdus. Vous m’avez pas posé la question de l’empathie pour les victimes, évidemment j’en ai. Vu mon âge je suis désespéré et...

Juge (le coupe) : — pour le manque d’argent il y a des aides, des associations caritatives ! Vous n’avez aucune expérience professionnelle, pourquoi ?

K. : — J’ai fait 10 ans en prison…
C’est la société qui crée le crime. Depuis très jeune j’ai eu affaire à la justice, c’était naturel pour moi.

Juge : — donc vous êtes victime de la société ?

K. : — non mais c’est les aléas de la vie.

Juge : — votre seul travail c’est en prison ?

K. : — le travail en prison ça tue l’ennui. On s’ennuie toute la journée en prison. Je me comportais parfaitement avant, jamais de remarque, tout bien, et tout d’un coup j’ai eu 15 refus pour insertion professionnelle. Ça m’a énervé. Je veux sortir, être chauffeur livreur.

Proc : — Le vol est devenu un « vol de vie » ! J’entends bien les difficultés sociales mais même des gens qui travaillent ont du mal à se nourrir, la vie est difficile, c’est comme ça !
Mais heureusement tout le monde ne vole pas les biens d’un autre, ne choisit pas ce mode de vie. Car oui c’est un choix, il faut assumer !!
Monsieur B a un risque de récidive, il n’a pas d’excuses. Je demande 2 ans de prison ferme et un maintien en détention.
Par rapport à Monsieur K, il y a d’abord une évolution de son discours, je m’en réjouis. Avant il disait « c’était mon mode de vie ». Et puis, il se remet à avoir un discours victimisant : « c’est à cause de la société » ! Il n’y a pas de volonté de changer les choses, pas de responsabilité. Je demande 3 ans de prison et un maintien en détention.

Avocate de K. : — Je peux entendre que la défense de Monsieur K ne soit pas audible, il exprime des regrets, une désorganisation. C’est la fatalité d’un cercle vicieux : marginalité-détention, détention-marginalité. On a un profil récurrent dans les tribunaux, une entrée tôt et presque toute son existence dans la délinquance.
Mais, on doit rappeler qu’on parle juste d’une tentative de vol dans une station service ! Les faits, c’est : vol de plateaux sandwich et gâteaux ! Et peut-être 500 euros dans un commerce !
3 ans de détention pour ces faits, ça paraît exagéré, c’est un butin ridicule, les peines sont trop lourdes !
On ne prend pas le temps de regarder tout ce qui avait pu être fait dans le dossier. C’est un cas d’école de la confusion de peines.

Avocate de B. : — Monsieur B. doit déjà effectuer une peine lourde. Il m’a dit « quoique je leur dise, quoi que je fasse, j’ai pleuré, j’ai demandé pardon, ça ne sert à rien, j’ai été condamné quand même à 14 mois »
Il a volé parce qu’il avait faim ! On parle de menus larcins, sans plans, sans repérage, sans précaution, sans mettre de gants, c’était pas prémédité. Il a reconnu tout de suite les faits.
Alors même qu’il est libérable on lui rajoute 2 ans de peine. On est dans le cas d’école d’un concours de circonstance.

Juge (quand ils sortent) : — vous pouvez y aller. La balle est dans votre camp ! 

B écope de 2 ans de prison ferme et un maintien en détention.

K aura 3 ans de prison et un maintien en détention.

***

Affaire 3 Sac de noix

Juge : — Vous avez le droit de garder le silence, répondre aux questions ou faire des déclarations spontanées.
Monsieur S comparait pour avoir tenté de donner un coup de couteau à un commerçant après avoir sorti un sac de noix. En garde à vue, il explique qu’il voulait faire un gâteau aux noix pour la fille de son amie. Il aurait sorti le couteau pour réussir à partir.
Alors qu’avez-vous à dire ?

S. : — j’ai sorti le couteau pour lui faire peur, mais je l’ai déplié puis replié. Je suis pas un voleur, c’était pas mon intention de voler.

Juge : — Il n’y a pas de vidéosurveillance. Monsieur S s’est pris un coup de poing par le commerçant, qui aurait dit « au voleur je vais t’étrangler ». Les passants autour ont eu peur, ils sont venus à son secours, mais ils ne savaient pas qu’il était en train de voler.

S. – j’ai vu personne dans le magasin, j’ai pas voulu voler !

Avocat : — Monsieur S, vous pouvez dire que vous venez d’aller dans un magasin juste avant et que vous avez réglé vos achats ? Du café, des pates, etc.

S. : — oui j’ai payé mes courses.

Avocat : — pouvez vous nous dire où vous êtes quand vous êtes interpellé, vous êtes loin du magasin ?

S. : — juste devant la porte du magasin.

Juge : — Monsieur S a une invalidité à 60 %, il a demandé une formation aux espaces verts. Il a fait un sevrage il y a 2 ans, a passé 1 mois à St Egreve. Le SPIP dit qu’une obligation de soin serait bien mais qu’il a du mal à les respecter.

Avocate partie civile : — Il y a de la violence verbale, des insultes, un préjudice non pas physique mais psychologique ! Le commerçant se rend à son commerce tous les jours la peur au ventre ! Je demande des frais de surveillance, pour assurer sa sécurité, et 3000euros de préjudice, et une interdiction de s’approcher de son commerce à 500m.

Proc : — Nous ne pouvons qu’être porté par la violence faite au commerçant. Il faudrait veiller à ne pas inverser les rôles. Peu importe la valeur de ce vol, c’est le comportement lié à ce vol qui compte. C’est pas grand-chose, presque risible quand on parle d’un sac de noix, mais c’est le préjudice qui compte !
La fille de l’amie de Monsieur S, l’a aidé, du haut de ses problèmes psychiatriques et de son raisonnement intellectuel limité.
C’est d’autant plus inquiétant quand on regarde son casier judiciaire. La révocation montre que Monsieur S peut être attentif à des prises en charge, constructives, il est capable du mieux mais d’un pire inquiétant.
Sur son avenir et sa peine, il y a un besoin de sécurité de la voie publique, il a un comportement pas adapté et une surréaction, une absence de maîtrise et un risque de réitération.
Je demande 10 mois de prison, dont 4 avec sursis et un maintien en détention et une obligation de soin, une interdiction des rues autour du commerce.

Avocat : — Je ne suis pas forcément opposé à une peine mixte. Monsieur S n’est pas ancré dans la délinquance profonde. Les derniers faits datent de 2018, il y a eu des jours amende effectués. Il y a eu 8 ans sans rien !
C’est quelqu’un de fragile, il a des problèmes de santé importants, une dépression, de l’alcool. Il a besoin d’aide, de se soigner ! Il a conscience de ça, la question du soin est importante !
Sur le fond du dossier, Monsieur S prend sa part de responsabilité. Il dit à l’audience que c’était pas normal d’avoir ce couteau, même si avoir un couteau n’est pas forcément synonyme de violence.
Et puis c’est plutôt rare de voir quelqu’un payer ses courses puis qui va voler dans un autre magasin ! Ça ne se passe pas comme ça, enfin je ne dis pas, on peut tout voir, mais voler c’est plutôt un état d’esprit !
Effectivement il était à l’extérieur du commerce mais rien ne prouve qu’il voulait voler. Dans les faits, c’est le commerçant qui porte les coups pour empêcher S de gesticuler, ce qui suscite une réaction des passants qui criaient au scandale, qui n’ont pas été entendus dans ce dossier !
Le commerçant fait 1m85, 135kg, le double du gabarit de S. Même si Monsieur S n’aurait pas du sortir un couteau, la fille de son amie, vient s’interposer, mais elle dit que le commerçant « était beaucoup trop fort il m’a repoussée et je suis tombée j’ai perdu mon doudou, ça se voyait qu’il avait trop la haine ».
Je demande d’envisager de condamner Monsieur S pour les faits de violence, c’est à dire avoir montré la lame du couteau, mais une peine au maximum avec sursis probatoire, car il adhère au soin, éventuellement une peine mixte. Mais S doit faire ses preuves en milieu ouvert pour se faire soigner.

S écope de 10 mois de prison, dont 4 avec sursis et un maintien en détention et une obligation de soin, une interdiction des rues autour du commerce.

***

Affaire 4 17 ans

Juge : — Vous avez le droit de garder le silence, répondre aux questions ou faire des déclarations spontanées.
A comparait pour le vol d’un portefeuille. A était SDF, il y a un débat sur la date de naissance. Il a comparu le mois dernier pour une autre affaire, le vol de 400 euros dans un magasin ; mais le tribunal a rejeté la demande d’expertise par le service des mineurs isolés, considérant qu’il est majeur et n’a pas 15 ans. Le tribunal a tranché sur votre majorité !

A dit quelque chose

Juge : énervée, à la traductrice : — vous pouvez dire à M. A de ne pas parler ?! 
Vous avez volé un portefeuille à un homme qui vous a donné une cigarette, en lui faisant une accolade. Les policiers notent que vous êtes alcoolisé. Qu’avez vous à dire ?

A. : — J’avais bu, comme je suis malade je prends des médicaments, je suis parti chercher à manger, quand j’ai vu les vidéos j’ai compris.

Juge : — vous devez vous tromper de dossier, on est sur l’autre affaire !
Ça vous arrive souvent de prendre des hommes dans les bras à 4h du matin ?

A. : — Il m’avait donné une cigarette, on s’est fait un check. Je ne boirai plus, c’est l’alcool.

Juge : — Vous ne boirez plus, mais vous reconnaissez les faits ou pas ?

A. : — Les vidéos oui mais pas ceux là.

Juge : — Vous avez été convoqué par le juge des enfants au début du mois.
Sur l’autre affaire, on vous accuse de vol dans la caisse d’un magasin, on trouve 400euros sur vous. En garde à vue, vous contestez être entré dans ce commerce ! On a un système de vidéosurveillance où on vous voit prendre l’argent et fuir.
Qu’avez vous à dire ?

A. : — J’avais trop bu, je ne recommencerai plus...

Juge : — On sait que vous sentiez l’alcool. Vous reconnaissez les faits ?

A. : — Oui je n’étais pas conscient, c’est quand on m’a montré les vidéos que j’ai reconnu. j’avais dit que je ne me souvenais pas.

Juge : — Et l’argent que vous aviez sur vous ?

A. : — Sur les 400€ il y avait 160 du magasin, le reste était à moi.
Tous les jours je bois.

Juge : — Comment vous financez votre alcool ?

A. : — Je travaille à Saint Bruno.
Maintenant que j’ai été en prison, j’ai compris.

Juge : — Il y a une incohérence sur les âges et sur le nom. Malgré son parcours de vie, il dit vivre chez sa grand-mère et que sa mère est décédée, mais dans son récit il n’y a aucune émotion ! Il n’a jamais sollicité les services de l’aide à l’enfance. Il y a des incohérences sur son arrivée en France, il est allé à Marseille, Lyon, Calais…. L’évaluateur montre qu’il veut rapidement mettre un terme à l’entretien, il déclare : « tout laisse à penser que c’est une personne majeure se faisant passer pour mineure par opportunité »
On a retrouvé ses empreintes à plusieurs endroits sous plusieurs identités différentes. Comment vous expliquez ces identités ? Quelle est votre véritable identité ?

A. : — Je suis né en 2004, j’ai 17 ans.

Juge : — Pourquoi vous ne le dites pas tout de suite ?

A. : — J’avais peur qu’on me renvoie au bled et qu’on me tue.

A commence à faire un malaise, personne ne réagit

Juge : — Vous avez déclaré être malade.

A. : — J’ai une opération à la main, mal au thorax, des fois je fais des malaise et je m’évanouis… On m’a cassé toutes mes dents…
Le médecin de la prison me prescrit des médicaments.

Juge : — Je vous précise que le mois dernier le préfet vous a donné une obligation de quitter le territoire français. Vous ne pouvez donc pas travailler en France !

proc : — Nous ne nous faisons pas d’illusions. Il a encore modifié sa date de naissance et pour cause ! On s’aperçoit qu’il a de multiples comparutions. C’est le parcours classique de quelqu’un arrivé récemment en France et qui s’enfonce dans ses mensonges !
Ça à la rigueur, ça fait partie des situations précaires des personnes étrangères.
On a la consommation d’alcool pour fuir ses responsabilités et mettre un voile opaque et éviter de répondre à vos questions.
Il ne pouvait se satisfaire des aides qu’il percevait de façon illégitime en tant que Mineur Non Accompagné. Pour ma part je ne suis pas dupe ! Pour véritablement marquer la vie de l’intéressé, j’écarte une possibilité d’aménagement, je demande 6 à 8 mois de prison ferme et un maintien en détention.

A. parle

Juge : (à l’interprète) — pouvez vous lui redire de ne pas interrompre les intervenants ?!

avocate : — je tiens à préciser qu’on le juge uniquement sur son apparence ! C’est pourquoi je demandais une expertise osseuse. Il a bien 17 ans, je ne reviendrai pas sur ce point.
Il est arrivé en France depuis 9 mois, il était passé dans d’autres villes avant mais n’avait pas décidé de rester en France, raison pour laquelle il n’a pas effectué de démarches, demande d’asile, etc. Il se retrouve dans une situation précaire, irrégulière, à la rue, sans argent, avec une consommation d’alcool très importante plus des médicaments, ce qui fait qu’il n’a pas conscience de ses actes. A explique qu’il a des vertiges, comme vous l’avez vu tout à l’heure. Son état de santé est assez précaire. Il ne se rappelle plus du tout la soirée des faits.
C’est la première fois que A passe en comparution immédiate, il n’a jamais été incarcéré, et on lui demande 6 à 8 mois de prison ! La sanction ne doit pas être trop sévère ! Je demande de faire preuve de clémence.

Juge : — Avez vous quelque chose à dire ?

A. : — je demande pardon, je ferai une demande d’asile.

Juge : — la peine pourra être réduite si vous acceptez une sortie conditionnelle-expulsion !

A écope de 6 mois de prison ferme et un maintien en détention

***

Affaire 5 Dinosaure

Juge : — Vous avez le droit de garder le silence, répondre aux questions ou faire des déclarations spontanées.
Monsieur R comparait pour conduite en récidive sans permis. Il a déjà plusieurs condamnations, notamment de conduite en état d’ivresse.
Pourquoi vous conduisez alors que vous êtes alcoolique ?!

R. : — je suis pas alcoolique !!
J’ai pas d’argent pour repasser le permis, j’ai besoin de travailler malgré mon âge, j’ai besoin d’une voiture pour travailler, j’ai que 600 euros d’allocation handicapé.

Juge qui l’interrompt : — Monsieur R, vous dites que vous vous foutez des décisions de justice !!

R. : — j’ai jamais dit que je m’en foutais !

Juge : — C’est tout comme !
Si je ne m’abuse, quand vous avez pris la voiture pour aller boire des coups ou aller jouer au tiercé, c’ est pas pour le travail. Monsieur R, vous êtes un danger public, vous êtes un criminel ! Si vous voulez vous tuer sur la route, et bien faites le !!

R. : agacé : — c’est bon j’ai compris !!

Juge : — hum, je vois que vous avez eu déjà 9 mois de sursis, que vous avez demandé à être aménagés. Alors là vous pouvez dire adieu à l’aménagement, bye bye le bracelet !!!
Monsieur R, on peut très bien comprendre que vous ayez des problèmes dans la vie. C’est pas le tribunal qui va arranger ça. Mais ça ne justifie pas que vous ne respectiez pas la loi et les décisions de justice ! Vous avez quoi comme garanties ?

R. : — ma parole.

Juge : en prenant et reposant tous les papiers sur le bureau — elle vaut rien, votre parole !! Votre parole, et bien, le tribunal…. va la laisser ailleurs !

R s’appuie contre le muret du box devant lui

Juge : — Tenez vous bien, on n’est pas au bistrot !!

R. : — j’ai un handicap...

Juge : — ah, en plus vous êtes handicapé et vous conduisez !!!

proc : — c’est particulièrement inquiétant parce qu’on n’a pas de garanties ! On ne va pas attendre qu’il tue quelqu’un ! La comparution immédiate est la dernière chance aujourd’hui, j’espère que Monsieur R l’entend ! Je demande 14 mois avec aménagement de peine dont 6 mois de sursis.

avocat : — On peut parler de quelqu’un d’un peu archaïque, il n’a pas internet, pas de téléphone, etc, il a une phobie administrative, il a une santé fragile, invalide à 90%, a eu un cancer, est SDF. Je demande une peine avec une DDSE et une obligation de soin et de passer le permis, pour comprendre qu’il doit se bouger. R reconnaît tous ses torts, même s’il peut être agaçant. R est un dinosaure, il faut que le dinosaure se bouge !

R écope de 14 mois avec aménagement de peine dont 6 mois de sursis

Mépris & humiliations quotidiennes

« Non je n’ai rien autorisé, je ne veux pas voir ça en salle d’audience. L’escorte, je vous ai déjà dit, je ne veux voir aucun contact physique entre le box et la salle, il y a des parloirs pour ça. »

***

« - Pas de travail, mais comment vous vivez ?
 Je ne vis pas madame la juge. »

***

Contexte : arrêtés avec 1 400€ en liquide, deux jeunes hommes partent pour un mois de détention en attente de leur procès. Requis par la proc : mandat de dépôt car « pas de projet sérieux, précarité économique, récidive, situation critique. »

« - Pourquoi de tels faits de violence ?
 Je n’ai pas d’argent pour vivre.
 Se mettre à la gare pour tendre la main ? Emmaus ? Les restos du coeur ? Il y a, en France, plein d’autres solutions. »

***

« - Vous êtes en France depuis 13 ans, comment ça se fait que vous ne parlez toujours pas français ?

 Je ne suis pas allé à l’école au bled.

 Oui non mais attendez, ce n’est pas la question. Ah non, vous êtes arrivé en 2016, il y a une erreur dans le dossier. »

***

Pour un vol de téléphone avec violence, sans casier judiciaire :

« La peine que je vais requérir aujourd’hui, elle est lourde, j’en ai conscience, mais elle me paraît juste. 2 ans ferme, sans aménagement, assorti d’un mandat de dépôt et d’une OQTF.

***

À un prévenu qui signale ses difficultés liées à des problèmes de santé :
« On ne va pas se lamenter sur des problèmes de thyroïde qui sont soignés. »
rires de l’assesseur.

Puis à un autre qui a un handicap à la main :
« En attendant, votre main ne vous empêche pas de commettre un vol ».

***

La juge à un prévenu qui ne comprend pas la question :
« Je parle petit chinois ? Il faut appeler un interprète ? »

***

Juge : « Acceptez-vous d’être jugé maintenant ?
Avocate défense : Ah mince, je lui ai pas expliqué l’histoire des délais… »

***

« - Vous comprenez un peu le français ?
 Oui
 Bon ben vous traduisez que s’il y a besoin. »

***

Le procureur : « Quand on a pas d’argent, l’autre solution c’est de ne pas trop dépenser ».

***

Contexte : un dossier vraiment bizarre, au fur et à mesure que la juge expose les faits, on se rend compte qu’il y a une embrouille. Ensuite, l’avocat de la défense soulève toutes les absurdités du dossier, mais la juge les balayent d’un revers de manche : elle ne cherche pas à comprendre, pour elle, il est coupable.

Juge : Comment vous expliquez que vous commettez ce genre de vol ?

Prévenu : Il n’y a pas de vol, il n’y a pas d’effraction

J : dites lui de se taire ! Donc ce que vous avez déclaré devant les policiers est faux ?

P : Non je n’ai pas dit ça

J : Bref, le patron du bar dit que ses affaires lui ont été volées

P : Non.

J : Non quoi ?

P : Non c’est pas ça

J : [rires] puis après échange avec le procureur : « écoutez, c’était vos déclarations en garde à vue, à un moment ça va bien. »

***

Un policier portant plainte contre un homme noir pour vol avec violence : « Il parlait avec l’accent qu’il a aujourd’hui, je ne comprenait pas ce qu’il disait » (le prévenu parle parfaitement français, sans accent particulier) . Encore une fois, le dossier ne tient pas, mais cette fois c’est tellement gros que même le procureur demande la relaxe.

***

Alors qu’un travailleur social écrit dans le dossier qu’il faudrait que prévenu ait accès à un espace de parole :

La juge, d’un ton moqueur : « Vous n’avez personne à qui parler ? Vous avez besoin de parler de quelque chose à quelqu’un ? ».

[1Notamment dans la une thèse, de baptiste bochart « https://www.theses.fr/s182530 »

[2La coupure avec la royauté n’est pas si nette, le 4 juin 1814 le roi octroie une charte constitutionnelle permettant de garder certains principes monarchiques tels que l’inviolabilité des propriétés, y compris celles des biens nationaux, et l’amnistie politique pour les actes antérieurs à 1814.

[3Contexte de bouleversement économique et industriel, le crime, la criminalité sont les terrains privilégiés pour refléter les inquiétudes, les peurs d’une société en mouvement. Le sentiment “d’insécurité” économique et sociale ne fera que se déplacer vers ce pôle visible. La IIIe République prône des valeurs d’ordre, de stabilité, de travail, et a la volonté de tout mettre en œuvre afin de les faire respecter. À une époque tournée vers la science et vers l’homme, des méthodes ou techniques nouvelles émergent quasi simultanément, entre autres la criminologie. « L’anthropologie criminelle et le ressassant discours de la criminologie trouvent là une de leurs fonctions précises : en inscrivant solennellement les infractions dans le champ des objets susceptibles d’une connaissance scientifique, donner aux mécanismes de la punition légale une prise justifiable non plus seulement sur les infractions, mais sur les individus ; non plus sur ce qu’ils ont fait, mais sur ce qu’ils sont, seront, peuvent être. Le supplément d’âme que la justice s’est assuré est en apparence explicatif et limitatif, il est en fait annexionniste. Depuis cent cinquante ou deux cents ans que l’Europe a mis en place ses nouveaux systèmes de pénalité, les juges, peu à peu, mais par un processus qui remonte fort loin, se sont donc mis à juger autre chose que les crimes : “l’âme” des criminels. (...) Une autre vérité a pénétré celle qui était requise par la mécanique judiciaire une vérité qui, enchevêtrée à la première, fait de l’affirmation de culpabilité un étrange complexe scientifico-juridique » (Foucault). Le discours criminologique va construire tout un appareillage propre à accompagner la décision politique, savoir expert, il sera au fondement de nombreuses dispositions législatives ou institutionnelles.

[5Durant l’été 1983, de nombreux contrôles policiers sont conduits aux Minguettes. Toumi Djaïda, président de l’association locale SOS Avenir Minguettes, qui a entre autres organisé une grève de la faim contre les violences policières et l’impunité des auteurs de crimes racistes, aide un jeune attaqué par un chien policier ; il est atteint par une balle. Bernard Grasset, préfet de Police de Lyon, affirme que l’auteur du tir n’est pas inquiété par la justice parce qu’il a fait usage de son arme en légitime défense ; il est aussi le premier homme politique français à publiquement reconnaître les violences policières.. Djaïda est transporté d’urgence à l’hôpital, gravement blessé au ventre. L’événement inspire à Djaïda l’organisation de la Marche pour l’égalité et contre le racisme, qui va de Marseille à Paris d’octobre à décembre 1983, sur le modèle de la marche du sel de Gandhi et des mouvements noirs aux Etats-Unis pour la défense des droits civiques.

[6Lire l’article « Peines éliminatrices et isolement carcéral » - L’envolée

[7Observatoire international des prisons, section française, d’après les chiffres du ministère de la Justice, www.oip.org.

[8Sacha Raoult et Warren Azoulay, « Les comparutions immédiates au tribunal de grande instance de Marseille », Les rapports de l’Observatoire n°8, ORCDS, juillet 2016

[9Sacha Raoult et Warren Azoulay, op. cit.

[1070 % des peines prononcées en comparution immédiate sont des peines de prison ferme, source Ministère de la justice, La comparution immédiate : éléments d’évaluation des pratiques mises en œuvre, octobre 2012

[11Michel Foucault, « Sécurité, territoire et population », in Dits et Écrits, tome III, Paris, Gallimard, 1994

[12Loïc Wacquant, Les prisons de la misère, Raisons d’agir, 2015

[13La République raciale. Paradigme racial et idéologie républicaine (1860-1930), Carole Reynaud-Paligot, Presses universitaires de France, 2006

[14« La discrimination raciale et le système juridique aux États-unis : Les leçons récentes de la Louisiane », Bill Quigley, sur le site des Nations Unies, www.un.org.

[15« Combattre le racisme et la discrimination raciale en Europe », Isil Gachet, www.un.org.

[16Comparutions immédiates : quelle justice ? LDH Toulouse, érès, 2012.

[17Les seuls chiffres officiels à ce sujet se basent sur la nationalité ou le lieu de naissance des personnes : les personnes racisées nées en France et de nationalité française ne sont donc pas prises en compte, et pourtant déjà les discriminations raciales apparaissent clairement (sur-représentation d’étrangers et de personnes nées à l’étranger). Observatoire international des prisons, section française.


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