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500 ans de résistance autochtone

mis en ligne le 5 février 2022 - Gord Hill


OH-TOH-KIN - Publication For/Of Native Peoples Resistance, Vancouver, British Columbia, Canada, first issue, 1992.

INTRODUCTION

Au cours de l’année 1992, les nombreux États qui ont su tirer profit de la colonisation des Amériques seront marqués par des célébrations grandioses de la « Découverte de l’Amérique ». L’Espagne a dépensé des millions de dollars pour ces célébrations en conjonction avec Expo ’92 à Séville. À Colombus, en Ohio, on a investi 100 million $ dans les fêtes du cinquième centenaire pour le divertissement des quelques millions de touristes. Le CELAM, l’Association des Évêques Catholiques d’Amérique du Sud, a organisé un rassemblement pour la célébration du« cinquième centenaire de l’évangélisation des Amériques » qui sera présidée par le pape. Il y a aussi une multitude d’expositions dans les musées, de films, de programmes télévisés, de livres, de produits et d’activités portant sur Colomb et la « Découverte ». Tous présentent une interprétation des 500 années écoulées depuis 1492. L’idée principale de cette interprétation est que le processus de colonisation - un processus de génocide - fut après tout, malgré quelques « embûches », un processus mutuellement profitable. « L’ampleur » des religions et des cultures européennes a été portée au- devant des autochtones. Celles-ci et ceux-ci ont, en retour, partagé les terres et après coup, ont fait « accidentellement » connaissance avec les maladies européennes desquelles elles et ils sont mort(e)s. Leurs descendant(e)s s’entassent aujourd’hui dans les ghettos des villes et deviennent alcooliques ou profitent de l’assistance sociale. Bien sûr, quelques vestiges de la culture amérindienne ont été sauvegardés. Il y a même quelques politicien(ne)s « professionnel(le)s » de souche autochtone qui rôdent toujours.


500 Years of Resistance, Gord Hill.

Ce n’était non pas une « Découverte », mais plutôt un holocauste des Indien(ne)s d’Amérique !

Jusqu’à tout récemment, le taux de population généralement reconnu des peuples autochtones à la veille de 1492 se situait autour de 10 à 15 millions. Ce chiffre est toujours reconnu par les individu(e)s et les groupes qui voient en 1492 la « Découverte » au cours de laquelle quelques millions d’amérindien(ne)s seulement y ont laissé leur peau - la plupart à cause des maladies. Des données démographiques récentes dénombrent un taux de population autochtone se situant entre 70 et 100 millions de personnes dont environ 10 millions en Amérique du Nord, 30 millions en Amérique Centrale et entre 50 et 70 millions en Amérique du Sud.

Aujourd’hui, malgré 500 ans d’une colonisation génocide, il existe toujours environ 40 millions de descendant(e)s autochtones en Amérique. Au Guatemala, les descendant(e)s Mayas forment 60.3% de la population et en Bolivie, les descendant(e)s autochtones composent 70% de la population totale. Malgré cela, ces personnes indigènes n’ont aucun droit sur leurs propres terres et font partie de la tranche de la population la plus exploitée et la plus défavorisée. On retrouve ces mêmes caractéristiques dans d’autres populations autochtones des États colonisateurs de l’Amérique (et à travers le monde).

LE MONDE DE L’AVANT-COLOMB

« Préhistorique » ou « précolombienne » est cette époque à laquelle réfèrent les spécialistes lorsqu’il est question de la période avant la colonisation européenne de l’Amérique. En ces temps-là, l’hémisphère ouest était un territoire densément peuplé. Un territoire avec ses peuples et ses modes de vie aussi diversifiés que n’importe quels autres territoires dans le monde.

Le territoire ne fut pas nommé « Amérique » par ces peuples. S’il y eût référence au territoire en tant que tel, ce fut en tant qu’Île de la Tortue, Cuscatlan ou bien Abya-Yala.

Les Premières Nations occupaient toutes les régions des Amériques. Elles vivaient selon la diversité du territoire et développaient des habitudes culturelles en relation avec leur environnement. Leur population atteignait de 70 à 100 millions d’individu(e)s avant la colonisation européenne.

De façon générale, les centaines de nations différentes se regroupaient dans les mêmes régions géographiques. Dans ces régions, la standardisation des cultures est en fait une évolution naturelle des gens qui se bâtissent des modes de vie en fonction du territoire. Ainsi, de fréquentes interactions et interrelations existaient entre les individu(e)s de ces régions. Elles se reconnaissaient toutes les unes et les autres en tant que nations.

Dans les régions arctiques habitaient (et habitent toujours) les Inuit et les Aléoutiens. Leurs modes de vie tournaient autour de la chasse aux mammifères marins (bélugas, morses, etc.) et aux caribous à laquelle on ajoute la pêche et les échanges avec les gens du sud.

Au sud de l’arctique, dans la région sub-arctique aujourd’hui nommée Alaska, Territoires du Nord-Ouest et les régions du nord des provinces canadiennes, demeuraient des gens vivant de chasse et de pêche. Le paysage de la région possédait une grande diversité passant de la vaste toundra à la forêt, aux lacs, aux rivières et aux ruisseaux. Les Cris, les Chipewuans, les Kaskas, les Chilcotins, les Ingalik les Beothuk et beaucoup d’autres nations habitaient (et habitent) cette région. Ils chassaient l’ours, le bouc et le chevreuil dans l’ouest, le boeuf musqué et le caribou plus au nord, ou le bison dans les prairies plus au sud.

Dans les régions de l’arctique et du sub-arctique réunis vivaient probablement près de 100 000 personnes.

Le long du nord-ouest des côtes du Pacifique, des côtes de l’Alaska et de la Colombie-Britannique jusqu’au nord de la Californie, vivaient (et vivent toujours) les Tlingites, les Haïdas, les Tsimshians, les Kwa-Kwa- Ka’wakw, les Nuu-chah-nulth, les Nuxalk, les Salish, les Yurok et plusieurs autres. Ces peuples ont développé un mode de vie dont l’activité principale était la pêche. On a dénombré quatre millions d’individu(e)s dans cette région.

Entre les montagnes de la chaîne côtière du Pacifique et les plaines centrales dans ce qui est aujourd’hui connu comme le sud de la Colombie-Britannique, les états de Washington, de l’Oregon, de l’Idaho et du Montana vivaient (et vivent) les Sahaptins (Nez percés), les Chopunnish, les Shoshones, les Siksikas (Pieds Noirs) et plusieurs autres. On pouvait compter environ 200 000 individu(e)s.

À l’est, vivaient les peuples de la plaine. Ils occupaient une vaste région bordée au sud par le Texas, au nord par les régions du sud de l’Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba, à l’est par le Dakota du Nord et du Sud, le Minnesota, le Wisconsin, le Missouri, et l’Arkansas. Dans cette région, les Lakotas (Sioux), les Cheyennes, les Arapahos, les Cris des plaines, les Siksikas (de la confédération des Pieds Noirs en compagnie des Bloods et des Peigans), les Crows, les Kiowas, les Shoshones, les Mandans et plusieurs autres formaient une population d’un million de personnes. On dénombrait aussi environ 80 millions de bisons avant leur massacre par les Européens.

Plus à l’est, dans la région qui s’étend des Grands Lacs aux côtes de l’Atlantique, des peuples vivaient (vivent) de la chasse, de la pêche et de l’agriculture. On y retrouvait les Kanienkehake (Mohawks), les Oneidas, les Onondagas, les Cayuga, les Senecas (ces cinq dernières nations formaient les Haudenosaunee - le Peuple de la Maison Longue (People of the Longhouse) aussi connus en tant que confédération des Iroquois), les Ojibways, les Algonquins, les Micmacs, les Wendats (Hurons), les Potowatomis, les Tuscarora et plusieurs autres. Dans ces régions boisées qui s’étendent de l’Ontario, du Québec et de l’état de New York jusqu’aux Carolines vivaient jusqu’à deux millions d’individu(e)s.

Au sud de cette région, d’une partie des Virginies jusqu’à la Floride et à l’ouest du Golfe du Mexique incluant le Mississippi et la Louisiane vivaient (vivent) les Muskogees - parlant Choctaw, Creek et Chikasaw, les Cherokees, les Natchez, les Tonkawas, les Atakapas et plusieurs autres. Une des régions les plus fertiles au monde où l’agriculture est monnaie courante et complétée par la chasse et la pêche. On pouvait compter entre deux et trois millions d’habitant(e)s.

À l’est de cette région, au sud-ouest des États-Unis, au nord du Mexique et en Californie habitaient (habitent) des peuples agraires et nomades. Ce sont les Pueblos, les Hopis, les Zunis, les Hualapaïs parlant le Yumun, les Mojaves, les Yumas et les Cocopas. Les Pimas et les Papagos parlant uto-aztèque et les Athapascans font parti des peuples Navajos (Dines) et Apaches. Réunis, ces peuples pouvaient compter deux millions d’individu(e)s.

Dans la région de l’amérique centrale comprenant le Mexique, le Guatemala et Belize, de nombreux peuples vivaient (vivent) d’agriculture dont l’aliment principal était le maïs. Ces peuples sont les Aztèques, les Texacocos, les Tlacopans et les Mayas - dans la péninsule du Yucatân. Ils ont érigé de grandes cités avec des bâtiments et des pyramides de pierres et de briques et construit de vastes réseaux agraires de dérivation d’eau impliquant des digues et des canaux. Les langues écrites étaient publiées dans des livres et on s’adonnait à l’étude de l’astronomie et des mathématiques. Un calendrier plus précis que ceux existant en Europe au XVe siècle fut mis au point. Au total, ces peuples comptaient environ 30 à 40 millions d’individu(e)s.

Dans le bassin des Caraïbes incluant les régions côtières de la Colombie, du Venezuela, du Costa Rica, du Honduras et plusieurs petites îles telles que Cuba, Hispaniola, Puerto Rico, etc. vivaient des peuples agraires pratiquant la chasse et la pêche tels que les Caribes, les Arawaks, les Waraos, les Yukpas, les Paujanos et d’autres. Au total, ils étaient environ cinq millions.

Dans toute l’Amérique du sud, il y avait entre 40 et 50 millions d’individu(e)s.

Dans les hautes terres des Andes au Pérou et au Chili, habitaient (habitent) les peuples Incas constitués des Quechuas et des Aymaras. Dans le sud du Chili, on retrouvait (retrouve) les Mapuches et dans les basses terres - incluant la région de l’Amazone, les Yanomamis, les Gavioe, les Txukahame, les Kreens, les Akarore et plusieurs autres. Au sud de la région amazonienne, en Argentine, au Paraguay et en Uruguay, vivaient (vivent) les Ayoreos, les Ache, les Matacos, les Guaranis et plusieurs autres. Dans les régions les plus au sud, on retrouvaient (retrouvent) les Qawasgars, les Selk’nams, les Onus et d’autres.

Sauf quelques exceptions, les Premières Nations formaient des sociétés communautaires sans classes avec de fortes tendances matrilinéaires. Le domaine politique chez les Autochtones n’était pas dominé par les hommes, mais était dans plusieurs cas la responsabilité des femmes. Les Ancien(ne)s occupaient une place d’importance et d’honneur en raison de leur sagesse. II n’y avait aucune prison. Les Premières Nations ont créé de bons moyens pour résoudre les problèmes dans la communauté et - au dire des Ancien(ne)s on y observait peu de crime antisociaux. Les décisions politiques n’étaient souvent rendues qu’après consensus et discussions entre les habitant(e)s.

Les Premières Nations n’étaient toutefois pas parfaites. Elles étaient humaines et donc elles avaient, et ont toujours, des inconsistances et des pratiques loin d’être positives.

À titre d’exemples, citons les conflits armés entre les nations, dans toute l’Amérique. Ainsi que les pratiques d’esclavage entre les habitant(e)s de la côte nord-ouest du Pacifique et dans les régions mésoaméricaines. Toutefois, les façons de faire la guerre ici ont reflété des développements similaires à travers le monde et en aucun cas n’ont approché les méthodes de génocide inventées, en particulier en Europe. La guerre n’était qu’une pratique explicite des peuples guerriers. Le prétexte de l’esclavage, même si il est non justifiable, diffère nettement de celui des Européens qui n’est ni basé sur le racisme ni sur une caractéristique fondamentale qui forme les bases de l’économie de ces sociétés.

L’Histoire des Premières Nations doit toujours s’analyser de façon critique. Celles et ceux qui nous racontent cette histoire font rarement partie des populations autochtones.

LE DÉBUT DU GÉNOCIDE

« La cupidité nourrissait leur corps, et leur appétit était vorace »
Témoignage aztèque

Le 12 octobre 1492, naviguant à bord de la Santa Maria, financée par la couronne espagnole, Christophe Colomb mis pied à terre sur l’île de Guanahani (probablement le San Salvador), dans la région des Caraïbes. Initialement à la recherche d’une nouvelle route d’échange vers les marchés asiatiques, Colomb a découvert bien malgré lui un marché qui sera manifestement plus lucratif que la découverte d’une nouvelle route d’échange, pour l’Europe du moins.

Sur l’île de Guanahani, Colomb trouva pour la première fois sur son chemin les Taino Arawaks qu’il nomma « Indiens » croyant avoir atteint les Indes. Dès cette première rencontre, le journal de bord de Colomb témoigne de sa propre cupidité :

« N’avions nous pas terminé les formalités de la prise de possession de l’île que des individus ont commencé à s’amener sur la plage... Ils sont amicaux et calmes. Ils ne portent aucune arme sauf de petites lances. Ils devraient faire de bons et d’habiles serviteurs... Je crois qu’ils peuvent être facilement christianisés, car ils ne semblent posséder aucune religion. S’il plaît à notre Seigneur, j’amènerai, à mon départ, six d’entre eux devant Vos Altesses. » (du journal de bord de Colomb, le 12 octobre 1492) [1].

N’ayant qu’une parole, à défaut d’autre chose, Colomb enleva 9 Taino lors de son voyage dans les Bahamas. Il anticipait même plus d’enlèvement et d’asservissements :

« ... ces individus sont peu habiles au maniement des armes. Vos Altesses le verront d’eux-mêmes quand je vous amènerai les sept que j’ai capturés. Lorsqu’ils auront appris nos langues je les ramènerai ici à moins que Vos Altesses ordonnent que toute la population soit détenue à la Castille ou tenue captive ici. Avec 50 hommes, vous pourriez en faire tous vos sujets et leur ordonner de faire ce que bon vous semble » (du journal de bord de Colomb, le 14 octobre 1492) [2].

Tout au long du journal de bord de Colomb lors de ce premier voyage, il y a une référence constante à la notion que les Taino croyaient que les Européens descendaient du ciel malgré le fait que ni Colomb ou ses hommes ne comprenaient l’Arawak. Une autre constante dans le journal de Colomb fait référence à l’obsession pour l’or. On y retrouve 16 références dans les deux premières semaines seulement, 13 dans le mois suivant et 46 dans les cinq semaines suivantes, malgré le fait que Colomb n’ait trouvé que très peu d’or autant sur l’île de Guanahani qu’à n’importe quel endroit où il a mis le pied.

Dans une dernière référence au journal de bord de Colomb, on y découvre la double mission de Colomb :

« ... Vos Altesses devraient en faire des chrétiens (les Taino). Je crois que si cet effort commence, une multitude d’individus seront très bientôt converti à notre Foi et l’Espagne acquerra de grands domaines, de grandes richesses et tous les villages. Sans l’ombre d’un doute, il y a une très grande quantité d’or dans ces terres... Il y a aussi des perles, des pierres précieuses et une quantité infinie d’épices » (du journal de bord de Colombo, le 11 novembre 1492) [3].

La dualité de la mission de Colomb et des invasions européennes subséquentes était la christianisation des non- Européen(ne)s et l’appropriation de leurs terres. Ces buts ne sont pas distincts l’un de l’autre. La « christianisation » n’était pas simplement un programme d’endoctrinement religieux Européen, c’était une attaque contre la culture non-Européenne (barrière à la colonisation) et une forme de guerre légalement et moralement sanctionnée pour la conquête. « Même son nom était une prophétie face au monde qu’il a découvert Christophe Colomb se traduit par « le colonisateur porteur du Christ » » [4].

Toujours lors de son premier voyage, il erra dans les Caraïbes avant d’établir le premier poste espagnol, Natividad, sur l’île d’Hispaniola (aujourd’hui Haïti et la République Dominicaine). Laissant environ 35 hommes sur Hispaniola, Colomb et son équipage sont rentrés en Espagne afin de rassembler le matériel et les hommes nécessaires à la colonisation prochaine et pour rapporter leur voyage à la Couronne.

En septembre 1493, Colomb retourna à Hispaniola avec une flotte de 17 navires et de 1200 hommes. Le détachement qui est demeuré sur Hispaniola fut détruit suite au soulèvement des Taino contre les Espagnols. La résistance avait déjà en fait débuté.

Colomb aura fait quatre voyages en tout dont les deux derniers en 1498 et en 1502. Ces voyages dans les Caraïbes l’auront mené dans des endroits aujourd’hui connus comme Trinidad, Panama, Jamaïque, Venezuela, Dominique et plusieurs autres îles. Il y captura des autochtones pour en faire des esclaves et leur fit extraire l’or à coup de quota de grosses marmites pleines de poussière d’or qui doivent être ramassées par tous les autochtones de 14 ans et plus à tous les trois mois. Le non-respect du quota exposait la/le « coupable » à se faire trancher les mains. Ensuite on la/le laissait mourir à bout de son sang. Des centaines de Caribes et d’Arawaks ont été envoyé(e)s en Espagne en tant qu’esclaves sous la gouverne de Colomb, 500 de plus après son second voyage seulement. En fait, l’absence de « grandes quantités d’or » dans les Caraïbes le força à trouver un autre mode de financement pour la colonisation : « Les Caribes, sauvages et cannibales, serait échangés en tant qu’esclaves contre des vivres fournis par des marchants en Espagne. »

Colomb mourut en 1506, mais à la suite de son voyage initial en Amérique, plusieurs vagues d’expéditions espagnoles, portugaises, hollandaises, françaises et britanniques ont suivi transportant des conquistadores, des mercenaires, des marchants et des missionnaires catholiques.

Hispaniola a servi de première tête de pont aux Espagnols. Elle servait de relais de ravitaillement pour les incursions armées et les missions de reconnaissance justifiées à travers le programme de christianisation. Un an après le premier voyage de Colomb, le pape Alexandre VI dans sa bulle papale inter cetera divina a accordé à l’Espagne tout le monde n’étant pas déjà possédé par les États chrétiens sauf la région du Brésil qui fut octroyée au Portugal.

Pendant que les Espagnols établissaient les fondations de leur plan de colonisation, les autres nations européennes ont commencé leurs propres expéditions.

En 1497, Giovanni Caboto Motecataluna (Jean Cabot), financé par l’Angleterre, traversa l’Atlantique et longea les côtes Atlantiques de l’Amérique du Nord. Sous les ordres d’Henri VII de « conquérir, occuper et posséder » les terres des « païen(ne)s et des infidèles », Cabot a fait la reconnaissance des côtes de Terre-Neuve enlevant trois Micmacs du même coup.

Vers la même période, Gaspar Corte Real, financé par le Portugal, a fait la reconnaissance des côtes du Labrador et de Terre-Neuve enlevant du même coup 57 Béothuks qui seront vendus comme esclaves afin de rentabiliser le coût de l’expédition.

Pendant ce temps, Amerigo Vespucci, de qui on nomma l’Amérique, et Alonso de Ojedo en différentes missions pour l’Espagne, ont fait la reconnaissance des Antilles et des côtes Pacifiques de l’Amérique du Sud. Ojedo exécutait activement des raids à la recherche d’esclaves. Dans ses efforts, il trouva la mort lorsque atteint par la flèche empoisonnée d’un guerrier.

De la bulle papale de 1493 et du subséquent Traité de Tordesillas (1494), la possession du Brésil fut accordée au Portugal. En 1500, l’amiral portugais Pedro Alvares Cabral pris formellement possession du territoire brésilien au nom de la Couronne portugaise. Maintenant que les missions de reconnaissances sont complétées, l’invasion s’est intensifiée et a pris de l’expansion. En 1513, Ponce de Leon, financé par l’Espagne, a tenté de mettre pied à terre en Floride, mais il fut repoussé par 80 embarcations de guerre Calusa.

De 1517 à 1521, le conquistador espagnol, Hernando Cortes a réduit à néant l’empire Aztèque au Mexique. Il a pris possession de la cité de Tenochtitlan et a tué des millions de personnes lors d’une sanglante ruée vers l’or.

Peu après, en 1524, Pedro de Alvarado a conduit une invasion de la région de EI Salvador. Il a attaqué les Cuscatlans, les Pipeles, et les Quiches. Au Guatemala, Alvarado a mené huit campagnes majeures contre les Mayas. Pendant que lui et ses hommes brûlaient des gens vivants, les prêtres catholiques qui l’accompagnaient s’occupaient de détruire les documents historiques des Mayas (cela s’ils n’étaient pas occupés eux-mêmes à diriger les massacres). Les hommes d’Alvarado, en guise de récompense, pourront faire des survivant(e)s leurs esclaves.

En 1531, l’Espagnol Francisco Pizarro a envahi la région occupée par les Incas (aujourd’hui le Pérou). Il pris avantage d’une dispute interne entre deux factions incas menées par les frères Huascar et Atahualpa. Pizarro a réussi à venir à bout des Incas en deux ans.

Dix ans plus tard, Pedro de Valdivia pris possession du Chili au nom de la Couronne espagnole malgré une résistance féroce de la part de la nation Mapuche qui a restreint les Espagnols aux régions du nord et du centre. Valdivia fut éventuellement tué au combat par des guerriers Mapuche.

Au cours de la même période, Jacques Cartier, pour le compte de la France, fit la reconnaissance en 1534 des régions de l’est (devenu aujourd’hui le Canada) et des Espagnols comme Hernando de Sotos, Marcos de Niza et plusieurs autres ont commencé leur incursion en Amérique du Nord prenant possession du territoire au nom de leur pays, comme c’est la coutume.

EXPANSION, EXPLOITATION ET EXTERMINATION

« Je me nomme Variole... Je viens de très loin... Où se trouve la grande mer et plus loin au-delà d’elle. Je suis un ami des grands couteaux qui m’ont amené ; ils sont mon peuple »
Jamake Highwater, Anpao : une odyssée indienne.

Les premières années de la colonisation étaient dirigées au maximum vers l’exploitation des terres et des autochtones. Aux yeux des Européen(ne)s, les Amériques étaient de vastes régions vierges qui convenaient à l’expansion et l’exploitation économique.

L’activité principale était l’accumulation d’or et d’argent pour former de la monnaie pour les nations européennes. Cette accumulation était accomplie sous la forme la plus barbare de vols et de pillages (les méthodes employées par Colomb et Cortes). Plus tard, des méthodes plus systématiques furent développées y compris l’encomiendas - une forme de taxe imposée aux communautés autochtones assujetties et l’utilisation d’esclaves autochtones pour tamiser les rivières et les cours d’eau. Au milieu des années 1500, l’exploitation de l’or et de l’argent impliqua des travaux miniers intensifs. Des villes entières se sont développées autour des chantiers miniers. Des millions d’autochtones ont trouvé la mort en travaillant comme esclaves dans les mines de Guanajuato et Zacatecas au Mexique et de Potosi en Bolivie. Vers la fin des années 1500, Potosi était l’une des plus grandes villes du monde avec ses 350 000 habitant(e)s. Le Pérou contenait également de nombreux chantiers miniers. De l’arrivée des premiers colonisateurs européens jusqu’en 1650, de 180 à 200 tonnes d’or - provenant de l’Amérique - se sont retrouvées dans les coffres du trésor européen. Aujourd’hui, tout cet or vaudrait 2.8 milliards de dollars [5]. À la même époque, huit millions d’esclaves sont mort(e)s dans les mines de Potosi seulement.

L’esclavage était une autre activité économique majeure, non seulement pour le travail dans les mines, mais aussi pour l’exportation vers l’Europe. Au Nicaragua seulement, les premiers dix ans d’esclavage intensif qui débutèrent en 1525 ont vu environ 425 000 Miskitus et Sumus envoyé(e)s en Europe. Des dizaines de milliers d’esclaves ont péri dans les navires qui les transportaient. Au milieu des années 1500, les échanges d’esclaves passeront par l’Afrique alors que les colonisateurs portugais ont déporté des esclaves africain(ne)s vers le Brésil afin de couper la canne à sucre et de défricher la forêt pour construire des villages et des églises. On estime qu’environ 15 millions d’esclaves africain(ne)s ont été déporté(e)s en Amérique jusqu’en 1800. Environ 40 millions d’autres esclaves africain(ne)s ont péri lors de la traversée de l’Atlantique en raison des misérables conditions des navires.

Dans des régions telles que les hautes terres du Chili, du Pérou, du Guatemala et du Mexique, là où le climat était propice, les Espagnols ont pu faire pousser des produits agricoles tels que le blé, le choufleur, le chou, la laitue, les radis, la canne à sucre et un peu plus tard, des raisins, des bananes et du café. Vers le milieu des années 1500, plusieurs de ces produits agricoles (surtout le blé et la canne à sucre), grâce à la main d’œuvre esclave, étaient exportés en grande quantité vers les marchés européens.

Dans d’autres régions, des troupeaux de bétail affalé se sont établis. Les troupeaux qui ont rarement excédé 800 ou 1000 têtes de bétail en Espagne atteignent 8000 au Mexique. Dès 1579, quelques ranches du nord du Mexique possédaient jusqu’à 150 000 têtes de bétail [6].

Les effets du défrichage intensif du territoire pour faire place à l’agriculture et aux ranches et l’exploitation intensive des mines ont fini par causer une augmentation de la déforestation et des dommages aux territoires. Encore plus immédiat pour les peuples autochtones de ces régions, en particulier ceux qui vivaient de l’agriculture de subsistance, était le démantèlement et la destruction des moyens agraires remplacés par les produits agricoles d’exportation.

Dans le but d’accroître cette expansion et cette exploitation, soumettre les Premières Nations s’avèrait une nécessité, et la tâche de coloniser d’autres peuples en était une dans laquelle les européens étaient passés maîtres.

« D’une certaine manière, les premiers peuples colonisés pour le profit par le moyen du travail... était des paysans européens et britanniques. L’Irlande, la Bohème, la Catalogne furent colonisés. Le peuple Mores, aussi bien que le peuple judaïque séfarade, fut déporté physiquement par la Couronne de Castille de la péninsule Ibérique... Toutes les méthodes utilisées pour la déportation et l’expropriation furent pratiquées sinon perfectionnées » [7].

Avant le voyage de Colomb en 1492, le développement d’un mode de production capitaliste ressortant du féodalisme a dépossédé les paysan(ne)s européen(ne)s d’une production et d’une agriculture de subsistance indépendante. Conséquemment, elles et ils n’ont eu d’autre choix que d’entrer dans une relation de dépendance forcée vis- à- vis les propriétaires de terres et les manufacturiers, menant ainsi à une guerre de classe sociale, particulièrement lorsque la Révolution Industrielle (nourrie par l’expropriation des matériaux des Amériques et de l’Afrique) pris de l’ampleur.

De fait, la majorité des Européens émigrant vers l’Amérique au XVIe, au XVIIe et au XVIIIe siècle étaient des marchants appauvris, des petit-bourgeois commerçants, des mercenaires et des missionnaires chrétiens. Tous souhaitaient se bâtir une nouvelle fortune dans le « Nouveau Monde » et échapper à l’écart qui s’amplifiait entre les classes sociales. Toutefois, les premières colonies permanentes étaient limitées dans leur capacité. Leur but premier consistait à faciliter et maintenir des régions d’exploitation. Pendant tout le XVIe siècle, on estimait à seulement 100 000 le nombre d’émigrant(e)s européen(ne)s en Amérique.

Leurs effets furent toutefois incroyables. Au cours de la même période de 100 ans, les populations autochtones sont passées de 70 -100 millions à près de 12 millions. La nation Aztèque à elle seule a passé de 30 à 3 millions en 50 ans seulement. Le seul mot qui pourrait décrire une telle décimation est génocide : l’holocauste des Amérindiens. Celles et ceux qui excusent le génocide attribuent la majorité des mort(e)s à l’introduction de maladies épidémiques comme la variole et la rougeole par des Européen(ne)s ignorant(e)s.

Pendant qu’on tente de diminuer la grandeur et l’intensité du génocide (d’autres opinions sur cette diminution. prétendent que la population des Amériques était beaucoup moins nombreuse que laisse croire les chiffres démographiques généralement reconnus), une telle perspective ne tient pas compte des conditions dans lesquelles ces maladies ont débarqué en Amérique. Des conditions telles que les guerres, les massacres, l’esclavage, la destruction du territoire et la destruction subséquente de l’agriculture de subsistance et des réserves de nourriture ainsi que la famine et la malnutrition qui s’en suivent et le démembrement des cultures communautaires.

Ces conditions n’ont pas été introduites par des Européen(ne)s ignorant(e)s. Elles faisaient partie intégrante d’une campagne préméditée basée sur l’exploitation où l’extermination des peuples autochtones était un facteur crucial.

Les maladies européennes ainsi introduites dans ces conditions sont arrivées en tant qu’effets secondaires aux attaques. Leurs effets furent désastreux. Une fois qu’on eut réalisé les effets des épidémies, on planifia une guerre biologique sous la forme de draps infestés et d’autres tissus distribués aux peuples autochtones.

L’INVASION DE L’AMÉRIQUE DU NORD

Pendant que les Espagnols détruisaient les Caraïbes et l’Amérique Centrale, les Portugais affligeaient le Brésil du même traitement. Les façons de faire établies par les Espagnols auront été répétées par les Portugais au XVIe et au XVIIe siècle au Brésil, en Uruguay et au Paraguay.

Jusqu’au début du XVIIe siècle, les Espagnols et les Portugais ont pratiquement occupé toutes les régions de l’hémisphère sud. Ils ont construit de nombreuses colonies facilitées par l’apport des missionnaires jésuites et franciscains, des mines, des ranches, et des plantations. Malgré tous ces faits, il existait de vastes régions pour lesquelles les prétentions européennes pour ces terres demeuraient théoriques. Ces régions sont demeurées hors de l’emprise européenne grâce à l’acharnement de la résistance autochtone, surtout dans les régions du sud.

Durant cette époque, les Français, les Hollandais et les Britanniques ont aussi établi des colonies dans les Caraïbes.

En 1604, les Français ont occupé l’île de la Guadeloupe et ensuite la Martinique et de nombreuses petites îles des Antilles. En 1635, ils ont occupé ce qu’on appelle aujourd’hui la Guyane Française. Ailleurs, les Hollandais occupèrent une région côtière qui allait devenir le Surinam (Guyane Hollandaise) et d’autres colonies ont été établies par la Compagnie Hollandaise des Antilles dans la région de Belize (qui deviendra plus tard une colonie britannique).

Les Hollandais, les Français et les Britanniques étaient passablement limités quant à l’exploitation de l’Amérique du Sud. Ils dirigeront donc leurs efforts vers l’Amérique du Nord.

Tel que mentionné plus tôt, les expéditions françaises ont fait incursion, dans les années 1530, les régions du nord-est qui deviendront plus tard le Québec et les provinces de l’Atlantique. En 1562 et 1564, les Français ont tenté de s’établir en Caroline du Sud et en Floride, mais furent repoussés par les Espagnols (qui ont réclamé la Floride lors de la périlleuse expédition de Soto en 1539).

En 1585 et en 1586, les Britanniques ont tenté en vain d’établir une colonie sur l’île Roanoke en Caroline du Nord. Les colon(ne)s étant incapables de survivre.

Jusqu’en 1600, plusieurs missions de reconnaissance furent lancées. En 1576, Martin Frobisher longea les côtes arctiques et rencontra les Inuit. En 1578, Francis Drake, longea les côtes de la Californie.

Ailleurs, les Espagnols étendaient leur territoire en Amérique du Nord depuis leurs bases dans le sud du Mexique. Ils ont fait face à la résistance des Pueblos et d’autres.

Au début des années 1600, pendant que les Espagnols s’emparent du sud-ouest se dirigeant vers les plaines, Samuel de Champlain va étendre les explorations précédentes de Cartier. Il ira aussi loin vers l’ouest que le lac Huron et le lac Ontario. Ses attaques contre la communauté Onondago, avec l’aide de guerriers Wendat (Hurons), tourneront les Haudenosaunee contre les Français.

En 1606, les Britanniques ont finalement réussi à établir leur première colonie permanente en Amérique du Nord à Jamestown en Virginie. En 1620, les Pèlerin(ne)s (Puritain(ne)s britanniques) ont aussi posé le pied sur la côte est établissant une colonie à Plymouth.

Ailleurs, les Béothuks de Terre-Neuve se sont rallié(e)s contre les attaques des Français dans des conflits qui ont tué 37 colon(ne)s français(es). Les Français ont répondu en armant les Micmacs - ennemis traditionnels des Béothuks - et en offrant des récompenses contre des scalps béothuks. On croit que l’origine des scalps des guerriers autochtones provient de cet événement. Le stéréotype de la sauvagerie des autochtones était en fait introduit par les Français et, plus tard, par les Hollandais. Les attaques combinés des Français et des Micmacs ont mené à l’éventuelle extermination du peuple Béothuk.

En 1624, les Hollandais ont construit Fort Orange (qui deviendra plus tard Albany, New York) et ont nommé la région New Netherland.

Pendant que les colonies britanniques, françaises et hollandaises occupaient de plus en plus de place sur les côtes atlantiques de l’Amérique du Nord, des différences substantielles sur le territoire et dans les ressources ont forcés le régime d’exploitation à se mettre à jour par rapport au processus de colonisation déjà en cours en Méso-Amérique et en Amérique du Sud.

Au sud, l’expropriation en masse de l’or et de l’argent a servi à financer la plupart des invasions. Aussi, les populations denses d’autochtones ont fourni une énorme part « d’ouvri(ers/ières)-esclaves » pour travailler dans les premières mines et les plantations.

En contrepartie, les Européen(ne)s qui ont colonisé l’Amérique du Nord sont tombé(e)s sur une population autochtone beaucoup moins dense. Le territoire, malgré sa fertilité agricole et l’abondance des animaux à fourrure, n’était pas généreux en métaux précieux accessibles à la technologie du XVIIe siècle.

L’ exploitation de l’ Amérique du Nord requerra des années de travail pour lequel on ne pourra compter sur les esclaves autochtones et africain(ne)s, mais la participation des Amérindien(ne)s est toutefois requise. Pour que les colonies survivent à des milliers de miles de l’Europe sans l’or qui a financé l’armada espagnole, les forces coloniales en Amérique du Nord devront se tourner vers l’accumulation graduelle de produits de la terre et la traite des fourrures.

De cette façon, les premières colonies ont dû surtout compter sur l’hospitalité des peuples autochtones. Les tentatives précédentes d’établir des colonies européennes ont échoué pour cette raison particulière, car les Européen(ne)s s’attaquaient à une terre étrangère dont elles et ils ne connaissaient rien.

Les colonies européennes grandissantes ont rapidement entrepris l’acquisition de terres déjà défrichées et cultivées et leur politique expansionniste les amènera à une violente confrontation avec les autres colonies. Cette compétition peu saine pour dominer le territoire et les échanges entraînera de fréquentes attaques contre la communauté autochtone. Une de ces premières « attaques stratégiques » eut lieu en 1622 lorsqu’une troupe de la colonie de Plymouth a massacré une tribu de Péquots. En revanche, des guerriers péquots ont attaqué le village colon de Wessagusset qui fut ensuite abandonné et plus tard pris sous la tutelle de la colonie de Plymouth. Ces derniers enviaient depuis toujours la terre et les échanges qu’exploitaient les colons de Wessagusset.

En 1630, la colonie de la baie du Massachusetts est établie et « New England » (Nouvelle-Angleterre), autrefois un vague environnement géographique, est maintenant une région bien à elle englobant New Plymouth, Salem, Nantucket, Rhode Island, Connecticut, New Haven et plusieurs autres.

L’expansionnisme des colons du Massachusetts consistait à massacrer, premièrement, les Péquots et par la suite les Narragansetts entre 1634 et 1648.

La dépendance européenne sur les Premières Nations commença à se renverser au cours de cette période. À mesure que les colonies européennes prenaient de l’expansion et construisaient, les nombreux contacts avec les Premières Nations ont intensifié les échanges ainsi que l’apparition des maladies épidémiques et des conflits.

Les échanges ont fini par semer la rupture parmi les peuples autochtones.

« L’industrie indienne est devenue de moins en moins spécialisée et s’est divisée à mesure qu’elle s’est rapprochée de l’industrie européenne. Pour les indiens, le commerce inter-société a triomphé en mettant de côté et éventuellement éliminant les fabrications artisanales, sauf celles directement reliées aux échanges euroindiens. Les échanges inter-tribus n’a survécu que pour servir le commerce inter-société. » [8].

Ainsi, les échanges avec l’Industrie européenne ont développé une relation de dépendance grandissante chez les colon(ne)s européen(ne)s. Les produits qu’on donnait en échange aux autochtones - marmites en métal, couteaux et de temps à autres, des fusils - provenaient de manufactures et de fournisseurs européens. Les échanges ont aussi dérangé et changé les modes de vie traditionnels des amérindien(ne)s lors de l’avènement de l’alcool et des guerres sous forme d’extermination - avec torture - sous le commandement des colons ainsi qu’une escalade généralisée des guerres causées par la compétition qu’entraîne la traite des fourrures et par l’infiltration des fusils européens.

Les maladies épidémiques commençaient à faire leur ravage dans toute la région côtière de l’Atlantique, lorsque les colon(ne)s se sont mis(es) à exploiter et à exagérer grandement les hostilités déjà existantes parmi les Premières Nations tout comme l’on fait les Espagnols et les Portugais avant elles et eux.

« Les sinistres épopées de Cortes et de Pizarro, sans parler de Colomb lui- même, sont témoins des habiletés militaires des soldats espagnols, mais elles doivent aussi être comparées aux échecs de Narvaez, Coronado et de Soto... (Les Conquistadores) n’ont pu conquérir le Mexique et le Pérou sans aide. Des alliés indigènes se sont avérés indispensables... Au nord de la Nouvelle-Espagne, les invasions ont débuté plus tard quand les Français, les Hollandais et les Britanniques ont trouvé des communautés indigènes... déjà décimées par des épidémies provenant de populations qui n’ont jamais été aussi nombreuses que celle du Mexique » [9].

À ce moment, le concept d’adoption de traités fit son apparition, dans le but premier des colon(ne)s anglais(es) de respecter un seuil de paix avec les Premières Nations, en référence à 1606 quand

« la Virginia Company de Londres a ordonné à ses colons d’acheter du maïs des "natifs" avant que les intentions de l’Angleterre de s’établir en permanence deviennent réalité. Les dirigeants de la Compagnie étaient convaincus que "vous ne devez pas trop leur en donner car ils se retourneront contre vous". » [10].

Les premiers colons anglais (et hollandais) ont commencé à acheter des terres toujours accompagnés de forces armées contre les nations autochtones vulnérables (telles que celles décimées par les maladies ou celles déjà engagées dans des guerres contre des Premières Nations plus puissantes).

Il subsiste un doute quant à savoir si les Premières Nations comprenaient le procédé d’achat. Quelques points sont toutefois clairs : il n’y avait aucune pratique de propriété privée d’une partie de territoire, ni de vente de celle-ci parmi les peuples avant l’arrivée des colons. Il s’y produisait toutefois des ententes et des pactes entre les Premières Nations quant au droit d’accès à des endroits pour chasser et pécher. Ceci indique que les traités étaient certainement compris comme une entente entre les Premières Nations et les communautés coloniales quant à l’utilisation de certaines régions du territoire tout comme un pacte de non-agression. Dans les deux cas, les Premières Nations sont demeurées assez puissantes pour prévenir les atrocités des premiers colons, pour lesquels les traités n’ont que peu d’effets, s’ils venaient qu’à manquer à leur parole. Les traités regorgeaient tellement de faussetés, de fraudes et de vols qu’ils ne pouvaient être considérés comme des engagements. Des pratiques telles que traduire oralement une version d’un traité et en signer une totalement différente sur papier étaient fréquentes, ainsi que n’écrire les propositions européennes dans les négociations et proclamer ensuite que ces propositions ont été acceptées par tou(te)s et chacun(e) quand en fait, elles étaient en négociation. Aussi les violations de traités par les colons étaient choses communes, particulièrement quand, par exemple, la colonie de Virginie a découvert les profits qu’elle pouvait faire en faisant pousser du tabac (que les Premières Nations ont montré aux colon(ne)s). Elle débuta alors son expansion à l’extérieur de ces limites territoriales.

Graduellement, les Premières Nations se sont vu dépossédées de leurs terres et furent victimes des ravages des colon(ne)s. Un des premiers conflits qui a sérieusement menacés les forces colonialistes de se retrouver dans l’océan éclata en 1622 lors de l’attaque de la Confédération des Powhatans, menée par Opechancanough, contre la colonie de Jamestown. Des combats ont fait rage jusqu’en 1644, lors de la capture et de la mise à mort d’Opechancanough.

Au milieu des années 1600, les confrontations entre les Premières nations et les colon(ne)s ont commencé à s’intensifier. La tension grimpa au fur et à mesure que les Européen(ne)s devenaient plus borné(e)s et autoritaires dans leurs relations avec les Premières Nations. En 1655 par exemple, la prétendue « Peach Wars » (Guerres des Pêches) a éclatée entre les colon(ne)s de New Netherlands et de la nation du Delaware quand un Hollandais a tué une femme Delaware parce qu’elle cueillait une pêche dans un arbre sur la propriété de la colonie. Le colon fut éventuellement tué et les guerriers Delaware ont attaqué plusieurs colonies hollandaises. La bataille sur les rives de la rivière Hudson dura jusqu’en 1664 lorsque les Hollandais ont forcé la nation Delaware à se rendre en se servant d’enfants Delaware comme otages.

Dès 1675, les Narragansetts, les Nipmucs et les Wapanoags, conduits en partie par Métacom (connu sous le nom de Roi Philippe par les Européens), se sont soulevé contre les colonies de la Nouvelle-Angleterre à la suite de l’arrestation et de l’exécution par les Anglais de trois Wapanoags reconnus coupables du meurtre d’un des leurs qui s’était converti au christianisme et qu’ils croyaient être un traître. La guerre pris fin en 1676 alors que les colons anglais, se servant de leurs alliés et informateurs autochtones, sont venus à bout de la rébellion. Métacom fut tué. Sa famille et plusieurs centaines d’autres furent vendu(e)s comme esclaves aux Antilles. La campagne militaire menée par les colons a décimé les nations Narragansett, Nipmuc et Wapanoag.

Ailleurs en 1680, le soulèvement des Pueblos, menés en partie par le guérisseur Tewa Pope, a réussi à sortir les Espagnols du Nouveau-Mexique. En 1689, les forces espagnoles ont pu finalement venir à bout des Pueblos.

Vers la fin des années 1600, les batailles entre les états européens dominèrent le processus de colonisation en Amérique du Nord.

HÉGÉMONIE : LE RÊVE EUROPÉEN

Les guerres coloniales furent, par le passé, disputées entre la France, l’Espagne, les Pays-Bas et l’Angleterre. Des conflits ont éclaté entre leurs colonies en Amérique. Dès la fin des années 1680 et pendant les 100 années qui ont suivi, on a connu une période de violentes confrontations entre les Européens pour la suprématie. Cette période de guerres européennes se jouera aussi en Amérique. « Jusqu’à un certain point, la bataille pour les colonies et la richesse dont on en tire profit était le champ de bataille par excellence pour l’accroissement du pouvoir d’un état européen. » [11]


Mexica Eagle Warrior, Gord Hill.

Débutant en 1689 avec la guerre du Roi William entre les Français et les Anglais, qui deviendra celle de la Reine Anne (1702- 1713), en passant par celle du Roi Georges (1744 - 1748) et atteignant son point culminant entre 1754 et 1763 avec la « Guerre de Sept Ans », les batailles pour la possession de colonies en Amérique étaient le reflet de celles qui faisaient rages à travers l’Europe au cours de la même période. Toutefois, en Amérique du Nord et dans les Caraïbes, la lutte des Européens pour l’hégémonie dans un marché d’échanges mondiaux en plein essor requiert de fortes concentrations de guerriers autochtones.

Lorsque les Britanniques sont sortis victorieux de la « Grande Guerre pour la Suprématie » et que les Français, vaincus, ont dû céder la baie d’Hudson, l’Acadie, la Nouvelle-France et d’autres territoires dans une série de traités, celles et ceux qui furent les plus affecté(e)s par les guerres européennes étaient les autochtones des régions atlantiques. Ces guerres ont pratiquement causé l’extermination de quelques peuples autochtones dont les Appalaches, en Floride. On a aussi vu s’installer des garnisons militaires coloniales et des postes de garde. On a effectué une militarisation générale des régions avec de l’armement lourd et des spécialistes de combat. Subséquemment, l’expansion des colonies repoussait les frontières du territoire et, du même coup, refoulait plusieurs nations autochtones vers l’ouest.

La résistance autochtone ne s’est pas terminée avec les guerres coloniales de cette période. Elle ne s’est pas non plus limitée à donner un coup de main à leurs « alliés ».

En 1711, les Tuscaroras ont attaqué les Anglais en Caroline du Nord et ont combattu pendant deux ans jusqu’au jour ou la campagne anti-insurrection anglaise fit son oeuvre. Résultat : des centaines de mort(e)s et quelque 400 autochtones vendu(e)s comme esclaves. Les Tuscaroras ont fui vers le nord pour s’installer parmi les Haudenosaunee devenant ainsi la Sixième Nation en 1722.

En 1715, la nation Yamasee s’est soulevé contre les Anglais en Caroline du Sud, mais fut pratiquement exterminée lors d’une riposte anglaise sanglante.

En 1720, la nation Chickasaw a combattu l’occupation française jusqu’à la capitulation de la France aux mains des Anglais en 1763. À l’instar de la nation Chickasaw, la nation Fox a également opposé une résistance, de 1720 jusqu’à vers 1735, face à la colonisation française.

En 1729, la nation Natchez débuta une série d’attaques contre les colons français de la Louisiane suite aux ordres du gouverneur Sieur Chépart de raser le village principal des Natchez pour semer des plantations. Lors des batailles qui s’en suivent, Chépart est tué et la contre-attaque des Français est fatale pour la nation Natchez qui se retrouvera décimée. La lutte des guérilleros continuera toutefois sur les bords du fleuve Mississippi.

En 1760, la nation Cherokee s’est soulevée contre leurs alliés, les Anglais, en Virginie et en Caroline. Menés par Oconostota, les Cherokees ont combattu pendant deux ans. Éventuellement, ils ont accepté une trêve de paix non sans voir des parties de leur territoire pris par les Anglais qui y ont rasé villages et cultures.

En 1761, les Aléoutiens d’Alaska ont attaqué les commerçants russes suite aux déprédations contre les communautés aléoutiennes sur les côtes de l’Alaska (les colonisateurs russes ont éventuellement installé leurs camps sur les îles de Pribilof et aléoutiennes en 1797 expropriant du même coup le peuple Aléoute et faisant d’eux des esclaves pour la chasse au phoque).

En 1763, le chef Ottawa, Pontiac, a organisé une alliance entre Ottawas, Algonquins, Senecas, Mingos et Wyandots et mené une offensive contre la colonisation anglaise. Cette campagne leur a permis de capturer neuf des douze garnisons anglaises et d’assiéger Détroit pendant six mois. L’incapacité d’étendre les possibilités de l’insurrection et le retrait de la promesse d’une assistance française ont poussé Pontiac à négocier la fin du conflit en 1766.

Il faut ajouter à cette période riche en guerres l’évolution des maladies épidémiques. En 1746, en Nouvelle-Écosse seulement, 4000 Micmacs sont mort(e)s de ces maladies. Avec la défaite de la France, les Britanniques ont acquis de vastes territoires appartenant auparavant à la France à l’insu de plusieurs Premières Nations qui habitaient ces régions et avec qui les Français n’avaient jamais négocié de traités territoriaux ni reconnu aucun titre aux autochtones.

À ce moment là,

« ... le gouvernement britannique a saisi l’occasion de consolider ses positions impériales en tissant des relations formelles et constitutionnelles avec les ...indigènes. Dans la Proclamation de 1763, il a annoncé son intention de se réconcilier avec les tribus mécontentes
en reconnaissant leurs droits territoriaux, en leur laissant le plein contrôle sur les territoires non- cédés et en entrant dans une relation de nation à nation » [12].

La Proclamation Royale de 1763 a décidé de l’emplacement d’un « territoire indien » à l’ouest des Appalaches et les Treize Colonies d’origine. À l’intérieur de ce territoire, personne n’aurait le droit d’y acheter des terres, sauf la Couronne. Dans les colonies maintenant sous l’empire britannique dont Terre-Neuve, le Labrador, le Québec, la Nouvelle-Écosse et les Treize Colonies, les colon(ne)s occupant des territoires autochtones non-cédés seront relocalisé(e)s et les achats de terres, occupées par ou réservées pour les autochtones, à des fins privées étaient interdits. Seule la Couronne pouvait acheter ces terres, en présence des Premières Nations.

Remplie de bonnes intentions, la Proclamation était toutefois couramment violée par les colon(ne)s et rarement mise en application. En fait, un an après la Proclamation, Lord Dunmore, le gouverneur de la colonie de Virginie, avait déjà franchi la frontière en accordant à des vétérans de la Guerre de Sept Ans, qui avaient servi sous ses ordres, des terres sur le territoire de la nation Shawnee. La voix des Shawnees ne se fit pas attendre, mais la provocation de Dunmore envers le contrôle britannique avait pour but de précipiter, en forme et en substance, une autre période de conflits qui verraient le processus de colonisation s’étendre vers l’ouest. Cette période de conflits mettrait en évidence la véritable intention de la Proclamation Royale en tant que document stratégique pour la défense des intérêts coloniaux britanniques en Amérique du Nord.

CATASTROPHE : LES ÉTATS-UNIS SONT NÉS

En raison de la domination britannique à l’échelle mondiale, la lutte européenne pour l’hégémonie tirait donc à sa fin. Par la suite, le XVIIIe et le XIXe siècle se sont avérés une période de guerres pour l’indépendance qui ont chassé les états européens hors des Amériques. De plus, parmi ces guerres eut lieu la lutte d’indépendance qui mènera par la suite à la naissance des États-Unis.

Tout juste sorti victorieux de la « Grande Guerre pour la Suprématie », les Britanniques ont amassé une lourde dette. Afin de défrayer les coûts du maintien et de la défense de ses colonies, les Britanniques ont substantiellement modifié leur politique coloniale. Une large part des coûts financiers des colonies ont été défrayés directement par les colonies à travers une série de taxes. L’imposition de ces taxes a incité les colons à demander que les taxes ne soient imposées qu’avec leur consentement. De fait, la question des taxes n’était que la pointe de l’iceberg d’un débat plus sérieux. Qui doit contrôler et tirer profit de la colonisation, les colonies ou les colonisat(eurs/trices) ?

En 1775, les années de protestation et de révolte des colon(ne)s ont mené à une guerre générale d’indépendance qui s’est poursuivie jusqu’en 1783, lors de la capitulation des Britanniques qui ont cédé de grandes parties de territoires le long de l’Atlantique.

Le fait que les Britanniques n’aient pas perdu trop de territoires est attribuable à la participation de nombreux peuples autochtones du côté des Britanniques. La Proclamation Royale était donc une stratégie pour étouffer la résistance autochtone face à la colonisation britannique (comme lors de la Guerre du Roi Georges en 1744 où les Micmacs se sont alliés aux Français et, suite au traité d’Aix-la-Chapelle en 1748, elles et ils ont continué de combattre les Anglais qui ont conclu avec elles et eux un traité de « Paix et d’Amitié ») et un moyen de former des alliances militaires avec les Premières Nations, sinon d’obtenir leur neutralité lors de conflits européens.

Tout comme lors de batailles européennes précédentes, les peuples autochtones servaient de troupes de renforts et la militarisation intensive a intensifié le contrôle des colon(ne)s :

« La fin de la guerre fut marquée par l’exode de Blancs, les Loyalistes de l’Empire Uni, vers la Nouvelle-Écosse. Ils sont venus en si grand nombre et se sont répandus si largement à travers la région des Maritimes qu’il était devenu essentiel de séparer la Nouvelle-Écosse en trois provinces afin de réduire les problèmes administratifs : le Nouveau-Brunswick, le Cap-Breton, la Nouvelle Écosse et ...I’île St Jean, peu après renommée l’Île-du-Prince Édouard » [13].

Au sud, les colon(ne)s rebel(le)s procédaient à la création des États-Unis. Dans ces régions, la guerre a passablement détruit les Premières Nations. Les rebelles ont mené une campagne afin d’évincer de leurs terres les Shawnees, les Delawares, les Cherokees et les Haudenosaunees (souffrant d’une séparation d’avec les Onéidas et les Tuscaroras qui ont choisi le côté des révolutionnaires).

Là encore, la Proclamation Royale s’est avérée une alliée de taille en renforçant la frontière coloniale britannique et tenant les alliés autochtones à distance :

« Le respect des principes de la Proclamation demeurera la base de la politique indienne britannique pour plus d’un demi-siècle et expliquera le succès des Britanniques dans le maintien d’alliés indigènes au cours des guerres nord-américaines impliquant les Britanniques. Même lorsque les Britanniques ont perdu beaucoup de territoire en Amérique du Nord après 1781 et que ses alliés indigènes ont perdu leurs terres traditionnelles résultat de leur alliance avec les Britanniques, la Couronne a acheté des terres des indigènes vivant à l’intérieur du territoire britannique et les ont données à leurs alliés qui ont monté vers le nord... » [14].

Après avoir bien ancré ses Treize Colonies sur les côtes de l’Atlantique, les États-Unis indépendants organisent l’expansion vers l’ouest. Ils lancent des campagnes militaires afin d’élargir les frontières du territoire.

Une de ces premières campagnes débuta en 1790 sous les ordres du président George Washington. Constituée d’environ 1100 hommes de milice de la Pennsylvanie, de la Virginie et du Kentucky dirigés par le brigadier général Josiah Harmar, la troupe essuya une cuisante défaite face à une confédération de guerriers Miamis, Shawnees, Ojibways, Delawares, Potawatomis et Ottawa menée par le chef Miami, Michikinikwa (Petite Tortue). Une deuxième troupe fut envoyée et défaite en novembre 1791. Finalement, en 1794, une grosse armée menée par le général Anthony Wayne a défait la confédération qui était maintenant dirigée par Pied de Dindon, aux abords du lac Érié. Les guerriers qui ont survécu ont fui tentant de trouver refuge à la garnison britannique de Fort Miami. Les Britanniques, anciens alliés de plusieurs peuples autochtones confédérés lors de la guerre d’indépendance, ont refusé de leur offrir un refuge et des centaines d’autochtones furent massacrés devant les portes du fort par les hommes de Wayne. Même si la confédération est essentiellement anéantie, les Miamis continueront d’offrir une résistance armée jusqu’en 1840.

Les « Guerres Indiennes » lancées par les É.-U. au cours des 100 ans qui ont suivi, respectaient la politique d’extermination visant à détruire les nations autochtones et à isoler les survivant(e)s dans (selon ce qu’on croyait être à l’époque) des réserves arides et désolées. Une fois les peuples contenus dans ces Bantoustans, la prochaine étape consistait à détruire la culture autochtone. Cette opération fut sous les auspices des agences gouvernementales alors en plein essor.

La guerre contre les Premières Nations ayant atteint un autre niveau, on commença à s’attarder aux puissances européennes toujours présentes en Amérique.

En 1812, utilisant le prétexte que les autochtones organisaient des raids le long de ses frontières avec les territoires britanniques, les États-Unis ont tenté d’envahir l’Amérique du Nord Britannique. Encore ici, les politiques coloniales britanniques les ont favorisés. Une alliance entre des peuples autochtones (qui avaient leurs propres intérêts dans le plein accomplissement de la Proclamation de 1763) et les colons européens a réussi à repousser l’envahisseur. Parmi ceux qui ont combattu l’invasion des États-Unis, on retrouvait les chefs autochtones Tecumseh, un chef Shawnee qui participa à l’élaboration d’une confédération d’autochtones contre les Européens (il déclara qu’aucun individu ou groupe d’individus ne peut vendre la terre puisqu’elle appartient à tous les autochtones) ; Black Hawk, un chef Sauk qui conduira également d’autres insurrections autochtones, et Joseph Brant, un chef dans les Haudenosaunee qui fut récompensé par les Britanniques avec un grand territoire duquel il commença à vendre des part à des colons européens (dans l’histoire, il fut reconnu comme un héros par les Euro-Américains, mais comme un traître par son peuple). Tecumseh fut tué au combat lors de la bataille de Moraviantown en Ontario en 1813.

En 1815, le Traité de Ghent mis fin aux hostilités entre les Britanniques et les États-Unis. Toutefois, ni la guerre des États Unis contre les autochtones ni la résistance autochtone ne connurent de répit.

RÉVOLUTIONS AU NOUVEAU-MONDE

Suite à la Révolution Américaine, des mouvements d’indépendance virent le jour en Amérique Centrale et du Sud.

Malgré le semblant d’apparence monolithique du colonialisme espagnol et portugais au cours des trois premiers siècles suivant l’invasion européenne et malgré les politiques génocides des conquistadores, la résistance autochtone n’a jamais cessé. Surtout, par exemple, dans les régions intérieures de la péninsule du Yucatân, dans les forêts des basses terres du Pérou, dans la région amazonienne et même dans les hautes terres des Andes qui a souffert d’une dépopulation sérieuse. Entre 1532 et 1625, la densité de la population des Andes est estimée avoir passée de 9 millions à 700 000. Dans ces régions, la domination coloniale était constamment défiée et formait la base des
mouvements de résistance qui ont débuté aussi tôt que dans les années 1500.

Parmi ces premières révoltes, on retrouve la rébellion de Vilacabamba de 1536 menée par Manqu Inka. Même si l’insurrection fut incapable de prendre de l’expansion et a échoué dans sa tentative d’évacuer les espagnols, les rebelles ont pu établir une « zone libre » dans la région de Vilacabamba (aujourd’hui la Bolivie) pour les trois prochaines décennies [15]. L’exécution d’un autre chef, Tupac Amaru, en 1572, fut l’élément qui précipita la fin de la révolte initiale.

D’autres insurrections majeures sont survenues en Équateur en 1578, 1599 et en 1615. Les Itzas de Tayasal dans la péninsule du Yucatân sont demeurés insoumis jusqu’en 1697.

« Les Européens ont trouvé difficile d’établir des moyens de transport et de communication dans la forêt des basses terres de la région des Mayas... Même si les Espagnols ont acquis une souveraineté formelle sur le Yucatân avec relativement d’aisance, plusieurs tribus Mayas de la région ont résisté avec succès toute domination efficace... depuis des siècles » [16].

Conservant l’allure des développements coloniaux en Amérique du Nord, les Espagnols ont instauré une série de lois au XVIIe siècle connues sous Leyes de Indias. Semblable à la Proclamation de 1763 instaurée plus tard par les Britanniques en Amérique du Nord, les lois ont coupé la région des Andes en deux soit la « République d’Espagne » et la « République des Indes » - chacune ayant son propre système judiciaire, ses propres lois et ses propres droits. Les Leyes de Indias étaient : « du point de vue de l’état colonial... une mesure pragmatique afin de prévenir l’extinction de la main d’oeuvre (indigène)... » [17]

Malgré son semblant de « libéralisme », les travaux forcés de même que les lois sur les taxes sont demeurés en vigueur et le règlement n’a jamais vraiment été appliqué.

En 1742, Juan Santos Atahualpa a mené un mouvement de résistance autochtone au Pérou comprenant principalement les peuples Yanesha (Amuesha) et Ashaninka (Campa) qui ont combattu la colonisation espagnole pendant plus d’un siècle.

Au XVIIIe siècle, la résistance autochtone s’est amplifiée pour devenir une révolte majeure, menée par Jose Gabriel Tupac Amaru, dans la colonie du Haut Pérou (aujourd’hui la Bolivie).

« Beaucoup s’est écrit sur la rébellion indienne de 1780 et menée par Jose Gabriel Tupaq Amaru et ses successeurs. On connaît peu de chose par contre sur les révoltes des Chayantas et des Sikasikas qui eurent lieu pendant la même période. Cette dernière fut conduite par Julian Apasa Tupaq Katari. Pendant plus d’un demi-siècle, les lois coloniales sur les taxes ont provoqué un tollé de protestation... Au milieu des années 1780, une révolte d’apparence spontanée est survenue à Macha, dans la province de Chayanta, dans le but de libérer un indien Cacique, Tomas Katari, emprisonné suite à une dispute avec les autorités métisses locales. Ensuite, en novembre 1780, Jose Gabriel Tupaq Amaru mena une rébellion très bien organisée à Tungasuca, près de Cuzco. Julian Apasa Tupaq Katari, un roturier indien de Sullkaw (Sikasika) se souleva et assiégea La Paz de mars à octobre 1781. Durant ce siège, le quart de la population de la ville trouva la mort. Après la défaite de Tupaq Amaru à Cuzco en avril 1781, la rébellion pris la direction de Azangaro, où des parents à lui, Andres et Diego Cristobal ont mené le soulèvement. Andres a assiégé Sorata avec succès en août de la même année, mais en novembre, lui et Diego Cristobal ont dû se rendre aux autorités espagnoles. Au début de 1782, la rébellion était réduite à néant. » [18].

Les chefs, perçus ou véritables, étaient capturés et exécutés. Ils étaient écartelés, décapités et brûlés vifs.

Pendant que la résistance autochtone se poursuivait et donnait fréquemment l’assaut vers les rangs des colonialistes - incluant les Espagnols et les Créoles (descendant(e)s de colon(ne)s espagnol(e)s en Amérique) - les colonies elles-mêmes commençaient à former des mouvements indépendantistes qui comprenaient les Créoles et les Métis.

Les raisons des mouvements indépendantistes - comme aux États- Unis se retrouvent dans l’oppression causée par la taxation et les lois sur le monopole des échanges imposés par le centre colonial. Ces deux particularités étouffent la croissance économique de la colonie. Aussi, on évitait les Créoles au moment de combler des postes dans la colonie ; on les attribuaient aux personnes nées en Espagne.

La première révolte majeure des colon(ne)s se passa en 1809 dans la colonie du Haut Pérou (Bolivie). Elles et ils ont réussi à renverser temporairement les autorités espagnoles. En 1810, la Colombie déclara son indépendance, suivie un an plus tard du Venezuela. En 1816, c’est au tour de l’Argentine de se déclarer indépendante. L’année suivante, le général Jose de San Martin mena ses troupes à travers les Andes pour « libérer le Chili et le Pérou des forces Royalistes ». Les guerres d’indépendance se répandaient rapidement et les forces royalistes espagnoles perdaient les colonies les unes après les autres dans des conflits décisifs dont le point culminant fut la Bataille d’Ayacucho en 1824 au Pérou. Cette bataille diminua grandement l’influence de l’Espagne en Amérique (qui était déjà en déclin en raison de l’invasion de Napoléon en Espagne pendant la même période).

Les mouvements indépendantistes ont réussi à renverser les forces espagnoles et portugaises, mais ils furent menés par, et pour les intérêts de, l’élite créole - avec l’aide de propriétaires de terres et de marchands.

« ... les révolutions pour la création d’états indépendants en Amérique vers la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle doivent être vues comme le moyen de création d’états-nations à l’européenne dans le but de favoriser le développement du capitalisme. Si toutefois ils étaient anti-« mère-patrie », ils n’étaient pas anti coloniaux (par exemple, la création des états de la Rhodésie et de l’Afrique du Sud n’étaient pas des événements anti- coloniaux) » [19].

Aujourd’hui, la Confédération des Nations Indigènes de l’Équateur (CONAIE) décrit l’indépendance de l’Équateur, par exemple, comme

« sans l’intention de changer nos conditions de vie ; c’était simplement le passage du pouvoir des mains des Espagnols à celles des Créoles » [20].

Comme dans le cas des États-Unis, les nouveaux états indépendants consolident rapidement leurs positions politiques et militaires et poursuivent l’expansion économique.

Il en résulta de nombreuses guerres entre nations indépendantes concernant les frontières, le commerce et enfin les ressources naturelles. En 1884, la guerre du Pacifque vit s’affronter la Bolivie, le Chili et le Pérou pour l’accès aux sources de nitrate. Entre 1865 et 1870, l’Argentine, le Brésil et l’Uruguay se sont alliés contre le Paraguay lors de la sanglante Guerre de la Triple Alliance au cours de laquelle le Paraguay a vu sa population mâle grandement réduite.

Tout comme en Amérique du Nord, des conflits ici et là ont plus souvent qu’autrement affecté les Premières Nations. La majorité des mort(e)s lors de la Guerre de la triple Alliance étaient des Amérindiens. L’accroissement de la militarisation a créé de larges réserves de troupes expérimentées et équipées. En Argentine et au Chili, ces réserves militaires servaient à repousser les invasions dans les régions où la résistance Mapuche persistaient depuis des siècles. Entre 1865 et 1885, il existait une frontière militaire à partir de laquelle on conduisait des attaques contre les Mapuches. Des dizaines de milliers de Mapuches furent tué(e)s. Les survivant(e)s furent dirigé(e)s vers les réserves.

Dans les années 1870, le développement de la vulcanisation en Europe mena à l’invasion des régions de la Haute Amazonie au Brésil, en Colombie, en Équateur, au Pérou et en Bolivie où les hévéas constitueront éventuellement la source mondiale de caoutchouc. Dans la région du fleuve Putumayo seulement, au nord du Pérou et en Colombie, 40 000 Autochtones ont été tué(e)s entre 1886 et 1919. En 1920, on estima le taux de dépopulation en quelques endroits de la région du caoutchouc à 95% [21].

Pendant cette période post-indépendantiste, influencée par la transition du régime féodal au capitalisme en Europe, une nouvelle forme de domination européenne fut lancée. Brièvement, elle consistait en l’apparition des prêts bancaires à l’intention du développement d’infrastructures pour l’exportation de matériaux bruts ou manufacturés : routes, chemins de fer, ports et plus particulièrement l’industrie minière et agricole. Dans les années 1820, les banques anglaises ont prêté plus de 21 millions de livres aux colonies espagnoles. L’amoncellement des dettes et les importations subséquentes de la technologie et de la machinerie européenne nécessaire à l’exploitation en masse du sol et du soussol, essentiel pour pouvoir rembourser ses prêts, ont créé une dépendance qui s’est installée graduellement (et qui continue son oeuvre aujourd’hui à travers le Fond Monétaire International et la Banque Mondiale, contrôlés par le G-7 [22].

Pendant la même période, les États-Unis ont commencé à avoir un pied-à-terre dans la région. En 1853, cinq ans après la découverte d’or dans des régions jusque-là inconnues en Amérique Centrale, la marine des États- Unis a envahi le Nicaragua. En 1898, suite à la Guerre Américano-Espagnole, Puerto Rico et Cuba furent annexés aux États- Unis (Puerto Rico demeure aujourd’hui la dernière possession coloniale des États-Unis). L’armée des États- Unis a aussi occupé les Philippines, y massacrant hommes, femmes et enfants. Hawaï tomba aux mains des États-Unis en 1893. Suite à ces événements, les États- Unis furent reconnue comme une puissance capitaliste en plein essor et l’éventuelle expansion de l’impérialisme des États-Unis commença à prendre forme.

Le développement de l’impérialisme se manifeste maintenant à l’échelle mondiale. La séparation entre la puissance européenne prédominante et les États-Unis était complète (et mènera éventuellement à deux guerres mondiales).

LA « DESTINÉE MANIFESTE » ET LES « GUERRES INDIENNES » AUX ÉTATS-UNIS

Pendant que les États-Unis s’établissaient en tant que puissance mondiale impérialiste, ils luttaient afin de consolider leurs bases continentales et repousser la résistance armée des Premières Nations.

Avant la guerre États-Unis-Angleterre de 1812, la Louisiane fut achetée de la France en 1803 et l’Espagne a cédé la Floride en 1819. Dès 1824, le Bureau des Affaires Indiennes fut mis sur pied par le Département de Guerre. Des campagnes militaires furent lancées contre les Premières Nations, aussi bien contre les hawnees de la vallée du Mississippi que contre les Séminoles de la Floride. Au même moment, les documents légaux de l’occupation furent écrits. En 1830, la Loi sur le Retrait des Indiens fut ratifiée. En 1854, le Congrès réorganisa les nombreux départements qui avaient compétence dans la répression des indiens en créant le Département des Affaires Indiennes des États- Unis. Il ratafia le Commerce Indien et la Loi sur les Relations qui redéfinira le territoire autochtone et la frontière autochtone permanente. Le territoire autochtone fut précédemment défini, en 1825, comme étant les terres à l’ouest du Mississippi. Suite à la formation des territoires du Wisconsin et de l’lowa, la frontière fut prolongée du Mississippi jusqu’au 95e méridien.

La Loi sur le Retrait des Indiens était conçue dans le but de relocaliser les Autochtones à l’est du 95e méridien à l’ouest de ce dernier. En 1838, les troupes des États-Unis ont entassé des milliers de Cherokees dans des camps de concentration afin de les acheminer vers l’ouest sur le Chemin des Pleurs. Au milieu de l’hiver, un Cherokee sur quatre mourrait de froid, de faim ou de maladies. Plusieurs autres nations furent aussi relocalisées de force : les Choctaws, les Chickasaws, les Creeks, les Shawnees, les Miamis, les Ottawas, les Wendats et les Delawares. La frontière indienne permanente était un front militaire pour les garnisons des États-Unis. Elle était semblable à celle instaurée en Argentine et au Chili pendant la même période.

Mais la frontière indienne n’était pas respectée. Tout comme la Proclamation Royale Britannique de 1763, les restrictions imposées à la colonisation ou au commerce européen dans ces régions furent ignorées. Lors de l’annexion du nord du Mexique en 1848, les États-Unis ont acquis les, territoires du Texas, de la Californie, du Nouveau-Mexique, de l’Arizona, de l’Utah et du Colorado. La même année, on a découvert de l’or en Californie.

Ces deux événements combinés font en sorte que le territoire autochtone était sous la menace d’une invasion prochaine. Sous l’idéologie de la « destinée manifeste », les États-Unis étaient sur le point de lancer de nouvelles attaques génocides contre les Premières Nations non-soumises. Le théâtre de ces guerres s’étendait de la région des Grands Lacs au Minnesota au sud du Rio Grande et jusqu’en Californie s’étendant au nord jusqu’à l’état de Washington. Plusieurs nations autochtones furent impliquées dans cette période de guerre : les Lakota, les Cheyennes, les Commanches, les Kiowas, les Yakimas, les Nez Percés, les Walla Wallas, les Cayuses, (les Arapahos, les Apaches, les Navajos, les Shoshones, les Kickapoos et plusieurs autres.

C’était une guerre de laquelle plusieurs chefs autochtones légueront un héritage de combat qui, tout comme les combats en Méso-Amérique et en Amérique du Sud, demeureront des symboles de résistance face à la colonisation européenne : Crazy Horse, Tatanka Yotanka (Sitting Bull), Ten Bears, Victorio, Geronimo, Quanah Parker, Wovoka, Black Kettle, Red Cloud, Chief Joseph et plusieurs autres. Même si les Guerres Amérindiennes de cette période n’étaient pas à sens unique (les troupes des États-Unis ont essuyé plusieurs défaites), les troupes coloniales des États-Unis ont tout de même réussi à imposer leur domination graduellement et impitoyablement. De nombreux facteurs y ont contribué suivant les moyens employés lors de campagnes précédentes contre les Premières Nations : les maladies telles que la rougeole, la variole et le choléra ont continué à se répandre (entre 1837 et 1870, au moins quatre épidémies majeures de variole ont balayé les plaines de l’ouest et entre 1850 et 1860, une épidémie de choléra a frappé le Grand Bassin et les plaines du sud) ; les services d’informateurs et de traîtres et l’incroyable force des troupes des États- Unis autant aux armes qu’au nombre d’hommes. Ces facteurs combinés aux grandes tricheries et aux politiques d’extermination ont érodé les forces des Premières Nations autrefois si puissantes.

Un des points tournants majeurs de cette période est sans contredit la Guerre de Sécession.


Page de couverture de la BD The 500 years of resistance Comic book, Gord Hill.

ESCLAVAGE DES AFRICAINS, RÉBELLION AFRICAINE ET GUERRE DE SÉCESSION

En apparence une croisade morale afin d’abolir l’esclavage, la Guerre de Sécession de 1861-1865 était en fait un conflit entre le développement commercial et industriel du Nord et la stagnation agricole basée sur la main-d’oeuvre esclave des Africain(ne)s dans le Sud.

Jusqu’au XIXe siècle, de 10 à 15 millions d’Africain(ne)s ont été amené(e)s en Amérique en premier par les Portugais, ensuite par les Anglais, les Espagnols et les colonialistes des États-Unis. Ces individu(e)s provenaient de toutes les régions de l’Afrique : le Sénégal, la Côte d’Ivoire, l’Angola, le Mozambique, etc. et de plusieurs nations africaines : les Yorubas, les Kissis, les Senefus, les Foulahs, les Fons, les Adjas et plusieurs autres.

Fait esclaves, ces peuples ont dû travailler de force dans les mines, les industries de textile, les manufactures et les plantations. Elles et ils servaient d’abord les intérêts des marchés européens et, après les guerres d’indépendance, les tout nouveaux états-nations des Amériques.

Le commerce d’esclaves américain(ne)s et africain(ne)s était absolument nécessaire à la colonisation des Amériques. L’embarquement forcé de millions d’Africain(ne)s a apporté une nouvelle dynamique au processus de colonisation ; non seulement dans l’économie de l’occupation européenne, mais aussi dans le développement de la résistance des peuples africains.

Aussitôt que 1536, des esclaves africain(ne)s ont formé une rébellion contre une colonie espagnole en Caroline du Sud qui n’a pas fait long feu. Les esclaves qui ont fui ont trouvé refuge auprès des Premières Nations. Dans les Caraïbes et en Amérique du Sud, où était concentré les premi(ers/ères) esclaves africain(e)s, de grandes révoltes ont fréquemment éclaté et les esclaves en fuite se sont réfugié(e)s chez les Caribes et les Arawaks. Au nord du Brésil, une rébellion africaine a réussi à prendre possession du territoire de Palmares (qui deviendra aussi grand que le tiers du Portugal).

Probablement une des plus célèbres alliances entre Africain(ne)s et Autochtones fut celle entre des esclaves africain(ne)s en fuite et les Séminoles de Floride. Les Africain(e)s en fuite « ont formé des communautés africaines libres en tant que partie semi-autonome de la nation Séminole qui les accueillait » [23]. Ensemble, ces peuples organiseront une des plus fortes résistances contre les États-Unis. Les présumées Guerres Séminoles débutèrent en 1812 alors que des individus de Géorgie qui ont décidé de faire la loi ont tenté de capturer des Africains pour en faire des esclaves. Ces guerres se poursuivront pendant trente ans sous la campagne de relocalisation des États-Unis. Les Guerres Séminoles, menées fanatiquement par le président Jackson, s’avéra la plus coûteuse des « Guerres Indiennes ». Du côté des États-Unis, plus de 1600 hommes furent tués et des milliers, blessés. Tout ça aura coûté aux États-Unis 30 millions de dollars. Même après ces événements, la guérilla sémino-africaine demeura libre. La solidarité qui existait entre les Africains et les Séminoles se montrera évidente lors de la seconde Guerre Séminole de 1835. Les Séminoles, dirigés par Osceola, ont refusé la relocalisation en Oklahoma, le principal désaccord étant l’insistance des États- Unis à désirer la séparation entre les Africains et leurs frères et soeurs Séminoles. Les troupes des États- Unis ont relancé la guerre et n’ont jamais pu remporter une nette victoire.

Dès le milieu des années 1800, l’esclavage était vu par quelques membres de la classe législative des États-Unis comme une entrave au développement économique et à l’expansion. La campagne anti-esclavage, menée par le Nord, était un effort louable afin de libérer le territoire et la main-d’œuvre des limites qu’imposait le système fermé de l’agriculture de plantation qui employait de la main-d’œuvre esclave.

« L’esclavage est devenu un obstacle à l’épanouissement de la société coloniale et aux intérêts de la bourgeoisie euro-américaine. Non pas que l’esclavage n’était pas profitable en lui- même. Il était beaucoup plus profitable que la main-d’oeuvre blanche payée. Les esclaves africains dans les industries coûtait aux capitalistes moins que le tiers de la main- d’oeuvre blanche... Mais les capitalistes américains avaient besoin d’étendre à grande échelle leur force ouvrière. Les propriétaires de plantations croyaient qu’importer quelques millions de nouveaux esclaves d’Afrique aurait pu satisfaire ces nouveaux besoins. Mais il était évident que ça ne ferait que jeter de l’huile sur le feu de l’insurrection des colonies africaines. Les profits ne devraient pas être le résultat de la compression de quelques dollars à court terme, mais en fonction des besoins d’un empire au complet et du futur. La demande pour la main- d’oeuvre n’était pas seule responsable du démantèlement du système esclavagiste. Le capitalisme avait besoin d’une gigantesque armée de colons, une infinité de nouvelles troupes d’élite européennes, afin de conquérir et de conserver de nouveaux territoires, les développer pour la bourgeoisie et l’armer contre les invasions » [24].

Le feu des insurrections a donné un coup aux forces de l’occupation en 1791 lors de la Révolution Haïtienne. Les esclaves africain(ne)s, mené(e)s en partie par Toussaint L’Ouverture, se sont rebellés pour défaire les Espagnols, les Anglais et les Français. La rébellion a mené à l’instauration de la République d’Haïti qui a offert la citoyenneté à tous les Autochtones et les Africains qui la désirait.

Les révoltes augmentaient aussi aux États-Unis dont la révolte de 1800 en Virginie menée par Gabriel Prosser et celle de Nat Turner en 1831 pendant laquelle soixante colons ont trouvé la mort.

« La situation devenait de plus en plus délicate au fur et à mesure que le développement de l’économie capitaliste créa des tendances à l’urbanisation et à l’industrialisation. Au début des années 1800, la population africaine de plusieurs ville croissait plus vite que celle des Euro- américains. » [25].

Les révoltes dirigées par Gabriel et Turner ont provoqué des discussions à l’assemblée législative de la Virginie sur la fin de l’esclavage et un sondage à été mené auprès de la population blanche de l’ouest de la Virginie pour leur demander leur avis.

Tous ces facteurs ont poussé le Nord à mettre un terme à l’esclavage en tant que forme d’exploitation. En revanche, les états du Sud, menés par les propriétaires de plantations et les exploiteurs d’esclaves, ont menacé de se séparer de l’Union. La Guerre de Sécession débuta.

CONSTRUCTION ET DESTRUCTION NOIRE

Le début de la Guerre de Sécession en 1861 causa divers problèmes à la classe dominatrice de l’Union du nord. La guerre avait non seulement pour but la préservation de l’expansion d’un empire continental, mais elle a aussi ouvert un second front, celui du combat des esclaves africain(e)s pour leur liberté. Avec une population de quatre millions d’individu(e)s, le soulèvement des Africain(ne)s du Sud s’est avéré crucial dans la défaite des Confédérés. À coup de dizaines de milliers, les esclaves africain(ne)s ont échappé à leurs maîtres(ses) et se sont enrôlé(e)s dans l’armée de l’Union. Ce retrait massif de la main- d’oeuvre esclave a donné un grand coup dans l’économie du Sud et les forces de l’Union était soutenues par des milliers d’esclaves.

Vers la fin de la guerre en 1865, les Africain(ne)s qui n’ont pu s’échapper ont préparé un assaut à grand déploiement suite à la défaite des Confédérés. Elles et ils ont réclamé les terres sur lesquelles elles et ils ont travaillé et ont commencé à s’armer (non seulement contre les propriétaires de terres sudistes, mais aussi contre l’armée de l’Union). L’inquiétude généralisée de cette « dangereuse position » des Africain(ne)s dans le Sud a mené à la « Reconstruction Noire ». On a promis au Africain(ne)s la démocratie, les droits de l’homme, leur propre gouvernement et la propriété des terres.

Dans les faits, ce fut une stratégie pour le retour de la domination euro-américaine impliquant :

« 1. La répression militaire des communautés africaines les mieux organisées et les plus militantes.
2. Pacifier les Africains en passant par le néo-colonialisme en utilisant des éléments de la petite-bourgeoisie africaine afin d’attirer les gens vers la citoyenneté américaine en réponse à leurs problèmes. Au lieu de la nationalisation et de la libération, les agents néo-coloniaux ont dit aux masses que leurs demandes démocratiques pourraient être retenues à la condition qu’ils suivent les colons capitalistes du Nord… » [26].

Suite à cette stratégie, les forces armées de l’Union ont attaqué les communautés africaines qui occupaient collectivement des terres, repoussant des dizaines de milliers d’individu(e)s hors des terres et arrêtant les « chefs ». Les troupes africaines qui ont combattu pour l’armée de l’Union furent rapidement désarmées et dispersées ou alors envoyées pour combattre sous l’Union dans les « Guerres Indiennes ». Des organisations terroristes blanches d’extrême droite ont vu le jour. Une des plus controversées, mais non la seule, est le Ku Klux Klan.

Sous le 14e amendement de la Constitution américaine, les Africain(ne)s sont devenu(e)s des citoyen(ne)s américain(ne)s et ont le droit de vote. À travers la stratégie néo-colonialiste de reconstruction, les Africain(ne)s ont pu instaurer des réformes comme le droit de faire partie d’un jury, la réforme de la protection de la main-d’oeuvre, le droit au divorce et à la propriété de la femme et l’implication dans les gouvernements locaux.

Toutefois, même ces petites réformes en étaient trop pour les Sudistes blanc(he)s. Elles et ils ont vigoureusement résisté à la reconstruction. La résistance n’a pas seulement été effectuée par les propriétaires de plantations, mais aussi par les Blancs pauvres qui ont joint des organisations telles que le KKK, White Caps, White Cross et la Ligue des Blancs. Des milliers d’Africain(ne)s ont été tué(e)s lors des élections d’État lorsque des groupes de blancs d’extrême droite ont mené des campagnes terroristes visant à contrer les gains de la reconstruction et à préserver la suprématie Blanche.

« En 1876-1877, le compromis final entre le capital Nordiste et les plantations Sudistes fut signé dans « l’entente de Hayes-Tilden ». Le Sud a promis d’accepter la domination de la bourgeoisie nordiste sur tout l’empire et de permettre au candidat Républicain Rutherford B. Hayes de succéder à Grant à la présidence des États-Unis. En retour, la bourgeoisie nordiste a donné son accord à l’hégémonie régionale des propriétaires de plantations dans tout le sud et au retrait des dernières troupes nordistes du Sud pour que le Klan puisse s’occuper des Africains comme il l’entend. Pendant que les vestiges gardés de la Reconstruction ont tenu le coup ici et là pendant quelques années (les Congressistes africains ont été élus par le Sud jusqu’en 1895), l’année critique de 1877 fut marquée par leur défaite concluante » [27].

Non sans importance pendant la même période, la classe ouvrière blanche nordiste était engagée dans une virulente lutte des classes pour le 8 heures de travail par jour, pendant que les Africain(ne)s étaient attaqué(e)s par le KKK et par d’autres organisations racistes. Au même moment, peu d’attention fut portée sur les campagnes militaires d’extermination des Premières Nations.

Pendant la guerre, plusieurs Premières Nations ont tenté de demeurer neutre dans le Sud, même si les promesses faites par les Confédérés pour les terres ont stimulé quelques Premières Nations à s’allier avec les Sudistes. Neutralité n’est pas synonyme de passivité. Les Autochtones ont donc continué la résistance à la colonisation. À partir de 1861-1863, les Apaches, conduits par Cochise et Mangas Colorado, ont combattu les forces de l’occupation. Cette résistance continuera jusqu’en 1886 lors de la capture de Géronimo. Les Santees, conduits par Little Crow, ont aussi combattu l’armée américaine à partir de 1862- 1863. En 1863-1864, cette guerre se déplacera au Dakota du Nord sous les Tétons. En 1863, les Shoshones de l’ouest ont combattus des colons et attaqués des patrouilles militaires et des routes de ravitaillement en Utah et en Idaho. La même année, les Navajos du Nouveau-Mexique et de l’Arizona se sont rebellés.

Avec la fin des travaux du chemin de fer transcontinental en 1869, la colonisation de l’ouest s’effectua rapidement. La militarisation suite à la Guerre de Sécession et la possibilité de fournir et de faciliter une opérations militaire à grand déploiement, enclencha la phase finale des « Guerres Indiennes ». Dans la période d’après-guerre, après la Guerre de Sécession, le processus génocide de colonisation entra dans une nouvelle ère, même au prix de voir des milliers de soldats américains tués ou blessés et où chaque autochtone tué rapportait 1 million de dollars. Dès 1885, le dernier grand troupeau de bisons fut massacré par les chasseurs euro-américains. Cette initiative a provoqué une contre-attaque des Indiens de la Plaine qui se verraient ainsi dépourvu(e)s de leur source d’alimentation première. Cinq ans plus tard, 350 Lakotas seront massacrés à Chankpe Opi Wakpala, les Creeks hisseront alors le drapeau blanc.


No justice on stolen land, Gord Hill.

LA COLONISATION DU CANADA

En contraste aux campagnes d’extermination américaines, le processus de colonisation au Canada s’effectua sans conflits militaires à grande échelle qui ont caractérisés les « Guerres Indiennes » aux États- Unis. Même si plusieurs Euro-canadiens [28] se portent à croire que ces différences dans le mode de colonisation reposent sur des valeurs et des cultures fondamentalement différentes, elles ne sont rien de plus que le résultat des différences dans les pratiques coloniales enracinées dans les besoins et les stratégies économiques de base. À l’instar de ce qu’on a vu suite à la Guerre d’indépendance des États-Unis, une période d’expansion et de colonisation rapide s’en suivie. Suite à la consolidation des « 13 colonies britanniques le long de la côte atlantique nord et armés d’une poussée pré-impérialiste (la doctrine Monroe et l’ idéologie de la « destinée manifeste »), les entrepreneurs qui contrôlaient la nouvelle machine de l’État ont rapidement déplacé leurs contingents militaires à travers l’Amérique du Nord » [29].

Le Canada, d’un autre côté, n’a pas combattu pour son indépendance et demeure toujours sous l’Empire Britannique.

Tel que vu plus tôt, la première colonisation majeure de ce qui deviendra l’est du Canada fut engendrée par la France. Entre 1608 et 1756, quelque 10 000 colon(ne)s français(es) sont venu(e)s s’installer au Canada. La Guerre de Sept Ans au XVIIIe siècle vit une défaite de la France. Plus tard, le Traité de 1763 a accordé aux Britanniques la domination sur la Nouvelle-France (aujourd’hui le Québec). Suite à la signature de l’Acte de Québec en 1774, la province de Québec fut élargie et le code criminel britannique prévaudra désormais. L’administration féodale implantée par les Français est demeurée pratiquement inchangée. Les conflits reliés aux questions civiles sont demeurés régis par le code civil français. Le système seigneurial, système féodal dans lequel des terres de la province étaient accordées par le Roi de France à des seigneurs (souvent de classe noble inférieure et de l’Église) qui, à son tour, louaient ses terres aux paysans contre un loyer annuel (appelé la dîme et payable sous forme de produits de la terre), continua. Lors de la Proclamation Royale de 1763, l’Acte de Québec a garanti la loyauté du clergé et de l’aristocratie française pendant la Guerre d’indépendance américaine.

Suite aux guerres du XVIIIe siècle, la colonie française vit ses effectifs militaires grimper à 60 000 hommes ce qui a enorgueilli la population française. L’expansion de la province sous l’Acte de Québec a saisi une grande partie du territoire autochtone et l’a déclaré sous la juridiction de la Couronne. Suite à la guerre de l’indépendance américaine, quelque 40 000 loyalistes ont fui les anciennes colonies britanniques pour venir s’installer au Canada où elles et ils ont occupé une partie du territoire des Autochtones (plus particulièrement celui des Haudenosaunee). Les autorités coloniales britanniques ont fait des pieds et des mains pour acquérir des terres tout en calmant les toujours importants autochtones géo-militaires. [30]

Pendant que les colonialistes s’occupaient à consolider l’administration de « l’Amérique du Nord Britannique », les voyages de reconnaissance dans le nord-ouest du Pacifque s’intensifiaient.

Tout commença en 1774, alors que les premi(ers/ères) colonisat(eur/rice)s connu(e)s dans la région de la Colombie- Britannique sont arrivé(e)s à bord du navire espagnol Santiago. Quatre ans plus tard, une expédition menée par James Cook atteignit la région. Cette expédition conduira à l’installation de grands comptoirs d’échange de fourrures profitables. La domination du commerce des fourrures durera jusqu’en 1854 alors que les colonies européennes ont commencé à accroître rapidement, tout comme l’industrie minière et du bois. Les Britanniques ont restreint leurs opérations militaires suite à la domination du commerce des fourrures, plus tôt, qui était en fonction de la collaboration des autochtones.

Néanmoins, des conflits ont tout de même éclaté, d’abord contre la déprédation britannique. Avec plus de navire fréquentant la région, les combats se sont répandus. On attaqua des vaisseaux coloniaux et on bombarda des villages autochtones. Même avant la colonisation européenne en Colombie- Britannique, l’impact du commerce était désastreux. Par exemple, de 1835, lors du premier recensement de la nation Kwakwaka-wakw, à 1885, il y eut une réduction de cette population de l’ordre de 70-90%. De 10 700 qu’elles et ils étaient, elles et ils sont passé(e)s à 3 000 [31]. De façon bien familière, avec l’invasion des commerçants européens se sont aussi amené les maladies épidémiques aussitôt que dans les années 1780 et 1790. En 1836, une épidémie de variole a frappé la côte nord et la traite des fourrures fut « réduite pendant tout l’hiver et au cours du printemps suivant » [32]. Suite à l’invasion de chercheurs d’or dans la région en 1858, une des épidémies les plus dévastatrices frappa durement en 1862. Elle tua au moins 20 000 Amérindien(ne)s [33].

Pendant ce temps, en Amérique du Nord Britannique, l’importance géo-militaire des Premières Nations fut rapidement effacée. Grâce à la vague d’immigration des loyalistes après la guerre de l’indépendance américaine, la population européenne a grimpé et elle s’est regroupée stratégiquement en garnisons dans des régions militaires clés. Des conflits contre les États-Unis étaient à venir. Tout comme l’augmentation de la population européenne dans la région, la Guerre de 1812 et la décision américaine de repousser les autochtones de la frontière nord ont contribué à briser des confédérations et diminuer grandement la puissance des Premières Nations dans la région. Suite à ces événements, les politiques coloniales britanniques sont passées de la formation d’alliances militaires à un niveau plus élevé de colonisation à travers des politiques de diminution du pouvoir des Premières Nations. La christianisation et l’européanisation générale des autochtones consistaient en une politique officielle. Dès 1850, on se dota d’un instrument dans le but de parvenir à cette fin : « L’Acte de Civilisation Graduelle de 1857 ».

« L’Acte était basé sur l’hypothèse que la civilisation complète des tribus ne pourra s’accomplir seulement que lorsque les Indiens seront en contact avec des biens de propriété individuelle... Tout Indien... qui aura été choisi par un comité spécial d’examen pour être formé à la civilisation, sans dettes et possédant un bon caractère moral pourra, s’il en fait la demande, se voir accorder 20 hectares de terres… » [34].

Ici, la civilisation des tribus doit être vue comme une élimination des bases de la culture autochtone et, par rebond, des Premières Nations en tant que nations. Les vingt hectares sont pris directement sur le territoire déjà réservé aux indiens, ce qui aura pour effet de détruire la pratique autochtone dans laquelle les terres sont de propriété collective et communautaire et de la remplacer par des parties de terre en propriété individuelle. Du côté des colonisat(eur/rice)s, le but à long terme était d’éliminer complètement les nations autochtones pour ne laisser que des individu(e)s dispersé(e)s, livré(e)s à l’acculturation et à l’assimilation par les sociétés européennes. Les dimensions patriarcales de l’assimilation forcée était très claires : seul les hommes se sont vu accorder le droit de vote [35]. Une Commission d’Enquête recommandera plus tard que les terres accordées aux autochtones ne dépassent pas 25 âcres par familles et que les organisations autochtones soient remplacées graduellement par une forme de gouvernement municipal.

Au même moment, on développa de nouvelles méthodes afin d’acquérir du territoire. Le tout débuta en 1850 pour se continuer jusqu’au XXe siècle. On « négocia » une série de traités dans lesquels les autochtones cédèrent d’immense lots de terres en échange de réserves et du droit à la chasse, à la pêche, à l’éducation et aux soins médicaux et aux paiements de rentes. Les premiers traités de ce genre furent les Traités de Robinson qui seront renégociés plus tard sous les noms de Traités numéro 1 et numéro 2.

« La relation entre le besoin immédiat pour l’expansion impérialiste interne et les traités est remarquable. Le premier de ces traités, selon les écrit d’un historien du XIXe siècle, était recherché en raison de la découverte de minerais sur les rives des lacs Huron et Supérieur. Les traités sur les prairies ont été obtenus juste avant l’implantation de fermes agricoles et le traité qui incluait une partie des Territoires du Nord-Ouest fut négocié immédiatement après la découverte de pétrole dans la vallée de Mackenzie. » [36].

Les colonisateurs savaient, de leur côté, ce qu’ils voulaient en négociant ces traités. D’un autre côté, les autochtones n’étaient pas préparés à la duplicité et au déshonneur des promoteurs de traités. Lorsqu’un comité s’est rendu dans les Territoire du Nord-Ouest afin d’enquêter sur le non-respect des clauses des Traités 8 et 11, ils ont trouvé que

« lors de plusieurs assemblées, les Indiens qui ont déclaré être présent lors de la signature des traités ont signifié qu’ils ne se souvenaient pas avoir entendu un mot à propos des droits sur les terres dans les traités. Ils ont expliqué que de mauvais interprètes ont été désignés et que leurs chefs ont signé sans même savoir ce que contenaient les traités » [37].

Les traités constituaient un aspect important du plan d’expansion du Canada vers l’ouest et du développement économique basé sur l’extraction des ressources naturelles et sur l’agriculture. En fait, la Confédération du Canada dans l’Acte de l’Amérique du Nord Britannique de 1867 visait premièrement à consolider les provinces de l’est déjà existantes et à faciliter l’expansion vers l’ouest.

Les premiers instruments de l’expansion furent le chemin de fer transcanadien, les lignes télégraphiques et les routes. L’expansion n’était pas seulement une nécessité économique, mais aussi une urgence politique puisque les États-Unis s’étendaient également vers l’ouest. L’invasion des Grandes Prairies ne s’est pas effectuée sans combats. La résistance la plus significative à cette époque fut celle des Métis, descendant(e)s des colon(ne)s françai(se)s et écossai(se)s et des Cris, où se trouve aujourd’hui le Manitoba. La Rébellion de la Rivière Rouge, aussi connue sous le nom de Première Rébellion de Riel après Louis Riel, un chef métis, éclata suite à l’avènement de plusieurs colons euro-canadiens et à l’achat du territoire de la Compagnie de la Baie d’Hudson par le gouvernement du Canada. La rébellion était dirigée contre l’annexion du territoire contre le gré des Métis qui s’élevaient à 10 000 personnes dans la région. Une force de 400 Métis armés se sont emparé d’une petite garnison et ont exigé des droits démocratiques pour les Métis dans la Confédération. L’année suivante, l’Acte du Manitoba a fait de ce territoire, une province. Toutefois, quinze ans plus tard, en 1885, les Métis, accompagnés de centaines de guerriers cris, dirigés par les Chefs Big Bear et Opetecahanawaywin, étaient une fois de plus engagés dans une résistance armée contre la colonisation. Pendant près de quatre mois, la résistance est restée debout face aux milliers de soldats du gouvernement qui, contrairement à 1870, étaient transportés rapidement et en masse via la nouvelle ligne de chemin de fer du Canadien Pacifique. Après quelques batailles, les Métis et les guerriers cris furent défaits. Les guérilleros métis et cris furent emprisonnés, tués au combat ou exécutés.

Un autre chef métis, Gabriel Dumont, a fui vers les États-Unis.

La résistance des Métis et des Cris de 1885 fut le chapitre final de la résistance armée au XIXe siècle. Toutefois, l’utilisation de la force militaire afin de maîtriser les autochtones a violé l’Acte sur les Indiens de 1876 qui fut une confirmation et une augmentation par rapport aux législations précédentes concernant les amérindiens. Cet Acte, avec de futurs ajouts et des changements, demeure aujourd’hui à la base de la législation sur les autochtones au Canada.

L’Acte sur les Indiens donna au gouvernement fédéral, à travers son département des Affaires Indiennes, le plein contrôle sur les affaires économiques, sociales et politiques des communautés autochtones. Bien plus qu’un simple instrument législatif d’administration des « Affaires Indiennes », l’Acte sur les Indiens était et est une attaque sur le fondement des Premières Nations en tant que nations. En plus de la chasse et de la pêche restrictive et de la criminalisation des moyens de subsistance économique indépendants (en 1881, l’Acte a rendu illégal pour les Amérindiens de vendre, de troquer ou de faire le trafic du poisson), l’Acte a aussi défini qui était et qui n’était pas un Indien. L’Acte a retiré le statut d’Indien aux femmes autochtones qui mariaient des non-Autochtones et a criminalisé des aspects vitaux de l’organisation et de la culture amérindienne tels que le potlatch, la danse-du-soleil, et les pow-wow. Tout ce qui constituait les bases politiques, sociales et économiques des Premières Nations était interdit. Leur culture fut attaquée parce qu’elle opposait la dernière barrière de résistance face à la colonisation européenne. Dans l’entourage de l’organisation politique,

« L’Acte sur les Indiens (de 1800) a créé une nouvelle aile de service public qui fut appelé le Département des Affaires Indiennes. L’Acte a, encore une fois, donné le pouvoir au gouverneur général d’imposer un système électoral de conseil de bande... De plus, cette nouvelle législation a permis au gouverneur général de priver les chefs traditionnels de reconnaissance en stipulant que les seuls porte-parole de la tribu devaient être élus selon les dispositions prévues... dans l’Acte sur les Indiens » [38].

En 1894, des amendements à l’Acte ont forcé la relocalisation des enfants autochtones vers les pensionnats qui étaient vus supérieurs aux écoles sur les réserves parce qu’ils retiraient les enfants de l’influence de leur communauté. Des enfants isolé(e)s et sous un contrôle européen total étaient plus faciles à assimiler. Les langues autochtones étaient interdites. Toutes les coutumes, les valeurs, les traditions religieuses et même l’habillement ont été remplacés par les éléments européens. Les abus sexuels et physiques étaient fréquents dans ces écoles et leurs effets furent tout particulièrement dévastateurs et efficaces en ce qui à trait à l’acculturation de générations d’autochtones.

L’Acte sur les Indiens fait partie de la foulée des législations ayant pour but à long terme l’assimilation des Indigènes christianisé(e)s en retirant graduellement tout « statut spécial » aux Amérindien(ne)s et en éliminant les réserves et les droits acquis lors de traités. Toutes ces opérations feraient de l’exploitation complète du territoire une simple tâche. Une stratégie pour contenir et réprimer les Autochtones qui ne se sont pas assimilé(e)s et qui furent ainsi un obstacle à la pleine expansion du Canada, l’Acte sur les Indiens a aussi refusé le droit de vote aux Autochtones et a implanté un système de passe semblable, sinon le précurseur, au Pass Laws dans les Bantoustans d’Afrique du Sud (notez que les peuples asiatiques se sont également vu refuser le droit de vote et furent la cible de furieuses campagnes racistes en Colombie-Britannique de la part du gouvernement et du mouvement pour la main-d’oeuvre ; les Autochtones et les Asiatiques ont dû patienter jusqu’en 1950 avant de pouvoir jouir de cet « illustre » droit).

EXTERMINATION - ASSIMILATION : DEUX MÉTHODES, UN SEUL OBJECTIF

Au début des années 1900, la population autochtone en Amérique du Nord a atteint son plus bas niveau. Aux États-Unis seulement, cette population a décliné à 250 000. Tout comme au Canada, les Amérindien(ne)s ont été confiné(e)s dans des réserves désolées et ensuite le processus d’assimilation débuta sous la gouverne du Bureau des Affaires Indiennes, une agence gouvernementale. Ici aussi, les pensionnats, la criminalisation de la culture autochtone et le contrôle du système économique et politique des Autochtones étaient les moyens employés. Les Amérindien(ne)s, tout comme celles et ceux du Canada, étaient perçu(e)s comme des obstacles à détruire sur le chemin du profit.

Dans les deux pays, la résistance à l’assimilation s’est poursuivie sous toutes sortes de formes. Les potlatchs et les danses-du-soleil étaient clandestinement perpétrés et on s’opposait à l’élection d’un conseil de bande. Aussi, les Amérindiens ont commencé la formation d’organisations contre les politiques gouvernementales. En 1912, la Fraternité des Indigènes de l’Alaska vit le jour, formée par les Tlingites et les Tsimshians à Sikta. Au cours de la même année, la Pétition sur les demandes territoriales des Nishgas fut remise au gouvernement canadien. Elle concernait la reconnaissance des titres autochtones puisqu’aucun traité ne fut signé avec les Premières Nations de Colombie-Britannique, à l’exception d’une petite partie du nord-est de la Colombie-Britannique qui faisait partie du Traité numéro 8 et de quelques traités mineurs sur l’île de Vancouver. Malgré tout, les Autochtones de la Colombie-Britannique se sont vu dépossédé(e)s de leur territoire et assujetti(e)s aux dispositions de l’Acte sur les Indiens. En 1916, les Nishgas se sont joints aux Salishs pour former une autre organisation inter-tribale, la Coalition des Tribus de la Colombie- Britannique. Des fonds furent amassés, des rencontres, organisées et des pétitions, envoyées à Ottawa. En 1927, un comité paritaire formé du Sénat et de la Chambre des Communes a découvert que les Autochtones « n’avaient déposé aucune demande d’acquisition des terres de la Colombie-Britannique basée sur des titres autochtones ou autres » [39]. La même année, l’article 141 fut ajouté à l’Acte sur les Indiens. Cet article interdisait d’organiser des levées de fonds, de poursuivre en justice les demandes d’acquisition de terres, d’avoir recours aux avocats.

Pendant que les nations européennes se dirigent tout droit vers les deux guerres mondiales pour l’hégémonie, l’instabilité politique et la déprédation économique sont devenues les caractéristiques générales en Amérique Centrale et en Amérique du Sud. Les régimes militaires soutenus par l’impérialisme américain et britannique ont appliqué des politiques génocides et de sévères répressions face aux Autochtones. Tout comme en Amérique du Nord, les Amérindien(ne)s étaient confiné(e)s dans des réserves désolées où l’état ou les missionnaires exerçaient le contrôle sur les systèmes politiques, économiques, sociaux et culturels. Toutefois, contrairement à la colonisation de l’Amérique du Nord où les Amérindiens étaient considéré(e)s hors du contexte de l’expansion économique, les Autochtones de l’Amérique Centrale et du Sud sont demeuré(e)s une source substantielle de main d’oeuvre exploitée. Les énormes investissements sous forme de prêts des centres impérialistes ont mis l’accent premier sur l’exportation des ressources primaires. Le « boom du caoutchouc » fut un exemple où des dizaines de milliers d’Autochtones sont mort(e)s lors de travaux forcés, de relocalisation et de massacres menés par les grands « propriétaires de terres », les compagnies et les tueurs sur gages.

« Au début du "boom du caoutchouc", la Colombie, l’Équateur et le Pérou sont devenus les champs de batailles des compagnies de pétrole. Des filiales de Shell et d’Exxon se sont battus pour les droits d’exploration en Amazonie au point de devenir impliqués dans une bataille de frontière entre l’Équateur et le Pérou en 1941. Au Brésil, 87 groupements indigènes furent effacés dans la première moitié du XXe siècle en raison de leur contact avec les frontières coloniales en expansion - spécialement à cause du caoutchouc et des mines au nord-ouest, du bétail au nord-est, de l’agriculture au sud et à l’est et de la construction de routes dans toutes les régions » [40].

Même si les politiques d’assimilation forcée n’étaient qu’occasionnellement mises en pratique, les forces militaires et paramilitaires demeuraient un moyen essentiel de maîtriser les communautés autochtones et d’ouvrir de nouveaux territoires à l’exploitation. La manifestation la plus violente de cette répression se passa au EI Salvador en 1932. Près de 30 000 individu(e)s, surtout des paysan(ne)s autochtones, furent massacré(e)s suite à un soulèvement contre la dictature militaire qui a pris le pouvoir un an auparavant. Alors que les massacres furent perpétrés sous une apparence « anticommuniste », les navires de guerre américains et canadiens demeuraient au large et les navires américains au Nicaragua étaient sur un pied d’alerte. Toutefois, « il ne se s’avéra pas nécessaire pour les forces américaines et britanniques de mettre pied à terre » L’officier américain au opérations navales témoignera devant le Congrès « que le gouvernement salvadorien avait la situation en main » [41]. Lors de la même période en Colombie, le chef autochtone, Quintin Lame donna un coup de main à la lutte pour le territoire et développa une philosophie de résistance autochtone. Au début des années 1980, son héritage refit surface à travers l’organisation de guérilla autochtone, Commando Quintin Lame. Gonzalo Sanchez fut un autre chef qui a contribué à la mise sur pied du Conseil Suprême des Indiens à Natagaima en Colombie en 1920.

Après la deuxième guerre mondiale, des changements significatifs dans le monde de l’économie capitaliste verront l’augmentation des pénétrations en Amazonie et dans les forêt des basses terres de l’Amérique du Sud. Pendant la période d’après-guerre, les États-Unis s’affichent comme la référence dans l’économie mondiale et ouvriront éventuellement le marché pour l’expansion économique. En Europe de l’Ouest et au Japon, comme le prévoyait le plan Marshall, quelque 30 millions de dollars en prêt et en aide furent injectés dans l’économie afin de reconstruire ces pays à l’image du marché américain et, non sans importance, afin d’endiguer l’U.R.S.S. (des alliances militaires furent créées ; on n’a qu’à penser à l’O.T.A.N. et à l’O.T.A.S.E. qui ont défini leur position contre le Bloc de l’Est).

L’Amérique Centrale et du Sud a été amenée sous le contrôle des américains. Un processus qui a débuté tôt dans les années 1900 a vu les États-Unis prendre la place de l’Angleterre en tant que nation impérialiste dominante dans la région, payant même les dettes dues aux Britanniques. Tel que prévu dans les plans d’après-guerre des États-Unis, l’Amérique Centrale et du Sud vont recevoir des milliards de dollars en aide financière directe des États-Unis et des banques transnationales privées. Cette aide permit aux pays « sous-développés » de s’industrialiser en important de la technologie moderne des États-Unis (une condition à l’aide financière américaine était que ces pays devaient dépenser ce prêt aux États-Unis). La dette énorme qui suivit ce processus a garanti la dépendance de ces pays et les ont ouvert aux sociétés multinationales. Des organisations internationales telles que la Banque Mondiale, la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (B.I.R.D.) et l’Agence pour le développement international furent créées afin de fournir des fonds multilatéraux destinés principalement aux secteurs de l’exportation agro-alimentaire, à l’extraction des ressources naturelles, aux projets hydroélectriques et aux infrastructures (routes, communications, etc.) nécessaires aux développement de ces industries. On retrouve lié à ce plan d’aide le Fonds monétaire international (F.M.I.) qui ne finance pas de projets spéciaux, mais qui entre en jeu avec une aide sur la balance des paiements lorsqu’un pays est incapable de payer ses dettes.

Ces projets et l’industrialisation en général ont généré des possibilités d’exploitation de certaines régions et la pénétration de régions telles que l’Amazonie et les expropriations à grande échelle accélérées dans les années 1960, ont mené à de nouvelles périodes d’extermination des peuples autochtones.

Cette restructuration économique n’est pas survenue sans résistance. Les mouvements anti-impérialismes se multipliaient chez les unions de paysan(ne)s, d’étudiant(e)s, de travaill(eur/euse)s, de guérillas et d’Autochtones. Une part substantielle de « l’aide » prévoyait un entraînement militaire, des armes et de l’équipement. Les troupes de forces spéciales américaines n’étaient pas basées uniquement en Asie du Sud-Est, mais étaient plutôt actives en Amérique Centrale entraînant des escadrons de la mort et dirigeant des massacres. La militarisation à elle seule, faisant partie d’une campagne anti- insurrection généralisée, a précipité une montée de violence. Au Guatemala seulement, entre 1966 et 1968, quelque 8000 personnes furent massacrées par les militaires guatémaliens sous les ordres des conseillers faisant parti des Bérets Verts américains et des avions militaires américains ont effectué des missions de bombardement. Des organisations paramilitaires, les escadrons de la mort, ont traqué les « éléments subversifs » en collaboration avec le gouvernement, l’armée, les multinationales et les propriétaires des terres [42]. Les principales cibles de cette campagne, nommée « Opération Guatemala », furent les Mayas.

Un autre aspect des plans anti-insurrections était le contrôle de la population. L’Agence pour le développement international (A.D.I.) fut créée en 1961. À l’origine, elle finançait les états américains. Utilisant le faux prétexte de la pauvreté des masses et de la famine causées par le problème de la surpopulation, au lieu de l’impérialisme, le contrôle de la population devint le moyen par excellence qui résolut l’important dilemme à qui faisait face le « monde moderne ». Sous une apparence de « planification de la famille », l’Agence pour le développement international débuta le financement d’un grand nombre d’organismes publics et privés, de fondations et d’églises qui fournissaient un enseignement, de l’équipement et des cliniques pour le programme de régulation des naissances. Entre 1968 et 1972, « les fonds débloqués pour les programmes de population, à travers les législations et rendus obligatoires par l’Agence, ont dépassé les 250 millions $ » [43]. L’Amérique du Sud a reçu la plus grosse part du gâteau. En plus du matériel éducationnel, des contraceptifs oraux, des dispositifs intra- utérins (DIU) et autres produits pharmaceutiques développés par les lucratives entreprises biotechnologiques travaillant sur les gènes dans les centres impérialistes. L’instrument principal de contrôle de la population demeure la stérilisation. Entre 1965 et 1971 au Brésil, on estime à 1 million le nombre de femmes qui ont été stérilisées [44]. À Puerto Rico, 34% des femmes en âge d’avoir des enfants furent stérilisées jusqu’en 1965 [45]. Entre 1963 et 1965 en Colombie, plus de 40 000 femmes ont été stérilisées [46]. En contraste à ces programmes, au « Tiers-Monde », les centres impérialistes voient à des restrictions sur les avortements et à la lutte des femmes pour la liberté de choix. Mais même ici, il existe un double standard pour les femmes non-européennes :

« Lee Brightman, président de l’Union des Amérindiens, estime que de la population indigène de 800 000 (aux États-Unis), 42% des femmes en âge de donner naissance et 10% des hommes... ont été stérilisés... La première enquête portant sur la stérilisation des femmes indigènes... par le Dr Connie Uri... a confirmé que 25 000 indiennes furent stérilisées en permanence dans les installations du Service de santé indien seulement jusqu’en 1975... Selon une étude sur la fertilité effectuée en 1970, 20% des femmes noires mariées furent stérilisées, ce qui est presque trois fois plus que les femmes blanches mariées. Il y eut une augmentation de 180% dans le nombre de stérilisations effectuées en 1972-1973 dans les hôpitaux municipaux de la ville de New York qui desservent davantage les quartiers de Puerto Ricains » [47].

Des résultats similaires furent constatés dans les communautés Inuit dans les Territoires du Nord-Ouest. De toute évidence, la surpopulation n’est pas un problème en Amérique du Nord et en Amérique Centrale et du Sud non plus. Il s’agit plutôt d’un moyen de réduire une portion spécifique de la population qui pourrait se soulever contre son oppression et qui n’aurait pas sa place aux fins monétaires. En d’autres termes, « il est plus efficace de tuer les guérillas à la source ».

De tous les pays d’Amérique du Sud qui ont connu une industrialisation massive après la deuxième guerre mondiale, le Brésil est probablement le plus connu. Suite au coup d’état de 1964, soutenu par les États- Unis, le F.M.I. et des multinationales, les investissements étrangers se sont mis à entrer. Entre 1964 et 1971, plus de 4 milliard de dollars furent injectés au Brésil via la Banque mondiale, l’A.D.I., la B.I.R.D. et d’autres [48].

Entre 1900 et 1957, la population autochtone du Brésil a décliné de 1 million à moins de 200 000 [49], en raison du boom du caoutchouc, de l’élevage en ranch et de l’industrie minière. Suite au coup d’état de 1964 et à l’accroissement des investissements étrangers, la pénétration de la région amazonienne, tout particulièrement, s’intensifia. À mesure que ces industries envahissaient de plus en plus de territoires autochtones, les campagnes d’extermination reprirent. Les Autochtones furent traqué(e)s par les escadrons de la mort, leurs communautés furent bombardées et massacrées et on a répandu des maladies épidémiques volontairement par injection ou en infestant les draps. Au cours des années 1960 seulement,

« des 19 000 Monducurus qui croit-on ont existé dans les années 1930, on en dénombra alors 1200. Le nombre de Guaranis a été réduit de 5000 à 300. Il ne resta que 400 Carajas sur 4000. Des Cintas Largas qui furent bombardés du haut des airs et repoussés vers les montagnes probablement 500 d’entre eux sur 10 000 ont survécu... Quelques autres comme les Tapaiunas qui ,dans ce cas-ci, se sont fait offrir un cadeau empoisonné à l’arsenic (caché dans le sucre) sont tous disparus » [50].

Toutes ces atrocités faisaient partie d’une campagne « pacifique » destinée à éliminer les Autochtones qui, ici aussi, étaient vus comme une entrave au « développement ». Les agences gouvernementales responsables des « Affaires Indiennes » faisaient partie des pires agences lors de cette campagne, tellement que le Service pour la protection des Indiens fut démantelé et remplacé par la Fondation nationale pour les Indiens. Rien de moins surprenant, le seul changement fut le nom. Dès 1970, les plans pour la construction d’un système routier étendu pour toutes les industries qui ont récemment envahi l’Amazonie furent annoncés.

L’année suivante, le président de la Fondation nationale pour les Indiens a signé un décret qui se lit comme suit : « l’aide aux Indiens sera aussi complète que possible, mais ne pourra entraver le développement national ni bloquer les nombreux axes de pénétration dans la région amazonienne » [51]. Le système routier trans-amazonien a causé la relocalisation forcée de quelque 25 nations autochtones et des milliers de mort(e)s. La batailles contre les routes est toujours en cours aujourd’hui.

Le Brésil n’est qu’un exemple. Des résultats semblables ont été constatés dans d’autres pays de l’Amérique du Sud.

En apparence contraire à ces campagnes d’extermination, le Canada semblait se diriger vers une époque beaucoup plus « libérale ». Pourquoi ? Parce que les autochtones se sont vu accorder le droit de vote, les lois de passe furent abrogées et les potlatches furent à nouveau permis ! En fait, l’Acte sur les Indiens était lui-même vu par plusieurs comme un obstacle à l’assimilation des autochtones. Les effets combinés de l’Acte sur les Indiens, les pensionnats et autres ont tellement affaibli les Premières Nations qu’ils n’étaient pratiquement plus nécessaires. Jadis, les puissantes bases culturelles des autochtones telles que les potlatches ne sont qu’aujourd’hui que des spectacles pour le divertissement des Eurocanadien(ne)s tels les rodéos. Dès 1969, le gouvernement ira aussi loin que de dévoiler ses objectifs dans un document qui porte bien son nom, le Document Blanc. Son intention était de mettre un terme au statut légal et constitutionnel spécial des autochtones et de renier la valeur des droits que conféraient les traités. Visiblement une politique d’aide aux Indiens, le document suggérait même une révision complète de l’Acte sur les Indiens et une élimination graduelle du Département des affaires indiennes sur une période de cinq ans. Au sujet de l’abandon des droits que conféraient les traités et de la revendication des territoires, le document stipula que

« les revendications de territoire de la part des aborigènes est tellement générale et indéfinie qu’il n’est pas réaliste de croire à des revendications spécifiques capables d’y remédier sauf à travers une politique et un programme qui mettront fin à l’injustice envers les Indiens membres de la communauté canadienne » [52].

Pendant la même période, le Canada augmentait ses activités en matière d’extraction des ressources naturelles. Elles ont débuté dans les années 1950 spécialement dans les mines d’uranium, source d’énergie nucléaire, qui fut exporté aux États-Unis pour l’énergie nucléaire américaine et l’industrie des armes. L’extraction de l’uranium était d’abord concentrée en Saskatchewan et au sud-ouest des États-Unis. Il y avait une augmentation des explorations pour trouver du pétrole et du gaz naturel dans le nord et on développait des projets hydroélectriques. Existe-t-il un meilleur moyen d’aller de l’avant dans l’exécution de ces projets dangereux et dommageables qu’en accélérant l’objectif à long terme du gouvernement de politique d’assimilation et de retirer aux autochtones le droit à leurs terres ? Visiblement, les campagnes d’extermination du Brésil et les politiques d’assimilation du Canada représentent les deux côtés de la même médaille : la destruction des Premières Nations et l’ouverture des terres à de plus grandes explorations. Ce que ces gouvernements n’avaient pas prévu était la résistance continue des autochtones.

LA LUTTE DU PEUPLE POUR LA LIBERTÉ

En 1960, en même temps qu’eut lieu une irruption de combats à l’échelle internationale dont les mouvements de libération nationaux en Afrique, en Asie et en Amérique, on assista à une recrudescence de la résistance autochtone. Cette recrudescence a pris sa source dans les luttes perpétuelles des autochtones et dans le développement de la lutte contre l’extraction continuelle des ressources naturelles à travers les Amériques.

En Amérique du Sud et Centrale, la résistance autochtone s’est développée en compagnie des mouvements étudiant(e)s, de travaill(eur/euse)s, féministes et de guérillas qui étaient en grande partie constituées de métis dans les centres urbains.

En Équateur, la nation Shuar a formé en 1964, une fédération constituée des associations régionales de communautés Shuars. Elle a influencé le développement d’autres organisations autochtones. Elle fut aussi la cible de la répression gouvernementale alors qu’en 1969, ses locaux furent incendiés et ses dirigeants, attaqués et emprisonnés. En 1971 en Colombie, 2000 autochtones provenant de 10 communautés ont créé le Conseil Régional Indigène de Cauca (CRIC). Le CRIC a rapidement entrepris une campagne pour la récupération de leurs réserves, volées. En Bolivie, deux organisations d’Aymarans ont vu le jour : le Mink’a et le Movimiento Tupac Katari (Mouvement Tupac Katari). Des conférences nationales et internationales furent organisées dans différents pays et dès 1974, une conférence au Paraguay attira des délégués de tous les pays d’Amérique du Sud et Centrale provenant d’un large éventail de nations.

L’objectif premier de ces mouvements autochtones était de récupérer les terres volées. L’organisation d’occupations, de protestations et de blocus routiers était répandue. Au Chili, les Mapuches ont commencé à déplacer les barrières qui séparaient les réserves des terres agricoles et à étendre leur territoire. Au Mexique, des paysan(ne)s autochtones ont mené des opérations d’occupation à grande échelle. En 1975, on occupait 76 régions du Sinaloa uniquement, représentant environ 25 000 âcres de terre sous occupation au Sinaloa et au Sonora. Dès décembre 1976, des dizaines de milliers d’autochtones occupèrent des terres au Sonora, au Sinaloa, dans Durango et dans Coahuila [53]. Il fallait s’attendre à ce que ces occupations et ces protestations ne soient pas sans conséquences. Les mouvements autochtones furent donc les cibles d’assassinats, de massacres, de destruction de communautés et de tactiques de la terre brûlée.

De façon similaire, la reprise des terres traditionnelles autochtones était l’un des objectifs principaux des combats menés en Amérique du Nord. Une des premières occupations de cette époque fut la prise par les Mohawks du pont Seaway International en Ontario en décembre 1968. Le geste avait pour but de protester contre la décision du Canada d’imposer des droits de douane aux Mohawks sur les produits qui traversent la frontière internationale, malgré les dispositions d’un traité qui leur donnaient le droit d’aller et venue et le fait que la frontière était en territoire mohawk. L’occupation pris fin lors de l’intervention conjointe de la G.R.C. et de la police ontarienne qui ont procédé à l’arrestation de 48 Mohawks. Toutefois, la lutte des Mohawks allait conduire à de futures occupations sous le mouvement « Nationalisme Rouge / Pouvoir Rouge » qui a balayé le Canada et les États-Unis en même temps que les mouvements de libération des Puerto Ricains, des Chicanos et des Noirs.

En 1968, le Mouvement des Amérindiens (AIM) vit le jour à Minneapolis St-Paul. D’abord une organisation formée d’après les groupements de gauche euro-américains et inspirés par la lutte pour les droits civils des années 1950 et 1960, par des groupes comme les Panthères Noires (Black Panthers), AIM s’est élevé contre la violence policière, le racisme et la pauvreté. D’abord concentré dans les villes, surtout dans celles des Dakotas (Nord et Sud) et du Nebraska, AIM s’est répandu rapidement et s’est développé en d’autres mouvements agissant autant dans les ghettos urbains que dans les réserves rurales.

Même si les membres de AIM étaient actifs dans plusieurs combats en développement (en partie parce que AIM est un organisme international et non seulement régional), AIM n’était qu’une partie du mouvement « Nationaliste Rouge ». En 1968, sur la côte ouest, est né l’Alliance Nationale pour le Pouvoir Rouge. Pendant l’année qui suivit, des Indiens ont occupé la prison d’Alcatraz dans le port de San Francisco déclarant l’avoir « découverte ». L’occupation durera 19 mois et sera reconnue comme le premier événement majeur du combat pour le « Pouvoir Rouge ». Les combats locaux et régionaux de tous les jours était un autre aspect de cette période. Des combats indépendants certes, mais toujours reliés à l’évolution du mouvement de libération des autochtones. Les communautés combattaient le vol de leur terre, la pauvreté, la pollution, etc. En 1970, à titre d’exemple, 200 Métis et Amériendien(ne)s ont occupé le Alberta New Start Centre au Lac La Biche. Ils protestaient contre l’annulation du programme conduit par le Centre par le gouvernement fédéral.

La même année, AIM fut impliqué dans l’occupations de Plymouth Rock et de la réplique du navire le Mayflower le jour de l’Action de Grâce. Il a organisé des protestations et des mouvements contre le BAI (Bureau des Affaires Indiennes). Au Dakota du Sud, la police est intervenue massivement lors d’une protestation au Palais de Justice de Custer. La protestation a alors tourné en émeute au cours de laquelle le palais de justice et plusieurs autres immeubles ont été incendiés. En 1972, AIM a organisé la « Caravane de la Croisade des Traités Rompus » et a rédigé un document portant sur 20 points traitant de la condition générale des autochtones aux États-Unis. La croisade se termina à Washington D.C. où des manifestant(e)s ont occupé et détruits les locaux du BAI.

Dans l’année qui suivit, les traditionalistes de la réserve de Pine Ridge au Dakota du Sud ont demandé l’appui du AIM lors d’une campagne de terreur menée par le président des tribus, Dick Wilson, et les despotes du BAI. Le 27 février, une caravane s’est rendue à Wounded Knee, le site du massacre de 1890, pour réunir un Conseil. La région fut aussitôt assiégée par la police. Ce qui était
prévu pour n’être qu’une réunion d’une journée s’est finalement terminé en une occupation armée de 71 jours au cours de laquelle 300 personnes ont résisté a un grand déploiement de forces militaires et paramilitaires, d’agent(e)s du FBI, de la police du BAI, de la police locale et d’état et de personnel militaire. Deux autochtones furent tués par balles, deux autres, blessés et un agent fédéral fut blessé. Lors des trois semaines d’occupation à Wounded Knee, on a créé la nation indépendante des Oglalas.

« La formation de la nation Oglala fut plus qu’un geste de bravoure de la part d’indiens assiégés. Elle représenta la plus grande menace, en plus d’un siècle, envers les plans du gouvernement américain qui désirait soumettre les indigènes des États-Unis et les priver de leurs terres à des fins d’exploitation et pour le profit des Blancs » [54].

Étant donné que les réserves de vivres et de munitions diminuaient et que l’armée préparait un assaut final, les assiégé(e)s ont décidé de retraiter. Le 7 mai, près de la moitié d’entre elles et d’entre eux sont passé(e)s à travers les lignes ennemies et la journée suivante, les 150 qui demeuraient ont déposé les armes. La période qui suivit donna lieu à une campagne de terreur dirigée par le FBI, le BAI et le régime Wilson. En 1976, près de 250 personnes dans et autour de Pine Ridge étaient mortes dont 50 membres du AIM. Les fers-à-bras de Wilson, en collaboration avec le programme de contre-intelligence du FBI (COINTELPRO), ont procédé à des mitrailles, des bombardements, des assauts et des assassinats. Le 26 juin 1975, un assaut du FBI contre un camp du AIM donna lieu à un échange de coups de feu au cours duquel deux agents du FBI et un Oglala, Joseph Stuntz, furent tués. Même si aucune enquête ne fut menée quant à la mort de Joseph Stuntz, ni lors des meurtres des autres Oglalas traditionalistes et de membres du AIM pendant cette période, le FBI a lancé une campagne afin d’emprisonner les membres du AIM pour le meurtre des deux agents. Plus tard, Leonard Peltier sera trouvé coupable des meurtres dans un procès au cours duquel rien n’a été démontré sauf la fabrication par le FBI de preuves et de témoignages.

Lors de la même année de la libération de Wounded Knee, AIM s’installa au Canada suite au blocus routier de Cache Creek en Colombie-Britannique. Le blocus servait de protestation aux conditions pitoyables de logement sur une réserve à proximité. En novembre de la même année, le bureau des affaires indiennes de Kenora en Ontario était pris en otage pendant une journée par les Ojibways. L’année suivante, des membres de la Société des Guerriers Ojibways et du AIM ont effectué une occupation armée de Anicinabe Park, près de Kenora, du 22 juillet au 8 août. Deux mois plus tôt, des Mohawks d’Akwesasne et de Kahnawake ont occupé Moss Lake au nord de l’état de New York, réclamant et renommant la région Ganienkeh, le territoire de Flint, nom traditionnel des Kanienkehakes, Peuple de Flint. Suite à un échange de coups de feu entre Mohawks et une bande de Blancs, la police a insisté pour pénétrer Ganienkeh afin d’enquêter, mais elle s’est butée au refus des Mohawks. Comme la menace policière s’intensifiait, des Autochtones dont des vétérans de Wounded Knee se sont précipités vers Ganienkeh. On y a construit des bunkers et creusé des tranchées. La police a finalement baissé les bras (en 1977, les Mohawks furent d’accord à laisser Moss Lake en échange de terres dans le comté de Clinton qui est plus près de Kahnawake et Akwesasne).

Le 14 septembre 1974, la « Caravane des Premières Nations » quitta Vancouver. Une initiative des autochtones qui ont participé à l’occupation de Anicinabe Park. Semblable à la Croisade des Traités Rompus, la caravane réclama la reconnaissance et le respect des traités et des droits des autochtones, une entente quant aux réclamations territoriales des autochtones, l’abrogation de l’Acte sur les Indiens et une enquête sur le Département des affaires indiennes par les autochtones visant à le démanteler. Le 30 septembre, la caravane avait conduit entre 800 et 900 autochtones sur la colline parlementaire à Ottawa. Au lieu d’une rencontre avec les parlementaires, les protestant(e)s se sont buté(e)s à l’escouade antiémeute de la police et à des barricades. Lors de l’assaut de la police contre la manifestation, les hostilités ont éclaté causant des douzaines de blessés du côté des autochtones et neuf chez les forces de l’ordre.

En 1976, la « Route de l’Autodétermination » fut l’une des protestations autochtones anti-bicentenaire des plus connues sur la côte ouest américaine. Son but était d’obtenir des réponses du gouvernement concernant les points soulevés par la caravane de 1972. Comme en 1972, les autorités gouvernementales ont refusé de rencontrer les gens et 47 manifestant(e)s furent arrêté(e)s aux locaux du BAI à Washington D.C.

Toujours à cette époque, les Autochtones se sont regroupé(e)s en organismes internationaux. Aux États-Unis, des membres du AIM, de nombreux chefs traditionnels et des Anciens ont créé, en 1974, la Conférence du Traité International des Indiens.

« La Conférence a pour but la reconnaissance des traités par les ÉtatsUnis en tant que moyen de rétablir des relations viables entre les Premières Nations et ce pays. Par la suite, il y aura des actions d’entreprises afin de contrôler l’exploitation, de remettre le contrôle des territoires indigènes... aux indigènes et permettre le retour de formes de gouvernements appropriées à chaque nation. » [55].

La CTII fut la première organisation autochtone à appliquer et à recevoir le statut non-gouvernemental de l’O.N.U. Des délégués de la CTII, du CRIC et d’autres organisations indigènes d’Amérique du Sud et Centrale ont jeté des bases solides afin de développer des structures légales basées sur les lois internationales souhaitant le retour du statut de nations souveraines pour les Premières Nations. Des conférences telles que la rencontre des O.N.G. sous la commandite de l’O.N.U. sur « les problèmes des Indigènes de l’hémisphère ouest » de 1977 ou le Quatrième Tribunal International Russell de 1980 furent mises sur pied afin d’examiner et de notifier la continuité des pratiques génocides et de créer des politiques afin de résoudre le problème. Le résultat final de ces conférences n’est qu’un forum argumentatif sur le génocide. Au mieux, il exerce une pression internationale discutable sur certain pays. En tant que membre du AIM, Russell Means a déclaré : « Il semble vain de faire appel aux États-Unis ou à son système judiciaire pour rétablir son honneur en respectant ses traités » [56]. A la lumière du rôle qu’a joué l’O.N.U. dans la guerre du Golfe, menée de front par les États- Unis, et de sa récente révocation de la condamnation du sionisme en tant que racisme, l’O.N.U. semble elle-même inutile.

LE COMBAT POUR UN TERRITOIRE

Tel que vu plus tôt, le système économique mondial a subi des changements radicaux suite à et à cause de la deuxième guerre mondiale. Lors de la montée en flèche de l’économie d’après-guerre, de nouvelles politiques énergétiques furent annoncées aux États-Unis et au Canada. Tel que spécifié auparavant, un des aspects de ces politiques s’appuyait sur la recherche deminerai d’uranium et sur ses possibilités pour l’énergie nucléaire et les systèmes d’armement. Des projets de dérivation de cours d’eau ou d’énergie hydroélectrique ou les deux, du Canada vers les États- Unis, ont aussi été mis au jour en 1964 à la signature de l’Alliance Nord Américaine sur l’Eau et l’Énergie. Suite à la crise du pétrole de 1973, les projets de développement de sources d’énergie « internes » se sont intensifiés. Aux États-Unis, cette politique énergétique fut appelée le « Projet Indépendance ».

« Il semble évident que le gouvernement américain prévoyait que les indigènes, tout comme ceux des autres régions colonisées dans le monde qui ont essayé de résister au vol de leurs ressources naturelles, se battraient... C’est la conclusion la plus logique à laquelle il faut se rendre si on jette un coup d’oeil au projet de loi 826 du Sénat qui étend la Loi Fédérale sur l’Énergie de 1974 vers une politique énergétique détaillée centrée sur les États-Unis. L’Article 616 de ce projet de loi, propose que les administrateurs de l’Énergie puissent profiter d’une participation militaire dans l’exercice de leurs fonctions et que cette force armée ainsi désignée sera une « armée de l’énergie » indépendante et entièrement sous les ordres du Département de l’Énergie » [57].

En 1971, une association de compagnies d’énergie électrique et des bureaucrates des ressources gouvernementales ont pondu l’Étude sur l’énergie du Centre-Nord « qui proposait l’exploitation de mines de charbons à ciel ouvert dans le Montana, au Wyoming et aux Dakotas… » [58].

Au Canada, on compare ces plans aux projets hydroélectriques construits au Manitoba et à la Baie James dans le nord québécois. On explora aussi le grand nord canadien à la recherche de pétrole et de gaz naturel. Il y avait aussi des installations telles que l’oléoduc de la vallée de Mackenzie, les mines d’uranium de la Saskatchewan, etc. Aux États- Unis, les nouvelles politiques énergétiques ont conduit à de nombreux assauts contre les autochtones.

En 1974, on passa la Loi Publique 93-531 qui autorisait la partition des territoires Hopis et Navajos au nord de l’Arizona et la relocalisation forcée de quelque 13 000 individu(e)s. Le but de la relocalisation consistait officiellement à résoudre une fausse « dispute de territoire entre Hopis et Navajos ». Dans les faits, il y avait plus de 19 milliards de tonnes de charbons sur ces territoires. Un autre exemple est celui de Wounded Knee. Au cours de la deuxième guerre mondiale, la partie nord-ouest de la réserve de Pine Ridge fut « empruntée » par le gouvernement fédéral pour servir de champ d’essai à l’armement aérien. Elle devait être rendue à la fin de la guerre.

« La guerre pris fin en 1945... jusqu’en 1970. Quelques traditionalistes ont commencé à demander « Où sont nos terres ? Nous les voulons ! » Que s’est- il passé ? Une certaine agence... la NASA, a mis un satellite en orbite avec la collaboration de... l’Institut National sur la Recherche et l’Évaluation de l’Uranium. Il ont découvert un site particulièrement riche en uranium sur... le champ d’essai en question. » [59].

Dick Wilson fut nommé président du Conseil des Tribus, financé, approvisionné et appuyé par le gouvernement dans le but de lui faire céder par écrit le champ d’essai au gouvernement américain. Le 26 juin 1975, Dick Wilson a signé l’accord cédant les droits de ce 10% de la réserve de Pine Ridge au gouvernement fédéral. Le même jour, le FBI a pris d’assaut le campement du AIM. 

« Sur une période d’un peu plus de 200 ans, des 100% du territoire jadis appartenant aux indigènes en 1600, il n’en resta que 10% et à la fin des années qui ont suivi, 3%. De nos jours, nous possédons des droits nominaux sur environ 3% de notre territoire original aux ÉtatsUnis. Les indigènes furent confinés sur les terres qu’on croyait être les plus désolées... Ironiquement, selon la perspective du Prédateur, on s’est rendu compte que ces terres contenaient environ les deux tiers de ce que les américains considèrent comme leur réserve domestique d’uranium ; peut-être 25% du charbon faible en soufre facilement accessible ; peut-être un cinquième du pétrole et du gaz naturel et probablement toute la réserve de cuivre et de bauxite. Il y a donc de l’or. Il y a des ressources renouvelables et des droits d’eau dans l’ouest désertique » [60].

Des comparaisons similaires peuvent être effectuées au Canada et dans les pays de l’Amérique du Sud et Centrale. Avec d’extraordinaires changements dans l’industrialisation et dans les demandes énergétiques, en plus des nouvelles technologies de localisation et d’extraction des ressources, le processus de colonisation est, depuis la seconde guerre mondiale, entré dans une nouvelle phase. En plus de ces situations explosives surgissant de la « Dernière Guerre Indienne : Pour l’Énergie », il y a les demandes quotidiennes de capitaux des autres industries telles que la foresterie, les pêches, le caoutchouc, l’agriculture, l’élevage, etc. et pour les essais d’armes militaires, les entraînements, etc.

En tenant compte de ces développements depuis la deuxième guerre mondiale et du processus de colonisation qui a précédé, on comprend mieux l’histoire de la résistance autochtone. Mais le plus important est de savoir que cette résistance continue toujours aujourd’hui.

AU NOM DE LA RÉSISTANCE TOTALE

« Maintenant que la guerre nous est imposée, nous abandonnerons nos coeurs et nos âmes à la guerreet nous combattrons de toutes nos forces... Nos esprits sont forts. Nous ne faisons finalement qu’un avec nous-mêmes et le monde de nos ancêtres. Nous sommes fiers de nos enfants et des générations à venir... Nous sommes libres. Aucun joug ni l’oppression du gouvernement blanc ne peut nous contenir. Nous sommes libres. »
L’Office de la Nation Mohawk, 27 août 1990.

En mars 1990, les Mohawks de Kanesatake ont occupé la Pinède, terres traditionnelles qui contiennent également le cimetière de la réserve et un terrain de lacrosse, contre les plans de la municipalité d’Oka d’agrandir son terrain de golf sur celle-ci. L’agrandissement du terrain de golf faisait parti d’un plan d’expansion de la lucrative industrie touristique. Le 11 juillet, plus de 100 policiers de la Sûreté du Québec ont assailli les barricades en ouvrant le feu sur des femmes et des enfants pour la plupart et en tirant des grenades lacrymogènes et fumigènes. Des membres de la Société des Warriors de Kahnawake ont pris possession du pont Mercier, pont majeur reliant la banlieue à Montréal, en riposte à une seconde attaque de la Sûreté du Québec. D’autres barricades furent érigées sur les routes et les autoroutes autour de Kanesatake et de Kahnawake par des centaines d’hommes et de femmes mohawks débutant ainsi l’un des plus longs affrontements de l’histoire récente de l’Amérique du Nord. L’affrontement qui a vu se déployer des centaines de policiers et plus de 4000 soldats des Forces Armées Canadiennes a répandu un mouvement de solidarité des autochtones à travers tout le Canada. Des routes et des chemins de fer furent bloqués et les locaux des Affaires Indiennes, occupés. On a tenu des manifestations et saboté des ponts de chemins de fer et des lignes électriques. La vulnérabilité de ces infrastructures était bien connue. En fait, la possibilité que la résistance autochtone augmente fut une raison pour laquelle aucun massacre ne fut perpétré contre les autochtones qui avaient fait leur niche dans le Centre Communautaire.

Le 26 septembre, les derni(er/ère)s réticent(e)s ont collectivement décidé de se, rétracter, et non se rendre, et de libérer les lieux. Elles et ils s’en retournaient, en théorie, chez-elles et chez-eux refusant de se rendre parce qu’elles/ils n’avaient commis aucun crime. Elles et ils défendaient simplement le territoire Mohawk souverain. Il va sans dire que les forces de l’occupation colonialiste furent en désaccord et les capturèrent. Ils soumirent quelques Warriors à la torture en leur infligeant des corrections et en faisant croire à des exécutions.

Au même moment, des membres de la Communauté des Peigan Lonefighters ont privé un système de barrages de l’Alberta de son cours d’eau, la rivière sacrée Oldman, en la dérivant. Elles et ils ont dû faire face à la G.R.C. Milton Born with A Tooth sera subséquemment arrêté pour avoir tiré des coups de feu d’avertissement ans les airs. Il a ensuite été condamné à 18 mois d’emprisonnement.

La nation Lil’wat de Colombie-Britannique a érigé des blocus routiers sur leurs terres traditionnelles afin d’affirmer leur souveraineté et par geste de solidarité envers les Mohawks. Quatre mois plus tard, le 6 novembre, la G.R.C. prendra les barricades d’assaut et arrêtera environ 50 Lil’wats et leurs supporters. Le 24 novembre, une opération de déboisement sur les terres des Cris Lubicon dans le nord de l’Alberta fut la cible d’une attaque dont les dommages matériels furent évalués à 20 000 $. 13 Cris Lubicon dont le chef Bernard Ominayak furent plus tard accusées du geste, mais sont toujours en attente d’un procès lequel ils ne reconnaissent aucune juridiction sur le territoire des Cris Lubicon.

À la même époque, les peuples autochtones d’Amérique du Sud menaient leurs combats.

En octobre 1990, en Bolivie, quelque 800 Autochtones de la région amazonienne (les Moxenos, les Yuracares, les Chimanes et les Guaranies) ont marché 330 miles (env. 530 km) de la ville de Trinidad, au nord, jusqu’à La Paz lors d’une « Marche pour la Dignité et le Territoire » d’un mois. Lorsque la marche a atteint les montagnes qui séparent les hautes terres des plaines amazoniennes, des milliers d’Aymaras, de Quechuas et d’Urus provenant de l’autre côté des hautes terres de la Bolivie les ont rejoint(e)s afin de les accueillir. Comme leurs frères et soeurs de l’Amérique du Nord, cette marche se voulait une protestation contre le déboisement et l’élevage de bétail en territoire autochtone.

En Équateur, du 4 au 8 juin 1990, un grand soulèvement autochtone a paralysé le pays. La plupart des routes et des autoroutes majeures furent bloquées. Des manifestations de près de 50 000 personnes se sont répandues à travers le pays malgré une intervention policière massive et une répression militaire. Des manifestations furent la cible d’attaques, des manifestant(e)s ont été battu(e)s, bombardé(e)s aux grenades lacrymogènes et tiré(e)s à coup de fusil. Sous la coordination de CONAIE (Confederacion de Nacionalidades del Ecuador), une organisation nationale d’Indiens formée en 1986, un document en 16 points fut publié : Mandat pour la Défense, la Vie et les Droits des Nations Indigènes. On demandait le contrôle du territoire autochtone, des réformes constitutionnelles et sur les taxes et le démantèlement d’organismes pseudo-autochtone contrôlés par le gouvernement. Le gouvernement s’est ouvert à des discussions sur les demandes. Le soulèvement a contrôlé la quantité de nourriture disponible dans les régions urbaines, a perturbé l’apport en eau potable et en électricité, a fermé les écoles et a investi les puits de pétrole, les aéroports et les stations radiophoniques. L’invasion autochtone avait arrêté toute activité dans le pays.

Pendant ces 500 années au début desquelles le génocide apparut dans les Caraïbes et toujours aujourd’hui, il est évident que le processus de colonisation ne s’est jamais arrêté. Les tueries, les vols et la destruction de l’habitat naturel se poursuit. Les premiers conquistadores ont été remplacés par les forces armées et les escadrons de la mort au sud et par les forces militaires et policières au nord. Les maladies épidémiques européennes continuent de faire rage, maintenant accompagnées de pesticides mortels et de polluants industriels. L’esclavage n’est plus, nous dit-on, mais dans plusieurs cas, des Amérindien(ne)s, des Noir(e)s et de pauvres Métis remplissent les prisons en nombre disproportionné. Quelques conditions n’ont jamais vraiment changé : les peuples d’origine existent toujours, mais dans des conditions de pauvreté, de suicide et de désespoir sombrant dans l’alcoolisme. Ce sont toutes des conditions apportées il y a 500 ans. Autre chose est aussi demeuré : l’esprit de résistance et de combat contre les colonisat(eur/rice)s. La résistance contre ce génocide est demeurée sans fin et démontre que le peuple n’a jamais été défait ni conquis.

De cette façon, la Campagne des 500 Ans de la Résistance Autochtones en 1992 constitue un point important dans cette histoire : « Sur notre continent, l’histoire se divise en trois phases : avant l’arrivée des envahisseurs, ces 500 années et la phase débutant aujourd’hui, laquelle nous devons définir et construire » (Campagne des 500 ans de Résistance Autochtone et Populaire).

À la mémoire de Crazy Horse,
À la mémoire de Tupac Katari,
Au nom de la Résistance Totale.

NOTES DE FIN DE DOCUMENT

Sources concernant les données sur la population amériendienne avant 1492 :

DOBYNS, Henry F.. Native American Historical Demography : A Critical Bibliography. University of Indiana Press, 1976 ; « Estimating Aboriginal Population : An Appraisal of Techniques with a New Hemispheric Estimate », Current Anthropology, n°7, 1966.

CHANU, Pierre. Conquête et exploitation de nouveaux mondes (XVle siècle). Paris, 1969 (estimation de la population entre 80 et 100 millions).

JACOBS, William R. The Tip of an Iceberg : Revisionism. In William & Mary Quarterly, n°31, 1974 (estimation de la population entre 50 et 100 millions).

WILSON BORAH, Woodrow. America as Model : The Demographic Impact of European Expansion Upon the Non-European World. In Actas y Memorias XXXV Congreso Internacional de Americanistas, Mexico, 1962 (estimation de la population à 100 millions).

[1FUSON, Robert H. The Logi of Christopher Colombus. International Marine Publishing Co., Maine,1987, page 76.

[2Ibid., page 80. Colomb était inconsistant dans le nombre réel de Tainos qu’il a enlevés.

[3Ibid., page 107.

[4Akwesasne Notes, vol. 9, n°4.

[5WEATHERFORD, Jack. Indian Givers. Ballantine Books, New York,1988.

[6CROSBY, Alfred W. The Biological Consequences of 1492. Report on the Americas, vol. XXV, n° 2, page 11.

[7DUNBAR ORTIZ, Roxanne. Indians of the Americas. Praeger Publishers, New York,1984.

[8JENNINGS, Francis. The Invasion of America : Indians Colonialism and the Cant of Conquest. University of North Carolina Press. Jennings écrit sur les activités de ces premières colonies en se fiant fréquemment aux manuscrits de l’époque, page 85.

[9Ibid., page 33.

[10Ibid., page 76.

[11DUNBAR ORTIZ, op. cit.

[12MILLOY, John S. The Early Indian Acts : Developmental Strategy and Constitutionnal Change. University of BC Press, 1983, page 56.

[13STANLEY, George F.G. As Long As The Sun Shines and The Water Flows : An Historical Comment, pages 5 et 6.

[14TOBIAS, John L. Protection. Civilization. Assimilation : An Outline History of Canada’s Indian Policy, page 40.

[15CUSICANQUI, Silvia Rivera. Aymara Past. Aymara Future. Report on the Americas, vol. XXV, n°3, page 20.

[16HENDERSON, John S. The World of the Ancient Maya. Cornell University Press, 1981, page 32.

[17CUSICANQUI, Silvia Rivera. op. cit.

[18Ibid., page 21.

[19DUNBAR ORTIZ, op. cit.

[20Cité dans FIELD, Les. Ecuador’s Pan-Indian Uprising. Report on the Americas, vol. XXV, no 3, page 41.

[21GRAY, Andrew. The Amerindians of South America. Minority Rights Group Report n°15, London,1987, page 8.

[22G-7 : Le regroupement des sept pays les plus industrialisés. En font partie : l’Angleterre, le Canada, la France, l’Italie, l’Allemagne, le Japon et les États-Unis. Le G-7 se rencontre annuellement afin de déterminer les prochaines politiques économiques mondiales. Ensemble, ils dominent l’ordre économique mondial.

[23SAKAI, J. Settlers : The Myth of the White Proletariat. Morningstar Press, 1989, page 27.

[24Ibid., page 25.

[25Ibid., page 31.

[26Ibid., page 39.

[27Ibid., page 41.

[28Euro-Canadien : terme utilisé afin de faire la distinction entre les descendants des Européens des États-Unis et ceux du Canada.

[29DUNBAR ORTIZ, op. cit.

[30Des négociations avec les Mississaugas du sud de l’Ontario ont eu lieu dès 1781 afin de donner à des communautés des terres appartenant aux Haudenosaunees lesquelles terres furent données aux loyalistes anglais le long de la frontière américaine comme moyen de défense stratégique. Entre 1781 et 1836, on a procédé à 23 cessions de terres. Pas de traités, seulement de « simples ententes immobilières » dans lesquelles les Anglais ont payé avec de la marchandise et plus tard avec de l’argent. En 1818, on adopta la pratique de paiement de rentes. Dès 1830, ces paiements annuels n’étaient réservés qu’à la construction d’habitations et à l’achat d’équipement agricole -relié au changement de pratiques coloniales. « Il s’en suivi l’instauration du système de financement des bandes ». Voir As Long as the Sun Shines, op. cit., page 9.

[31CULHANE SPECK, Dara. An Error in Judgement. Talonbooks, Vancouver, 1987, page 72.

[32DUFF, Wilson. The Indian History of BC, vol.1 : The Impact of the White Man. Anthropology in BC, Mémoire n°5, 1964. BC Provincial Museum, Victoria, 1965 (Première Édition), page 42.

[33Ibid., pages 42 et 43.

[34MILLOY, John S. op. cit., page 58.

[35JAMIESON, Kathleen. Indian Women and the Law in Canada : Citizens Minus Advisory Council on the Status of Women, Indian Rights for Indian Women. Canada,1978, pages 27 et 28.

[36COLBORNE, Donald R. et ZIOTKIN, Norman. Internal Canadian Imperialism and the Native People. Imperialism, Nationalism, and Canada, Marxist Institute of Toronto, Between the Lines and New Hogtown Press,1987, page 164.

[37Ibid., page 167. Citation tirée du rapport de la commission mise sur pied afin d’enquêter sur les causes du non-respect des dispositions des Traités 8 et 11 telles qu’elles doivent être appliquées concernant /es Indiens du district de Mackenzie,1959, pages 3 et 4.

[38TOBIAS, John L. op. cit., page 46.

[39Tiré de DUFF, Wilson. op. cit., page 69.

[40GRAY, Andrew, op. cit., page 8.

[41Tiré de CHOMSKY, Noam. Turning the Tide : The US and Latin America. Black Rose Books, Montréal,1987, page 44.

[42BARRY, Tom, PREUSCH, Deb et WOOD, Beth. Dollars and Dictators, Grove Press Inc., New York, 1983, page 122.

[43MASS, Bonnie. The Political Economy of Population Control in Latin America. Édition Latin America, Montréal, 1972, page 8.

[44Ibid., page 19.

[45Ibid., page 41.

[46Growing Fight Against Sterilization of Native Women. Akwesasne Notes, vol.11, n°1, Hiver 1979, page 29.

[47Ibid., page 29

[48Supysaua : A Documentary Report on the Conditions of Indians Peoples in Brazil. Indigena Inc. and American Friends of Brazil, novembre 1974, page 48.

[49Ibid., page 6.

[50LEWIS, Norman. Genocide. Supysaua, op. cit., page 9.

[51The Politics of Genocide Against the Indians of Brazil. Supysaua, op. cit., page 35.

[52GOUVERNEMENT DU CANADA. Statement of the Government of Canada on Indian Policies. 1969, page 11.

[53ADAMS, Jane. Mexico : The Struggle for the Land. Indigena, vol.3, n°1, Été 1977, pages 28 et 30.

[54On the Road to Wounded Knee. Indian Nation, vol.3 n°1, avril 1976 page 15.

[55North American Sovereign Nations. Akwesasne Notes, vol.8, n°4, page 16.

[56Akwesasne Notes vol.8, n°6.

[57GIESE, Paula. The Last Indian War : For Energy. Report on the Third International Indian Treaty Conference, du 15 au 19 juin 1977.

[58Ibid.

[59CHURCHILL, Ward. Leonard Peltier, Political Prisoner : A Case History of the Land Rip-Offs. Red Road, n°2, juin 1991, page 6.

[60Ibid., page 6.


)

Texte révisé et publié par Média Recherche Action (media.recherche.action@@@riseup.net).
La traduction originale a été publiée par Solidarity sous le titre "500 ans
de résistance indigène".



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