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Récits et analyses de l’occupation du parc Paul Mistral pendant l’hiver 2003/2004 à Grenoble

mis en ligne le 22 novembre 2005 - Collectif

Les efforts des autorités publiques pour gommer le souvenir de l’occupation aussitôt après l’expulsion nous font saisir à quel point la transmission de cette expérience est utile au prolongement de la mobilisation locale, à la diffusion des pratiques qui s’y sont développées et à l’invention de foule d’autres, toutes aussi enthousiasmantes. Eviter les procès collectifs - et donc leur médiatisation -, détruire scrupuleusement les dernières traces de l’occupation (cabanes, affiches sur les murs de la ville, graffitis sur les palissades autour du parc) et écarter les revendications par leur réduction à la défense “ aussi noble que donquichotesque ” de quelques arbres, c’est minimiser le “ risque ” qu’un mouvement continue à vivre au-delà de l’événement qui l’a fait naître.

Cette mémoire que nous voulons créer ne doit pas être (seulement) un gentil album photo, mais aussi une pratique systématique et diffuse de l’échange de savoirs, nécessaire à l’évolution et à l’adaptation des formes de luttes et à la construction des rapports de force.

Nous voulons aider à la réappropriation, au dépassement collectif de ce type d’actions. Nous voulons encourager l’occupation généralisée de tous les espaces publics (et privés) disponibles, vides de sens et vides tout court. L’expérience de Grenoble contribue au défrichage de terrains et de modes de lutte encore peu explorés en France (à part dans la vallée d’Aspe), et sur lesquels il y a vraiment moyen de s’amuser.

Nous voulons que tou-tes les gen-tes qui veulent de l’info non médi-argh-tique puissent avoir accès à une foule de points de vue sur la vie qui s’est déroulée au parc, sur les obstacles qu’elle a pu rencontrer dans son organisation, sur des choses chouettes et moins chouettes qui y ont eu lieu.

Ces textes sont enfin les reflets d’un événement qui nous travaille, d’interprétations plus ou moins bancales, et certainement pas figées. Ces textes sont partiels, subjectifs, excessifs. Alors ce serait super bien d’être critiqué-es, corrigé-es, commenté-es, et ce serait vraiment encore plus mieux si tou-tes celleux qui ont participé à cette expérience de près, de loin, du trottoir d’en face, ou à d’autres encore, décrivaient leurs ressentis, leurs analyses pour les diffuser sous forme de brochure(s), d’articles dans les médias alternatifs, de tracts...


PETITE HISTOIRE DE L’OCCUPATION DU PARC MISTRAL À GRENOBLE, NOVEMBRE 2003 - FÉVRIER 2004

Sorte de petite introduction

Voici des bribes de souvenirs vécus et glanés par nous deux, c’est-à-dire une fille qui vit dans un squat et un garçon inscrit à la fac (poils aux étiquettes), mais pas que.

De manière parcellaire et approximative, nous avons voulu raconter l’occupation dans sa durée et sa complexité en même temps que nos propres émotions, interprétations, interrogations...

Cette histoire fait donc la part belle aux moments où nous étions présent-es plutôt qu’à ceux, nombreux, que nous avons manqués. Elle retrace surtout les étapes de notre implication sur le parc, progressive et tardive, sans vouloir figer/limiter les moments, les ambiances et les personnes à notre propre compréhension de cette aventure.

A ce sujet, il peut être utile de préciser que nous appartenons l’une comme l’autre à un groupe d’occupant-es du parc (plusieurs groupes affinitaires, géographiques, ou de hasard se sont formés tout au long de l’occupation) : cellezéceux du “ diwa ”, groupe composé d’une bande de potes de la campagne, de squatteureuses et d’autres copain-ines grenoblois-es... Les deux premiers mois de l’occupation [novembre-décembre] sont ainsi abordés avec un regard extérieur sur les occupant-es du parc, tandis que la description des suivants [janvier-février], où nous sommes devenues occupant-es, sont centrés sur ce groupe affinitaire auquel nous nous sommes intégré-es et indentifié-es.

NOVEMBRE : occupation surprise

Avant l’occupation

L’histoire commence sans doute avec l’association “ SOS parc Paul Mistral ” (“ SOS PPM ” de son petit nom). Elle rassemble depuis 2001 des habitant-es du quartier qui veulent s’opposer à la construction d’un gigantissime stade de foot, à cheval sur l’emplacement de l’ancien stade et sur le parc, et à l’abattage de 292 arbres.

Rappelons au passage que dans Grenoblecity, ville industrialo-technologique de 400.000 personnes compressées entre les montagnes, il faut écarter le nuage de pollution avec des palmes pour trouver les espaces verts. Heureusement que les autorités lancent de grands projets, de bêtification de masse et de façadisme, pour convaincre les promoteurs et les grands diplômés qu’il fait bon vivre... Le parc Mistral est l’un des seuls espaces du centre ville qui permet - presque - d’échapper au bruit des voitures.

Déjà, en septembre 2003, l’association organise une manif pour porter les revendications des riverain-es qui s’attachent moins à une politisation du débat qu’à la préservation de leur espace de vie et de promenade. Le 24 octobre, la “ fête des arbres ” rassemble au parc plusieurs centaines de sympathisant-es.

Le “ platane insoumis ”

Le 2 novembre, dans le prolongement de ces premières mobilisations, trois amis amateurs d’escalade et acrobranchistes, montent dans un platane au centre de la zone du parc qui doit être détruite. Encouragés par des membres de SOS PPM, ils pensent sans doute rester là une semaine, le temps de créer l’événement médiatique, avant de redescendre.

Au pied du “ platane insoumis ”, ils dressent une table avec quelques tracts et une pétition contre la destruction du parc. Des riverain-es les ravitaillent en café, thé, et gâteaux. Au bout de quelques jours, des dessins d’arbres faits par des enfants de passage sont accrochés aux plus basses branches dans des pochettes en plastiques. Vision un peu “ grelottante ” et fragile. Cette occupation temporaire se présente comme une action “ écolo et apolitique ”.

Pendant ce temps, le hall Nord de la faculté de lettres de Grenoble est occupé jour et nuit par une cinquantaine d’étudiant-es impliqué-es dans les grèves ; un groupe d’intermittent-es occupent le théâtre Le Rio. Dans ces deux cas la volonté est d’investir et de faire vivre des lieux menacés de privatisation, comme au parc. Nous sommes l’une et autre impliqué-es dans ces mobilisations.

“Full chantier”

Très vite, le nombre des occupant-es s’accroît sur le parc, avec l’arrivée d’une petite bande d’ami-es de Chambéry, qui ont déjà fait l’expérience d’actions dans les arbres (construction de cabanes dans la forêt), ainsi que de personnes plus isolées et assez différentes les unes des autres : traveler-euses, étudiant-es, journalistes indépendant-es, lycéen-nes, etc., s’agglomèrent une à un. A chacun de nos passages, il y a plus de monde qui se presse autour de la petite table d’information. Trois cabanes sont construites dans les arbres environnants (la yourte, le tibet, et le nid de marsupilami). Une cuisine permanente est organisée au sol, sous une tente de jardin. 7 ou 8 personnes occupent le lieu de manière permanente.

Constitué très spontanément, ce groupe fonctionne au jour le jour, sans beaucoup d’organisation formelle ni parole commune, ce qui rend son approche difficile. Rassemblé-es autour d’un brasero le soir, illes boivent du vin chaud, du thé et de la bière pour se réchauffer. Des promeneur-euses de tous âges passent, en journée et le soir, goûter un peu de convivialité et d’information. Certain-es, et en particulier des personnes âgées du quartier, apportent chaque jour à manger pour les occupant-es.

Il est pourtant difficile, si l’on ne parvient pas à rester près du feu pour apprécier l’ambiance dispersée, de saisir le sens de cette mobilisation et de trouver les moyens de s’impliquer. Quelques personnes concentrent les responsabilités et assument pêle-mêle les tâches de communication, de logistique au sol, et dans les cabanes. L’absence d’organisation de la vie quotidienne rend également difficile l’expression des positions collectives propres aux occupant-es, ce qui peut laisser l’impression qu’ils ne sont que les supporters des revendications de SOS PPM. Les adhérent-es de l’association qui passent sur le parc, fournissent les tracts et apportent un soutien financier et en nourriture. Illes considèrent un peu les occupant-es comme “ leurs jeunes ”. Tout cela laisse une impression incongrue de mamies qui “ parrainent leurs punks ”...

Mediamania

Début décembre un article plutôt favorable à l’occupation paraît dans Libération. Dès le lendemain, c’est la bousculade aux parc : un visiteur sur deux est un journaliste télé ou de presse écrite. Certain-es se prêtent au jeu de la “ starification ”...

Bien que nous ayons soyons généralement enclin-es à refuser les contacts avec la presse, nous continuons à nous interroger sur le rôle de la médiatisation dans la création du rapport de force.

Les amalgames, le sensationnalisme et les formules toutes faites prévalent comme de coutume dans les médias. Ainsi les premier-ères occupant-es se voient plaquer les labels “ d’écocitoyens ”, “ d’accrobranchés ”, ou “ d’écowarriors ”, faute de pouvoir formuler leurs propres intentions. Les articles renvoient une image tronquée des occupant-es : jeunes, rebelles, sympas et inconséquent-es, illes s’opposent à un processus “ démocratique ”, à une décision approuvée par un conseil d’élu-es représentaif-ives. Les portraits et de petites citations des “ écocitoyens ” font contraste avec les larges tribunes offertes aux pouvoirs institutionnels (les communiqués officiels sont ainsi rapportés mot pour mot, par le Dauphiné Libéré, torchon local, “ daubé ” de son petit nom).

La couverture de l’événement place également les socialistes au pouvoir dans une situation délicate : il s’agit de garder une crédibilité “ de gauche ”, en réprimant mais pas trop.... Sans nous avancer trop sur la part réelle de la médiatisation dans la création du rapport de force, celui-ci est en tout cas propice à une occupation durable et relativement “ tranquille ”, sans violence policière excessive (du moins à l’égard des occupant-es lors de l’expulsion).

Aurait-on pu se passer des grands médias ? Devait-on accepter cette info tronquée sans même réfléchir à la visibilisation de la vie propre à l’occupation du parc ? Nous n’avons en tout cas pas su le faire, malgré les discussions que nous avons entamées au mois de janvier avec les premie-ères occupant-es. Nous ne pouvons que constater et nous interroger sur le rôle des médias dans cette aventure, et expliciter nos fortes réticences à leur égard (à ce sujet, voir dans la même brochure le chouette texte d’analyse critique des communiqués des autorités parus dans le Daubé).

DÉCEMBRE : démobilisation et mobilisations

Froid et alcool

Il fait plus froid. Il y a un peu moins de monde qu’en novembre, même si les cabanes se sont multipliées. Manque de personnes pour organiser et gérer l’espace au sol. Quelques personnes continuent cependant à passer pour aider à faire à manger, couper du bois, proposer des informations sur les risques juridiques découlant de l’occupation etc. Les occupant-es sont elles-eux mêmes dans une attitude un peu passive où illes sont alimenté-es par les vieux-eilles du quartier. Les décisions collectives sont rarement/difficilement respectées. La sensation générale est que l’occupation se limite “ à tenir malgré le froid ”. Trop difficile pour chercher à développer des revendications et une organisation plus offensives.

Pour pouvoir nous investir plus pleinement sur le parc, nous sommes dans l’attente d’une dynamique de groupe qui ne parvient pas à se développer (mais que nous sommes aussi conscient-es de ne pas contribuer à créer). Si l’on trouve chouette l’idée de s’impliquer dans l’occupation, ça reste difficile : les informations se perdent assez vite, l’ambiance est parfois très alcoolisée le soir, les comportements virilistes, parfois violents, sexistes, etc.

Ce type d’atmosphère donne une certaine impression de “ déjà vu ” assez démotivante pour nous, mais qui n’empêche pas un certaine joie à constater que c’est “ parti de presque rien ” et que “ ça tient malgré tout ”. A y repenser, l’important ne se joue pas là dans l’accumulation des arguments contre le stade, mais dans la création et le maintien d’une vie quotidienne dans une espace menacé. Par leur seule présence, les occupant-es témoignent d’une force qui suscite l’enthousiasme. L’acharnement à préserver une sorte de “ cellule de vie ” prend une intensité touchante, émouvante, prenante, qui donne envie de poursuivre, malgré les difficultés.

Blocages

Le 20 décembre l’occupation du parc est jugée illégale au tribunal administratif de Grenoble et les occupant-es sont condamné-es à une astreinte journalière (de 100 neurones par personne et par jour). A partir de ce moment-là, les pouvoirs publics cherchent à lancer le chantier côté parc. Depuis le 16 décembre la liste téléphonique est activée jour après jour pour empêcher physiquement la pose des barrières qui doivent clôturer l’espace du chantier. Chaque matin, les ouvriers sont confrontés aux habitant-es du quartier et autres sympathisant-es qui les empêchent de décharger leurs barrières et palissades, déplaçant les bornes en béton, rechargeant elles-eux-mêmes le matériel dans les camions, s’asseyant sur les pelleteuses etc. La division des tâches entre les occupant-es des arbres et cellezéceux qui les soutiennent : les un-es occupent et finissent leur nuit pendant que les autres se mobilisent entre 5 et 9 h du matin, à 100 mètres des cabanes.

Fin décembre, c’est également la fin de l’occupation de l’université de lettres. Certain-es étudiant-es commencent alors à se rendre plus régulièrement et longuement sur le parc. Certain-es grimpent dans les cabanes, pendant que d’autres participent aux blocages matinaux, au risque de voir passer les pelleteuses à 1 mètre de leur tête, alors qu’illes étaient endormi-es à même le sol en limite d’un parking.

La dureté des conditions de vie sur le parc (froid et démobilisation), provoquant l’admiration, voire la starification des occupant-es, explique en partie cette mobilisation au sol malgré l’aléa des ambiances et le manque d’affinité. D’autre part, ces actions quotidiennes d’interposition rendent l’action plus concrète et prenante pour ces “ non-occupant-es ”. Ces blocages sont l’occasion de nombreuses et longues discussions, favorisent les rencontres entre habitant-es du quartier, militant-es et étudiant-es. Les altercations sont aussi nombreuses avec certains ouvriers du chantier qui comprennent mal que nous fassions obstruction à leur travail et font parfois de l’excès de zèle, malgré nos appels au ralliement. Ces actions d’interposition se prolongeront tout au long du mois de janvier au point d’empêcher tous travaux jusqu’au lundi 2 février, date des premiers abattages.

Récupérations et rapports de force politiciens

La question de la récupération est amenée par la présence des élus de la minorité ADES (alternatifs écolo) qui prennent position contre la majorité municipale PS, commanditaire du stade. Elle se pose surtout avec la prise de position de l’UMP : pour se remettre en selle, Alain Carignon (ex maire de Grenoble RPR, écarté à cause du scandale de la Lyonnaise des eaux en 1995) lance sa campagne électorale avec pour mot d’ordre l’opposition au stade et à la destruction du parc. Ces conflits traversent l’association SOS PPM qui rassemblent des habitant-es aux affinités politiciennes de tous bords. L’option de l’association (qui reste la seule à délivrer un message global aux médias) est donc de conserver un apolitisme de façade.

Cette situation se complique encore de divergences entre la mairie, la Metro (agglomération des communes de la cuvette grenobloise) et la préfecture. Dans un premier temps, il semble que la mairie PS, secondée par la Metro, tente de mettre un terme à l’occupation en lançant des recours en justice contre les occupant-es. Mais elle se heurte à la réticence de la préfecture, pilotée depuis Paris par le gouvernement UMP, sans doute trop heureux de faire durer le conflit pour discréditer la majorité grenobloise. Le préfet rechigne visiblement à envoyer les forces de l’ordre. Les blocages se font sans aucune interposition armée, sinon à quelques reprises pour éviter les altercations entre opposant-es au stade et groupes de footballeurs supporters. Cette tension mairie/préfecture semble s’être inversée sur la fin : au moment de l’expulsion, la municipalité, probablement dépassée par le ridicule de l’intervention armée et le scandale médiatique qu’il pouvait provoquer, a cherché à minimiser “ la casse ” et l’étendue de la répression dans son propre intérêt politicien, à un mois et demi des élections.

Quoi qu’il en soit, le refus général des manœuvres politiciennes mène les occupant-es, dès le mois de décembre, à revendiquer elles-eux-mêmes l’apolitisme de principe, pour se concentrer sur des thématiques écologiques . Notre propre culture militante, s’articulant sur une réappropriation de l’action politique contre les politiques politiciennes, est sans doute à la source de maladresses, de méfiances et d’incompréhensions réciproques. Cela explique en partie notre difficulté à nous investir et à nous faire accepter du groupe déjà constitué des occupant-es.

La vie est-elle un film d’action ?

Les conditions exceptionnelles de cette mobilisation (vivre dans des arbres, à 12 ou 20 mètres de hauteur au cœur d’une ville, pendant de longues semaines, sous la pluie, la neige, le vent et le froid, arborer un baudrier cliquetant de mousquetons, tels les éperons du cow-boy solitaire hum) ont pour effet de projeter tout-es les occupant-es dans une “ autre dimension ” : impression que toute la vie se passe au parc ; que les routines quotidiennes du travail, des études, du rythme familial etc. sont dérisoires et creuses ; déphasage, décalage de plus en plus grand entre ces conditions d’existence extrêmes et l’indifférence d’une ville qui continue à fonctionner “ comme si de rien n’était ”.

L’impression de vivre dans un rêve est renforcée par la médiatisation nationale ou la convergence de personnes aux réalités antagoniques (punks des rues et mammies bourgeoises). L’attention médiatique des occupant-es (ou d’une partie d’entre elles-eux qui devient logiquement la plus voyante, la plus entendue) qui se laissent prendre au jeu de la flatterie les transforme en héro-ïnes et martyres d’un film d’action.

Si cela nous semble problématique tant que nous en sommes spectateur-trices et explique aussi notre difficulté à nous investir, nous nous y sommes sans aucun doute laissé-es prendre quelques semaines plus tard, lorsque nous nous sommes mis-es à habiter au parc...

JANVIER : second décollage

Le “ diwa ” et les squatteureuses

L’arrivée de nouvelles-aux occupant-es sur le parc, le 4 janvier marque pour nous un tournant décisif. Cette dizaine d’ami-es (en grande majorité des gars) sont rapidement assimilé-es par les autres occupant-es à la région de Die où illes ont passé quelques années ensembles et leur cabane devient le “ diwa ” (diois). Illes sont fort-es d’une pratique collective développée sur des chantier de construction. Descendus à Grenoble pour voir ce qui se passe sur le parc quelques jours, ils décident dès leur arrivée de rassembler du matériel pour s’installer plus durablement.

Pour une dizaine de squatteureuses grenoblois-es (et quelques-un-es d’autres villes), puis, en février, pour une quinzaine d’étudiant-es sorti-es des grèves et des examens, c’est enfin l’occasion et le prétexte pour s’impliquer plus concrètement : les “ gens du diwa ” apportent avec elles-eux du matériel d’escalade et de spéléologie, des outils, un savoir-faire et un enthousiasme qui permet de dépasser notre embarras devant l’escalade et la construction. L’arrivée du “ diwa ” déclenche ainsi l’implication plus concrète des squatteureuses ; réciproquement, la venue des squatteureuses favorise l’installation des gens du diwa et les aidera à “ rester jusqu’au bout ” , malgré l’épuisement et les doutes récurrents. Les squats servent aussi à dormir une nuit un peu plus au chaud, se réunir, avoir un accès Internet etc. ; le ralliement de squatteureuses, permet également d’accéder à divers plan récup’ de matériel de construction et de bouffe, d’enrichir les revendications de textes, de brochures, d’images, de films et d’expériences d’autres occupations, ou encore développer un fonctionnement collectif plus structuré.

Si les deux groupes sont assimilés l’un à l’autre dans le parc, leurs affinités et leurs ressemblances réciproques masquent, en interne, une curiosité mutuelle pour des pratiques et des expériences très différentes. Cette découverte réciproque s’enrichit à n’en pas douter de forts liens affectifs. Le caractère exceptionnel de l’occupation, les conditions extrêmes de vie, la promiscuité permanente des corps et, sans doute, la politisation par les squatereuses des rapports affectifs, de genre et des sexualités (“ à déconstruire et à reconstruire ”), accroissent l’intensité des histoires qui se nouent. Ajoutons que parmi des groupes d’occupant-es majoritairement constitués d’hommes, la majorité de filles squateuses - et féministes - contribue à créer une ambiance qui rompt un peu avec le virilisme ambiant. La pratique d’une vie collective et d’une réflexion commune permet l’élaboration progressive d’une confiance qui aboutira à la constitution d’un groupe vécu comme réellement affinitaire au moment de l’expulsion.

Notre implication plus entière nous fait découvrir et formuler le sens politique de l’occupation pour elle-même. Elle cesse ainsi à nos yeux d’être l’expression un peu passive des revendications de SOS PPM.

Intensification de l’occupation

Pour nous, la dynamique s’accélère surtout, en parallèle des constructions [cabanes, chiottes sèches], avec une série d’événements, à partir de mi-janvier, auxquels nous participons plus directement (les premiers mois de l’occupation sont également marqués par des rassemblements tels que la “ fête des arbres ”, la labelisation “ arbres remarquables ” etc., mais comme nous n’étions pas présent-es, nous n’avons pas su ni voulu les restituer dans ce témoignage).

Une cabane “ infokiosk ” est construite sous celle du diwa. On y trouve tous les jours, en libre accès, des brochures sur les thèmes de l’autonomie alimentaire et énergétique, de la remise en cause des rapports d’autorité et de domination, des méthodes d’action directe etc. En plus de mettre à disposition ces réflexions et savoirs-faire, l’infokiosk, accessible par une échelle de meunier, se transforme en espace de réunion, permet à un plus grand nombre de sympatisant-es sans cabanes de dormir au parc à l’occasion, et aux promeneurs de “ monter eux aussi dans une des cabanes ”.

Le samedi 17 janvier, le théâtre occupé du Rio nous accueille pour la projection publique d’un documentaire militant : “ Life in fast lane ”. Ce film retrace une année d’occupation de maisons et d’arbres sur le tracé de la voie rapide M11 dans la périphérie de Londres en 1994, par des habitant-es et des squatteureuses. Le mouvement d’occupation, très populaire, s’est achevé par une expulsion spectaculaire de trois jours et à l’annulation de nombreux projets d’aménagement routiers par le ministère des transports anglais. Ce documentaire, par le sens très politique qu’il donne aux mouvements d’occupation autonomes, par l’ampleur de l’événement et la violence d’Etat dont il témoigne, donne sans doute une portée nouvelle à l’occupation du parc. La projection est suivie de débats en petits groupes puis en grande assemblée, de 22h à 1h du matin, qui rassemblent les premier-ères occupant-es du parc, le diwa, les squatereuses et les étudiant-es, des curieu-ses et des sympathisant-es. Voulant discuter des moyens d’accentuer la mobilisation, la plupart des groupes en viennent à évoquer le problème de l’organisation interne de l’occupation. Cette question est le plus souvent posée par des personnes extérieures ou toutes nouvelles sur le parc. Il en résulte une impression de confrontation un peu dure, par la remise en cause de deux mois d’occupation par des gens qui n’y ont pas participé et tentent d’expliquer (un peu facilement ?) les raisons de leur retrait. La critique un peu facile laisse les premiers occupant-es désarmé-es, face à des détracteur-teuses embarassé-es. Mais ces discussions sont aussi l’occasion de développer plein d’idées nouvelles : nous abordons ensemble les questions de la médiatisation, du rapport aux forces de l’ordre, du sens politique élargi de l’occupation, de la possibilité de construire de nouvelles structures dans le parc, d’organiser des événements et des animations en journée et le week-end etc. C’est l’occasion d’une prise de conscience de nombreuses personnes de la possibilité, voire de l’obligation - pour certain-es d’entre nous - de s’impliquer pleinement dans l’occupation.

Le dimanche 18 janvier, un petit groupe composé d’occupant-es de la première heure, de gens du diwa et de squatteureuses achève l’écriture d’un tract et le propose en “ assemblée générale ” au parc dès le lendemain. Ce texte, le premier - et l’un des seuls - écrit par des occupant-es, met en cause la politique de la ville en matière d’urbanisme, de démocratie locale “ consultative ”, et élargit l’occupation à une contestation des structures de pouvoir politiques, industrielles et scientifiques, de l’idéologie sportive etc. (ce tract est reproduit dans cette brochure).

Toute la semaine, succession des tentatives d’assemblées générales autour du brasero et des réunions en petits groupes pour préparer la manif pour le samedi suivant, discuter de nos rapports aux médias, préparer des conférences de presse, échanger des savoirs juridiques et des méthodes d’action, organiser la vie collective... A cette activisme se superpose encore une période de défense des squats à Grenoble, dans laquelle s’impliquent quelques-un-es des occupant-es du parc : les matinées se transforment souvent en rendez-vous au Tribunal de Grande Instance pour assister aux jugements des squatteureuses ; en soutien au squat Golgoth-a-xxx, expusable sans délais et toujours sans électricité, un rassemblement dans le local commercial de la GEG (Gaz Electricité de Grenoble) est organisé le mardi 20 ; en réaction à l’avis d’expulsion sans délais du squat La Flibustière, un rassemblement est organisé devant la préfecture le mercredi 21, qui se solde par une forte répression (7 personnes arrêtées et lourdement inculpées).

Le samedi 24 janvier la manifestation pour la défense du parc Mistral et contre la construction du grand stade rassemble 4000 à 5000 personnes dans les rues de Grenoble. Entre autres anecdotes, rappelons les longues controverses sur le texte des banderoles trop ou pas assez citoyennistes selon les avis ; mais aussi les tentatives pour virer Alain Carignon (UMP) et sa horde de gorilles du cortège...

Alors que ce week-end marque le retour du soleil, quelques squatereuses prennent l’initiative de lancer un repas de quartier le dimanche, amenant dans leurs carrioles des jeux en bois, des déguisements, un peu de musique et de quoi dresser des tables pour manger ensemble. Plusieurs centaines de promeneur-euses du dimanche passent dans l’après-midi. Enthousiasmé-es par la convivialité que cette initiative a su créer, les occupant-es et sympathisant-es organisent des repas de quartier au parc Mistral tous les dimanches jusqu’au moment de l’expulsion... et jusqu’à maintenant, alors que la coupe des arbres a mis fin à l’expulsion depuis près d’un mois et demi.

Les aléas de la coexistence

Au regard de nos expériences d’occupations antérieures, la bande du diwa nous semble adopter un fonctionnement assez informel, plutôt porté sur les réalisations concrètes que sur l’intellectualisme squattero-urbain dans lequel nous sommes pris-es. Mais au yeux des premier-ères occupant-es du parc - et sans doute aussi parce que nous sommes peu à peu assimilé-es au diwa - celleszéceux-ci passent sans conteste pour des intellos formalistes. Ce contraste entre diwa/squatteureuses et premier-ères occupant-es se traduit par une certaine tension.

La complicité des premier-ères occupant-es, mais aussi la rudesse des soirées alcoolisées auxquelles illes sont - un peu vite ? - assimilé-es, conduisent les nouveaux-velles venu-es à se retrancher par affinités. La grande majorité masculine, dont découlent plein de rapports genrés, ainsi que l’effet de groupe implique une atmosphère assez dure, d’héroïsme, de fierté. Les comportements sexistes, homophobes et virilistes sont si récurrents qu’il nous devient parfois difficile de simplement discuter.

En adoptant nos modes de fonctionnement habituels et en proposant à quelques reprises nos propres codes dans un mouvement qui s’est construit sur des bases différentes, et au moment précis où le rythme des événements commence à s’emballer, nous provoquons des incompréhensions, des réticences et des rancœurs. Notre présence prend sans doute la forme d’une dépréciation de ce qui a été fait les premiers mois. Nos questionnements, mais aussi notre prise d’espace et de parole remettent en cause des positions de pouvoirs construites au fil de l’occupation. Le rôle moteur de certains occupants et de certain-es membres de SOS PPM en est sans doute ébranlé. De nos discussions “ entre diwas ” ressort la crainte que les occupant-es interprètent notre arrivée massive comme le rapt de leur mouvement, sa récupération par des squatteureuses politicien-nes “ 1er-ères de la classe ”. Notre arrivée en nombre accentue encore l’effet d’imposition : depuis le début de l’occupation, c’est sans doute la première fois qu’un groupe aussi important débarque d’un seul coup.

La séparation est surtout visible dans l’espace, puisque les cabanes qui entourent le brasero (le platane insoumis, la yourte, la chine, le tibet, le nid de marsupilami, la plate-forme, la canadienne, l’orme, etc.) sont à une centaine de mètres du “ bosquet du diwa ” (la maison mère, l’infokiosk, la vigie jurassienne puis, en février, l’optimiste), sous lequel est fabriqué un second poële (puis une cuisine en février). Avec deux sources de chaleur, deux lieux de convergence au sol se dessinent. Si beaucoup s’agglomèrent par affinités autour des feux le soir, les occupant-es du diwa se mêlent peu à ces groupes, préférant se regrouper en hauteur dans leurs cabanes pour manger et discuter. En journée, le dialogue se limite souvent à des questions pratiques et furtives d’échange de matériel.

Alors que nous vivons cette occupation comme une aventure, une lutte de quelques semaines avant de retourner à nos activités habituelles, nous saisissons que certain-es ont lâché leur job et leur appart’ pour s’impliquer depuis novembre, ou n’avaient pas, pour d’autres, de domicile avant leur installation au parc. Ces trois mois passés sur le parc revêtent pour eux un sens bien plus crucial que pour nous puisqu’ils représentent la construction d’un espace de survie matérielle et d’investissement affectif autrement plus entier. Le décalage entre nos pratiques et nos aspirations réciproques se transforme trop facilement en mépris d’un côté et en rancœur de l’autre. Les altercations du soir et les formules glissées à mi-mots témoignent de la tension rentrée qui peut régner en journée : “ intellos qui se prennent la tête ”/ “ derniers de la classe ”, “ organisés ”/ “ fouteurs de merde ”, “ bourges ”/“ punks à chiens zonards ”... et nous passons sur les insultes homophobes et les surnoms “ tendrement paternalistes ”. Les premier-ères occupant-es restent parfois en retrait des activités ; les dernier-ères arrivé-es abandonnent l’idée d’un fonctionnement collectif pour concentrer leur énergie sur leur groupe affinitaire ; et la vie sur le parc continue avec autant d’intensité que de questionnements.

Nous ressentons - jusqu’à aujourd’hui - une vraie gêne devant l’instauration de ce rapport déséquilibré où nous nous sentons en position de domination par la maîtrise du langage et notre bagage militant, voire de notre relatif confort matériel. Comment dire vraiment les choses sans risquer la langue-de-bois et les jugements hâtifs ? Notre embarras devant ces problèmes nous rend leur restitution difficile. Ces tensions sont d’autant plus complexes à analyser que les frictions et les frustrations se combinent avec la naissance d’une nouvelle dynamique qui réjouit tout le monde, ainsi que des moments forts partagés au-delà des groupes affinitaires.

Face à ce tableau dominant, de nombreuses personnes, occupant-es ou sympathisant-es se sont sans doute senti-es en retrait. Illes l’ont en tout cas suffisamment été à nos yeux pour que nous ayons du mal à les évoquer avec autant de netteté.

FÉVRIER : radicalisation et construction

Lundi 2 février, coup d’essai raté

Entre blocages physiques et recours en justice initiés par SOS PPM et l’ADES pour faire obstruction au démarrage du chantier, les tentatives de clôture de la zone échouent jour après jour.

Le lundi 2 février marque un changement stratégique des autorités. A défaut d’isoler les occupant-es ou d’obtenir leur départ, l’intervention se tourne vers la zone de chantier déjà clôturée - emplacement de l’ancien stade réduit à l’état de vaste terrain vague - qui jouxte la zone occupée du parc. En bordure de ce grillage haut de 2 ou 3 mètres, côté chantier, existe encore une rangée d’une quinzaine de grands platanes de 20/30 mètres de haut, sur 300 mètres de long. A l’exception du premier arbre de cette rangée dont les branches portent suffisamment du côté parc pour qu’une cabane, le baobab, y ait été construite, les autres platanes sont inaccessibles. Après avoir réussi - par un beau petit coup de bluff des flics - à faire descendre sans heurts les deux occupants de cette cabane les ouvriers bûcherons abattent ce premier arbre puis toute la rangée et les débitent dans la foulée.

Grâce à l’arbre téléphonique, des sympathisant-es affluent en ordre dispersé. 100 à 200 personnes restent rassemblées toute la journée de l’autre côté du grillage poussant des cris de colère à chaque arbre qui tombe. Les insultes fusent. Les caillasses aussi. Retranchés derrière le grillage, les ouvriers poursuivent leur tâche toute la journée sans être gênés, seulement défendus par une trentaine de CRS qui font le pied de grue “ au cas où ”. Ils interviennent en fin de matinée pour retenir le “ bûcheron fou ” prêt à passer le grillage pour répondre avec les poings aux insultes de la foule... C’est le sentiment d’impuissance qui domine. En milieu d’après-midi, des groupes de manifestant-es se rassemblent à la mairie (à 500 mètres de là), ce qui provoque la mise en place d’un dispositif policier devant le bâtiment, pour les 15 jours suivants. Certain-es occupant-es passent leur journée à la cime de leur arbre pour prévenir tout abattage surprise côté parc.

En fin d’après-midi alors que les derniers platanes vont être coupés, la foule parvient à faire une brèche dans le grillage et une soixantaine de personnes s’engouffrent sur le chantier pour s’allonger au pied de plusieurs arbres. Les CRS robocopisés interviennent aussitôt à coups de gaz lacrymogènes et de matraques, envoyant quatre personnes aux urgences et quatre autres en garde-à-vue. La violence policière, filmée et photographiée passera bien dans la presse dès le lundi soir... mais avec la contre-information que l’expulsion des occupant-es a eu lieu, alors qu’une seule cabane sur les 17 existantes a été dégommée.

Le soir même, une réunion qui rassemble environ 80 personnes est organisée à la MJC toute proche pour faire le bilan de la journée et réfléchir à la suite des événements. De nombreux-ses riverain-nes, adhérent-es de SOS PPM, expriment leur incompréhension. Choqué-es et scandalisé-es, illes restent un moment sans voix, avant d’exprimer leur détermination à continuer la résistance. Cette journée est analysée comme un coup d’essai pour voir si l’heure est à la démobilisation ou au durcissement de la lutte. Nous étions conscient-es, les mois précédents, que nous ne défendions plus tout à fait les arbres, mais surtout la vie qui s’était crée sur le site. Cette journée donne une nouvelle dimension à la lutte, exprimée par un riverain : si les personnes rassemblées se mobilisaient pour des arbres, ils sont maintenant mus par la révolte contre les méthodes employées par les autorités pour répondre à la contestation. Les événements de l’après-midi sont l’occasion de rappeler à celles et ceux qui en doutaient que la fonction des flics est de frapper et que ce qui est vécu comme un geste inadmissible et exceptionnel se reproduit chaque jour à leur insu dans cette fRance de - argh.

La discussion entre membres de l’association SOS PPM témoigne surtout d’une véritable banalisation des actes d’interposition et d’action directe, fruit des longs mois de blocages matinaux : des riverain-nes âgé-es appellent “ les vieux à se mettre en première ligne, plutôt que d’exposer des jeunes sur lesquel-les on ose taper ” ; d’autres tentent d’imaginer des moyens “ plus discrets ” de défoncer le grillage ; d’autres encore s’intéressent aux méthodes d’enchaînement et de cadenassage aux arbres... Si de telles réactions nous enthousiasment, nous nous interrogeons encore sur les conséquences d’une radicalisation par le traumatisme de la répression.

L’occupation au sol

En réaction à l’intervention du lundi 2 février, plusieurs affiches sont placardées sur les murs de la ville la nuit même. Elles informent des violences policières de la journée, appellent à la mobilisation contre la construction du grand stade et à l’occupation massive du parc mistral, dans les arbres, mais aussi au sol, avec l’invitation à une “ grande camping partie ”. Les deux semaines suivantes, ces affiches sont l’objet d’un décollage ciblé... mais sont recollées presque tous les jours.

Répondant à cet appel, quelques étudiant-es, sorti-es de leurs partiels depuis la fin janvier, entreprennent de monter une première yourte au sol, afin de dormir au pied des arbres. Les tentes au sol se multiplient pendant la semaine et permettent la constitution de nouveaux groupes affinitaires et de nouveaux projets.

Certain-es d’entre nous construisent une cabane au sol qui se transforme en cuisine/salon de thé, sous “ l’arbre à palabres ” volontairement choisi pour sa position hors du périmètre des arbres à abattre, (position d’abord réprouvée par pas mal d’occupant-es). Pendant l’expulsion, ce lieu servira de point de convergence, d’interface avec le groupe des cabanes assiégées et permettra les premiers soins médicaux - contre les gaz lacrymos -, avant d’être détruit par les CRS et reconstruit quelques mètres plus loin... En attendant, cette cabane permet des rencontres entre enfants, adultes, djeunes autour de bouffes, d’infusions, de galettes, et de jeux et ouvre le périmètre occupé vers les allées où se promènent les riverain-es qui n’osaient pas encore s’approcher des autres cabanes.

Le sentiment d’urgence, mêlé à l’impression que l’occupation peut tout aussi bien durer jusqu’à l’été provoque une constructomania, tant au sol (avec de nouvelles tentes, des lieux de cuisine, des fours, des hamacs et des bâches tendues, etc.) que dans les arbres (nouvelles cabanes, plates-formes, filets tendus entre les arbres, etc.). Avec le retour du soleil, l’affluence au parc est plus importante chaque jour. Des concerts acoustiques sont improvisés, des matchs de foot mixtes et intergénérationnels se disputent sur pelouse, enfants et adultes sont invité-es à monter au diwa pour redescendre sur 50 mètres de tyrolienne, la fréquentation des repas de quartier se fait plus massive, jongleureuses et dormeureuses se multiplient, certain-es prévoient déjà pour la semaine suivantes un programme d’animations en plein air...

En fin de semaine, des bruits circulent, depuis les couloirs de la mairie et de la Metro, qui nous annoncent l’imminence de l’expulsion sans que nous puissions y croire tout à fait. La résistance s’organise cependant, avec de nouveaux ateliers juridiques et médicaux, et le tout début de réflexions stratégiques en petits groupes affinitaires.

La veille de l’expulsion, plus d’une soixantaine de personnes dorment dans la vingtaine de cabanes, et peut-être une trentaine d’autres sous des bâches et des tentes au sol.

L’expulsion : du mardi 10 février, 5H du matin, au jeudi 12 février, 14H30

“ Je crois qu’on a bien rigolé.

 Hum. Moi aussi.

 C’était difficile aussi, des fois.

 Pas mal, ouaip. Si tu leur lisais un de ces nombreux témoignages poignants ?

 Illes ont qu’à le faire elles-eux-mêmes : c’est dans la brochure... ”

sorte de conclusion rapide

Le fichage en règle auquel furent soumi-ses les occupant-es dans la foulée de l’expulsion n’a pour l’instant été suivi d’aucune poursuite en justice. Quelques personnes auront cependant un procès dans les jours et mois à venir, pour s’être fait arrêté-es - voire tabassé-es en règle - au cours de l’occupation. Les principales inculpations dénoncent le “ démontage de palissades ” et/ou des outrages et résistances aux agents.

Nous tenons aussi à souligner le contraste, pendant l’expulsion, entre notre vécu dans les arbres (hors d’atteinte, enthousiastes, en confiance, passif-ves, sans rien d’autre à faire que dormir, crier des slogans et se faire des bisous... et pourtant réceptionné-es en “ rock stars ”) et celui des sympathisant-es au sol (soumis-es aux lacrymogènes et aux matraques, nombreux-ses à s’être mobilisé-es dans l’urgence, sans avoir vécu l’intensité et la continuité de la vie au parc).

Nous trouvons marrant de remarquer que tout au long de cette occupation, les organisations politiques traditionnelles de ce qu’on appelle l’extrême-gauche n’ont jamais montré le bout de leur nez (par contre, l’UMP a été très très présente comme principale instigatrice des tentatives de récupération politique de l’okup’...d’ailleurs, leur slogan pour les régionales à Grenoble c’est : "Non à la destruction du parc !"...Hum...) : pas trace de LCR, de SUD, d’AC !...sinon quelques-un-es de leurs militant-es venu-es à titre individuel.... Sans doute ce mouvement était-il si inhabituel dans sa forme et sa durée que les organisations “ traditionnelles ” n’ont pas su comment réagir et jouer un rôle en son sein. Tant mieux !

On sait aussi que le projet d’aménagement de la Bastille (une sorte de “ luna parc ” avec mini golf, ski sur pelouse etc.) est pour l’instant mis au placard, la peur des "écocitoyen-nes" semblant rester vivace chez les politocard-es du cru...

Aujourd’hui, on sait aussi que la plupart des occupant-es ne sont pas tout à fait redescendu-es : certain-es envisagent déjà de partir occuper d’autres espaces publics menacés, d’autres ont la ferme intention de construire un village plus durable dans des arbres un peu moins menacés à court terme, d’autres ouvrent des squats, organisent des chantiers-échanges de savoirs sur la construction de cabanes en paille, d’autres voyagent dans des camtards, d’autres s’apprêtent à résister fermement face à l’expulsion printanière de leurs squats... L’occupation du parc n’a laissé personne indemne, et a permis à de nouveaux projets de naître, à une forte dynamique collective de se créer sur Grignoble et ça ben c’est chouette quand même (non ?).

15 mars 2004


POURQUOI PRENONS-NOUS FROID DANS LES ARBRES ?

(Tract diffusé par des occupant-es du parc)

AU DELÀ DE LA DESTRUCTION DU PARC MISTRAL, S’OPPOSER À UNE LOGIQUE DE DÉVELOPPEMENT ET D’URBANISME.

Depuis deux mois l’occupation des arbres du parc Mistral à permis de faire connaître la résistance pour la préservation de cet espace. Aujourd’hui encore, cette action, plaçant la mairie dans une situation de porte a faux, remet en cause la construction du stade.

Des actions de résistances quotidiennes ont permis d’empêcher l’avancée du chantier.

Cependant tout cela n’aurait pas été possible sans le soutien massif et concret de nombreuses personnes que nous remercions. (Blocage quotidien des tentatives d’encerclement et d’abattage, soutien logistiques : matériaux, nourriture et chauffage, sourires...)

Au delà des arbres pourquoi s’opposer à la destruction du parc Paul mistral ?

ENVIRONNEMENT ET URBANISME.

Quelques centaines d’arbres peuvent paraître bien dérisoires... Mais dans une société suicidaire, en proie à la pollution, au réchauffement planétaire et à l’extinction rapide des ressources naturelles, chaque espace préservé, chaque acte de résistance compte !

Mais pendant ce temps là nos élus ont déjà travaillé dur, en témoigne les projets achevés de la nef-chavant, d’europôle, et de la place de Verdun...Ils ont prévu de faire encore plus fort :

 Rocade nord et son tunnel, A 51... projets pharaoniques alors qu’il est temps d’envisager d’autres alternatives aux « tout bagnole »

 Crolles II, MinaTech, biopolis...où vont se développer d’inquiétantes bio nano technologies à ajouter au nucléaire et à la chimie déjà bien présente à Grenoble

 Luna parc, transformant un autre patrimoine public en parc d’attraction privé... et payant !

L’avant projet d’agglomération préparé en 2002 par la métro nous en donne un avant goût : on y apprend que « Le sillon alpin connaît une croissance démographique et urbaine importante jusqu’à constituer d’ici à 20 ans une continuité urbaine de Genève a Voiron voire Valence. »

La mégaloPole qu’ils nous préparent ne laissera plus de place qu’aux espaces de consommation et de travail au détriment des lieux de rencontre, de détente, et d’échange non marchand.

Cette lutte pour la parc constitue un tremplin pour réfléchir à de nombreuses autres solutions concrètes en terme de vie et d’urbanisme : moins consommer et gaspiller, produire localement et se nourrir autrement, mettre en place des transports en commun gratuits, utiliser des énergies renouvelables et bio carburants.

Il est temps de penser en terme de décroissance plutôt que de bétonner et de dépenser plus. (Spécial dédicace a Bouygues béton hein jérôme )

POUR NOUS, DEFENDRE CES ARBRES C’EST COMBATRE CETTE POLITIQUE D’URBANISATION MASSIVE.

UN PROCESSUS DÉMOCRATIQUE ?

L’affaire du parc/stade est révélatrice d’une démocratie de façade où le pouvoir est délégué à quelques personnes qui l’exercent ensuite à leur profit, sans prendre en compte les personnes concernées par leurs décisions. La mairie dépense ensuite 1,41 millions d’euro par an (Daubé du 14/01/03, budget 2001) en communication et encarts coûteux en couleurs, pour nous laver le cerveau et faire croire qu’un stade constitue un espace vert et que couper des arbres est bon pour la couche d’ozone. (cf. tracts distribués dans vos boites au lettres ces jours ci, ATTENTION : photo non contractuelle).

On nous accuse de faire le jeu de la droite contre la gauche. Ne soyons pas dupes, la droite au pouvoir porterait le même type de projets. elle avait même proposé pire par le passé (souvenez vous de l’ancien Quartier de la Friche/Europôle). Il ne s’agit pas d’un problème de partis mais d’un système politique corrompu au service d’intérêts privés.

Expérimentons d’autres modes d’organisation:Autogestion, démocratie directe ,il est temps de prendre en main collectivement la gestion de notre ville, notre vie.

POUR NOUS, DEFENDRE CES ARBRES C’EST CE REAPPROPRIER LA VIE POLITIQUE DE NOTRE VILLE ET PRESERVER UN DES RARES LIEUX QUI N’EST PAS DEDIE UNIQUEMENT A LA PUBLICITE, A LA CONSOMMATION, AUX VOITURES ET AU TRAVAIL : MULTIPLIONS CES LIEUX !!!

FOOT, STADE ET CULTURE !

Nous aimons les jeux et le sport. Mais quand le sport devient simple synonyme de compétition, de consommation, de fric et de pression au dopage... constitue-t-il vraiment un modèle ou projet intéressant pour la collectivité ?

Ne devient-il pas un spectacle qui nous détourne des problèmes réel et d’une participation active à la vie sociale ?

Le stade est un énorme détournement de fond public au profit de quelques industriels et organisations maffieuses (ligue et fédération de foot), alors que les grenoblois-es qui voudraient pratiquer ou jouer (pas seulement contempler à la télévision ou dans un stade) ne disposent que de très peu d’espace pour le faire.

Alors A.Pilaud, adjoint aux sports, nous explique pour justifier le grand stade et le financement public du GF 38 que le foot professionnel est nécessaire « comme modèle pour motiver les plus jeunes à faire du sport ».

Salaires indécents, transferts exorbitants, virilité obligatoire et souvent sexiste, Porsche et villas tropéziennes, c’est cela que l’on veut inculquer aux enfants ?

Qu’on ne vienne pas pleurer sur les violences des mômes qui comprennent qu’ils ne deviendront jamais ni champions, ni riches, ni puissants.

POUR NOUS, DEFENDRE CES ARBRES C’EST REVENDIQUER QUE LE SPORT RESTE UN JEU ET NON UN CENTRE DE CONVERGENCE D’INTERETS FINANCIERS

la lutte pour le parc montre que, quelque soit notre age et notre façon de faire, il est possible de résister concrètement et de désobéir quand on considère que les politiques nous manipulent.

A l’heure actuelle, un recours en justice contre le permis de construire a été posé par des associations et des individu-e-s et sera jugé le 27 janvier. La justice n’est cependant pas neutre, elle est souvent du coté du pouvoir.

Même si le permis de construire est autorisé, il faut empêcher jusqu’au bout et par tous les moyens utiles (notamment l’occupation des arbres) la destruction du parc.

Si, au final, la mairie s’acharne dans sa bêtise et construit le stade, cette résistance est utile. Elle est une étape forte et symbolique qui montre que politiques et industriels ne pourront plus s’attaquer aux populations et à leur environnement sans y perdre argent, temps et crédibilité politique.

Cette résistance est d’ores et déjà victorieuse par toutes les rencontres et solidarities qu’elle a permises (avec les riverain-e-s, les occupant-e-s de différents squats et du théâtre le Rio et beaucoup de grenoblois-e-s).

Pour plus de lecture, de discussions et d’information, sur les thèmes abordés, un info kiosque (ouvert de 12 à 18 h) et un espace d’accueil vous attendent au parc

DES OCCUPANT-E-S DU PARC ET SOLIDAIRES

Merci à www.piecesetmaindoeuvre.com pour leur documentation.


IMPRESSIONS IMPRÉCISES D’UN OKUPANT AU SOL

Période de la dernière semaine avant l‘expulsion

Les faits sont totalement subjectifs en raison des circonstances de l’okupation du parc : fatigue, alcool, froid, traumatismes...

Premier soir

J’ai débarqué au parc après qu’un copain eut installé un campement au sol. Comme je n’avais pas de baudrier, je ne pouvais donc okuper qu’au sol, et le petit bivouac me donna une première alternative qui tombait à pic.

L’arrivée au premier soir ne s’est pas différenciée des soirées suivantes. L’ambiance est très particulière autour du brasero principal qui sert de chauffage et de feu de cuisine. En tant qu’étudiant fraîchement au courant de certaines pratiques en milieu de squat et d’occupation comme l’autogestion et surtout les débats hyper construits j’ai été assez surpris de voir des gens durer depuis près de trois mois avec une telle absence de concertation générale et d’organisation.

Spontanéisme et formalisme deux pôles antagonistes ?

Ça ne veut pas dire que c’eut été mieux avec une meilleure gestion et tout plein de réunions mais il en résulte qu’il m’a été difficile de savoir à qui m’adresser pour des questions matérielles, idéologiques et pratiques. Alors j’ai installé mon hamac dans mon coin et j’ai abandonné parce qu’il faisait moins 40 la nuit en plein vent et que je me voyais mal faire mon Robinson en milieu nordique. J’ai donc dormi avec les genTEs que je connaissais déjà très bien en nous organisant comme d’habitude avec les même genTEs que d’habitude...dommage mais ça devait changer peu à peu.

Car la pluriethnie du parc, c’est-à-dire la réunion d’une soixantaine de genTEs complètement différentEs au niveau politique et pratique, permit de former des groupes affinitaires et de s’organiser avec les genTEs qui fonctionnaient comme soi. Ainsi la souche dure des écowarriorEs (appelés par le commun des mortels citoyennistes « ecocitoyenNEs ») se débrouillaient dans une organisation plutôt spontanéiste, les squatteureusEs étaient très au fait d’un mode libertaire et les autres se démerdaient comme ils voulaient. J’ai entendu parlé d’une lutte des classes entre ceux qui grimpaient et ceux au sol et nouveLLES, ancienNEs mais je ne l’ai pas trop ressenti, il m’a plus semblé que chacun était libre d’okuper comme ille l’entendait, tant qu’ille ne gênait pas les autres, en théorie du moins, de sorte que l’okup’ était relativement ouverte à n’importe qui car exempt de pratiques ésotériques et totalement obscures. Par contre une absence de fédération de tous ces mini groupes engendre l’impossibilité d’une volonté bien définie de l’okup’ : pas moyen de savoir de quel matos et ressources on dispose, de faire des réu’ d’information et de conseils en cas de « capture » ou même d’ « attaque » de savoir ce que touTEs veulent faire et pas faire au parc...etc. Pour résumer l’ambiance générale n’était pas particulièrement accueillante (ce qui n’est pas son but d’ailleurs) mais arborait une grande tolérance quant aux nouvelles/aux et aux autres modes de fonctionnement et autres motivations/politiques.

Ainsi après quelques jours j’ai quelque peu abandonné mon campement initial au sol pour construire ma cabane que j’envisageais comme intermédiaire entre sol et air. Nous avons pris avec un copain l’initiative d’un projet de campement qui réunissait mon envie de cabane et son envie de lien avec l’extérieure. Nous avons beuglé à la ronde que nous organisions la première réunion "fondatrice" de notre projet et nous nous sommes retrouvés à trois : lui moi et sa guitare. L’idée -d’abords assez mal vue- était de s’établir en dehors du futur périmètre de sécurité pour à la fois capter l’attention des promeneurEs en journée pour ensuite les canaliser vers le foyer central de l’okup’, ensuite de faire un campement accessible par les sans-bodar et les enfants et enfin d’être assez loin des autres ethnies pour en être indépendant.

L’arbre à palabre

On a donc tous les trois baptisé notre campement l’arbre à palabre à l’ombre d’un chouette tronc aux branches ramifiées et accueillantes. On a essayé d’être très formaliste ce qui est assez facile à trois surtout quand la troisième est une guitare. On a écrit une charte très courte qui engageait à pouvoir la révoquer, à ne pas fumer de gros blunts ni boire avec, si je me souviens bien une volonté anticapitaliste/libertaire et végétarienne/bio aussi un peu. Pendant cette première réu’ dite pow wow qui se tenait quand le crépuscule fond sur la plaine nous avons décidé de commencer le "chantier" le lendemain.

Au petit jour un pillage spontané de chantiers nous a fourni le bois nécessaire, des bâches ont été achetées et on s’est lancé. Les quinze premières tentatives de cabane se sont systématiquement effondrées sur mes pieds jusqu’à ce que des copains d’autres groupes nous filent un sérieux coup de main. En deux jours la cabane -si modeste soit elle- fut édifiée et opérationnelle. Haute de deux mètres d’une superficie de quatre mètres carrés elle consistait en une simple mèdezanine accolée à l’arbre. Les gosses pouvaient grimper sans soucis, aucun clou et sécurité sur toute la surface.

Le campement possédait aussi une cantine autonome, un salon de thé et de polémique plus un coin enfant histoire qu’ils puissent graffer la cabane et les tables en se gavant de gâteaux.

Opération "palabre"

Le campement est prêt le dimanche, jour de prédilection des familles et des habitantEs du quartier. Un grand repas de quartier se tient au milieu des arbres et le rythme des outils au travail répond aux pizzicatos des contrebasses. On discute avec plein de chouette genTEs qui passe dans le coin et l’arbre à palabre est noir de gosses. L’opération palabre marche comme prévu en interpellant les simples passantEs et en accueillant les familles à gaminEs. C’est ce que j’appelle de la communication extérieure.

Nous dormons à l’arbre qui est en dehors du périmètre malgré de sérieuses rumeurs d’attaque pour le lendemain.

Le lundi c’est-à-dire le lendemain tout ce passe bien et l’opération palabre continue, même succès que la veille. Les rumeurs paraissant de plus en plus fondées moins de personnes dorment à l’arbre et je réintègre mon campement initial à l’intérieur du périmètre. Ce campement est entièrement au niveau du sol.

Jour J

Des clameurs nous préviennent de l’imminence d’une attaque. J’enfile une paire de jeans et de ranjos en abandonnant le matos avec lequel j’ai affronté la nuit. Il doit être 5h45 et nous montons tant bien que mal au filet fixé horizontalement à cinq mètres du sol. Nous sommes sept personnes, certaines okupent depuis une semaine d’autres dorment à l’extérieur en temps normal. Le filet permet à cellezéceux-qui-ne-montent-pas de ne pas se faire virer pendant la première salve des CRS. On assiste en même temps que cellezéceux-dans-les-arbres à l’expulsion des personnes au sol parfois brutale et à la destruction systématique de toute construction au sol par des bulldopanzers. On se dit qu’on est bien où on est plutôt que dans l’arène que dressent les ouvriers en un temps record avec des tôles de deux mètres de haut solidement boulonnées sur des poutres verticales elles-mêmes boulonnées à des piquets à deux mètres d’intervalle fichés dans le sol par une machine sur rail.

Et soudain c’est le drame

Nous sommes dans le filet les plus accessibles aux forces de l’empire. Les CRS jouent à faire la tortue façon légionnaires en Armorique pendant que quelques gendarmes essayent de nous amadouer avec un humour gaulois. L’un de nous menace de sauter du filet s’ils approchent et une autre crie qu’elle ne veut pas qu’ils nous fassent tomber. Ils nous rassurent et coupent un côté du filet et on se casse la gueule. Leur idée était d’attacher leurs cordes à une extrémité du filet, de couper celles d’origine et de descendre doucement le filet et relâchant petit à petit leurs cordes. Sauf qu’ils s’y prennent comme des pieds et que donc un côté du filet lâche et nous projette de l’horizontal à la verticale d’un coup. Un copain tombe de cinq mètres sur le dos et est traîné sans ménagement. Trois autres descendent du filet puisqu’ils sont trop bas et qu’ils sont agrippés aux chevilles par les starshipstroppers, les trois derniers sont assez hauts sur le filet pour grimper dans l’arbre ou le filet est resté accroché. Il fait très froid, l’un descend et part sans problème, le second tente de descendre pour grimper dans un autre arbre et foire et le troisième reste environ douze heures debout sur une branche avant de descendre épuisé après un enregistrement d’identité.

Un occupant du sol


VOILÀ DONC LE RÉCIT DE TROIS JOURS D’EXPULSION PAR DEUX OCCUPANT-ES D’UN BOSQUET D’ARBRES DU PARC PAUL MISTRAL DE GRENOBLE.

Pour commencer, merci à Suzanne et tous nos ami-es au sol, qui ont permis par leur présence massive à ce que notre expérience ne se finisse pas dans l’anonymat et à la merci d’une répression plus féroce. Cette foule enthousiaste a ramassé dans la gueule tout ce que la hauteur nous a épargné : lacrymos, coups de matraques, et cohabitation forcée avec des individus peu recommandables que l’on nomme CRS.

Pour notre part, on a eu droit à tous les cotés positifs de la lutte : l’expérience en elle-même, passionnante à vivre et enrichissante personnellement, la solidarité entre nous et avec celles et ceux de dehors et, bien sur, être des rock stars ultra médiatisées pendant quelques jours...

Nous avons expérimenté dans la joie de nouveaux modes de vie : comment dormir à 10 dans 8 mètres carrés, comment faire caca et pipi à 10 dans le même espace, comment survivre avec deux boîtes de cassoulet quand on est végetarien-es, combien de slogans et chanson débiles peut-on trouver quand on reste 3 jours sur un arbre, etc.

Pour enlever tout de suite du crédit à l’image de militants hypers organisés que nous aurions pu être, précisons d’abord que l’un de nos soucis principaux pendant ces trois jours a été le manque de nourriture. Comme nous ne nous attendions pas (dans notre bosquet « optimiste » en particulier) à ce que l’Etat soit aussi mauvais et mette plus de trois jours à nous expulser, nous n’avions pas prévu de provisions nous permettant de supporter un siège de longue durée. Ce qui, quand on se prépare a une expulsion de cette sorte est loin d’être malin (nous avions tout de même pensé à l’eau que nous avions en grande quantité, pour une quinzaine de jours au moins).

Le mardi avant l’aube quand les CRS envahissent sauvagement le campement, nous sommes 20 personnes à dormir dans nos cabanes à 12 mètres du sol, bientôt rejoint-es par 3 naufragé-es fuyants les flics. Nous occupons trois cabanes installées dans trois arbres reliés par des ponts de singes. Une trentaine d’autres personnes occupent les 14 cabanes restantes du campement.

Déjà réveillé-es et prévenu-es de l’arrivée des flics par des guetteureuses, nous assistons un peu inquiet-ètes à leur entrée en scène fracassante : très vite, on a senti que les CRS ne se sentaient plus. Ils commencent par déloger brutalement les occupant-es au sol en dévastant littéralement les tentes sous les arbres. Vue d’en haut cette scène est mémorable : c’est tout de même assez frappant de voir ces soi disant gardiens de notre soi disant démocratie se comporter comme des mercenaires en pleine détruisant avec un plaisir manifeste a coup de pieds et de matraques des cabanes qui furent construites avec tant d’allégresse.

Les Crs s’attaquent ensuite à un filet tendu à 5m de hauteur ou se trouvent 6 personnes. Avec leur délicatesse légendaire et malgré nos cris, ils coupent tout simplement les cordes du filet, et c’est un miracle que seule une personne soit tombée et qu’elle s’en soit sortie sans blessure. Un garcon réussit néanmoins a rester sur l’arbre. Il y restera toute la journée, dans une position inconfortable et sans nourriture.

Ensuite, un des personnages centraux de l’expulsion entre en scène : le paysagiste, c’est le nom qu’on donne au bûcheron dans notre société hypocrite. Pendant ces trois jours en voilà un qui a montré plus de zèle qu’aucun flic.

Il a d’abord tenté de tronçonner un arbre ou se trouvait une femme. Heureusement elle a résisté avec vaillance à cette pression ridicule et ce sont les flics qui ont du le retenir. L’occupante de l’arbre restera elle aussi toute la journée, seule sur une branche avec quasiment rien à manger. Elle réussira dans un moment ou plus personne ne s’occupe d’elle à rejoindre d’autres occupants dans une cabane voisine, traversant le parc au nez et à la barbe des CRS.

Le paysagiste viril s’est ensuite tourné vers une autre cible, et de taille : la cabane de l’infokiosk, chalet « Do it yourself » sur deux étages, temple de la subversion, ou se trouvaient toutes les brochures maudites qui colportaient d’odieux messages : prends ta vie en main, résiste, prouve que tu existes.

La manière dont ce type s’est attaqué à cette cabane résume toute la stupidité de ce personnage à la solde de l’autorité. Sans même regarder a l’intérieur, il a commencé par tronçonner l’échelle de meunier qui permettait de monter a l’infokiosque. Mais il a bien été embêté ensuite quand il s’est aperçu que la cabane était accrochée a l’intérieur et qu’il a du utiliser une nacelle pour y monter. En plus, l’infokiosque qui se trouvait au sol était situé sous une de nos trois cabanes. Une des branches de l’arbre traversait la cabane. Malgré nos cris, ils ont décidé de tirer la cabane avec un tracteur, risquant d’entraîner tout l’arbre ainsi que les occupant-es de cet arbre. Finalement par une nouvelle chance inouïe il n’y a pas eu de dégât, et l’arbre a résisté.

Avec l’arrivée des caméras et de plus en plus de gens en bas, les choses se sont un peu calmées pour nous, le bûcheron et ses amis CRS étant un peu moins excités envers nous.

Par contre, les flics érigent des barrières tout autour du campement, nous laissant isolé-es dans un périmètre de sécurité. Nous ne pouvons plus communiquer avec les gens d’en bas qu’avec des porte-voix improvisés grâce à des cônes de chantiers.

De là-haut nous avons une vision lointaine de se qui se passe ensuite.

Les choses paraissent démesurées, une cinquantaine de personnes accrochées à quelques arbres assiégées par une centaine de flics et cette immense barrière ridicule.

L’ambiance semble de plus en plus tendue. On entend des cris, des altercations.

D’en haut nous observons le comportement des troupeaux de crs, qui ressemblent a s’y méprendre a ceux des moutons, se tenant par l’épaule, courant au hasard par groupe de cinq. A ce moment la, on a le sentiment qu’ils sont débordés. Les gens en bas commencent a s’attaquer à la barrières en tapant dessus. On la voit s’ouvrir a plusieurs endroits. Pour nous c’est un grand moment de stress et d’euphorie.

L’émeute va-t-elle enflammer grenoble ? Mais non, les choses se calment plus ou moins à grand renfort de coups de matraques et de gaz lacrymogènes.

On apprendra plus tard que les CRS avaient à un moment chargé environ 600 personnes à travers le parc, gazant des mamies et des enfants (alors même que nous sommes au pied du Vercors, haut lieu de la résistance !).

Les arbres qui peuvent être coupéx le sont, et les gros camions défilent sous nos arbres et s’embourbent. En quelques heures le parc est transformé en grand chantier boueux.

La nuit approche et on se demande s’ils vont arrivér à nous déloger aujourd’hui. A chaque passage de la nacelle, ou relais entre les régiments de CRS et gardes mobiles, on se dit que c’est pour nous. Mais en fait ils sont maintenant flippés sous la pression publique et ne savent plus du tout comment faire pour nous déloger.

Une bande de beaux gars musclés finit par arriver en voitures avec escorte, inspecte chaque arbre et fait des plans. C’est les troupes d’élites (GIPN ou PGHN ???), ils jouent les sympas. Les rumeurs disent qu’ils ne veulent finalement pas intervenir.

Pour nous la question de la nourriture commence à se poser, et on se partage une boite de cassoulet froid. Nous sommes assez content-es que ça dure. On décide de se relayer pour la nuit, deux personnes surveillant en continue que les choses ne se précipitent pas. Mais la nuit se passe. Divers cris et hurlements nous rappellent qu’un bon groupe de personne veille au sol près de l’orme et que la police n’est pas totalement inactive. Les bruits des percussions des gens en bas nous réchauffent le coeur pendant une partie de la nuit.

Dans une ambiance nazi-hollywoodienne, on voit des troupes de gens armés aux boucliers luisants faire des rondes dans le parc sous les sunlights des projecteurs installés pour la surveillance nocturne de la barrière.

Le concept des siestes collectives entassées les unes sur les autres nous permet de lutter efficacement contre le froid.

Le lendemain, nous sommes réveillées à 6 heures par de nouvelles échauffourées entre les manifestant-es au sol et des CRS. On entrevoit quelques individu-es masquées s’interposer face aux CRS. C’est beau.

Quelques fumées irritantes remontent jusqu’à nos cabanes. Les flics détruisent le nouveau camp de base établis par les gens. Des habitué-e-s du parc font leur footing et se mettent à pleurer.

Ensuite commence une longue journée d’attente et d’excitation pendant laquelle la préfecture s’essaye à négocier notre redescente en nous envoyant ses sbires en costard, ces messieurs dames des renseignements généraux. Nous connaissions déjà la perfidie de ces professionnels de la délation et nous n’avions pas l’intention d’accorder le moindre crédit à leur discours de discorde. Néanmoins isolés des autres cabanes, et sachant leur capacité à manipuler et embrouiller les esprits, nous n’étions pas surs que tout le monde réagirait comme nous.

Les RG proposaient un marché : qu’on descende, et peut être que la préfecture ferait passer un moratoire protégeant les arbres pendant 3 mois. Bien sur, nous serions relâchés sans aucune poursuite, a condition de sortir maintenant.

La vue du parc déjà dévasté et des 15 arbres isolés au milieu du chantier suffisaient à nous faire rire devant cette proposition. Par contre plusieurs personnes « infiltrées » comme "médiateurs-trices" ont réussi a nous faire passer de la nourriture (et du chocolat !) et un portable.

Finalement, personne n’a été dupe de la tentative désespérée de la préfecture pour nous faire descendre, malgré les menaces finales "si vous restez, on ne pourra pas tenir les CRS, ils vous gazeront sûrement... etc".

Une dizaine de personnes ont décidé de descendre pour des raisons personnelles, mais nous restions encore une quarantaine perchés dans les arbres, dont 19 dans notre bosquet.

L’un des autres animateurs de cette longue journée, fut ce jeune garçon bien propre sur lui que l’on nomme Olivier Noblecourt et qui tient lieu de chef de cabinet au maire de grenoble. Ce social traître de haut vol, a pu essuyer nos quolibets à chacune de ses entrées dans le campement. Et plus d’une fois nous avons pu nous réjouir de le voir se retirer avec précipitation sous les hurlements "olivier, si la gauche a existé un jour, elle te vomit". En tout cas, bien que nous ne nous faisons aucune illusion sur sa capacité de remise en cause personnelle, nous pensons avoir au moins déclenché un ulcère ou une poussé d’urticaire, car même les plus méprisants des notables ont un corps qui réagit.

Le soutien constant de la population du parc était un autre motif d’euphorie pour nous. Les multiples discussions échangées grâce aux porte-voix avec des inconnus et des amies difficiles à reconnaître donnait un petit coté dadaïste a cette situation surréaliste.

Cette journée c’est finie en beauté pour nous, par un vrai repas cuit sur un feu de bois improvisé sur une branche à 10m du sol. On reprend des forces avant une nouvelle nuit de veille. Une nuit qui se passe plus calmement que la précédente, du moins c’est la vision qu’on a de nos arbres.

Jeudi matin vers 8 heures, on voit arriver sur le parking des véhicules du SAMU. Peu après, les beaux gosses musclés du gign ou du pghm, refont leurs apparitions. Et on se dit que ça sent le roussi. Ils inspectent les cabanes et nous disent que c’est sans doute notre dernière journée dans les arbres.

Effectivement, les nacelles se remettent en route et des camions chargés de gros matelas débarquent.

L’arbre téléphonique est lancé et la foule commence à arriver.

Les nacelles et les matelas encerclent d’abord un premier arbre. La chine est menacée. C’est le nom de la première cabane à tomber sous le joug de l’oppresseur légal.

Ces trois jours en état de siège, nous les avons passés dans une ambiance militaire de surveillance constante et bien que le vocabulaire guerrier ne soit pas notre tasse de thé il nous vient à la bouche plus facilement que d’habitude.

Peu à peu les cabanes sont vidées de leurs occupant-es. L’expulsion se passe relativement calmement. La plupart des occupant-es sont assez vite ramené-es au sol, alors que d’autres font un peu de résistance. Certains montent à la cime de leurs arbres pour être plus difficile à attraper. On en voit un qui en circulant sur les ponts de singes arrive a retarder plus d’une demi-heure les expulseurs. Il vient se poser sur la nacelle et remonte ensuite sur ses cordes.

Finalement les expulseurs commencent à s’intéresser a nos cabanes. Des matelas sont installés en bas et on voit s’élever vers nous une nacelle et trois garçons assez musclés.

Ils se débattent pas mal avec les branches qui les empêchent de s’approcher facilement. En étudiant leur façon de faire, on se rend vite compte qu’on aurait facilement pu installer plus de choses qui les auraient retardés assez longtemps. On s’en souviendra pour la prochaine fois.

La plupart de nos co-habitant-es des arbres sont interceptés facilement et redescendus. Les paramilitaires qui s’occupent de nous faire descendre sont très calmes et jouent aux gentils secouristes.

Rappelons au passage que ces « sympathiques gars du gign, dont la maîtrise et le calme » ont épaté politiciens et journaleux, sont quand même des tueurs professionnels, des tueurs légaux, certes, mais dont le métier consiste à descendre froidement des gens et à maîtriser de multiples façons d’assassiner. Evidement, notre société a les héros qu’elle mérite, des héros fait à son image : répressifs et dangereux.

Nous ne sommes pas surpris non plus que ce soient nous (les gens dans les arbres ou celles et ceux qui ont résisté au sol) que messieurs Migauds et Destot traitent d’extrémistes ou de fanatiques, nous comprenons des gens qui s’organisent, réfléchissent et résistent sont plus dangereux pour les politiciens que des assassins a la solde de l’état.

Nous sommes récupérés en bas par deux RG, qui nous escortent jusqu’à le police pour un contrôle d’identité. L’ambiance est déjà nettement moins sympathique. Les flics ont l’air assez énervés et crispés, même si cela semble être une habitude chez eux. Ce dur moment passe finalement et nous sommes relâché-es un-e par un-e. La police tente tout de même une dernière petite blague ; celle de n’en garder qu’un, notre meneur évidemment. C’est vraiment ne rien comprendre à nos modes d’organisation que de croire que nous avons besoin de chefs. Après quelques frayeurs, notre ami est aussi relâché.

Plein de gens nous accueillent à la sortie avec des montagnes de victuailles. Mais en fait ce qui nous réconforte c’est de pouvoir toucher et parler avec tous ces gens qui pendant trois jours nous ont soutenu jours et nuits.

Il reste encore un arbre occupé et nous nous joignons à la foule au pied de l’orme pour soutenir les dernier-es habitant-es du parc. Apparemment il semble que les occupant-es de l’orme aient décidé de s’attacher pour empêcher les expulseurs de les descendre facilement.

Ça marche assez bien puisque les flics mettent assez longtemps a les déloger mais eux aussi finissent par descendre....


RÉCIT À CHAUD DE TROIS JOURS D’ÉTAT DE SIÈGE AU PARC MISTRAL À GRENOBLE

Depuis le 3 novembre 2003, des arbres du parc Mistral de Grenoble étaient occupés et habités afin d’empêcher la destruction d’une partie du parc. L’expulsion devait venir un jour ou l’autre, et elle se faisait sérieusement sentir depuis quelques jours (voir les liens cités plus bas pour en savoir plus sur l’histoire et les raisons de l’occupation).

Dimanche 8 février 2004, les occupant-e-s du parc s’attendaient à voir débouler les flics encore plus nombreux que le 2 février (où ils avaient tabassé quelques personnes et expulsé une cabane, pendant que des arbres commençaient à être tronçonnés...) à partir de mardi matin.

En effet, à partir de 6 heures du matin le 10 février, des dizaines de flics ont envahi le parc en chassant les gens présent-e-s au sol, détruisant à peu près tout sur leur passage (les installations au sol, tentes et autre mobilier). Plusieurs dizaines de personnes occupaient alors les tentes et cabanes perchées dans les arbres. Ce sont les seules à n’avoir pas été attaquées par la police. Et encore... Un filet installé à quatre mètres de haut entre deux arbres a été littéralement arraché par les flics, les quelques personnes qui s’y trouvaient s’y agrippant au dernier moment, sauf une personne qui a fait une chute de quatre mètres pour être ensuite traînée face contre terre par des flics survoltés !

Le superbe infokiosque installé dans un arbre à trois-quatre mètres de haut a été immédiatement détruit également. L’offensive policière et étatique ne faisait que commencer et dès lors, plus d’une centaine de policiers allaient être en permanence sur le parc, se relayant nuit et jour pour en finir avec l’occupation du parc Mistral.

La violence policière ne suffisant pas pour éloigner définitivement les personnes présentes au sol, la résistance continuait pour empêcher la mise en place de clôtures autour des arbres occupés. Des dizaines, puis des centaines, plusieurs centaines de personnes, dépassant largement le millier au cours de l’après-midi, ont afflué ce mardi pour protester contre l’opération policière et soutenir activement les occupant-e-s des arbres.

De nombreuses altercations ont eu lieu entre policiers et personnes solidaires de l’occupation du parc (que nous appellerons "manifestant-e-s" pour simplifier mais le terme est en l’occurrence insatisfaisant) : en début d’après-midi, les palissades installées dans la matinée pour délimiter un périmètre de "sécurité" avec d’un côté les arbres occupés et de l’autre les dizaines de CRS repoussant les quelques assauts des manifestant-e-s. Ceux-celles-ci ont essayé en vain de briser les palissades hautes d’au moins 2 mètres, à coups de pied surtout, et à quelques endroits à coups de barrières en métal, réussissant parfois à les percer, mais pas assez pour les franchir complètement.

Les CRS n’hésitent pas à charger et à être plus que menaçants. Quelques pierres volent en leur direction, mais pas trop. Des fumigènes sont allumés autour du parc par des manifestant-e-s. On assiste à des scènes de mini émeute, auxquelles participent plus ou moins toutes sortes d’individus présents (des personnes âgées aux collégien-ne-s...). Les flics sont obligés de garder le parc occupé et ne s’en éloignent pas trop (c’est un peu la "zone rouge" du moment...). La mairie, grandement responsable de la destruction du parc Mistral, est à deux pas, mais elle aussi est sous bonne surveillance policière...

La nuit tombant, les manifestant-e-s se font de moins en moins nombreux-euses, contrairement aux flics. L’ambiance commence à refroidir un peu mais le campement extérieur est bien installé, tout près des palissades, la solidarité avec les occupant-e-s des arbres se fait sentir tout au long de la nuit, avec musique et feux de camp. Les occupant-e-s du parc ne seront jamais seul-e-s !

Mercredi 11 février, très tôt le matin, le campement extérieur est attaqué par la police, à coups de matraque et de lacrymogènes. Après un repli immédiat, les manifestant-e-s ne tardent pas à se réinstaller, pour finalement être redéplacé-e-s par un nombre conséquent de flics municipaux, peu avant midi, lorsque cet endroit était relativement délaissé.

Peu après midi, nous apprenons que quelques occupant-e-s des arbres en sont sorti-e-s, pour différentes raisons personnelles, mais que la plupart (une bonne trentaine) sont toujours là haut. Aucune arrestation n’a lieu lors des sorties de ces premières personnes. Des négociations sont lancées par la police, mais n’aboutissent à rien. La trentaine d’occupant-e-s des arbres décident de rester jusqu’au bout malgré le manque de nourriture et le refus catégorique de la police de leur laisser parvenir ce que de nombreuses personnes leur apportent.

Vers 14h30, une dizaine de fumigènes sont allumés sur la route et sur la voie de tram à un carrefour très passant en bordure du parc Mistral (côté Nef Chavant / Bibliothèque municipale). La présence de manifestant-e-s en cet après-midi est moins importante que la veille, l’ambiance est moins chaude mais l’occupation continue. Des rumeurs circulent quant à une éventuelle intervention du GIPN ou du GIGN dans l’après-midi. Cette intervention de forces spéciales n’aura jamais lieu. Les occupant-e-s des arbres et les manifestant-e-s se parlent, ça rappelle fortement les parloirs sauvages dans les prisons. La présence policière est toujours aussi permanente, les changements d’équipes sont très réguliers (toutes les deux ou trois heures). A l’intérieur, les nacelles installent des projecteurs mais ne s’attaquent pas aux arbres. Tout cela ressemble juste de plus en plus à un camp de détention/rétention... Il continue d’y avoir du monde autour du périmètre de sécurité, de façon constante, le long de la nuit.

Au petit matin du jeudi 12 février, l’alerte est déclenchée et de nombreuses personnes affluent aux abords des palissades : trois nacelles passent à l’attaque des arbres occupés. L’intervention n’est pas le fait du GIPN ou du GIGN mais d’un corps de gendarmerie spécialisé en haute montagne (dont les initiales seraient le PSGHM...). Ils doivent déloger une trentaine de personnes dans des cabanes ou des tentes placées parfois à plus de vingt mètres de haut. Certain-e-s des occupant-e-s ont même quitté ces cabanes et tentes pour grimper encore plus haut dans les arbres.

Assez vite, quelques centaines de personnes entourent le parc, mais la police est encore plus nombreuse que mardi et mercredi. Les manifestant-e-s conversent avec les occupant-e-s, grâce à des plots de récup’. La solidarité fait chaud au coeur, même si bien sûr, elle ne suffira pas à empêcher la répression policière. Des slogans sont scandés de part et d’autres, dont, parmi les plus repris : "Ni Etat ni bûcherons, Autogestion !", "Ni Destot ni Carignon*, Autogestion !" (le terme "Autogestion" étant quelquefois remplacé par "Révolution") et "Résistance, Existence", etc.

Au fil de la matinée, quelques personnalités n’ont pas eu honte de se pointer en pleine expulsion des occupant-e-s du parc. Parmi ces individus peu fréquentables, le vice-président de la Métro (communauté d’agglomération Grenoble Alpes Métropole, hautement responsable du projet de grand stade / destruction du parc Mistral, voir http://www.la-metro.org) s’est pointé et s’est fait très vite alpagué par une femme qui l’a reconnu et insulté copieusement. Suivie par d’autres manifestant-e-s le huant et lui proposant vivement de se casser, celui-ci est parti vite fait. Ce que n’eut pas la décence de faire tout de suite Alain Pilaud, délégué aux sports à la mairie de Grenoble. Celui-ci s’est fait insulter dans un premier temps, puis une course-poursuite s’est engagée car des manifestant-e-s voulaient le remercier pour ses projets... Il s’est réfugié avec ses associés, au pas de course (sportif, le bonhomme...), jusque dans la mairie.

Par ailleurs, un certain D’Enquin, membre du cabinet du maire, se serait fait taper dessus par des personnes ulcérées par les événements récents (devant les caméras qui plus est... info à confirmer cependant). Un peu plus tôt, une personne a été obligée de faire recours à la protection de plus d’une douzaine de CRS pour quitter le parc Mistral, face au mécontentement des manifestant-e-s (impossible de savoir qui était vraiment cette personne, un chef des flics ou un élu ? en tout cas il en a pris pour son grade puisque de nombreux CRS ont alors du délaisser les palissades un court moment pour protéger ce monsieur).

A côté de ces quelques altercations peu douloureuses, signalons que les violences policières ont émaillé ces trois jours d’état de siège de façon relativement constante, avec de nombreux coups de matraque au corps et quelques arcades sourcilières explosées... Et ce jeudi, trois jeunes se sont fait démolir par des travailleurs (des vigiles ?) du chantier du stade et sont actuellement à l’hôpital !

Les illusions perdues envers la démocratie et nos bons politiciens se sont faites plus que ressentir. Pourtant, le manque d’organisation des manifestant-e-s hors du périmètre de sécurité s’est également fait cruellement ressentir. Beaucoup se sentaient désemparé-e-s face à la machine policière et étatique et nous avons de bonnes raisons de l’être mais aussi de dépasser cet état de fait. Multiplions les expériences autonomes d’auto-organisation, les expérimentations de fonctionnement autogéré, sans chef ni suiveur-e-s !

Peu avant 14h, les occupant-e-s des arbres ont fini par être tou-te-s expulsé-e-s, sans aucune mise en détention/garde-à-vue parmi eux-elles, après avoir toutefois subi un contrôle d’identité et été photographié-e-s par la police.

La colère était encore très présente sur le parc, et un slogan prenait le relais : "Le stade n’est pas construit, la lutte n’est pas finie !".

A bon-ne entendeur-euse...

Grenoble, le 12 février à 17h30, un simple anarchiste

PS : Désolé pour le côté très factuel de ce texte, mais les mass médias (du Dauphiné Libéré à TF1 en passant par France 3 édition régionale et tous les médias commerciaux) ont déversé des tonnes de mensonges sur l’occupation du parc et en particulier ces derniers jours. De plus, on a pu lire quelques approximations dommageables sur Indymedia-Paris quant à cette fameuse intervention du GIGN (ou GIPN), ce serait pas mal que les médias indépendants réussissent à sortir du "sensationnel", mais il s’agit là d’un autre débat.

*Michel Destot est l’actuel maire PS de la ville de Grenoble, Alain Carignon a été maire RPR de Grenoble il y a quelques années et est probablement le futur candidat de la droite aux prochaines élections régionales.


Objet rapport du parc

De Richeboule

Date Mer 11 Février 2004 08:23

Richboule au rapport, les yeux piquants et mort de fatigue.

Hier mardi, nous avons subi les charges des forces de l’ordre (quel ordre, d’ailleurs ?) et j’ai vu devant moi Suzanne, 84 ans, traînée comme un sac d’excrément sur une dizaine de mètres. J’ai vu des enfants pleurer de lacrymos, des dames de la cinquantaine se faire bastonner et le parc Mistral sous juridiction Destot (maire Parti qui n’a de Socialiste que la rose) coupé par une palissade qui lui donne un teint de Palestine. Les charges injustifiées, les CRS provocateurs mais désordonnés au possible, rapidement : on a fait 3 trous dans le mur en faisant bélier dessus / on a fait faire de l’exercice aux CRS bedonnants / on a ravitaillé plus ou moins facilement les copains-copines dans les branches (ils sont environ 30 encore là-haut) / il y a eu qq annonces en ville / on a hué les RG repérés dans la foule (dt le grand connard avec son chapeau Stetson) / on a houspillé M. Jean-Christophe Sarrazin, rédacteur des articles réactionnaires suintant la colique des jours tristes dans le Dauphiné Libéré, élu organe de presse le plus rétrograde de la zone..

bref, je suis cuit faut que je dorme, continuons la lutte, pas pour le parc, mais pour la conscience politique alternative qui naît chez les milliers de gens qui passent constater les affres de l’état policier que les urnes nous ont décerné. On peut se balader de loin sans risque et prendre des photos ou filmer sans aucun danger, même avec des mômes). Mais si on veut forcir l’existence, si vous vous faîtes embarquer par les bleus, ne déclarez que votre nom, adresse et source de revenu, rien d’autre ; emportez pour le parc du liquide physio pour les yeux, du citron ou du vinaigre pour les écharpes, un mélange eau-talc (recette du Richboule) pour la face, ça absorbe les lacrymos, une pièce d’identité et 5 euros en poche (ils vous commettent d’office un casse dalle infâme à 3 euros au commissariat). L’objectif n’étant bien sûr de ne pas se faire ramasser, de ne pas attiser la violence, mais de défendre nos droits élémentaires et nous réapproprier ce monde déliquescent. Les lieux publics nous appartiennent

Je vais me coucher peut être que le lendemain sera chantant...



UNE PETITE ANALYSE DES COMMUNIQUÉS DES AUTORITÉS GRENOBLOISES PENDANT L’OCCUPATION DU PARC MISTRAL

Médias et autorités politiques font bon ménage, et notamment lors de conflits sociaux. Les autorités ont les moyens de salarier des professionnel-le-s de la communication, qui savent adapter leurs discours aux exigences spectaculaires des médias. Et les médias, eux, répondent présent, puisqu’ils reproduisent souvent de longs extraits de ces discours, à l’intérieur même des articles, offrant ainsi une vaste tribune aux dirigeant-e-s, positivement connotée par cette vaste fumisterie qu’est l’objectivité journalistique. A côté, les paroles des contestataires, souvent recueillies sur le vif, sont retranscrites dans un style oral, en phrases courtes voire en simples slogans, ce qui leur confère beaucoup moins de crédibilité...

Le texte qui suit essaie de faire l’inventaire des arguments et des procédés rhétoriques utilisés dans les médias par les autorités dans une situation de ce genre. En l’occurrence, le contexte est celui de l’occupation du parc Mistral, à Grenoble l’hiver 2003-2004, en opposition à un projet de stade qui doit y être construit. Nous avons tenté de décortiquer brièvement les communiqués et les propos de MD, maire de Grenoble, et de DM, président de la communauté de communes (Metro), parus dans le journal local, le DL. Le but n’est pas d’étudier l’ensemble de la propagande des autorités, qui utilisa aussi d’autres supports (plaquettes distribuées dans les boîte aux lettres, affiches publicitaires...), ni de recenser la totalité des méthodes d’influence de l’opinion publique par le DL, qui prirent également d’autres formes (iconographiques, stylistiques, etc. etc.).Le texte se restreint à l’observation de la rencontre et de l’alliance entre la communication politique officielle et la communication médiatique, qui à plusieurs égards utilisent des techniques très proches. Il est découpé suivant les différents arguments et thèmes avancés par les autorités.

EXTRéMISTES,

fanatiques, intégristes, jusqu’au-boutistes, radicaux...

Il y a "Ceux qui jouent avec le feu, poussent un certain nombre de personnes à l’intégrisme et au fanatisme, et je pense que ce n’est pas souhaitable dans une démocratie" DM 7/02

"Nous regrettons le caractère radical de la réponse négative qui nous a été apportée (exigence d’arrêt total du chantier), qui témoigne d’une forme de jusqu’au-boutisme assez inquiétante" DM, MD, 12/02

"Extrémiste" a toujours été un mot-magique, pratique pour discréditer les opposant-e-s ou les marginaux/ales de tout poil. Le principe du mot-magique, c’est qu’il a une connotation très forte et très consensuelle : il suffit de le placer

quelque part dans un discours pour provoquer le sentiment espéré (adhésion, réprobation...) chez le public. Très utilisé en communication et dans les médias, il permet d’être économique, rapide et "efficace" dans l’argumentation ; en réalité il court-circuite l’argumentation. En traitant certaines personnes d’extrémistes, DM et MD ne prennent pas le temps d’expliquer les raisons de leur désaccord, ils se contentent d’invalider les propos de leurs adversaires, par un qualificatif commode et sans appel. On n’est plus sur le terrain du débat, ce qui n’est pas très étonnant dans les médias, ni dans un communiqué de presse, dont le but est de correspondre aux logiques des médias, pour être sûr d’y être reproduit.

"Extrémiste", "extrémiste"... Mais par rapport à qui, à quoi ? Où définit-on le point d’équilibre à partir duquel certain-e-s seront "modéré-e-s" et d’autres "extrémistes" ? Qui le définit, avec quel système de valeurs ? D’après mon échelle de valeurs, DM et MD, et peut-être même cette fameuse "majorité" des français-es, sont extrémistes. Une société qui file à toute vitesse vers la croissance économique (rebaptisée "développement durable"), la rentabilité, une culture du spectacle et de la consommation, est pour moi une société extrémiste, qui court à sa perte, détruit la planète et généralise la misère, qu’elle soit matérielle, sentimentale ou existentielle. De quel droit mon acception des extrêmes serait moins valable que celle de DM et MD ?

Tout ça pour dire qu’après tout, l’argument des extrêmes n’est pas un argument, qu’il ne sert à rien, pas même, à mon avis, dans les discours dits "de gauche". Il fait trop facilement l’économie d’un débat plus profond, sur les choix de valeurs et de société qui nous animent. Il présuppose l’existence pour tou-te-s d’un avis conforme et généralisé (l’envers des extrêmes), une "opinion publique", un consensus mou, qui peut me faire aussi peur que les "extrêmes" dont on me parle. Quand je trouve certaines positions graves, je préfère expliquer directement pourquoi, plutôt que d’en passer par un adjectif trop court et trop confortable.

Quant aux termes "intégristes", "fanatiques", "jusqu’au boutistes", ils laissent à penser que les personnes visées sont aveuglées par un dogme qu’elles reproduisent mécaniquement, sans réfléchir. D’autres mots-magiques qui permettent toutes sortes d’amalgames, et qui épargnent l’effort d’aller entendre et comprendre les raisons des opposant-e-s. Comment se fait-il que des gens tiennent tant à certains idéaux, dépensent tant d’énergie et posent tant d’actes pour les défendre ? C’est qu’ils doivent être fanatiques. Mais la "justice", elle, qui dispose de moyens démesurés, qui n’hésite pas à frapper, réprimer, enfermer, non, elle n’est pas fanatique, elle est neutre, c’est ça ? Encore une fois, remettons en question ce genre de termes et essayons de voir à partir de quelle échelle de valeurs on les formule.

VIOLENT-E-S

"le climat de violence qui a été entretenu" DM, 13/02"Un certain nombre de limites ont été franchies, et pas de notre fait" DM, 13/02

Alors, faisons le point. Une longue lutte d’une association de riverain-e-s, puis une lutte quotidienne de plusieurs dizaines de personnes durant trois mois, qui occupent les arbres et qui rencontrent un large soutien dans la population, n’est pas entendue ni n’obtient la moindre once de modification dans le projet initial des dirigeant-e-s. Un matin à six heures, un déploiement massif d’hommes casqués et armés fait place nette autour des arbres occupés. Des barrières sont installées et solidement gardées, elles marquent une frontière infranchissable entre la population et les occupant-e-s des arbres. Au moindre prétexte, les forces de la répression matraquent toutes les personnes qui ont le malheur d’être en première ligne, plusieurs sont blessées. Des gaz lacrymogènes sont lâchés à plusieurs reprises, sans manquer de toucher de simples badauds. Qui entretient le "climat de violence" ?

Il est important de remettre en cause l’image de "provocateurs" que les dirigeant-e-s aiment à donner de certain-e-s manifestant-e-s pour justifier la répression. Dans le discours dominant, la police est neutre et elle répond machinalement, "parce qu’il le faut" ("elle fait son travail"), aux provocations de certain-e-s excité-e-s : les choses ne sont pas aussi simples. Les gens qui sont allés au parc Mistral durant les trois jours d’expulsion l’auront vu de leurs propres yeux : si les CRS entretiennent une image effectivement froide et robotique, ils ne se gênent pas, à divers moments, pour jouer de leur rôle et de leur toute-puissance, titiller les manifestant-e-s, vociférer, insulter, faire ostensiblement du délit de faciès. Leur seuil d’appréciation de la "provocation", qui entraînera leur réponse musclée, peut varier et peut être très bas aux moments voulus. Et surtout, on ne réalise pas assez combien l’ordre des choses, à la base, peut être une véritable provocation, bien plus violente que les accès d’émotion qu’elle peut susciter chez les manifestant-e-s, parfois nombreux/ses mais bien démuni-e-s face aux forces organisées et équipées de la répression.

DéFENDRE LA POLICE

"Si la police est intervenue, c’est parce que des infractions ont été commises" DM, 7/02

"Nous avons demandé au Préfet de l’Isère d’assurer la sécurisation de l’espace de chantier pour permettre aux entreprises de reprendre le travail pour lequel elles ont été mandatées." DM, MD, 11/02

Les autorités utilisent divers procédés de communication pour faire passer la pilule de leur usage de la "violence légitime". Elles commencent bien sûr, comme on l’a vu, par rejeter sur les manifestant-e-s l’entière responsabilité des actes de répression. Elles décrivent par ailleurs les opérations de police avec force euphémismes : on "sécurise" l’espace de chantier — tandis qu’on l’évacue, le barricade, le garde à grands renforts de vigiles, chiens et CRS ; la police "intervient" — quand elle frappe et envoie des gens à l’hôpital.

DM et MD saluent tous deux "le professionnalisme des policiers du GIPN"... satisfaits que l’opération "se soit passée sans aucune violence". 13/02

"L’évacuation des occupants du chantier du stade (...) s’est déroulée dans le calme, sans aucune violence." MI, 13/02

Intéressantes déclarations, faites le dernier jour d’expulsion des arbres, qui par un formidable tour de passe-passe, éludent complètement les gazages et matraquages des jours précédents, en braquant les projecteurs sur la toute dernière évacuation des accro-branchistes (effectivement calme).

"Nous saluons le sang-froid et le professionnalisme des autorités et les forces de police qui ont pu ainsi faire appliquer les décisions de justice" M. Issindou 13/02

Parmi les quelques phrases que les politicien-ne-s mettent en avant dans leurs discours aux médias, dans des moments de fortes tensions sociales, se faufile toujours une ode à la police... Surprenant, non ? Quelle est la fonction de cette phrase, à qui s’adresse-t-elle, à quoi sert-elle ? Surprenant, d’autant plus que son auteur, M. Issindou, n’est pas membre d’un parti conservateur, mais du PASC : Pour une Agglomération Sociale et Citoyenne...

UNE MINORITé

étrangère, politisée et manipulée

"Une minorité agissante, radicalisée et politisée, ne peut empêcher la mise en oeuvre de décisions démocratiques validées par la justice." DM, MD, 11/02

A une époque pas si lointaine, les politicien-ne-s "de gauche" et autres théoricien-ne-s en vogue déploraient la dépolitisation des "jeunes", leur apathie, leur repli sur la sphère individuelle et consommatrice, leur manque d’intérêt pour les questions de société. Aujourd’hui, les choses ont changé, n’est-ce pas, et les menaces pour la "démocratie" viennent bien des personnes "politisées", et non de celles qui boivent passivement les décisions des élu-e-s... Etonnant revirement de discours.

Un discours qui navigue également sur la fantasmagorie du complot, qu’il ne faut pas réserver à l’extrême-droite : il faut s’attendre à la retrouver à divers moments, diffuse et sous différentes formes, comme une déclinaison de la peur de l’autre. Ne nous étonnons donc pas d’observer, chez celles et ceux qui ont pour métier de gagner la confiance du peuple, des phrases comme :

"Un certain nombre de personnes qui sont dans les arbres ignore tout du projet d’agrandissement du parc, d’autant plus qu’ils ne connaissent pas notre agglomération" DM 7/02

Il y a deux catégories, "celle des opposants mais seulement au stade, avec sans doute des raisons très sincères, mais pas franchement contre la politique globale de la Métro au sujet des transports publics ou du logement social, par exemple." Mais on constate "chez d’autres une opposition totale contre toute décision démocratique. Et l’on devine bien d’où cela vient." DM, MD, 10/02

"On devine bien d’où cela vient"... A plusieurs reprises, DM et MD ont présenté les opposant-e-s au stade comme les marionnettes de "formations politiques" qu’ils accusaient à mots couverts de ne chercher, derrière toute cette histoire, qu’un prétexte pour affaiblir politiquement la municipalité... Or, plusieurs occupant-e-s du parc ont souvent très nettement marqué les distances avec les partis qui ont effectivement tenté de récupérer le mouvement, au point même de tomber dans des confusions un peu regrettables à mon goût, où "être autonome vis-à-vis des partis politiques" est exprimé comme "être apolitique".

Quoi qu’il en soit, et même si des partis ont pu essayer de jouer de la naïveté des occupant-e-s des arbres, il est intéressant de relever combien DM et MD ont pu insister sur cette image simplificatrice de militant-e-s manipulé-e-s par des méchant-e-s haut-placé-e-s... Et de militant-e-s étranger-e-s qui plus est : le "ils ne connaissent pas notre agglomération" ressemble fort au "ils ne sont même pas de Grenoble" qui circulait plus crûment parmi les pro-stade, ou au "vous n’êtes pas de Saint-Martin-d’Hères" que la mairie communiste pouvait répéter aux squatteurs/euses de la Charade pour justifier leur refus de tout dialogue. Depuis combien de temps faut-il résider dans un territoire pour avoir le droit de s’intéresser aux problématiques politiques locales ? Faut-il y être né-e ? Un-e immigré-e qui veut prendre position dans des enjeux de société doit-ille se contenter de suivre la vie politique internationale ? Ou celle de son territoire d’origine ?

LES BON-NE-S ET LES MAUVAIS-ES MANIFESTANT-E-S

"Il y a des gens très sincères et d’autres avec des démarches politiques" DM, 29/01

Il fait le distinguo entre "des jeunes sûrement sincères dans leur démarche" et ceux qui ont fait "preuve de beaucoup trop de fanatisme aveugle". DM 13/02

Voilà quelques propos dans la droite ligne des fameuses "deux catégories" évoquées dans une citation précédente... C’est l’occasion de replacer l’événement dans un contexte global (ce que les médias s’abstiennent bien de faire), d’aller chercher en d’autres lieux et en d’autres temps, dans des situations similaires, ce qui a pu se dire. Nous nous apercevrons que la problématique de l’événement dépasse de loin le cadre grenoblo-grenoblois, et qu’elle touche aux fonctionnements de la société dans son ensemble.

Que fait l’autorité face à un mouvement social qui la conteste ? Elle trie. Elle désigne les bon-ne-s contestataires et les mauvais-es. Les bon-ne-s sont évidemment les plus disposé-e-s à l’entendre et à négocier avec elle : elle les qualifie de "raisonnables". Les mauvais-es sont celles et ceux qui lui échappent le plus. Les bon-ne-s l’arrangent doublement : d’une part illes restent sur un terrain connu de l’autorité, illes sont plus transparent-e-s et possiblement plus contrôlables, d’autre part illes garantissent la légitimité "démocratique" de l’autorité, en assumant le rôle socialement conforme "d’aiguillon du pouvoir", qui conteste (prouvant qu’il existe une "liberté d’expression") et qui signe des accords (donnant à l’autorité l’opportunité de montrer qu’elle est à l’écoute des revendications et qu’elle évolue - même si c’est d’un pas en avant, puis trois en arrière).

Distinguer les "bon-ne-s" des "mauvais-es" est donc une stratégie classique pour l’autorité, utile en termes d’image comme d’efficacité répressive. Un survol de l’histoire des luttes sociales donnera une profusion d’exemples. Face aux mouvements de grève, aux contre-sommets, aux mouvements de squat, l’autorité s’empresse de déclarer et d’insister sur une pseudo-différenciation en deux camps bien tranchés, ni plus ni moins, des contestataires, alors qu’en réalité les choses sont toujours beaucoup plus complexes.

"Cette succession d’actes illégaux marque le caractère radical de certaines oppositions, bien éloignées des règles démocratiques et républicaines. (...) Nous attendons des responsables associatifs qu’ils condamnent les actions illégales de militants radicaux." DM, MD, 07/01

Cette citation est particulièrement éloquente. En distinguant les "bon-ne-s" manifestant-e-s des "mauvais-es" (ici, les "radicaux" "illégaux", deux termes que l’on répète), les dirigeant-e-s essayent également d’attiser des conflits et des divisions à l’intérieur des mouvements de contestation. Incapables d’imaginer une structure égalitaire, illes cherchent les chef-fe-s (ici, les "responsables associatifs") et tentent d’en faire les relais de leur autorité, économisant ainsi un affrontement direct. Les leadeurs/euses des mouvements sociaux sont des cibles de manipulation parmi d’autres, ligoté-e-s comme illes le sont souvent par la crédibilité qu’illes essayent de se donner face aux médias et aux décideurs/euses. Dans l’histoire récente, l’exemple le plus évident est celui d’ATTAC, organisation "citoyenne" et vénérable, qui à Gênes jouera parfaitement le jeu des autorités en condamnant, surveillant, réprimant toute tentative d’action directe, assimilant les black blocs à de simples "casseurs" et participant ainsi aux amalgames réducteurs lancés par le pouvoir, alors que dans d’autres pays, les manifestant-e-s qui choisissent différentes formes d’action peuvent se comprendre, être solidaires, coopérer et se protéger mutuellement.

HIERARCHIE DES LUTTES

Il appelle à "hiérarchiser les problèmes de la vie", "l’essentiel aujourd’hui pour tous les Grenoblois, ce ne sont pas les incidents autour du stade, c’est l’emploi, le logement, la santé publique". MD, 13/02

"Je regrette qu’on mette autant de violence verbale, parfois de violence tout court, de fanatisme dans ce dossier. Il faut replacer les choses dans leur juste proportion, il y a beaucoup de choses plus graves qui se passent en France et dans le monde et qui peuvent mobiliser les énergies" DM, 13/02

Autant de tournures élégantes pour dire ce que dit Romain, supporter du GF 38, le 9/01 au DL : "s’ils veulent sauver les arbres, ils n’ont qu’à aller en Amazonie !". Certes il convient de garder un recul et une compréhension globale des problèmes du monde. Mais la tentation de la hiérarchisation des luttes mène trop souvent à des écueils dénoncés notamment par les critiques féministes : sauver le Tiers-monde, par exemple, nous paraîtra prioritaire au point de justifier notre manque d’attention et de réaction face à ce que nous pouvons reproduire ici et maintenant, dans nos comportements et dans notre entourage, comme oppressions et dominations... Alors qu’une vision globale des choses nous encouragerait elle-même à mettre en lien nos critiques macro-sociales et nos actes quotidiens.

Qui cause la ruine des pays du Sud ? Pourquoi raye-t-on l’Amazonie de la carte ? D’où viennent les problèmes de logement, de précarité ? D’un système économique et moral profondément inégalitaire, où règne le profit, l’exploitation des un-e-s et l’abrutissement des autres, une culture de la hiérarchie, de la consommation, de la compétition. Reconnaître la racine des problèmes sociaux, c’est aussi repérer leurs liens, leurs inter-connections, et comprendre que si les enfants chinois-es sont asservi-e-s pour produire des ballons de foot, c’est aussi que j’en achète ici, qu’en parallèle tout est fait pour que le marché du foot fleurisse dans les pays riches, c’est comprendre que leurs employeurs sont les meilleurs amis des pontes pour lesquels mes proches ont voté.

Quelles logiques président à la construction d’un stade dans le Parc Mistral ? Les mêmes qui causent des ravages dans nombre de recoins de la planète : spectaculaires et marchandes. Le stade Mistral, c’est remplacer un espace public et gratuit par un espace privé et payant, c’est promouvoir le sport-spectacle, ses enjeux financiers et ses cultures identitaires et guerrières, c’est dépenser une tonne d’argent public dans un ouvrage "de prestige", dans une image de ville attractive pour les investisseurs/euses... Ce sont ces logiques, au fond, qui me révoltent, et elles me révoltent autant quand elles écrasent frontalement les plus défavorisé-e-s que quand elles se rappellent à moi tous les jours, à une rue de chez moi, chaque matin quand je prends mon vélo et que je longe le chantier du parc, malgré tout le camouflage publicitaire et reluisant que l’on peut vouloir donner à un équipement "de loisirs".

Quand un politicien me dit d’aller voir ailleurs la misère du monde, je lui réponds qu’il ne s’en tirera pas aussi facilement, et que les raisons qui me pousseraient à aller lutter ailleurs sont les mêmes qui m’encouragent à rester vigilant ici.

IRRESPONSABLES

"Avec ce projet de stade, nous nous inscrivons dans le développement durable avec cohérence" dit MD dans le DL du 29/01, avant de s’expliquer, en une seule et maigre phrase, par l’évocation des futures lignes de transports en commun qui desserviront le stade. "C’est une raison de fond, ce n’est pas un problème de "on aime ou on aime pas"."

Il s’agit d’une "opposition que l’on rencontre chaque fois qu’il y a une insertion urbaine dans cette ville" (Nef-Chavant, rues piétonnes, Verdun) MD, 13/02

A plusieurs reprises, les dirigeant-e-s relativiseront le discours des opposant-e-s en les présentant comme une populace irresponsable, égoïste, capricieuse, réactionnaire, pleurnicheuse. Comment peut-on oser qualifier l’engagement de dizaines et de centaines de personnes, sur plusieurs mois, comme "un problème de on aime ou on aime pas" ? C’est se prendre pour la seule élite éclairée, détentrice du souci du bien commun, et c’est prouver qu’on n’a pas même cherché à comprendre les "raisons de fond" de la lutte au parc Mistral. Etait-ce trop inconfortable, pour cette pauvre élite, de seulement envisager leur existence ?

"Il serait souhaitable qu’à l’avenir, les débats démocratiques et les décisions qui en découlent l’emportent sur l’agitation politicienne..." MI 13/02

Cette belle phrase prête le flanc à un facile retour à l’envoyeur... Il serait effectivement souhaitable, à l’avenir, que des débats véritablement démocratiques l’emportent sur l’agitation typiquement politicienne qui a vu DM, MD et leurs acolytes faire des pieds et des mains pour s’agripper à leur projet de stade. On s’aperçoit encore une fois que la communication des autorités n’est qu’une succession de grands mots, d’effets de style, efficaces en surface mais bien inconsistants.

"Il faut que tous ceux qui ont été opposants acceptent cette décision [de justice] dans un esprit citoyen, de responsabilité." MD 29/01

La rhétorique citoyenne, vous disiez, conforme au pouvoir et récupérée par lui ?

DéMOCRATIE

"Le dernier mot a été donné à la démocratie" DM, MD, 13/02

En voici un autre, de mot-magique : la fameuse "démocratie", que chacun-e invoque pour justifier sa position. Les dirigeant-e-s disent défendre la démocratie, leurs opposant-e-s aussi. C’est qu’il doit y avoir une confusion quelque part...

"Il n’y a pas de raison que nous revenions sur cette décision qui a été prise dans des conditions de légalité et de concertation qui ne méritent pas ce que l’on peut entendre" DM 7/02

Au contraire, le terme de "concertation" mériterait des flots de paroles et d’encre, tant la municipalité l’emploie de manière hypocrite. Rendez-vous à une réunion de "concertation" publique à laquelle la ville de Grenoble invite tout-e habitant-e de tel ou tel quartier, pour tel ou tel projet d’urbanisme, vous verrez que l’on ne vous y concertera en rien, mais que l’on vous présentera le projet. C’est tout. A la rigueur on écoutera vos remarques, mais au fil de vos questions on vous fera comprendre que les expert-e-s ont déjà pensé à tout, et que les idées des non-expert-e-s sont toujours compliquées et irréalisables. A la rigueur vous pourrez donner votre avis sur la couleur des façades. Ce que la mairie appelle "réunions de concertation publique" n’est autre qu’une opération de promotion de ses projets, agrémentée d’une sauce citoyenne.

"Un projet normalement adopté et validé par des élus du peuple, à travers une bonne soixantaine de délibérations" DL 9/02

"Nous avons largement pris le temps du débat, de l’échange. Les assemblées concernées ont de nouveau délibéré pour confirmer leur accord au projet." DM, MD, 11/02

Voici un premier indice de ce que les dirigeant-e-s appellent démocratie : il s’agit bien de la démocratie représentative, et seulement elle. La "délibération" des "élu-e-s du peuple" et de leurs "assemblées" suffit comme critère de démocratie, de "débat", "d’échange". "La démocratie, c’est nous", insinuent les élu-e-s, comme toujours imbu-e-s de leur prétendue représentativité, incapables de penser qu’un misérable vote tous les cinq ans, sur un programme en papier glacé ridiculement court et sur leurs talents d’orateurs/trices charismatiques, ne les investit certainement pas de la légitimité sacrée qu’illes clament en toute circonstance.

"Pour ce qui est de la démocratie, le rejet par le tribunal administratif des requêtes en référé déposées contre le permis de construire du stade d’agglomération permet de mettre les points sur les "i"." MD, 29/01

"Une minorité agissante, radicalisée et politisée, ne peut empêcher la mise en oeuvre de décisions démocratiques validées par la justice." DM, MD, 11/02

Voici le deuxième élément qui définit la démocratie des dirigeant-e-s : la Justice, institution au nom trompeur, très fortement connoté. La Justice est l’ensemble des règles que certain-e-s spécialistes écrivent, et que d’autres spécialistes votent, pour régir la vie sociale ; la Justice n’est pas forcément juste, elle n’est jamais aussi impartiale que son égérie aux yeux bandés. Elle est issue d’un certain système social, avec un certain système de valeurs, et elle est mise en place par un certain type de personnes, qui ne sont pas arrivées par hasard à flirter avec le pouvoir. Elle est loin du principe neutre et purement démocratique qu’on veut faire voir en elle.

"Certains opposants continuent de refuser les règles qui régissent notre démocratie."DM, MD, 11/02

Nous y sommes ! Le fond de la question est bien là, au-delà de l’orme, du gingko ou de l’orientation du stade : c’est la question des règles de notre société, celles qui permettent à des politicien-ne-s et à leurs allié-e-s économiques de dessiner l’avenir d’une ville et de réprimer sans inquiétudes les protestations de la population. Cette démocratie et ses règles nous satisfont-elles ? Quelle démocratie voulons-nous ? Représentative, participative, directe ? Voilà une problématique sous-jacente à toutes les empoignades médiatiques autour du mot-magique "démocratie", essentielle et pourtant jamais clairement posée.


POUR CONCLURE CETTE BROCHURE ...

On peut penser que désormais les politicien-nes grenoblois y réfléchiront à deux fois avant de prendre de grandes décisions sur la ville quand il y a un désaccord d’une grande partie de la population. Et effectivement, le récent recul de la municipalité sur le projet qui vise à transformer la montagne de la Bastille libre et gratuite en un parc d’attraction payant et surveillé est certainement une victoire qui découle de la lutte du parc. Le comble du burlesque est que le Tribunal Administratif vient de juger un énième recours d’opposition au chantier et de faire annuler le permis de construire, ce qui met une halte temporaire (et peut-être longue) au travaux du grand stade alors que le parc a déjà été transformé en champ de bataille. Par ailleurs, en pleine vague rose aux régionales et alors que tout au long de la lutte, beaucoup de gens de « gauche » nous accusaient de faire le jeu de la droite en nous opposant à un projet du PS, ce sont en fait, cas unique en France, les verts (seul parti de gauche à s’être opposé de manière un tant soit peu conséquente au stade) qui ont été élu dans le canton du centre-ville tenu par un élu PS. C’est pas qu’on croit aux élections, mais cela fait toujours plaisir de couler les politicien-ne-s au pouvoir ! Ce type de campement d’action permanent pour protéger un site ou empêcher un grand projet, et notamment l’utilisation d’un village aérien, a encore relativement peu été expérimenté en france. La lutte du parc mistral a donc pu créer un précieux terrain d’apprentissage et d’échanges. Ceci dans un contexte où des campements d’actions de ce type, qui ont pu aider à créer des rapports de force conséquent au cours de la dernière décennie dans d’autres pays européens (en Angleterre quelques centaines de projets de construction routière et de destruction de sites ont dû être abandonné dans les années 90 suite à un mouvement massif et déterminé), pourraient être envisagés pour empêcher la construction de nouvelles prisons, centre de rétention, supermarchés, routes et autres centrales nucléaires...


POUR EN SAVOIR PLUS SUR LE WEB

DO OR DIE - Voices from the Ecological Resistance

Des articles sur la résistance écologique et des actions directes en Angleterre et ailleurs publiés une fois par an par Earth First ! sous forme de livres et consultable sur leur site web

Le site des ÉCOCITOYEN-NES de Grenoble

Un site
où on peut trouver des infos à propos de l’occupation d’une forêt à FERNAY VOLTAIRE (contre l’extension de l’aéroport de genève)

Quelques liens à propos de l’occupation du parc Paul Mistral sur SQUAT.NET ! :

L’historique + brève présentation des raisons politiques de l’occupation du parc Mistral

Actualité de la lutte sur le parc (fin janvier 2004)

Tentative d’expulsion du parc et violences policières (le 2 février 2004)

Court appel à mobilisation (les 8 et 9 février 2004) et un deuxième

Bref récit de la journée de mardi (10 février 2004)

Pour plus d’infos sur le contexte grenoblois :

- Pièces et main d’oeuvre
- Nébuleuse
- Grenoble.squat.net



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